L’Irak à la croisée des chemins

L’Irak est maintenant face à plusieurs chemins possibles pour son avenir politique et économique. Malheureusement, la voie que le Premier ministre Nouri al-Maliki semble vouloir suivre ne conduit pas au meilleur pour le peuple irakien

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L’Irak à la croisée des chemins

Publié le 23 avril 2012
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L’Irak est maintenant face à plusieurs chemins possibles pour son avenir politique et économique. Malheureusement, la voie que le Premier ministre Nouri al-Maliki semble vouloir suivre ne conduit pas au meilleur pour le peuple irakien.

Par Ted Carpenter (*) , États-Unis.
Publié en collaboration avec UnMondeLibre.

Nouri al-Maliki, Premier ministre irakien

Le retrait définitif des troupes américaines d’Irak a marqué un tournant presque aussi important que le renversement de Saddam Hussein. L’Irak est maintenant face à plusieurs chemins possibles pour son avenir politique et économique. Certains de ces chemins mènent à un avenir prometteur, d’autres conduisent soit au chaos soit à une nouvelle ère de répression. Malheureusement, la voie que le Premier ministre Nouri al-Maliki semble vouloir suivre ne conduit pas au meilleur pour le peuple irakien.

Une question clé est celle du degré de pouvoir qui doit résider entre les mains du gouvernement central à Bagdad. Maliki et ses alliés politiques saisissent toutes les occasions pour étendre le pouvoir du gouvernement national et réduire l’autorité exercée aux niveaux provincial et régional. Un exemple récent : Bagdad a traîné les pieds pour le paiement des revenus pétroliers de 2011 au gouvernement régional kurde (GRK). Les fonctionnaires du GRK arguent que les autorités nationales doivent quelque 1 milliard de dollars au gouvernement régional. En outre, le GRK se plaint que Bagdad continue de refuser de reconnaître des contrats valides que Arbil a conclu avec des entreprises internationales du secteur de l’énergie.

Le président du GRK Massoud Barzani a dénoncé en termes vigoureux les actions du gouvernement Maliki : « les fonctionnaires du gouvernement central qui refusent d’admettre ces contrats sont des ratés qui n’ont pas pu donner à l’Irak ce que nous donnons à notre peuple au Kurdistan (…) Ils veulent que nous soyons comme eux. »

Le président Barzani n’a pas tort. Au lieu de tenter d’imposer que le reste de l’Irak imite la région kurde, le régime de Maliki semble vouloir contraindre le Kurdistan afin qu’il ressemble plus au reste de l’Irak. Ce serait tragique pour toutes les parties concernées. La région autonome kurde est une success story économique incontestable, en contraste marqué avec la plupart des régions de l’Irak. Et bien que le GRK reste un modèle démocratique imparfait, la tendance s’améliore. En outre, même avec ses défauts politiques, la performance du GRK sur ce front est de loin supérieure à celle du gouvernement national.

En effet, les pratiques du régime de Maliki se révèlent de plus en plus inquiétantes. Non seulement la corruption est en hausse, mais on note une érosion constante des libertés politiques. Les journalistes qui osent critiquer le premier ministre et ses alliés se plaignent toujours plus de harcèlement et parfois carrément de censure. L’hiver dernier, la sécurité de Maliki a arrêté des centaines d’anciens fonctionnaires, les accusant de soutenir un retour à un régime dictatorial du parti Baas. Bien que certaines de ces allégations ont pu être vraies, le gouvernement a « ratissé » très large et sans discrimination.

Un rapport récent de l’Institute for the Study of War (Institut pour l’étude de la Guerre) basé aux USA a conclu que M. Maliki semble mener une campagne concertée pour étouffer toute dissidence et toute opposition politique. « Il a rendu plus difficile la dissidence pour ses rivaux chiites », affirme le rapport, « tout en confinant ses adversaires sunnites dans une position qui lui permet d’exercer une pression et d’exploiter les divisions au sein de leurs rangs ».

Une telle stratégie ne favorise pas le développement d’une démocratie solide. Au contraire, elle est similaire aux méthodes utilisées en Russie par Vladimir Poutine pour saper la substance de la démocratie dans son pays, tout en conservant les élections et d’autres façades démocratiques. L’Irak ne doit pas vouloir imiter un tel modèle cynique et corrompu. Mais il semble bien le faire.

Un événement inquiétant a eu lieu en Décembre lorsque l’administration Maliki a accusé le vice-président irakien Tareq al-Hashemi de trahison au motif qu’il mènerait des escadrons de la mort anti-gouvernement. Al-Hashemi, l’un des principaux hommes politiques sunnites irakiens et chef de file du bloc politique de l’Iraqiya, clame haut et fort son innocence. Il a  fui vers la région kurde, affirmant qu’il ne pourrait jamais obtenir un procès équitable ou même avoir sa sécurité physique garantie à Bagdad. Le gouvernement Maliki a exigé du GRK  de rendre al-Hashemi, mais le président Barzani a jusqu’ici refusé de le faire.

Il est encore temps pour les dirigeants de Bagdad de changer de cap, de créer une véritable démocratie, avec un système fédéral vigoureux qui limite l’autorité du gouvernement national. L’objectif global devrait être de copier les succès politiques et économiques du Kurdistan. Malheureusement, Maliki et ses alliés semblent déterminés à poursuivre la voie contraire, qui conduira à une nouvelle dictature, à la guerre civile, ou aux deux. C’est un avenir que personne ne veut pour l’Irak.

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Sur le web

(*) Ted Carpenter est analyste au Cato Institute à Washington DC.

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