Thanksgiving : la fête américaine qui célèbre la propriété et la prospérité

Peu d’Américains penseront en dégustant leur dinde qu’ils honorent l’institution de la propriété privée aux États-Unis !

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President Reagan attending ceremony to receive the 36th annual Thanksgiving Turkey from representatives of the National Turkey Federation on the South Lawn. By: The U.S. National Archives - Flickr Commons

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Thanksgiving : la fête américaine qui célèbre la propriété et la prospérité

Publié le 21 novembre 2018
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Par Max Falque.

Jeudi 22 novembre les familles américaines dégusteront la dinde traditionnelle, célébrant ainsi l’abondance dont bénéficièrent la centaine de passagers britanniques du Mayflower, débarquant en 1622 à proximité de Boston. En fait, ces puritains animés par les sentiments communautaires, avaient prêté serment « Nous ferons ensemble pousser nos récoltes et en partagerons les fruits équitablement ».

Bien entendu, conformément à l’expérience séculaire du comportement des hommes, certains membres de la communauté (notamment les adolescents) travaillèrent moins que d’autres et même, la disette survenant, volèrent les aliments.
De toute évidence cette situation ne pouvait qu’aboutir à la famine et à la disparition de la petite communauté dont le chef, le gouverneur Bradford dans son journal de bord, (anticipant Hardin et sa « Tragedy of the Commons ») notait « Nous commençâmes à réfléchir sur les moyens de produire le plus de maïs possible afin d’échapper à la famine ». La réponse fut aussi simple qu’efficace « Attribuer à chaque famille une parcelle de terre ».

L’institution de la propriété

Certes la collaboration technique et sociale avec les indiens facilita la production abondante de maïs mais, alors que ceux-ci avaient des droits de propriété
tribaux mal définis, les pilgrims réinventèrent l’institution de la propriété, concept importé du Royaume d’Angleterre et consacré par la Magna Carta de 1215, fondement de la Common Law.

Dans son remarquable ouvrage Civilization, the West and the Rest (2011) Niall Ferguson insiste sur la portée symbolique de cet évènement car il place les droits de propriété parmi les principes fondateurs de la civilisation à savoir :
– La concurrence
– La science
– La médecine
– La société de consommation
– L’éthique du travail
– La propriété
À ce sujet, Ferguson fait longuement référence à John Locke, inspirateur de la future constitution américaine, pour lequel « Le grand et principal objet des hommes formant une communauté est la préservation de leur propriété », ce qui suppose des institutions dans le cadre d’un état de droit (rule of law). Pour démontrer le rôle essentiel des institutions, Ferguson imagine le destin opposé de deux groupes d’immigrants :
– vers l’Amérique du nord de pauvres sujet du roi d’Angleterre cherchant la liberté et moins de misère, mais imprégnés des institutions lentement mûries depuis la Magna Carta ;
– vers l’Amérique du sud des soldats chargés de piller les richesses en or et en argent sous les ordres d’un gouverneur nommé par le roi d’Espagne.

Ces deux groupes vont par leurs comportements sceller les destins divergents des deux Amériques. En effet « Lorsque le capitaine du navire anglais mit le pied sur la plage de la Caroline, il apportait avec lui un modèle institutionnel pour le Nouveau Monde, à savoir le rôle essentiel de la terre.

Ceci fut immédiatement inclus dans la Constitution de la Caroline dont John Locke était l’auteur et avait pressenti le lien entre la représentation politique et le droit de propriété. » Là se trouve l’origine des principes des constitutions des divers États américains, puis de la Fédération : droits de propriété, liberté individuelle, liberté religieuse, gouvernement limité et consentement à l’impôt.

Le clivage entre les deux Amériques

Que sont devenus nos Espagnols sans principes ni modèles concernant la répartition des terres ? Le recours à la violence imitée de la mère patrie a contraint le développement économique et la liberté. Ferguson conclut : « Ces profondes différences entre les sociétés civiles des deux Amériques coloniales auront des conséquences durables lorsque viendra le temps de leur indépendance. »
Ferguson, familier de l’histoire contrefactuelle, imagine alors une situation inverse : les Anglais débarquant au sud et les Espagnols au nord !

Je pense que peu de familles américaines évoqueront ces évènements et ces concepts en dégustant la dinde et pourtant, en choisissant Locke plutôt que Rousseau, les États-Unis ont choisi de donner la priorité à la Liberté dont les droits de propriété sont la condition sine qua non.

Et si les idées et les mythes gouvernaient le monde ?

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  • ICREI : la dernière fois que j’ai regardé j’avais trouvé que cette association liberalo-environnementaliste (ça existe ????) vivait de subvention publique.

    Tous les liens internet vers cette association ont disparus donc difficile de savoir qui nous parle et ce qu’est l’ICREI. Ça me gène.

    Contrepoints ne peut revendiquer ne pas faire appel aux subventions publiques et faire du recel de subvention publiques en utilisant des articles d’organismes subventionnés.

    • Même un imbécile partisan peut avoir une bonne idée, et reprendre une idée ne veut pas dire soutenir les autres caractéristiques genre imbécillité et parti-pris de la personne qui l’a eue. Demander un certificat de bonnes moeurs libérales pour publier sur Contrepoints serait contraire à ma conception du libéralisme et me conduirait immédiatement à ne plus soutenir financièrement ce site…

      • La question n’est pas les idées bien sûr mais la manière dont elles sont financées et je continue à penser que publier des articles d’associations subventionnées tout en proclament ne pas vivre de subventions est incohérent. J’aime bien la cohérence entre le discours et les actes.

        Pas un certificat de bonnes mÅ“urs, mais éviter par exemple un truc qui s’appelle trop-libre et qui est payé avec de l’argent des autres à hauteur de 74% me semblerait cohérent.

        Pour ma part, je ne donne pas cette année pas à cause de cela; comme quoi c’est compliqué.

  • Cette interprétation du Thanksgiving me paraît quelque peu tirée par les cheveux.

    Thanks veut dire merci et si vous cherchez un peu vous trouverez merci qui? et pourquoi et comment cela s’est [ex]terminé.

  • Au moins une partie des remerciements était destinée aux Indiens sans le maïs desquels maintes colonies anglophones, comme le célèbre groupe des pèlerins du Mayflower, auraient péri de famine durant l’hiver, leurs semis de blé n’ayant pas prospéré. Quand on sait la suite, à savoir le génocide desdits indiens, on a le droit de trouver que cette célébration constitue une atroce raillerie.

    Par ailleurs, si on veut comparer l’évolution de groupes européens en Amérique, on pourrait prendre les anglophones et les francophones, ce qui permettrait d’apprendre ou de se rappeler que ces derniers – malgré de rudes affrontements, ne soyons pas naïfs – se métissaient fréquemment avec les Indiens alors que les anglophones eurent globalement une attitude raciste proscrivant tout métissage (le  » Rassenschande  » avant l’heure) avant de passer à l’extermination quasi-complète.
    On peut rêver à ce qu’aurait été une Amérique du Nord francophone, probablement moins dynamique économiquement mais assurément plus ouverte humainement ou culturellement.

    Il ne s’agit pas de stigmatiser les Étasuniens d’aujourd’hui pour des crimes commis il y a au moins un siècle. Simplement, il s’agit de ne pas tolérer leur propension à donner des leçons de morale aux Européens  » immoraux et décadents  » et de cesser de glorifier béatement un soi-disant modèle en gobant, fût-ce inconsciemment les propos auto glorificateurs de l’Empire sur sa  » manifest destiny  » : en tout cas, le destin des infortunés Indiens fut de servir de terreau à l’agriculture et à l’industrie étasuniennes.

    • a la meme époque la France faisait du commerce d’esclaves.. ce n’était pas plus brillant

      • @ claude henry de chasne

        Oui mais la France est connue pour condamner autrui souvent mais ne rien avouer de ses zones d’ombre, l’hypocrisie se pratiquant depuis des siècles en ce pays!

        Lire « On peut rêver à ce qu’aurait été une Amérique du Nord francophone », c’est simplement du délire!
        Et oublier les Portugais dans la conquête du Brésil, c’est aussi inélégant!
        Pourquoi les Français auraient-ils ainsi voulu que le monde devienne français?
        C’est ridicule, cet égocentrisme et assez délirant!

      • Il ne s’agit pas de procéder à une classification des horreurs mais de rappeler le caractère moralement ambivalent, voire douteux, des origines de la fête du « Thanksgiving ».

        Pour une mise en contexte, quelques éléments de base :

        L’esclavage (que pratiquaient diverses populations, notamment nombre de tribus africaines, de nombreux marchands musulmans et les négriers européens, classement décroissant en fonction du nombre d’esclaves africains enlevés et vendus par ces différents groupes) était évidemment très brutal et entraînait de nombreuses morts ; mais, pour faire du profit et évidemment pas par humanité, les marchands d’esclaves ne cherchaient pas à tuer  » leur marchandise « . L’esclavage fut aboli en 1833-38 au Royaume-Uni (ce qui n’empêcha pas ce pays de pratiquer le génocide des Aborigènes en Australie), en 1848 en France (après une première tentative en 1794) et en 1863 aux États-Unis.

        En Amérique du Nord, les Anglo-Saxons ont délibérément pratiqué un génocide au sens de l’article 2 de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide adoptée par l’assemblée générale des Nations unies, le 9 décembre 1948 : « … actes ci-après commis dans l’intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux … »

  • La comparaison entre colonisateurs anglo-saxon et ibérique est intéressante, mais il manque un troisième modèle : l’islamique.

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