Croissance : quel potentiel de développement pour l’Afrique ?

La croissance économique africaine ne bénéficie encore que peu au continent, comme le montre l’étude des infrastructures, de la santé ou de l’énergie.

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Croissance : quel potentiel de développement pour l’Afrique ?

Publié le 24 mai 2014
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Souvent mise en avant en tant que terre des opportunités pour sa croissance élevée, l’Afrique est un continent prometteur. Cela s’en ressent-il enfin sur son niveau réel de développement ?

Par Leomick Sinsin (*).

dollars_AfriqueDans le panorama économique mondial, l’Afrique brille grâce à ses indicateurs macro-économiques : taux de croissance, intensité énergétique, etc. tous à  la hausse. De fait, cette mise en orbite entraine une recrudescence des flux de capitaux et des investissements, principalement de la Chine et de l’Inde suivies par les partenaires historiques. Pourtant, en lissant les effets de la récession économique mondiale, le continent africain demeure toujours très dépendant de l’aide au développement. La multiplication des programmes internationaux (AFD, FAO, GIZ, MCC,  USAID, etc.) et ONG témoignent de la dépendance du continent.  Ainsi, demandons-nous si la vague de croissance actuelle sur laquelle surfe l’Afrique contribue réellement à son développement et à l’amélioration des conditions de vie des Africains ? C’est donc pour approcher cette question, que nous aborderons de façon théorique, et par nos propres constatations trois secteurs aussi bien touchés par la croissance actuelle et qui représentent le quotidien des populations.

Infrastructures

Depuis les prémices de la théorie économique, les notions de commerce et de richesse entre les nations reposent sur le rôle des échanges. L’échange entre deux nations agit très significativement sur la valeur et le prix des biens. Cet échange dépend aussi bien des routes commerciales que du moyen de transport. Or bien souvent en Afrique, l’état des routes, l’insécurité et le manque d’entretien constituent un réel frein au développement. L’impact du coût du transport restant moindre quand il s’agit de produits à forte valeur ajoutée, qui par définition pèsent dans la balance commerciale, que lorsqu’il s’agit de produits à faible valeur ajoutée, la croissance en est finalement peu affectée. Ayons à l’esprit, dans une localité proche de Cotonou au Bénin, un échange avec un agriculteur qui produit des œufs à la campagne et va les vendre tous les jours aux marchés de Cotonou. Du fait de l’état des routes, il subira 10% de casse sur sa marchandise. Ce qui représente une grande perte pour ce commerçant. Et cela sans prendre en compte le coût de son transport tant au niveau financier qu’au niveau humain. En effet, qu’en est il de la poussière inhalée au quotidien sur les pistes, pour ne citer que cela, et qui agit certainement sur l’espérance de vie, même si aucune étude à ma connaissance n’a traité le sujet. Certes, le défi des Infrastructures est à l’ordre du jour avec des programmes de l’IFC (Banque Mondiale) du MCC (Millenium Challenge Account, ndlr) ou de la PRC (Chine), mais en attendant, le constat est sans appel : la croissance de l’Afrique semble peu agir sur les infrastructures même si elles sont fortement sollicitées.

Éducation et santé

Il serait erroné de confondre éducation et santé, si bien que ces deux secteurs mériteraient une analyse en bonne et due forme de façon particulière. Mais éducation et santé dépendent tous deux fortement de la valeur que nous accordons à l’être humain. Ainsi, en l’absence d’études sérieuses et de données clés récentes, l’état actuel de ces secteurs laisse supposer que les pays africains accordent peu d’intérêt au bien-être de leurs citoyens. L’éducation et la santé font partie des secteurs les plus touchés par les aides au développement. L’absence d’hôpitaux, de lieux de stockage des vaccins et produits sensibles, de centres de recherche et d’excellence représente un manque à gagner pour les pays africains, quand on observe les évacuations médicales et les frais qui s’en suivent, de même que l’immigration des intellectuels vers des cieux meilleurs. Certes, l’UNICEF, MSF et plusieurs autres organisations s’affairent sur place ; le Bénin vient de mettre en place un système Universel d’Assurance Maladie (RAMU) pour tous. Aliko Dangote, première fortune africaine vient d’équiper entièrement un hôpital dans la région de Kano pour environ 200 millions $. Mais à l’échelle du continent, une fois de plus, le constat semble sans appel : la croissance africaine semble avoir peu d’impacts sur le niveau d’éducation et la santé.

Énergie

L’énergie est à mon avis, la cause de bien de maux dont souffre l’Afrique. Très riche en matières premières, l’Afrique est fortement dépendante de l’importation de produits finis. Le secteur énergétique est dense et très diversifié, des produits pétroliers à l’énergie électrique. Mais dans chaque sous-secteur, les lacunes semblent être homogènes. D’après une étude du Millenium Challenge Account, les carences en énergie électrique sont la seconde cause du manque d’investissements privés après le défaut de crédit. Le faible nombre d’unités de production augmente le coût de l’énergie et donc agit sur le panier de la ménagère. A titre d’exemple, le kWh d’énergie électrique coûte environ 13 cts € en France contre environ 21 cts € au Bénin, quand l’écart du niveau est au moins du double entre les deux pays en terme de parité pouvoir d’achat. Et pour aller plus loin, avec des routes non éclairées, des usines qui fonctionnent au fil des délestages récurrents, des hôpitaux où l’on craint les coupures en pleine intervention chirurgicale, ou encore des écoles et universités où les cours s’arrêtent dès que le soleil se couche, il n’est pas possible de parler de développement. A nouveau, des programmes internationaux existent et sont actifs, l’énergie semble être une question d’actualité, mais pour le moment : la croissance de l’Afrique semble peu affecter le bilan énergétique du contient.

Somme toute, l’objectif de ce billet était de mettre en exergue 3 secteurs d’activités au cœur du quotidien des populations africaines afin d’observer, si la croissance agit effectivement sur l’amélioration des conditions de vie. De la richesse des proverbes africains, il est coutume d’entendre : « derrière un baobab peut se cacher un désert de sable ». Cet article est un clin d’œil sur le revers de la mondialisation qui accompagne l’Afrique du 3ème siècle, et sur les défis futurs à relever.

(*)Leomick Sinsin pour Afrikeya et IMANI-Francophone

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  • Le constat de carences n’est pas nouveau, pour ne pas dire usé.
    Un demi siècle d’indépendances a montré que les pays n’aboutissent pas à grand chose chacun de leur côté, et que les collaborations entre eux sont insincères et juteuses.

    L’Afrique dispose de tous les fondamentaux nécessaires à l’échelle du continent mais n’a pas le capital et le mental pour les transformer.
    Pour revenir au dernier point abordé dans le billet, il serait utile de mettre en commun une coopération continentale sur la construction de deux grilles superposées : une grille électrique et une grille ferroviaire.
    Il est probable que les capitaux internationaux afflueraient…
    …si les gouvernements étaient dessaisis du Projet !

    On peut aussi lire ça :
    http://royalartillerie.blogspot.fr/2012/06/la-double-grille-africaine.html

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