Le numérique, nouvelle frontière de nos libertés

L’approche technocratique du gouvernement méconnaît les enjeux identitaires et culturels liés au développement du numérique.

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Le numérique, nouvelle frontière de nos libertés

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 26 janvier 2018
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Par Édouard Fillias.

Avons-nous envie d’un monde où un implant numérique, transmettant nos données à la Sécurité sociale, comptabilisera le nombre autorisé de calories ou d’actes sexuels auxquels nous avons droit ? Souhaitons-nous que des IA nounous, à défaut d’être réellement intelligentes, nous transforment en assistés, incapables de préparer un repas, de nous déplacer sans téléphone ou pire encore, de faire preuve d’esprit critique ?

Et surtout, alors que la technologie accélère, pouvons-nous accepter qu’elle laisse derrière elle une part croissante de la population ? Isolées sur des territoires mal desservis et coupées des bénéfices financiers et intellectuels du numérique, ces populations perdantes pourraient devenir les premières opposantes à une technologie qui loin de les connecter, les mystifie et les isole.

Deux options possibles

Le monde numérique offre schématiquement deux options possibles, comme nous l’enseigne le plus grand esprit de ce temps, Stephan Hawking : « En résumé, je crois que l’émergence des intelligences artificielles sera soit la meilleure soit la pire chose jamais arrivée à l’humanité ».

La première option sera totalitaire. Agrégeant à l’infini les datas massivement captés, les monopoles de l’ère digitale deviendront des entreprises-mondes à l’emprise immédiate sur nos vies et sans aucun pouvoir de contrôle. C’est le scénario noir et crédible proposé par Laurent Alexandre ou Yuval Noah Harari, dans son maître ouvrage Homo Deus. Ce scénario est une attaque directe contre les valeurs fondatrices de notre civilisation occidentale : la liberté de conscience, de mouvement, de choix. Harari écrit « Au début du troisième millénaire, le libéralisme n’est plus menacé par l’idée que l’individu ne serait pas réellement libre, mais bien par les technologies ».

La mauvaise nouvelle est que cette première option est la pente naturelle que nous empruntons. En l’absence d’une réflexion stratégique de la part des gouvernements, d’une classe politique et médiatique dépassée, elle est l’avenir vraisemblable de la « révolution » numérique. Écoutons Jaron Lanier et les pères fondateurs d’Internet qui déplorent, à longueur de colonnes et d’ouvrages, la régression de l’esprit libéral d’Internet et de son potentiel créatif, au profit d’une société de la mesure et du contrôle.

La seconde option sera celle d’une incroyable accélération de notre potentiel humain, respectueuse de nos libertés fondamentales. Il s’agira d’un progrès démocratique, accessible à tous : la technologie, loin des monopoles, distribuera de l’égalité des chances là ou il n’y en avait plus. Les quartiers périphériques et cette France oubliée pourront renaître grâce au numérique.

Refaire de la politique

Cette seconde option a des préalables : le premier est d’arrêter de se prosterner devant les veaux d’or technologiques et d’accepter de faire, à nouveau, avec lucidité, de la politique. La domination des GAFA et des BATX chinois n’est pas une fatalité : nous ne devons plus accepter ni la spoliation fiscale qui les caractérise, ni le pillage massif des données individuelles de nos concitoyens, sur notre sol, qui nourrissent aujourd’hui les serveurs de la Silicon Valley.

Concrètement, il faut oser imposer un modèle d’opt-in payant aux réseaux sociaux pour compenser la valeur captée indûment, comme le suggère l’étude de référence sur les Datas du think tank Génération Libre.

Le droit à l’anonymat doit être garanti sur les réseaux, tout comme la neutralité du net, pour éviter le cauchemar dystopique de la série Black Mirror : nous n’avons pas besoin de la surveillance et du contrôle des monopoles comme des États quand nous surfons en toute légalité sur Internet.

Enfin, pour protéger nos libertés d’une attaque informationnelle massive, d’un défaut du système ou de l’éventuelle emprise d’une IA, le politique doit organiser au plan national, et peut être européen, une véritable stratégie du Switch Off.

Dans les infrastructures vitales (énergie, santé, transport, militaire), sans délais, on doit pouvoir débrancher les réseaux et basculer en low tech. C’est la condition de notre sécurité et de la protection de nos libertés.

Les enjeux du numérique sont sous-évalués

Ce gouvernement, comme les précédents, n’a pas pris la mesure de l’enjeu, malgré le choix d’un ministre jeune et dynamique mais peu valorisé. La valse-hésitation sur le CNNUM, une vindicte sans lendemain sur les taxes des GAFA tout comme la sortie pusillanime sur la question des fake-news, démontrent un traitement insuffisant et non stratégique de ces sujets au plus haut niveau.

La France se trouve souvent isolée en Europe alors que la concertation est nécessaire. L’approche technocratique du gouvernement méconnaît les enjeux identitaires et culturels liés au développement du numérique.

Oui, le numérique est une chance incroyable pour l’avenir de notre nation et de nos vies. Comment compter parmi les champions technologiques est la question majeure, peut-être la seule, qui s’impose à la France pour son avenir.

Édouard Fillias est Président de l’agence JIN (Paris, New-York, Londres, Hambourg), spécialiste de l’influence digitale. Il est éditeur  et auteur de E-Réputation, stratégies d’influence.

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