Crosswind : un chef d’œuvre sur un crime de masse du communisme

Une analyse de « Crosswind : la croisée des vents », un film estonien de Martti Helde.

Partager sur:
Sauvegarder cet article
Aimer cet article 0

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Crosswind : un chef d’œuvre sur un crime de masse du communisme

Publié le 28 mars 2015
- A +

Par Gérard-Michel Thermeau.

Crosswind la croisée des ventsLe réalisateur estonien Martti Helde s’attaque à un sujet douloureux et peu connu dans nos contrées : la déportation en Sibérie de centaines de milliers de Baltes par le petit Père des peuples, Joseph Staline, un des nombreux crimes de masse du communisme soviétique.

Il le fait en s’appuyant sur les lettres envoyées par une jeune mère de famille, Erna, à son mari Heldur (dont elle ignore l’exécution) : le drame individuel vaut témoignage du drame collectif et permet une identification de la part du spectateur. Dans le même temps, il n’y a aucun dialogue, les quelques acteurs étant mêlés aux 700 figurants : d’une certaine façon, il n’y a que des figurants dans cette histoire.

Comment la fiction peut-elle rendre compte de ce type de drame ?

Le parti pris esthétique est radical et magnifiquement filmé dans un superbe noir et blanc : construit en grande partie, mais non exclusivement, par de longs et lents travellings qui saisissent les diverses parties de grands tableaux composés de figurants figés dans un mouvement. Ces tableaux vivants produisent un curieux effet de réel, les figurants dans leur pose donnant une étonnante impression d’authenticité, comme s’il s’agissait d’instantanés photographiques d’époque. La caméra, virtuose, se glisse entre les corps, créant un véritable effet de profondeur, bien loin des effets tape-à-l’œil des films en 3D.

Tout nous est montré sans pathos ni complaisance : la violence des soldats de l’Armée rouge, le voyage en wagon à bestiaux, le froid et la faim en Sibérie, la mort des enfants, l’exécution des hommes, les violences sexuelles.

En dépit de la lenteur apparente des mouvements d’appareils et de la construction en longs plans-séquences, le rythme du film est très fluide et le spectateur est presque étonné d’arriver au bout du voyage. La bande son est remarquablement travaillée, parfois en accord avec les images, parfois annonçant ce qui va suivre, avec une belle musique douloureuse de Pärt Ususberg.

Martti Helde oppose la vie et la liberté, où règne le mouvement, à l’entreprise totalitaire où tout est figé : souffrances réelles comme joie factice et officielle. Soulignons l’hypocrisie des journalistes français qui, à l’exception d’une critique haineuse de Libération, saluent généralement le film mais se gardent bien d’utiliser le mot communisme et préférant évoquer simplement Staline et la « dictature stalinienne ». Une bonne partie de la presse de gauche dissimule son malaise sous des réticences pseudo-esthétiques, dénonçant des partis-pris formels et conceptuels, n’osant s’en prendre au sujet.

Crosswind est un chef d’œuvre qui ne peut laisser indifférent.

  • Crosswind : La croisée des vents, drame estonien de Martti Helde (sortie nationale le 11 mars 2015), avec Laura Peterson, Mirt Preegel, Ingrid Isotamm. Durée : 1h27min.

Voir les commentaires (3)

Laisser un commentaire

Créer un compte Tous les commentaires (3)
  • Tout à fait d’accord !
    Surtout ne pas nommer : les crimes commis au nom du communisme ne sont pas des crimes
    D’ailleurs le communisme n’y est pour rien
    Staline, Mao, Pol Pot et Cie n’ont jamais eu de carte au Parti
    Marchais n’a jamais travaillé dans les usines d’Hitler etc…etc…
    Lisez attentivement nos manuels d’Histoire, labellisés par tous les Ministres de l’E-N depuis plus de 60 ans .
    toutes les pages de droite sont noircies par les atrocités des pestes noires et brunes : et c’est l’honneur de notre mémoire
    Aucune page de gauche ( ou presque) pour les atrocités du communisme : c’est ainsi qu’on détruit la mémoire et que des générations d’enfants ont été privés de l’élémentaire vérité

  • La pique sur la 3d est en trop. Ça nuit a l’article, je trouve. Lq 3d est un outil, elle peut être bien utilisée. Mais c’est dans l’air du temps de taper sur la 3d…

    Je vous garantie que la façon de filmer que vous décrivez peut être tape a l’oeil aussi.

  • Tiens je connaissais pas ça, les crimes du communisme sont merveilleusement bien cachés par nos médias et éducation nationale…

  • Les commentaires sont fermés.

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Aurélien Duchêne est consultant géopolitique et défense et chroniqueur pour la chaîne LCI, et chargé d'études pour Euro Créative. Auteur de Russie : la prochaine surprise stratégique ? (2021, rééd. Librinova, 2022), il a précocement développé l’hypothèse d’une prochaine invasion de l’Ukraine par la Russie, à une période où ce risque n’était pas encore pris au sérieux dans le débat public. Grand entretien pour Contrepoints par Loup Viallet, rédacteur en chef.

 

Que représentent les pays baltes pour la Russie de Poutine ?

Aur... Poursuivre la lecture

Début décembre, Bob Iger faisait grand bruit :

« Les créateurs ont perdu de vue ce que devait être leur objectif numéro un. Nous devons d’abord divertir. Il ne s’agit pas d’envoyer des messages. » 

Cette mise au point tardive mais bienvenue de l’actuel PDG de Disney tranche avec la politique menée ces dernières années par ce géant du spectacle, encore renforcé par les rachats de l’univers de super-héros Marvel et de Lucasfilm.

Disney perd de l’argent alors que cette compagnie a longtemps eu l’habitude d’en gagner énormément.... Poursuivre la lecture

Dans Woke fiction - Comment l'idéologie change nos films et nos séries, Samuel Fitoussi* élabore une critique libérale du wokisme et de son impact sur le monde du cinéma et de la série. Un entretien réalisé par Baptiste Gauthey, rédacteur en chef de Contrepoints.

Contrepoints : Bonjour Samuel Fitoussi. Dans les dernières années, de nombreux essais politiques ont été publiés sur la question du wokisme. Pourquoi avoir choisi d’écrire sur ce sujet, et qu’est-ce qui fait l’originalité de votre ouvrage ?

Passionné de cinéma,... Poursuivre la lecture

Voir plus d'articles