Deux dirigeants khmers rouges condamnés pour leur rôle dans le génocide

Mieux vaut tard que jamais : jeudi 7 août, deux hauts dirigeants khmers rouges ont été condamnés à la prison à vie pour leur rôle dans les massacres cambodgiens.

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Nuon Chea CC Extraordinary Chambers in the Courts of Cambodia

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Deux dirigeants khmers rouges condamnés pour leur rôle dans le génocide

Publié le 24 août 2014
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Par Siegfried Herzog.

Nuon Chea CC Extraordinary Chambers in the Courts of Cambodia
Nuon Chea, l’idéologue du régime et le second dans la hiérarchie, juste derrière Pol Pot, a été condamné il y a quelques jours pour crime contre l’humanité.

 

On estime que 1,7 million de Cambodgiens (21% de la population du pays) ont été tués ou sont morts de faim pendant le règne de terreur du régime communiste des Khmers rouges de 1975 à 1979. En termes de pourcentage de la population, aucun pays n’a jamais tant souffert aux mains de ses propres dirigeants, rendus fous par une idéologie utopiste qui transforma la vie au Cambodge en un véritable cauchemar.

La société Cambodgienne, profondément traumatisée, a mis beaucoup de temps pour se confronter à son passé. Beaucoup ont préféré oublier et passer à autre chose, la douleur étant trop grande, ou se sentant menacés par le fait de rendre des comptes à cause de leur propre rôle, même minime, dans ce régime.. Cette réaction n’est pas unique au Cambodge ; la plupart des sociétés traumatisées prennent quelques décennies pour faire face aux horreurs de leur passé, et certaines n’y arrivent jamais, laissant les blessures s’envenimer.

Au Cambodge, le temps de faire face à ce passé est enfin arrivé. Deux hauts dirigeants khmers rouges ont été condamnés il y a quelques jours à la prison à vie pour leur rôle dans les massacres : Nuon Chea, 88 ans, et Khieu Samphan, 83 ans. Nuon Chea était le secrétaire adjoint du Parti communiste du Kampuchéa (PCK) et, avec son chef Pol Pot, exerçait le pouvoir de décision ultime. Khieu Samphan a été membre du comité central du parti et a joué un rôle clé dans la prise de décisions économiques. Les deux portent donc directement une lourde responsabilité dans les horreurs qui se sont déroulées.

Le verdict a été rendu par les Chambres Extraordinaires des Tribunaux cambodgiens, qui ont été mises en place avec le soutien des Nations Unies et pour la plupart financées par des contributions de plusieurs pays. Le gouvernement cambodgien a fourni de l’argent et le soutien logistique ; mais sans enthousiasme et en interférant avec le tribunal. Ceci a prolongé le procès et testé la patience de la population, en particulier les victimes survivantes en quête de justice.

Alors que le gouvernement ne savait pas si les démons du passé devaient être confrontés, de nombreux Cambodgiens estimaient le contraire : plus d’une centaine de milliers de personnes ont assisté aux débats. Le verdict a finalement apporté le sentiment que la justice, même imparfaite, avait enfin triomphé.

Pour Chea Leang, l’un des principaux procureurs, ce procès « ne rendra pas la vie aux personnes exécutées ou à celles qui sont mortes d’épuisement ou par manque de nourriture, d’eau, ou d’assistance médicale. Cela ne reconstruira pas les familles… [mais] je crois que ça va amener un peu de justice, et enfin accorder un certain respect aux victimes, mortes et vivantes, qui leur avait été refusé depuis si longtemps » (Phnom Penh Post, 8 août 2014 ).

Les procédures judiciaires ont été en proie à de nombreux problèmes, notamment la corruption, et ont mis plusieurs années pour atteindre leur conclusion. Peut-être cela n’est-il pas véritablement surprenant puisque il s’agissait du premier projet de ce genre. Pourtant, il a établi un exemple important (et fructueux) de coopération avec la communauté internationale, menée par les autorités locales et l’ONU, pour faire face aux crimes contre l’humanité. L’entreprise était fondée sur les principes énoncés dans la Déclaration des droits de l’homme des Nations unies, mais exercée au sein du système juridique local. Cela a envoyé le message que le monde défend encore l’idée que les violations graves des droits de l’homme ne doivent pas rester impunies.

En outre, la coopération au jour le jour entre le personnel international et le personnel cambodgien a contribué à renforcer la capacité judiciaire et améliorer les normes judiciaires au Cambodge.
Enfin, la peine d’emprisonnement à perpétuité – la peine de mort ayant été abolie par le Cambodge et fortement contestée par la communauté internationale des droits de l’homme – envoie le message que le verdict était justice, et pas vengeance. L’inviolabilité de la vie humaine, au cœur de l’idée des droits de l’homme, s’étend également aux coupables ; le Droit et les institutions de l’homme sont faillibles et ne devraient pas détenir le pouvoir de vie ou de mort.
Les « champs de la mort » du Cambodge sont un terrible souvenir de ce qui se passe quand ces principes sont renversés.


Cet article est syndiqué par le réseau AtlasOne et l’original est disponible ici. Traduction : Mathieu Bédard et Emmanuel Martin pour Contrepoints.

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  • domage que les oubliètes du moyen age n’existe plus ; c’est l’endroit ou je laisserai pourrir ces individus sans pitié responsables de tant de morts ; même la prison , c’est trop doux pour cette sale engeance ;

  • Un message pour le camarade Poutine ?

    Bientôt, nul ne pourra échapper à la justice internationale.

    • Poutine est d’abord russe avant d’être communiste et vu la désinformation des médias français, je resterai très prudent à son égard.
      Par ailleurs, il est un des rares à se soucier des chrétiens du Proche Orient, ce que ne ferait pas un socialiste.

  • Khieu Samphan fruit de l’enseignement universitaire de Montpellier. Peut être que les élus socialistes de la ville vont lui faire une Statue à coté des massacreurs de masse Mao ou Staline?
    Khieu Samphan terminera sa formation à la planification à Paris au PCF…..Dans la même classe que Pol Pot place du colonel Fabien.

    Hô Chi Minh le vietnamien formé à Paris au PCF aidé de Krivine mettra en place les instituts universitaires communistes au Nord Vietnam ou étudieront l’élève Nuon Chea.

    Reste a faire en France le procès des profs de l’université populaire du PCF qui a formé ces cadres Kmers.

    Aujourd’hui ils se pavanent comme profs dans l’éducation nationale à Sorbonne et Science Po et se font appeler « économistes » et font des articles dans Libération ou le Monde diplomatique….

    Oui il est temps de mettre ces gens bien « franco-Français » devant les cadavres et leur responsabilité.

    • tout à fait, bien des intellectuels français ont fait l’apologie du Stalinisme, et même de Pol-pot. Ce sont les mêmes qui aujourd’hui, soutiennent éhontément Valdimir Poutine, ce sont ces prétendus « communistes » qui ont posé les bases idéologiques du Front National de Marine Lepen.

      Si la France n’est pas déstalinisée, comme jadis l’Allemagne a été dénazifiée, nous courrons à la catastrophe. Mais pour cela, il faudrait que les libéraux français deviennent audibles, et donc rattrapent leur retard sur les libéraux américains. L’apologie de l’école de Chicago : c’est fini. Place à Schumpeter, place au structuralisme économique, au matérialisme historique, à l’économie expérimentale.

    • sans oublier les enfoirés qui a longueur d’ondes chez Ruquier et d’autres, philosophent et continuent de nous donner des leçons en oubliant a quel points ils furent complices de ces assasins

      • oui, et qui aujourd’hui, comme hier, font l’apologie de Poutine, du protectionnisme, de « LA » France…  » Ah « LA » France, le Christ, l’humanisme, la « justice » sociale, le « peuple » : COCORICO ! Vive « LA » France ! Vive le protectionnisme !  »

        Mais bon, de toute manière, cette bande de loosers pathétiques vont être écrasés sans pitié par la mondialisation. Qu’ils mettent leur Marine Lepen au pouvoir, et on va bien se marrer en terme de catastrophe économique.

  • « Destaniliser la France, comme l’Allemagne à été dènazéifiée »… Vaste programme !
    J’ai longtemps fait preuve d’un optimisme naïf, puis avec l’âge et l’expérience, je dois reconnaître qu’à moins d’un schisme très important, notre pays est totalement methastasé.
    De l’éducation nationale à la justice, nos khmers tiennent la baraque, nos syndicats verrouillent les grandes entreprises, la caste des fonctionnaires et leurs élus tiennent les leviers politiques, le tout mis en musique par des journalistes serviles qui veillent à l’exécution de la partition.
    Y’a plus qu’à faire sauter cet immense bordel !

    • on oublie le génocide des assyriens (ce sont des chrétiens du moyen orient)par les turcs qui est très méconnu. pourtant, c’est un génocide qui a éliminé en l’espace de 5 ans plus de 75 % des assyriens.aucun autre génocide n’a réussi à éliminer autant un groupe en pourcentage

  • le génocide cambodgien est trop souvent méconnu. autre génocide très méconnu c’est le génocide des hindouistes. http://www.dreuz.info/2013/03/hindi-kouch-ou-le-negationnisme-du-genocide-de-80-millions-dindiens-par-lislam/ je ne suis pas d’accord avec le titre car dire qu’un génocide a été commis par l’islam, cela ne veut absolument rien dire. c’est un génocide qui a été commis par des musulmans. Une estimation universitaire évalue que du XIe au XVIe siècles, de l’an 1000 à l’an 1525, 80 millions d’Hindous auraient été tués par la répression musulmane sans parler des famines et autres calamités naturelles engendrées par la guerre.
    En l’an 1000 la conquête islamique de l’Afghanistan fut suivie par la destruction de toute la population hindoue de cette région. Le nom « Hindu Kush » signifie aujourd’hui encore le massacre des hindous.
    Les sultans turcs Bahmani, qui régnèrent sur le Deccan de 1347 à 1425, avaient fixé un quota annuel de 100 000 hindous.
    En l’an 1399, le turco-mongol Tamerlan aurait fait mettre à mort de sang-froid en une seule journée 100 000 Hindous prisonniers lors de la prise de Delhi. Les têtes des victimes s’entassaient en énormes pyramides. Après quoi, un certain nombre d’Hindous embrassèrent l’islam pour échapper à la mort.
    Le fait qu’une disposition à la culture et une sensibilité développée puissent aller de pair avec la bigoterie et la cruauté trouva son illustration avec Firuz Shah, qui gouverna le Nord de l’Inde à partir de 1351. Ce chef musulman tyrannique, bien qu’éduqué, surprit un jour une célébration hindoue dans un village, et ordonna que toutes les personnes présentes soient exécutées. Il raconta fièrement qu’après avoir perpétré le massacre, il détruisit les temples et fit ériger des mosquées à leur place.
    Ce fut quasiment un Genocide Total

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