Les Pays-Bas votent aujourd’hui sur l’accord commercial UE-Ukraine

« Approuvez-vous l’association entre l’Union et l’Ukraine ? ». Si les Néerlandais répondent NON, l’accord pourrait être abandonné au niveau Européen.

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Drie keer NEE tegen het associatieverdrag met Oekraïne crédits SP Groningen (CC BY-NC-ND 2.0)

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Les Pays-Bas votent aujourd’hui sur l’accord commercial UE-Ukraine

Publié le 6 avril 2016
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Si aujourd’hui les Hollandais votent NON lors du référendum, ils pourraient bloquer la signature de l’accord d’association entre l’Ukraine et l’Union européenne. Symboliquement les Néerlandais vont surtout se prononcer pour ou contre l’expansion de l’influence de l’Union Européenne.

Par Thomas Palermo.

Drie keer NEE tegen het associatieverdrag met Oekraïne crédits SP Groningen (CC BY-NC-ND 2.0)
Drie keer NEE tegen het associatieverdrag met Oekraïne crédits SP Groningen (CC BY-NC-ND 2.0)

Suite à une demande populaire, les Hollandais peuvent depuis juillet 2015 obtenir un référendum consultatif sur l’annulation de presque tous les projets de loi votés en assemblée.

Les conditions paraissaient impossibles à réunir, notemment parce qu’elles imposaient la récolte d’un très grand nombre de signatures manuscrites en un temps tres restreint, mais un collectif a mis à profit les dernières technologies pour offrir à chacun la possibilité de signer de manière manuscrite à l’aide d‘une webcam et d’un Smartphone. Ils ont réussi à faire valider 427 000 signatures.

Les Hollandais vont donc répondre aujourd’hui à la question « Approuvez-vous l’accord d’association entre l’Union européenne et l’Ukraine ? ». Bien que consultatif, le gouvernement pourra difficilement ignorer l’avis des citoyens. Si les Néerlandais répondent NON, c’est l’accord entier qui pourrait devoir être abandonné au niveau Européen.

L’objet du vote

L’accord d’association entre l’Ukraine et l’Union européenne, celui-là même que Viktor Yanukovych avait refusé de signer en 2013, déclanchant les révoltes de la place Maidan, doit être signé par les 28 États membres pour être validé.

Ce qui doit être approuvé aujourd’hui est l’expansion du traité sur le commerce européen avec l’Ukraine. Mais à un niveau plus symbolique, les Hollandais parlent plutôt d’un vote pour ou contre l’expansion de l’influence du pouvoir de l’UE sur ses États membres.

Le contexte

Les Néerlandais ont globalement été enthousiastes pour la construction Européenne jusqu’à la mise en circulation de l’euro et une montée remarquée du coût de la vie.

En 2005, les Néerlandais (ainsi que les Français et les Irlandais) ont opposé un NON retentissant (61,54%) à la Constitution européenne par référendum, ce qui n’a pas empêché le traité de Lisbonne de passer en contournant le choix exprimé par le peuple Néerlandais nourrissant l’incompréhension, même chez les partisans du OUI.

Ensuite, dans le cadre de la crise financière grecque, les accords de l’UE ont contraint Mark Rutte (le Premier ministre actuel) à casser sa plus grande promesse de campagne : « pas un centime supplémentaire du contribuable néerlandais n’ira à la Grèce » ce qui avait eut l’effet d’un véritable coup de tonnerre dans le royaume.

Les crises bancaires, de la dette, puis des réfugiés n’ont fait que renforcer le sentiment général de perte de souveraineté nationale.

Baisse du pouvoir d’achat, référendum ignoré, crise bancaire, crise de la dette, crise des migrants, on a là une bonne recette pour une poussée de l’euroscepticisme.

Par ailleurs le crash du vol Malaysia Airlines – MH17 le 17 juillet 2014 a été vécu comme une véritable tragédie nationale aux Pays-Bas. Cet avion civil néerlandais qui a été abattu en survolant l’Ukraine, tuant tous ses occupants, a plongé bien malgré eux les Néerlandais dans le conflit géopolitique européen en Ukraine.

Un an et demi après cette tragédie, il n’y a toujours pas une once de clarification sur l‘identité des coupables. Les relations avec l’Ukraine ont été très mauvaises dès les débuts de l’enquête. Les enquêteurs hollandais ont été très mal accueillis, des images radar ont mystérieusement disparu et les Hollandais se sont sentis insultés par la manière dont ce dossier a été géré tant par l’Ukraine que par leur propre gouvernement.

Le NON va donc l’emporter ?

Les choses pourraient ne pas être aussi simples.

Le résultat ne sera validé que si la participation dépasse les 30%. D’un côté, le référendum de 2005 n’avait attiré aux urnes que 37% des électeurs malgré une longue campagne nationale, d’un autre,le fait que plusieurs journaux nationaux aient dénoncé un déni de démocratie lorsque Bruxelles a mis en application provisoire certaines dispositions de l’accord dès janvier 2016, sans attendre l’aval des Pays-Bas semble encourager les citoyens à aller voter.

D’après un sondage récent, un peu plus de la moitié des Néerlandais considèrent que cet accord est un chemin pavé pour l’adhésion de l’Ukraine à l’Union Européenne.

Il existe aussi une possibilité de vote sanction. Ce vote constitue une occasion de punir Mark Rutte pour ses promesses de campagne non tenues et ses troublantes réponses confuses à propos du vol MH17. D’autant plus en ce moment où la Hollande assure la présidence tournante de l’Union européenne. Un NON serait une humiliation, non seulement pour Mark Rutte et la majorité gouvernementale, mais également pour Jean-Claude Juncker.

Au dernier sondage, 57% des sondés ayant l’intention de se déplacer pour voter sont en faveur du NON.

Que se passera-t-il si le NON l’emporte ?

Si et seulement si les 30% de participation sont atteint, la loi sera annulée. Le Parlement devra alors adopter une nouvelle loi soit pour annuler la ratification de l’accord, soit pour la maintenir. Les responsables des principaux partis nationaux ont déclaré que si les 30% de participations sont atteints, ils respecteraient le résultat du référendum

Mais alors que le royaume assure la présidence tournante de l’UE et que le vote du peuple britannique sur le Brexit est imminent, un blocus parlementaire néerlandais serait catastrophique.

Dans ces circonstances, quoi qu’en disent les parlementaires à cette heure, il y a fort à parier que le Parlement néerlandais ne suivrait pas le résultat de ce référendum consultatif, déclenchant par là-même une nouvelle vague d’indignation et d’euroscepticisme dans le pays.

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  • Tout s’est déroulé comme prévu. Le quota de 30% de votants a été atteint, ce qui valide le référendum. Et à une écrasante majorité de plus de 60%, les votants ont rejeté le traité d’association avec l’Ukraine.

    La réaction des partis de la nomenklatura, elle aussi, était prévue : aussitôt les résultats connus, les « jeunes libéraux » (ça ne s’invente pas !) ont ainsi annoncé qu’il allaient exiger l’abolition de la loi qui autorise les référendums d’initiative populaire.
    https://www.jovd.nl/persberichten/nederland-stemt-referendumwet-weg

  • Les commentaires sont fermés.

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Nicolas Tenzer est enseignant à Sciences Po Paris, non resident senior fellow au Center for European Policy Analysis (CEPA) et blogueur de politique internationale sur Tenzer Strategics. Son dernier livre Notre guerre. Le crime et l’oubli : pour une pensée stratégique, vient de sortir aux Éditions de l’Observatoire. Ce grand entretien a été publié pour la première fois dans nos colonnes le 29 janvier dernier. Nous le republions pour donner une lumière nouvelles aux déclarations du président Macron, lequel n’a « pas exclu » l’envoi de troupes ... Poursuivre la lecture

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