Par Johan Rivalland.
Vingt-quatre heures dans la vie d’une femme
Il s’agit de l’un des romans les plus connus de l’illustre auteur autrichien.
Une fois de plus, Stefan Zweig se révèle en maître de la psychologie. Il parvient à nous faire ressentir avec force les passions, doutes, troubles, confusions de ses personnages, toujours avec une très grande intensité.
Ici, on croirait une nouvelle fois avoir affaire à un roman écrit par une femme, tant il s’immisce dans la pensée profonde de son personnage féminin, en dévoilant toute la fragilité, la force morale et l’opiniâtreté.
L’histoire d’une passion foudroyante, dans l’univers des salles de jeux de Monte-Carlo. Une aventure folle et intense dont seul l’auteur parvient à nous transmettre l’intensité, au-delà de toute morale de bon aloi. Le cœur a ses raisons que la raison ne connaît point. La célèbre citation semble ici s’appliquer à merveille.
Une narration tout simplement étonnante. Et surtout, époustouflante.
Sans omettre la description fort subtile du personnage masculin, que l’on dirait tout droit sorti d’un roman de Dostoïevski.
Du grand art.
Vraiment un très grand auteur.
- Stefan Zweig, Vingt-quatre heures dans la vie d’une femme, Le livre de poche, 1992, 128 pages.
Légende d’une vie
Nous voici à présent plongés dans l’univers du théâtre (nous y reviendrons d’ailleurs dès le prochain volet). Pas a priori l’univers de prédilection de notre spécialiste du roman et surtout de la nouvelle, mais je dois dire qu’on ne ressort absolument pas déçu de cette lecture, bien au contraire une fois de plus plutôt admiratif.
Maîtrisant parfaitement l’art du théâtre, Stefan Zweig parvient à y intégrer de très belle manière ce qui fait sa force, le sens de la psychologie profonde des personnages, l’expression pleine de ce que ces derniers peuvent ressentir sans qu’il soit évident de le faire émerger jusqu’à la conscience et moins encore de l’exprimer clairement.
Ici, l’histoire du fils d’un grand écrivain dont la vie semble avoir été celle d’une légende, ou comment faire face à la difficulté de succéder à un père dont tout concourt à montrer qu’il était irréprochable à tout point de vue et digne de l’admiration de tous.
Comment assumer les espoirs fondés sur lui, la comparaison inévitable que l’on fera de lui en référence à ce père parfait ? Comment supporter que l’on ne s’intéresse guère à lui pour lui-même mais toujours en évoquant immanquablement ce père disparu ? Comment résister à cette pression psychologique constante qui l’empêche d’avoir sa propre vie, de pouvoir se comporter en être libre puisque, quoiqu’il arrive, on le comparera inévitablement à ce père et on l’attendra forcément au tournant, espérant peut-être même sa chute, qui prouverait bien qu’il ne suffit pas d’être le fils de quelqu’un d’extraordinaire pour pouvoir prétendre rivaliser avec lui ?
Or, ce fils ne souhaite rien d’autre que de disposer de la paix intérieure, d’évoluer indépendamment de ce père qu’il a toujours admiré et en même temps peut-être d’une certaine manière haï à cause de ce poids qu’il lui fait involontairement subir.
À moins que ce père n’ait quelque faille dont personne n’a connaissance ou presque… Cela pourrait bien changer le cours des événements.
Une pièce de théâtre d’une parfaite maîtrise, passionnante, très réussie.
Du grand Zweig.
- Stefan Zweig, Légende d’une vie, Grasset, novembre 2011, 180 pages.
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