Par Aude de Kerros.
Enfin ! Thierry Ehrmann, créateur d’Artprice, d’ArtMarket et de la Maison du Chaos, tient ses promesses ! Il nous avait promis pour ce 30 juin 2017 un bombardement historique du marché de l’art. C’est en cours. Pourtant ce marché vient de connaître un moment de gloire entre Biennale de Venise, Documenta et Foire de Bâle, sans compter quelques records dans les salles des ventes, après deux années de grand creux.
Son premier missile est sémantique. Il nomme aujourd’hui le marché de « l’Art contemporain »: « marché traditionnel ». Il le définit et le délimite comme entièrement fondé sur les grandes galeries internationales, les salles des ventes et les Institutions fabriquant la valeur en réseau.
Les œuvres de ce marché, pour être « bankables », ne peuvent pas être vendues en dessous de 50 000 euros. Avec ironie, il désigne ce marché de l’AC1 non seulement comme « traditionnel » mais comme « réactionnaire », définissant ce système comme faisant en sorte que « tout change pour que rien ne change », selon la célèbre formule du Prince de Lampedusa.
L’émergence de « l’Art Caché »…
Thierry Ehrmann n’en reste pas là, il fait apparaître sémantiquement l’autre marché, l’invisible, l’inexistant, plongé dans l’ombre par médias et institutions. Il le nomme, « marché OTC », « over the counter », par-dessus le comptoir.
Après une longue accumulation de « Big Data » et d’études de marché, il l’évalue, en considérant le produit des transactions, comme sept à neuf fois plus élevé que « le marché traditionnel ». Il emploie la métaphore de l’iceberg pour décrire cette situation : le « marché traditionnel » hypervisible et hypercoté de l’Art contemporain, correspond à un million de transactions en ventes publiques et 3 millions en ventes privées (galeries, etc.) alors que l’ensemble du marché de l’art mondial, invisible est, lui, de 30 millions de transactions.
Grand disrupteur devant l’Éternel, Thierry Ehrmann nous annonce aujourd’hui qu’il a rassemblé les moyens de rendre visible et commercialisable sur le marché OTC toute la partie rejetée systématiquement par les institutions de l’Art d’aujourd’hui pour cause de non contemporanéité. Et c’est le « blast » !
Comment Thierry Ehrmann est devenu l’Uber de l’art
Sa stratégie est implacable. Il sait ce qu’il fait. Il connaît parfaitement à la fois le « marché traditionnel de l’art y compris contemporain » et l’expérience de la disruption puisqu’il a commencé à la pratiquer en 2015, en rendant accessibles gratuitement sur l’Iphone de tout un chacun la grande majorité des données concernant les cotes des artistes.
Il sait que toute disruption court-circuitant un intermédiaire crée du profit. Encourageant ainsi les ventes en ligne, moins onéreuses, il rend les galeries non rentables et inutiles, excepté bien sur celles qui en réseau fabriquent des cotes de l’AC.
Puis il a longuement préparé l’étape suivante, celle de la disruption générale : il a créé une salle des ventes en ligne « Artmarket.com », dont le nom de domaine a été conquis définitivement en 2017. Cette appellation, de compréhension planétaire, dit tout en deux mots.
Enfin, grâce à l’achat de Xylogic puis de Blockchain, il assure la transparence de la chaîne des transactions et leur sécurité, permettant de retracer ainsi les étapes de la construction de la valeur.
Par ailleurs Thierry Ehrmann a consacré ces deux dernières années à un immense travail d’étude, de recensement et d’analyse, dans le monde entier, sans discrimination, de tout le « big data » nécessaire à l’organisation du marché OTC : réseaux sociaux, circuits parallèles, sites d’artistes, de galeries, de musées privés, d’amateurs, de critiques, d’historiens d’art indépendants. Il constate que les acteurs essentiels du marché qu’il lui reste à organiser sont bien là, présents et actifs sur Internet.
Ses recherches aboutissent à une recension sur le Net de 1,2 million d’artistes vivants, 40 millions d’amateurs potentiels, portant un intérêt à 325 courants artistiques, employant 212 techniques différentes. Ces nouveaux acteurs du marché ont un atout : ils acceptent de se plier à la concurrence et à la loi du marché et leurs prix sont plus accessibles… tant les frais de vente et de visibilité ont diminué.
Le vrai jack pot, peut enfin avoir lieu. Thierry Ehrmann, président d’Artprice et de ArtMarket.com, se sent en mesure de profiter des carences du système fermé de l’AC, et de lancer « l’OTC market », non sans spectacle, suspens et marketing : il met aujourd’hui sous nos yeux l’offre et la demande de l’art non bankable : soit toutes les transactions allant de 50 euros à 50 000 euros, sans discrimination de genre ou de style et… c’est le Blast !
Son arme : une technologie de la transparence
Ses méthodes contribuent à court-circuiter non seulement les galeries moyennes, les institutions administratives et muséales, mais aussi elles mettent à mal la partie opaque du marché de l’art contemporain, c’est-à-dire le sommet de sa pyramide de Madoff ou tout est trust et entente à la fois.
En effet grâce au système de blockchain qui a fait ses preuves avec bitcoin, il peut, en appliquant au marché de l’art cette nouvelle technologie, rendre le marché de l’art transparent.
Tout l’enchaînement des transactions créant la cote deviendrait ainsi visible. Cela ferait de lui un vrai marché où entrent en jeu l’offre et la demande (le haut marché de l’AC est essentiellement un marché de l’offre).
Le « marché traditionnel » dont le principe de fonctionnement s’en inquiète, mais Thierry Ehrmann se donne gagnant, en raison du retard et des lacunes de « l’establishment » concernant la connaissance et la maîtrise d’Internet. Le deuxième handicap étant son refus de la diversité de la création et le troisième, sa considération exclusive pour une clientèle aux moyens astronomiques. Il croit aux vertus de la concurrence… celle d’un marché d’amateurs amoureux, contre un marché de froids collectionneurs de produits financiers.
L’ubérisation des clercs
Thierry Ehrmann s’appuie sur une révolution culturelle en cours, observée avec attention, qui se dresse contre les fondamentaux exclusivement conceptuels, financiers, institutionnels, et bureaucratiques en France de l’AC.
L’imposture financière, intellectuelle et artistique de l’AC est aujourd’hui largement connue. Une véritable dissidence dénonce ce « système » depuis trois décennies, en particulier en France.
Il ne faut pas oublier que la rue de Valois, avec l’argent du contribuable, a donné pendant tout ce temps comme consigne aux archivistes de sa bibliothèque des catalogues (censée être le dépôt concernant les monographies de tous les artistes d’une époque) de mettre systématiquement à la corbeille ceux dont la « contemporanéité » officielle n’a pas été établie par eux.
Thierry Ehrmann, dans sa quête de big data, à titre privé, a fait patiemment l’inverse. Il est en mesure aujourd’hui de court-circuiter experts, médias, théoriciens de l’Université, sans oublier en France les deux cents Inspecteurs de la Création du ministère, dont le rôle est de légitimer intellectuellement l’AC.
Il parie sur les vertus de l’écran. Devant lui, chacun se sent libre d’aimer et d’acheter ce qu’il veut, avec des moyens raisonnables, sans être ni intimidé, ni méprisé, ni moqué. Écran qui permet aussi aux amateurs cultivés de rechercher, comparer, découvrir la pépite, dont la valeur intrinsèque pourra à nouveau être reconnue sur un futur authentique marché.
Thierry Erhmann va-t-il permettre aux artistes de réaliser, par ricochet, leur vieux rêve de liberté ? Enfin !
- AC, acronyme de « Art contemporain » utilisé par Christine Sourgins pour éviter la confusion. Cette expression ne désigne pas « tout l’Art d’aujourd’hui » comme elle le laisse croire, mais l’unique courant conceptuel. Dans Les Mirages de l’Art contemporain, Paris 2005 Ed. de la Table Ronde. ↩
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L’art officiel est mort depuis plus de 15 ans, reste « juste » à couper la pompe à pognon.