Immobilier : dégonflement d’une illusion

L’intervention des dirigeants dans les marchés crée une distorsion entre les prix et la réalité de l’offre et de la demande.

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Immobilier : dégonflement d’une illusion

Publié le 26 août 2023
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Le secteur de l’immobilier absorbe la perte du crédit facile et connaît un déclin de l’activité en conséquence.

Les déformations de marché par les politiques de taux d’intérêts mènent, à terme, à une perte de richesse.

En effet, les encouragements à l’octroi de crédit produisent une hausse de demande pour les logements. Ils mènent à plus de projets de construction, et à l’émission de crédits aux particuliers.

Néanmoins, la hausse de l’activité dans le secteur tient non à une hausse du pouvoir d’achat des particuliers, ou à la prospérité dans l’ensemble, mais plutôt à une illusion de richesse en résultat des crédits.

Ainsi, avec la perte de l’accès à la dette, le marché retourne vers un équilibre entre l’offre et la demande, sans les aides et soutiens.

Selon les Notaires de France, le nombre de transactions a atteint un pic en août 2021, à 1,2 millions de ventes de logements. En mai 2023, ils chutent à un peu plus de 1 million.

Néanmoins,le marché a encore beaucoup de marge de baisse. À mai de cette année, les volumes restent aussi élevés qu’en 2019.

Le nombre de nouveaux prêts aux particuliers pour l’achat d’un logement atteint à présent 55 % du rythme de 2020. Le déclin touche le neuf et l’ancien dans le même genre de proportions.

Le Figaro :

“Le marché du logement neuf est en crise … Les réservations auprès des promoteurs immobiliers ont dégringolé d’environ 40% au deuxième trimestre 2023, sur un an, selon le ministère de la Transition écologique.”

Pour une partie de la presse, le dégonflement de la bulle met les particuliers en difficulté. 

Selon Le Figaro, la baisse des constructions constitue une “bien mauvaise nouvelle pour les ménages qui espèrent encore s’offrir une maison.”

En réalité, une bulle dans l’immobilier sert avant tout les spéculateurs à crédit, les émetteurs de prêts, et promoteurs. Le reste des particuliers profite d’une baisse du prix de la pierre, ce qui met plus de biens à portée d’achat, en dépit d’un ralentissement des constructions dans l’ensemble.

En somme, l’intervention des dirigeants dans les marchés crée une distorsion entre les prix et la réalité de l’offre et de la demande.

Les crédits induisent une création de demande dans l’immédiat. Cependant, au terme de la bulle, les propriétaires subissent une chute de la valeur de la pierre.

Les excès d’inventaires mènent à un effondrement de l’activité dans le bâtiment. Au final, le marché retrouve un équilibre. La hausse de prix et l’essor de l’activité en réaction aux crédits ne produisent pas de richesse sur la durée.

 

Profiteurs des illusions

En réaction à l’enfoncement de taux, l’essor de l’activité dans l’immobilier ne génère pas de richesse dans l’ensemble.

Par contre, dans l’immédiat, il met beaucoup d’argent dans les poches de fournisseurs, consultants, actionnaires, ou spéculateurs.

Il constitue une source de revenus, de carrières, et d’influence pour beaucoup de personnes, entreprises, ou associations.

De même, les interventions des élus dans les énergies ou l’écologie peuvent fournir une manne à des entreprises, entrepreneurs, ou spéculateurs. La plupart des gens préfèrent encaisser une part des dépenses, et évitent ainsi les critiques des projets.

Récemment, la société Deloitte publie par exemple un rapport sur le secteur de l’hydrogène. Les Échos en fournit les détails.

La société de conseil, basée à Londres, prévoit à 2020 la création d’une industrie mondiale d’hydrogène, à base de l’énergie des renouvelables. En accord avec les vœux des dirigeants, le secteur a besoin de 1400 milliards d’euros d’investissements en Europe, et de 9000 milliards de dollars d’investissements à travers le monde.

Deloitte trouve peu de critiques aux initiatives sur l’hydrogène, en dépit des coûts et des désavantages par rapport aux carburants d’aujourd’hui.

Le secteur requiert des milliards d’euros d’investissements dans les renouvelables, en plus de l’infrastructure pour la production et transport d’hydrogène.

Le groupe de conseil a un intérêt à donner du soutien au programme. Il court peu de risques de représailles de la part des dirigeants, en faveur de l’hydrogène. Il peut engranger une partie des milliers de milliards de dépenses grâce aux contrats en rapport au secteur.

De même, le gouvernement souhaite prendre plus d’importance dans le domaine des startups, en particulier la French Tech.

Les Échos rapporte :

« Emmanuel Macron tient toutefois à maintenir le cap de 100 licornes à horizon 2030. C’est élevé mais pas impossible compte tenu du chemin parcouru en peu de temps par la French Tech.

[…]

Les derniers gouvernements ont tous contribué à construire un environnement Tech pour nourrir les talents nationaux, comme les ingénieurs dont la qualité de la formation est reconnue dans le monde entier. Cet écosystème doit beaucoup à Bpifrance. Il a pu se développer grâce aux centaines de millions d’euros que la banque publique d’investissement a injectés directement dans des start-up mais aussi dans les fonds de capital-risque. »

 

La presse ne donne pas les raisons à l’objectif d’une centaine de licornes – des startups privées à valeur de plus de un milliard d’euros.

Les journalistes ne remettent pas en cause la participation des dirigeants au secteur. Ils ont l’impression que la hausse du nombre de licornes représente une amélioration de l’économie et de la vie des Français, même lorsqu’elles surviennent en résultat d’incitations ou de subventions sur le dos du contribuable.

La hausse du nombre de licornes, de startups, ou de constructions de logements sous l’effet des déformations ne génèrent pas plus de richesse.

Elles captent la création d’argent et les incitations des dirigeants, le tout aux dépens du contribuable ou de l’épargnant (qui détient la dette du gouvernement via ses comptes bancaires ou assurances-vie).

Néanmoins, tout comme dans l’immobilier, des entreprises, spéculateurs, ou investisseurs empochent beaucoup de revenus en résultat des programmes.

Les interventions dans l’économie par les politiciens génèrent des fortunes, et attirent beaucoup de soutiens, de la presse et des entreprises.

En raison des récompenses en vue, la plupart des acteurs dans l’économie évitent les critiques des programmes.

 

 

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  • Avatar
    The Real Franky Bee
    26 août 2023 at 8 h 56 min

    L’impact psychologique et sociétal d’un éclatement de la bulle immobilière française dépasse ce que tout le monde peut imaginer. Il ne s’agirait pas d’une simple baisse des prix salutataires, mais d’une vraie bombe pour des Français qui ont fait de la pierre l’unique moyen de constitution d’un patrimoine et leur principal outil d’épargne. Bien entendu, cela a créé une inefficience économique monstrueuse, beaucoup trop d’argent étant alloué à rembourser des dettes très élevées et trop longues, et générant des inégalités totalement absurdes. Mais si demain, le marché doit s’effondrer, alors cela risque de faire mal, car c’est une véritable remise en question du projet de vie de millions de personnes. À long terme, cela peut être bénéfique. Mais à court et moyen terme, ça piquerait sévère. Que voulez-vous ? Personne n’a jamais pris au sérieux les alertes sur ce sujet en mode : « Vingt ans qu’on dit que l’immobilier va baisser, et il ne fait que monter ». Il n’y a pas de repas gratuit.

    • Premièrement, tant que le bien n’est pas vendu, il n’y a pas de perte, contrairement aux actions (dont la valeur peut devenir nulle en cas de faillite). Deuxièmement, si l’on vend pour acheter plus grand, le bien à acheter a aussi baissé ainsi que ses frais de notaire. Troisièmement, si les biens baissent, beaucoup de propriétaires bailleurs vont arrêter de payer l’IFI.
      Donc la baisse immobilière doit prendre tous les facteurs.
      Ce qui est certain, c’est que les primo accédant ont plus de difficultés non pas parce-que les taux sont passés de 1% à 4% (l’écart sur une mensualité reste faible, même si sur 20 ans le montant est élevé), mais parce-que les critères d’attribution deviennent plus difficiles. Les banques limitent leurs risques sur les prêts immobiliers car elles savent que la situation économique est très mauvaise : les PME-PMI vont mal et il va falloir renflouer les 3000 milliards de la dette de l’État. L’État chante au petit peuple que tout va bien mais les banques savent que c’est le contraire qui se passe.
      Ainsi, les PME-PMI ont aussi beaucoup de difficultés à avoir accès au crédit qui les fait vivre.

      • Avatar
        The Real Franky Bee
        26 août 2023 at 10 h 09 min

        Vous devriez lire la littérature disponible relative à l’éclatement des bulles, et vous intéresser au concept de « negative equity » bien connu aux Etats-Unis (vous ne pouvez plus ré-emprunter car vous avez toujours le principal du premier achat à rembourser).

    • Depuis (au moins) 50 ans, l’investissement dans l’immobilier est une stratégie gagnante à long terme.
      Évidemment ne pas acheter la veille d’une crise et revendre le lendemain.
      Je ne sais pas quel but poursuit Bonner.
      Si c’est passer pour un cador de la finance, c’est plutôt raté.

      • Avatar
        The Real Franky Bee
        26 août 2023 at 10 h 02 min

        Donc les performances passées préjugent des performances futures ? Savez-vous que l’immobilier japonais est toujours plus bas qu’il y a trente ans ?

        • Trente ans… oui. Enorme bulle sur le foncier commercial qui éclate au début des années 90.
          Cinquante ans… non.

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