L’État ne doit pas intervenir dans le marché pharmaceutique

En intervenant, l’État fausse systématiquement le marché et empêche l’innovation.

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L’État ne doit pas intervenir dans le marché pharmaceutique

Publié le 16 avril 2017
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Par Bill Wirtz. 

Mi-janvier l’OCDE a publié un rapport intitulé « New Health Technologies : Managing Access, Value and Sustainability », qui analyse les régulations pratiquées dans le domaine de l’innovation pharmaceutique. Ce rapport est tout à fait opportun quand il s’agit d’identifier les problèmes liés à l’intervention de l’État. Cependant, il ne parvient pas à en tirer les conclusions appropriées.

L’une des plus grandes démonstrations du succès de la « libre entreprise » reste le progrès réalisé dans le domaine de la médecine moderne. Depuis la fin de la Première Guerre mondiale nous avons inventé un vaccin contre la tuberculose (1927), la défibrillation (1947), un vaccin contre la polio (1962), des antiviraux (1979), un vaccin contre l’hépatite B (1980), le clonage d’un mouton (1996), ou encore le premier œil bionique/artificiel (2007). L’innovation pharmaceutique apparaît à la fois comme une nécessité et comme une obligation morale que nous portons envers ceux qui souffrent de maladies incurables.

Un exemple contemporain est celui de la firme pharmaceutique Sanofi, dont le Dupixent a été approuvé par la Food and Drug Administration (FDA) le mois dernier – une entrée dans le marché qui représente plus de trois milliards d’euros et qui pourrait traiter l’eczéma atopique de millions de patients affectés.

Ces avancées dans la recherche pharmaceutique sont souvent lentes et difficiles. Nous devons donc faire tout notre possible pour la faciliter. Malheureusement, l’intervention étatique, destinée à assurer de façon bien intentionnée la sécurité des patients face aux nouveaux médicaments, réduit considérablement la marge de manœuvre des chercheurs. Le rapport de l’OCDE en témoigne parfaitement.

L’intervention des États n’est pas très utile

Le rapport de l’OCDE montre que le délai nécessaire à l’obtention d’une autorisation d’administrer un traitement varie entre 300 et 500 jours selon les pays (le délai le plus court au Japon, le plus long en Suisse et au sein de l’Union européenne) et que tous les pays membres tendent à faire des efforts afin d’accélérer leurs procédures.

En effet, l’OCDE reconnaît que la durée précédant l’émission des autorisations nécessaires aux traitements augmente le coût pour les patients :

Les efforts actuels devraient être concentrés sur la réduction des coûts associés. Les bénéfices de toute régulation devraient toujours être évalués par rapport aux coûts qu’elle engendre, à la fois en termes de délai d’attente pour les patients souhaitant accéder aux produits innovants, en termes de coûts pour les innovateurs et de frais administratifs.1

L’OCDE poursuit sa critique en affirmant que le manque de communication entre les États ralentit l’innovation : en coopérant davantage avec l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), des traitements légaux dans un pays pourraient le devenir plus rapidement dans un autre.

Les seules pratiques reconnues par le rapport comme ayant une influence positive sur le marché pharmaceutique sont les «Risk-Sharing Agreements», des accords de partages des risques, comme il en existe au Royaume-Uni et en Italie. En vertu de ces engagements, les laboratoires pharmaceutiques remboursent une partie ou même l’intégralité des traitements si la condition du patient ne s’améliore pas après un certain temps. Ainsi, les laboratoires sont évalués en fonction de leurs résultats.

Il semble vital que toute régulation appliquée au marché des nouveaux traitements fasse l’objet d’une véritable coopération entre l’ensemble des acteurs de l’industrie, dont les producteurs et les scientifiques, afin d’éviter la situation actuelle dans laquelle l’État participe à un travail d’équipe qu’il sabote de façon répétée.

L’État ne doit pas déterminer la valeur de la recherche pharmaceutique

Si l’État se permet de déterminer qui seront les gagnants ou les perdants de la recherche et du développement pharmaceutique, alors personne n’en profitera, et surtout pas les patients.

Le rapport de l’OCDE reconnaît la lenteur du processus concernant l’autorisation d’administrer des traitements, mais ne reconnaît pas l’influence néfaste du contrôle des prix : la mise en place de prix déterminés pour de nouveaux traitements ou produits diminuera l’innovation dans le secteur, puisqu’ils réduisent l’effet incitatif du profit.

Le professeur Darius Lakdawalla, enseignant dans le domaine pharmaceutique, expliquait dans le New York Times en 2015 que ces prix fixés par l’État pourraient réduire de 20% l’innovation relative aux traitements :

Ces contrôles de prix étoufferont l’apparition de nouveaux médicaments dans la mesure où les innovateurs passeront moins de temps à en développer puisque ces découvertes leur rapporteront moins d’argent.

L’exemple de l’Amérique du Nord est une belle illustration. Les Canadiens pratiquent ces contrôles de prix. En revanche ils profitent d’États qui interviennent moins dans ce domaine, au profit de l’innovation. Par conséquent, des milliers de Canadiens se déplacent aux États-Unis pour l’administration de traitements médicaux.

Le futur de la médecine est prometteur, ne le gâchons pas

Le passé regorge d’exemples de mauvaise gestion de la part de l’État dans la régulation du marché pharmaceutique, qui, malgré tout, a un avenir prometteur. Nous sommes entrés dans une nouvelle ère où la médecine moderne est sur le point de guérir beaucoup de maladies, et d’éradiquer des fléaux qui touchent surtout les individus les plus pauvres. Le rapport de l’OCDE nous a donné des bons indices concernant les réformes à adopter. Nous devons cependant insister sur le fait que toute action de l’État doit se faire avec la communauté scientifique ainsi qu’avec les producteurs pharmaceutiques, afin de favoriser l’innovation dans le domaine de la santé.

  1. OECD (2017), New Health Technologies: Managing Access, Value and Sustainability, page 125, OECD Publishing, Paris. http://dx.doi.org/10.1787/9789264266438-en
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  • Il est paradoxal de citer Sanofi en exemple, alors que cette société réalise ses plus belles performances dans les affections de longue durée remboursées à taux plein, dans les secteurs où l’absence de concurrence a pulvérisé les tarifs (notamment dans le domaine de l’insuline), et partout où ses liens avec les pouvoirs publics font des miracles…

    • @ Bertrand Bugalat
      Il est clair qu’il ne faut pas trop compter sur la France et son objectivité dans le domaine des médicaments: les chercheurs ne sont pas moins bons qu’ailleurs ni les quelques firmes moins performantes. Mais il reste comique qu’après l’infâme comédie de l’ AFSSAPS, on l’ait réinventée, sous l’acronyme d’ANSM, alors que tout médicament nouveau accepté par un pays-partenaire de l’Union Européenne devrait être enregistré et plus ou moins remboursé dans les autres pays: voilà un domaine où la France qui prétend jouer un rôle de leader dans l’Union aurait pu se montrer partenaire sans protection politique particulière pour SES entreprise pharmaceutiques, bien évidemment: c’est là qu’on voit l’inanité de ce conseil européen des chefs d’état et de gouvernement pour prendre des décisions communautaires, alors qu’ils ne pensent qu’à leur pouvoir national! Si l’Union est en panne, ils en sont bien la cause. Voir la France jouer la menace (stupide) d’un frexit, avec un président peu « charismatique », même pas au diapason des critères de convergence, voulant renouer « d’égal à égal » avec son partenaire de « couple » mais en voulant une Europe française, avec une fiscalité adoptant les taux français, ce qui n’arrivera évidemment pas! Le mythe d’une France « cartésienne » a dû s’arrêter avec « René »!

      • @ mikylux
        Vous avez parfaitement raison, il est difficile d’aborder ces questions sous un angle dogmatique : les partisans du merveilleux-système-de-santé-que-le-monde-entier-nous-envie (sans aller jusqu’à l’imiter) sont les idiots utiles de prébendiers toujours prompts à invoquer le patriotisme économique ou le programme (imaginaire) du C.N.R. afin de pratiquer la privatisation des profits et la mutuellisation des pertes (cf la Dépakine). On parle souvent de la HAS ou de l’ANSM, moins du CEPS, ex Comité Economique du Médicament. C’est pourtant là que les choses importantes se décident.

  • Cet article ou le rapport sur lequel il s’appuie est maladroit. Il est sans doute souhaitable que l’autorisation de mise sur le marché d’un médicament dans un État vaille pour un marché plus large, à condition que le niveau de contrôle et de garantie soit suffisant dans cet État : c’est un peu le but de l’EMA (agence européenne du médicament)… mais encore trop vaguement et dans un sens plutôt laxiste à l’image de ce qui est proposé ici.
    En effet, il est question de passer rapidement à la commercialisation à grande échelle quitte à transformer des populations entières en cobayes, alors que la nouveauté d’un traitement ne garantit pas sa sécurité ni l’amélioration du service médical rendu (SMR).
    La mention de vaccins (tuberculose, polio, hépatite B) est justement un argument à évaluer : le vaccin (préventif en général) ne s’adresse pas à des patients, mais à une large population pour laquelle l’utilité, l’efficacité et l’innocuité du vaccin sont rarement démontrées ; de nombreux États, dont la France, interviennent cependant dans la diffusion, préconisation, recommandation et, pire, obligation de certains vaccins, souvent en en prenant le coût en charge ou en le mettant à la charge de certaines assurances : il s’agit d’ores et déjà d’une forme de subvention, et même d’une orientation de la recherche pharmaceutique au bénéfice de telle entreprise (SANOFI par exemple, pour qui les vaccins représentent une forte marge contributive) et au détriment de solutions concurrentes moins invasives et plus efficaces.
    Les Risk Sharing Agreements sont en outre un paravent : le défaut d’amélioration de l’état d’un patient est difficile à démontrer, a fortiori sa dégradation conduisant parfois à l’invalidité ou au décès… et la pratique est de mettre à la charge du plaignant la démonstration de la causalité. C’est particulièrement le cas, une fois encore, en matière de vaccination… en Grande-Bretagne, en France, etc. de telle sorte que la sécurité n’est plus contrôlée jusqu’à ce que, par hasard, un scandale éclate (Thalidomide, Mediator, Depakine…).
    La tarification ou le contrôle des prix des nouveaux traitements ou la « licence d’office » peuvent freiner l’innovation, mais cet aspect est secondaire par rapport à la sécurité que tout individu doit espérer d’un médicament.
    Encore une fois, l’intervention de l’État fausse le marché et pas dans l’intérêt de l’individu.

    • @ HUGH

      Je suppose que vous faisiez confiance à votre AFSSAPS « française », autant qu’à l’objectivité in corruptible de votre ANSM! C’est vraiment comique!

      Comique autant que de mettre en doute les vaccins « dont « l’utilité, l’efficacité et l’innocuité du vaccin sont rarement démontrées »,

      sans compter votre

      « au détriment de solutions concurrentes moins invasives et plus efficaces »

      Où on franchit la barre du ridicule!

  • Les commentaires sont fermés.

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