John Bolton, le fou de guerre qui vient de rejoindre Donald Trump

Le nouveau conseiller à la sécurité nationale John Bolton est un fervent partisan de l’intervention militaire contre l’Iran, comme il l’a été contre l’Irak de Saddam Hussein. Il a aussi exprimé son souhait de bombarder la Syrie, la Libye, la Corée du Nord, etc.

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John Bolton, le fou de guerre qui vient de rejoindre Donald Trump

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 24 mars 2018
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Par Frédéric Mas.

La Maison-Blanche a annoncé le départ du conseiller à la sécurité nationale H. R. McMaster et son remplacement par le néoconservateur John Bolton. Cela faisait maintenant des mois que le général McMaster était tombé en disgrâce aux yeux du président Donald Trump, et que le Pentagone cherchait à le remplacer.

John Bolton est connu pour son engagement constant en faveur de l’intervention militaire tous azimuts pour imposer les supposés intérêts américains, peu ou prou ramenés à ceux de la démocratie mondiale dans la rhétorique des néoconservateurs américains. Il a régulièrement pris position pour le bombardement de Téhéran, et s’est déclaré favorable à une guerre préventive contre la Corée du Nord, après s’être fait l’avocat de la guerre en Irak, de l’intervention en Syrie et en Libye.

 

Bolton et la présidence impériale de G. W. Bush, Jr

John Bolton est un vieux routier du Parti républicain et plus généralement du mouvement conservateur. Il est membre de plusieurs think tanks, dont l’American Enterprise Institute, commentateur sur Fox News, et a participé à la campagne présidentielle en tant que conseiller aux affaires étrangères dans le staff de Mitt Romney.

Avec la victoire de l’administration Bush Jr au début des années 2000, il entre au gouvernement en tant que sous-secrétaire d’État à la limitation des armes et à la sécurité internationale. Réputé pour sa grossièreté et sa totale absence de diplomatie, il n’hésite pas à se situer dans le sillage idéologique de Bush, Jr et Dick Cheney, qui l’ont promu pour son rôle dans le retrait des États-Unis du traité antimissiles balistiques et de la Cour criminelle internationale. Dans les deux cas, l’ambition est de délier le pays de ses engagements internationaux pour mieux s’assurer la liberté de faire la guerre sans en payer les conséquences immédiates.

En août 2005, il est nommé par G. W. Bush Jr ambassadeur des États-Unis aux Nations unies, ce qui n’est pas sans ironie, quand on sait la piètre estime qu’il a de l’institution qu’il accuse régulièrement d’anti-américanisme ou encore de gaspiller l’argent du contribuable américain.

Il démissionne en 2006, pressé par la victoire des démocrates au sénat qui n’envisageaient pas de le reconduire dans son poste.

 

Contre la république islamique d’Iran

Le dernier engagement public de John Bolton consiste à vouloir faire avorter l’accord iranien adopté sous Obama, le tout en jouant de la grosse caisse médiatique autour du programme nucléaire iranien, et en multipliant les pressions politiques et diplomatiques.

Dans ses mémoires publiées en 2007, Bolton rappelle son rôle dans le rapprochement stratégique entre Israël et les États-Unis pour exclure l’agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) et le conseil des nations unies des négociations sur le nucléaire iranien.

Bolton a commencé à accuser l’Iran de défendre un programme nucléaire militaire caché dès 2003, afin d’insister sur son caractère de menace militaire pour la région. L’attaque n’a pas pris, et rien n’a été trouvé après inspection des observateurs de l’AIEA « alertés » par les partisans de l’intervention militaire.

 

La catastrophe néoconservatrice au Proche-Orient

L’esprit néoconservateur qui anime John Bolton et ses alliés n’est pas inconnu du grand public.

Sous prétexte de combattre le terrorisme, mais plus certainement de soutenir les alliés et les intérêts pétroliers américains au Proche-Orient, ils ont participé politiquement et médiatiquement à la transformation de la région en poudrière politique et religieuse. Leur méconnaissance du terrain1 alliée à la brutalité de leurs méthodes « jacksoniennes »2, a provoqué l’exact contraire des intentions affichées par Washington : l’explosion du terrorisme, une grande responsabilité dans l’invention de l’État islamique, une guerre en Irak estimée à plus de 1000 milliards de dollars, et surtout le discrédit jeté sur les USA et ses alliés, considérés comme des fauteurs de guerre au profit de leurs rivaux les plus immédiats, soit l’Iran, la Syrie et la Russie.

 

Le parti de la guerre impuni

Le projet de « nouveau Moyen-Orient » porté par l’administration Bush Jr a donné l’exemple le plus parfait du constructivisme socialisant de cette frange de la droite américaine : l’idée de renverser toutes les dictatures hostiles aux États-Unis pour les remplacer par des démocraties pro-occidentales « reconstruites »3 a été un lamentable échec qui s’est traduit en guerres et en vies humaines.

Comme l’explique Nassim Nicholas Taleb dans son dernier livre, Jouer sa peau, les néoconservateurs qui ont soutenu la guerre en Irak, puis en Libye, ont contribué à renforcer le terrorisme islamiste en soutenant des « rebelles » modérés qui se sont ensuite empressés de rejoindre Al-Quaeda. Ils ont joué la peau des minorités, notablement les Kurdes, les églises d’Orient et les Yézidis sans eux-mêmes prendre beaucoup de risques, ce qui les plaçait sans doute dans la pire des situations pour prodiguer des conseils.

Malgré leur échec patent depuis ces vingt dernières années, aucun n’a été sanctionné pour propos délirants. Pire encore, Donald Trump leur offre une promotion.

L’arrivée de John Bolton n’est donc pas une bonne nouvelle, car comme Mike Pompeo à la CIA, il est surtout connu pour son incompétence et son rôle de propagandiste en faveur de la guerre contre l’Irak, l’Iran, la Syrie, demain la Corée du Nord peut-être, et cela sans en mesurer les conséquences, ni pour les populations civiles ni même pour les États-Unis et leurs alliés.

  1. Sur le sujet, on pourra lire par exemple Anatol Lieven, John Hulsman, Ethical Realism. A vision for America’s Role in the World, Vintage Book, 2006 ou encore Hassner, Pierre, La Terreur et l’Empire. La violence et la paix II, Paris, Le Seuil, 2003.
  2. Bill Kristol, l’un des plus influents des journalistes néoconservateurs, a défendu l’idée que le néoconservatisme était un interventionnisme typiquement américain remontant à la politique du big stick de la présidence d’Andrew Jackson.
  3. Fukuyama, Francis, Nation Building, Cornell Univ. Press, 2004.
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  • c’est tellement facile de fomenter des guerres quand on sait pouvoir se mettre à l’abris ; ce bolton est un vieux croûton mais il est dangereux ;

  • C’est quoi les Nations « Unis », c’est comme les Etats-Unis ?

  • En face de dictateurs et de systèmes totalitaires, c’est de fermeté qu’on a besoin et non de mollesse et de palabres. Cela suppose qu’on défende le droit et la justice. L’opposition prompte et inflexible à l’expansionnisme ou aux menaces envers les droits fondamentaux de l’humanité éviterait souvent des conflits ultérieurs bien plus sanglants. On l’a vu tant de fois dans l’histoire. Bolton n’est pas une « tête brûlée ». Il a parfaitement raison. Ce qui importe, c’est de « faire ce qui est juste », ce que Trump a dit l’autre jour, à mon agréable surprise. Et on en revient à la notion de justice : le nazisme était-il juste ? le bolchevisme ? le communisme soviétique, chinois, cubain, etc. et leurs centaines de millions de morts (sans doute deux centaines). Et l’islam, qui ne connaît pas de moralité (pas de Dix commandements, pas d’interdiction de tuer, etc.), au moins 270 millions de morts, 14 siècles d’esclavage génocidaire, etc. ? N’aurait-il pas mieux valu les tuer dans l’œuf ? Hélas !

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