La « politique d’austérité » vue par les Banques Centrales

Banques centrales : la politique d’austérité est-elle toujours de mise après plusieurs années de crise économique ?

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Euro BCE (Crédits Maciej Janiec, licence Creative Commons)

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La « politique d’austérité » vue par les Banques Centrales

Publié le 3 septembre 2014
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Par Jacques Garello.
Un article de l’ALEPS.
Euro BCE (Crédits Maciej Janiec, licence Creative Commons)

Pure coïncidence ou lien logique ? « L’affaire Montebourg » s’est produite au moment où s’est terminée la conférence de Jackson Hole (Wyoming) organisée chaque année pour coordonner les politiques monétaires des grandes banques centrales du monde entier. Point commun : la politique d’austérité est-elle toujours de mise après plusieurs années de crise économique ?

Cette question a divisé les banques centrales : à la surprise générale, Janet Yellen, qui dirige la FED (Federal Reserve Bank à Washington) annonce que les États-Unis vont tourner la page des « assouplissements » et envisagent une hausse des taux d’intérêt, tandis que Mario Draghi, Président de la Banque Centrale Européenne (BCE) désire poursuivre dans la voie d’une relance monétaire. Apparemment, c’est donc Valls contre Montebourg. Mais qu’en est-il en réalité ? L’austérité n’existe que dans les discours politiques et le keynésianisme continue à hanter les esprits.

Des dizaines d’années de « monnaie facile »

« Quantitative easing » disent les anglo-saxons. C’est la politique que la FED a choisie bien avant la « crise » de 2008. C’est une rupture avec le monétarisme de Friedman, estimant que le devoir d’une Banque Centrale n’est pas de faire varier la masse monétaire en circulation d’après la conjoncture mais de respecter une règle d’or : assurer en permanence le parallélisme entre croissance de la quantité de monnaie en circulation (masse monétaire) et Produit National. Cette politique-ci est dite « automatique », alors que celle-là est « discrétionnaire », au sens de « laissée à la discrétion de la banque centrale ».

Il y a une différence de nature entre les deux politiques. Dans l’optique monétariste, la banque centrale a pour mission d’assurer la stabilité monétaire, un service éminent rendu aux agents économiques qui ont une certitude sur la valeur de la monnaie et peuvent faire des prévisions réalistes. Dans l’optique keynésienne, la banque centrale rend service à l’économie en ouvrant les vannes du crédit pour soutenir la dépense nationale, soit pour investir, soit pour consommer.
Au fil du temps, le « quantitativisme » s’est progressivement relâché et la FED a recommencé, comme aux plus belles années d’inflation de la décennie 1970-1980, à ouvrir les vannes du crédit et à rendre « l’argent facile » pour soutenir l’activité économique.

Les déboires de l’assouplissement quantitatif

imgscan contrepoints 151 BCE GrèceAvoir facilement accès au crédit distribué par des banques qui elles-mêmes sont approvisionnées en liquidités par la Banque Centrale : programme séduisant en apparence ! Tout le monde peut investir ou consommer à des taux d’intérêt nominaux très faibles, parfois même à des taux d’intérêt négatifs.
Mais, comme le font remarquer Hayek et les économistes « autrichiens », si n’importe qui a accès au crédit, les banques finiront par prêter à des insolvables, tandis que les projets réellement rentables seront ralentis, l’argent étant parti vers des parasites. C’est exactement ce qui s’est passé avec les « subprimes » en 2008.

De plus, il y a un consommateur de crédit insatiable : c’est l’État. Peu à peu la Banque Centrale est amenée à combler les déficits budgétaires et la dette publique prend son envol ; on sait qu’on n’est pas parvenu à la maîtriser – sauf dans quelques rares pays comme la Suisse et la Suède en Europe.
L’argent ainsi gaspillé sans considération de rentabilité ni de solvabilité constitue un « malinvestissement » (Hayek) et ne tarde pas à créer du chômage et l’économie s’enlise, alors même que l’on croyait la relancer.

Ainsi, dans l’histoire monétaire des vingt dernières années, il n’y a jamais eu d’austérité. Au contraire, c’est l’accumulation de déficits budgétaires et de la dette publique, c’est le financement de projets pharaoniques mais catastrophiques et c’est surtout l’irresponsabilité et le parasitisme qui s’installent, avec pour rançon le chômage massif.

Revenir à « l’austérité » ?

Donc très curieusement la question aujourd’hui en débat est celle de revenir ou non à une austérité qui n’a jamais existé, et surtout pas en France.

Parmi les banques centrales du monde entier, la tendance est à « l’austérité ». Le Japon fait exception, mais est en train de sombrer. La Fed veut réduire le quantitative easing, car un vrai danger pèse sur le dollar, dont la contrepartie est faite de créances sur le Trésor américain.
Il est vrai que, sous la pression des pays du Sud de l’Euroland, Monsieur Draghi vient d’annoncer le maintien de taux faibles et l’encouragement à la relance des crédits. Mais il met ainsi en danger la zone euro entière et le bloc « libéral » ne sera peut-être pas disposé à le suivre : Monsieur Junker ne veut pas cautionner les débordements budgétaires, notamment en France.

Tout au contraire, Monsieur « Made in France » et les siens préfèrent nous décrire une Europe marchant au pas derrière Madame Merkel. Il ignore que plusieurs pays qui ont renoncé à l’argent facile et ont remis leurs politiques budgétaires en ordre sont maintenant sortis de la crise et leur taux de chômage est la moitié (voire moins encore) du nôtre : Autriche, Pays Bas, Suède, République Tchèque, Allemagne bien sûr sont en-dessous ou autour des 5% de chômeurs,
Nous écrivions naguère (Nouvelle Lettre du 24 mai) que « Montebourg accusait l’Europe de libéralisme, en agitant l’épouvantail du libéralisme ; or la définition qu’il en donne montre que l’Europe n’est pas libérale ! L’Europe de la réglementation, des politiques communes, à commencer par la politique agricole, des directives tatillonnes, c’est tout sauf l’Europe libérale. »

Montebourg ne disait pas la vérité, ni sur l’Europe, ni sur l’austérité. Et s’il y a quelques raisons d’accuser Bruxelles, rien n’autorise à admirer Francfort.

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  • SuperMario veut-il à tout prix faire un QE comme Ben et Janet ? A priori, il ne peut pas, compte tenu des réglementations encadrant la BCE. Comment peut-il donc s’y prendre pour contourner le problème dans l’hypothèse où il le voudrait ? Si les traités interdisent de financer les Etats directement, la solution peu satisfaisante est le recours aux collatéraux. Un collatéral n’est pas à proprement parler un actif détenu par la BCE en l’absence de transfert de propriété. il s’agit seulement d’une garantie (rires). les banques touchent certes des liquidités nouvelles mais seulement temporairement, et à la fin du programme, elles doivent rendre l’argent (destruction monétaire), récupérer l’actif étatique pourri et l’assumer. On atteint rapidement la limite du système. Alors, que faire ?

    Si les Etats ne peuvent être directement financés, en revanche, l’entité Europe n’est pas concernée par l’interdiction. Dès lors, rien n’empêche l’Europe de collecter elle-même les actifs des Etats impécunieux mal gérés, de mélanger le tout en secouant très fort dans une sympathique titrisation innovante, de coller l’étiquette « UE » dessus, puis de demander à la BCE d’acquérir ces « nouveaux » actifs purifiés par l’onction européenne. Aucun traité n’interdit le tour de passe-passe financier. En plus, ça tombe bien, l’Europe en tant que telle n’a officiellement pas de dette (rires). Elle peut donc sans effort produire des milliers de milliards de dettes supplémentaires au niveau supranational par la titrisation des dettes nationales. Il suffit d’adapter le budget européen en conséquence, en consacrant un tout petit pourcentage du PIB de la zone euro au service de la dette (les intérêts versés à la BCE). La BCE tient enfin son QE comme les autres. C’est merveilleux ! Ah ah, La déflation n’a qu’à bien se tenir : la BCE va lui défoncer le groin à grands coups d’imprimantes.

    • Finalement, La BCE prend acte qu’elle ne peut pas financer directement les Etats, pour l’instant. Mais elle propose de racheter sans condition ou presque toute forme de créance non publique, ce qui revient à faire du carry trade au profit des dettes publiques dont les institutions financières sont gavées de force.

      Evidemment, à court terme, les marchés applaudissent à tout rompre, à l’image du patronat français subjugué par les mensonges d’un Valls. Tout aussi clairement, l’euphorie prendra brutalement fin lorsque le constat de la récession provoquée par la BCE aura atteint le cerveau reptilien des investisseurs, les créances ne valant plus rien, les mauvais investissements n’étant plus discriminés par les marchés, l’économie européenne étant laminée faute d’une demande motivée par des productions de qualité. A ce moment là, il faudra prendre ses pertes mais, dans l’urgence, il n’y aura plus d’acheteur en face. La chute promet d’être violente.

      Comme les autres banques centrales, la BCE se trompe dans l’analyse des difficultés économiques. Le problème n’est pas l’absence de crédit, le niveau de change de la monnaie ou même la déflation largement imaginaire. Le problème demeure les réformes structurelles que les pays mal gérés persistent à refuser pour préserver l’application bornée de l’idéologie socialiste. En supprimant le prix de la monnaie, la BCE détruit un des piliers indispensables de l’économie plus sûrement qu’une guerre aurait pu le faire.

  • D’ abord la fameuse crise n’ impacte pas tout le monde loin de là !

    Si certains tentent de faire croire que le chomage et l’ économie sont liés il faut le prouver donc
    mon avis est
    que nos gouvernements et politiciens pour des raisons NON économiques ont eut les yeux plus gros que le ventre autrement dit vous ne pouvez pas
    par exemple avoir une politique d’ immigration en Occident pour concurrencer des pays comme la Chine ou alors il faut niveler par le bas !
    c’ est peut etre ça leur très chère et bien pratique crise ?

    • Le chomage èlevé et l’immigration servent les interets du grand capital, comme ce fut le cas à l’èpoque de l’esclagisme. Le but ètant se soumettre les peuples à payer des rentes aux miliardaires qui pensent leur temps à corromprent les dirigeants à choisir leur produits. Ainsi la dèmocratie qui apporte son lot de droits sert au pouvoir complèsant, qui s’insurgent des sociétés moyenageuses car elles bloquent le gout de la cupidité, fondamentale dans un monde où la moralité peut s’acheter. Le taux èlevé du chomage des jeunes est lié à une culture du dirigisme ètatique. Un lien directe existe entre la corruption et le dèficit public. La France malgré un taux de prèlèvement digne d’un Etat totalitaire ne rèussit pas à resorber le chomage , qui est la cause de son dèficit . Soutenir la consomation ne semble pas rèsoudre celui de l’immoralité de la société. Est normal de survivre sur les aides sociale parceque l’accès au travail est devenu impossible malgré les besoins de la société? En effet la solidarité imposée engendre a terme le refus de faire des efforts à ceux qui sont doués de l’esprit d’entreprise nullement proposé dèsle plus jeune age dans un système centralisé dirigés par le dogme des policiens, et sous le controle d’un corps d’enseignants extrèmement politisé sans aucune expèrience du monde réel, et contre l’obligation de rèsultat… La seule option reste l’ouverture complète à la concurrences à toutes les activités publiques , mème pour la sècurité. Il faut limiter la presence de fonctionnaires au seul control de l’argent public de celui du respet des règles fixées par des lois votées pour èviter les dèrives qui existent dès qu’un pouvoir s’installe. Mettre en concurrence les services publics avec obligation de rèsultats est de loin la solution le plus efficace pour combattre les dèrives de l’Etat qui protèges ses fonctionnaires par des tribunaux administratifs au nom de l’Egalité garantie par la Constitution…

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