J’aime les Néerlandais : ils ont inventé le capitalisme

Ils ont fait davantage pour le bonheur de l’humanité que toute la tribu des politiciens et des généraux.

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Le Syndic de la guilde des drapiers par Rembrandt Bourgeois Hollande (Image libre de droits)

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J’aime les Néerlandais : ils ont inventé le capitalisme

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 20 novembre 2013
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Par Daniel Hannan, depuis Oxford, Royaume Uni.

Rembrandt_-_Klesveverlaugets_forstandere_i_Amsterdam

J’aime les Néerlandais. Pour faire une analogie avec l’œuvre de Tolkien, ce sont les Nandor : nos cousins qui ont refusé de traverser. Ils ont nos vices et nos vertus et les Britanniques se sentent chez eux aux Pays-Bas plus que nulle part ailleurs en Europe (bien que la Norvège et le Danemark suivent de près, tout comme la ville de Hanovre).

Ce n’est que récemment, cependant, que j’ai réussi à identifier ce que j’aimais tant chez eux. Voilà, pendant des siècles, les Néerlandais ont fait de l’honnête recherche de l’amélioration de soi-même une vertu suprême. D’autres nations européennes ont glorifié l’honneur, la foi ou la gloire martiale, mais le peuple que Shakespeare qualifiait de « Hollandais ventrus » a tranquillement continué à commercer.

Les choix du pays peuvent être vus comme ses briques : la plupart des villes néerlandaises comme les nôtres, sont construites face à la mer. Les Néerlandais sont des gens impatients, aventuriers et prompts à tourner le dos aux guerres et privations du vieux continent pour partir à l’aventure sur les océans.

Regardez les visages qui vous regardent sur les tableaux : des airs dodus, prospères, paisibles dans des costumes noirs à collerette blanche. C’est un peuple qui a vu, au contraire de notre génération actuelle, l’attrait moral du capitalisme. Ces marchands calvinistes à tête froide ont fait davantage pour le bonheur de l’humanité que nombre de généraux aristocrates ou de politiciens visionnaires.

La peinture nous dit l’histoire de la Hollande. Pendant longtemps, les artistes européens ont travaillé sur commande. Un prince local ou un prélat quelconque passait commande et le peintre réalisait ce qui était demandé. Cependant, aux Pays-Bas, après la Réforme, quelque chose d’extraordinaire se produisit. Les artistes ont commencé à peindre non pas pour des individus clairement identifiés mais pour le client, d’une manière générale. Le pouvoir d’achat était passé de l’État et l’Église, eh bien, au marché. Allez visiter le Rijksmuseum (sérieusement, allez-y. Depuis la rénovation, c’est devenu l’une des plus belles galeries du monde) pour voir le miracle du capitalisme. Lorsque le public est devenu plus riche, les artistes ont commencé à répondre comme les producteurs de n’importe quel système de marché, par la spécialisation. Certains se sont spécialisés dans les portraits, d’autres dans les marines, certains autres dans les natures mortes. Le résultat, à son époque, a été le meilleur du monde, dans la peinture comme dans d’autres domaines, car la Sagesse des foules existe vraiment.

Je viens d’écrire un livre sur l’Exceptionnalisme du monde anglo-saxon qui sera publié aux États-Unis la semaine prochaine et au Royaume-Uni une semaine plus tard. Pendant que j’écrivais, je n’ai pu m’empêcher de remarquer qu’un pays avait tenu le rythme des peuples anglo-saxons en matière de développement des droits de propriété, des institutions représentatives, du gouvernement limité et de l’individualisme. De surcroît, dans un domaine particulièrement critique, les Hollandais nous dépassent : le capitalisme moderne, comme défini par les concepts jumeaux de responsabilité limitée et de société par actions, a été inventé aux Pays-Bas.

imgscan contrepoints 2013-2391 hollandePourquoi le miracle anglo-saxon ne s’est-il pas produit au pays des polders et des maisons de verre ? Accident de géographie. La Grande-Bretagne, par son insularité, n’a pas eu besoin d’armée permanente ni d’instrument de répression interne. La Royal Navy nous a assuré la sécurité sur nos routes commerciales. La République hollandaise, en revanche, était située sur une plaine basse et presque indéfendable. Dans les années suivant la Révolution glorieuse, alors que les peuples anglo-saxons entamaient leur ascension vers la supériorité mondiale, les Hollandais s’épuisaient dans une série de guerres contre la France autocratique. Les banques et sociétés d’import/export se sont relocalisées d’Amsterdam à Londres. L’hégémonie du monde anglo-saxon était assurée.

La semaine dernière, j’étais aux Pays-Bas avec les Conservateurs et réformistes européens pour des conférences avec différents leaders financiers et politiques. À la fin des réunions, un de nos collègues hollandais, Peter van Dalen, nous a emmenés au Cimetière aérien de Arnhem où, en 1959, des militaires alliés, principalement Anglais et Polonais, ont été enterrés après l’échec de l’opération Market Garden en 1944. Notre groupe est celui contenant les plus importants contingents de parlementaires anglais et polonais. Des couronnes ont été déposées par Martin Callanan et Ryszgard Legutko. Ensuite, dans la bruine glaciale, Peter a prononcé un discours d’une si exemplaire brièveté et d’une sincérité si peu affectée, qu’il me semble utile de le retranscrire en entier :

De nombreux soldats anglais et polonais sont tombés pour défendre la liberté. Je vous ai amenés ici pour vous dire ceci : merci d’avoir libéré les Pays-Bas.

Décidément, j’aime les Néerlandais.


Sur le web. Traduction : Joëlle Kamel pour Contrepoints.

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  • Et bien pas moi. Ils ont laissé tombé leurs colonies comme des cochons, et beau discours ou pas, ils ont été de magnifiques colabos.

    • De magnifiques collabos ?? Connaissez-vous vraiment l’histoire des Pays-Bas pour sortir de tels âneries ?
      Seule une petite minorité collaborera avec les nazis. Et s’il n’y a pas de grands mouvements de résistance active, la population n’hésite pas à résister passivement face à l’occupant, se mettant en grève à plusieurs reprises notamment contre la déportation des juifs en 1941.
      Les dirigeants catholiques et protestants ne craignent d’ailleurs pas d’envoyer des télégrammes de protestation contre la déportation des juifs en 1942.
      Et c’est suite à une grève de ce genre que les nazis bloqueront les transferts de nourriture entre l’est et l’ouest du pays durant l’hiver 1944-1945, provoquant un début de famine, le hongerwinter.

      • Vous comparerez la déportation en France et en Hollande, de son application, compte tenu des dimensions des deux pays et de leurs populations, et on en reparlera.
        Et oui, je dois probablement un peu détesté leur côté marchand protestant. Je n’ y trouve pas beaucoup de signe de bonheur pour l’ humanité.

    • Les médecins hollandais ont résisté très activement aux nazis. On ne peut pas en dire autant des français.

  • « Ces marchands calvinistes » !!! vous êtes sûr ? luthériens peut-être ?

  • J’apprécie beaucoup vos interventions au Parlement Européen et je vous rejoins dans la notion de gouvernement limité, le droit à la propriété, la liberté etc…
    Mais prétendre à l’exceptionnalisme est une pente glissante qui peut ouvrir la porte à beaucoup de dérives et certains s’y sont essayés. L’Histoire nous a montré où cela les a mené. Il y a peu, l’exceptionnalisme a été ridiculisé et remis à sa propre dimension concernant l’issue des armes chimiques dans le conflit Syrien. Alors que l’exceptionnalisme battait les tambours de guerre, la diplomatie l’a emporté sur la folie. Monsieur Farage a eu l’honnêteté de le reconnaitre. L’exceptionnalisme, aux yeux du monde, c’est le pays le plus endetté que l’Histoire ait jamais connu, c’est le pays qui s’est étendu militairement dans plus de 130 pays avec au moins 800 bases. L’exceptionnalisme, c’est un pays qui détient des suspects sans les juger (NDAA), sans avocats, pour une durée illimitée. L’exceptionnalisme, c’est un pays qui ne cherche pas à gagner des guerres, mais à les prolonger. Qu’il soit démocrate ou républicain, l’exceptionnalisme obtient le soutien des mêmes groupes de personnes dont l’influence se mesure en dollars. Influencer le monde par la contrainte, ça n’a rien d’exceptionnel, c’est typiquement humain. Influencer le monde par son humilité, c’est déjà bien moins aisé, mais bien plus honorable.

  • « Pourquoi le miracle anglo-saxon ne s’est-il pas produit au pays des polders et des maisons de verre ?  »

    S’il est vrai que la marine anglaise a fini par dominer les mers, les anglais s’en sortent-ils mieux que les hollandais actuellement?
    En tout cas les élites hollandaises ont participé activement à l’édification des institutions européennes.
    Mais bon on sait pourquoi Hannan aime bien aussi les hollandais, il le dit à la fin: ils remercient chaleureusement les anglais de les avoir libérés des allemands en 45.

  • J’ai choisi cet article car en ce moment je suis au Pays-Bas, enfin grâce à TOR qui me le dit…
    http://www.01net.com/editorial/604920/la-nsa-n-aime-pas-tor-et-s-echine-a-vouloir-le-casser/
    des infos sympas avec Snowden

  • Ce sont surtout des protestants …

    Une variété pragmatique, économe, travailleuse à l’extrême, endurante et calme.

  • moi, j’aime surtout les hollandaises…

  • les hollandais ont la particularité d’avoir été la première puissance européenne a etre battue par des asiatiques, pirates de surcroit:
    au millieu du 17ième siècle, la présence hollandaise va faire à taiwan ( formose à l’époque ) va faire les frais de la lutte qui oppose les chinois du sud contre la tentative de domination sur l’empire, des nouveaux maitres mandchou. battu sur le continent, le célebre chef pirate Coxinga, n’a d’autre choix que de diriger sa flotte sur l’iles de formose pour sauver son armée. la garnison hollandaise capitule aprés un siège de plusieurs mois. son gouverneur sera décapité pour sa peine aprés etre rentré en hollande.

  • C’est plutôt le Danemark, ça…
    Cela dit, la Hollande d’aujourd’hui est aussi socialisante que le reste de l’Europe et pleine de politiquement correct qui veut imposer à tous la « bonne » façon de penser. Cela dit, ils restent plus « individualistes » et libres que la majorité. Enfin, pas trop les « hollandais » importés grâce aux aides sociales, eux sont comme partout ailleurs, collectivistes et avides d’intervention de l’Etat en leur faveur, sans trop rien faire en matière de création de valeur.

  • Les commentaires sont fermés.

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