La situation est pire que prévue sur le front de la dette publique au Canada, et les politiques font tout pour ne pas voir le problème tant que les créanciers les laissent s’endetter un peu plus.
Par David Descôteaux, de Montréal, Québec.
Il faut ajuster le compteur de la dette. Il tourne trop lentement. On croyait qu’on s’endettait de 31 millions $ par jour, mais c’est plus que ça, semble-t-il. Il faudrait ajouter 10 milliards $ au compteur. Ou est-ce 20? Ou 40?
C’est le vérificateur général par intérim du Québec, Michel Samson, qui le dit :
— Les dépenses de programmes des deux dernières années et celles prévues pour les trois prochaines années sont beaucoup plus élevées — 9,3 milliards $ — que ce que le gouvernement avait prévu en 2009-2010.
— La dette augmente beaucoup plus que ce qu’on prévoyait. Elle sera, en 2015, au moins 10 milliards $ plus élevée que ce que le gouvernement avait prévu en 2010.
Comme le soulignait le ministre Raymond Bachand en conférence de presse, ces chiffres ne sont pas nouveaux. Ils apparaissent dans le dernier budget. Mais le fait que le gouvernement ait continuellement changé à la hausse ses prévisions de dépenses et d’endettement avait jusqu’ici passé sous le radar.
Mais attendez, le meilleur s’en vient.
Selon le vérificateur, le gouvernement Charest a ajouté une quarantaine de milliards $ de dépenses — notamment des obligations contractuelles et des immobilisations — qui ne figurent pas dans la dette. Le vérificateur général estime qu’une bonne partie de ces dépenses sont des dettes implicites, « puisqu’elles obligeront éventuellement le gouvernement à céder des avantages économiques à des tiers. »
Ce n’est pas fini. En vertu d’un changement prévu dans les normes comptables, le vérificateur estime qu’il faudrait ajouter un autre 10,8 milliards $ sur notre Visa Gold collective, qui ne paraît pas en ce moment. Double ouch!
Bref, la dette est hors de contrôle. Et l’effort à faire pour revenir au déficit zéro en 2015 sera gargantuesque. Qui va le faire, vous pensez? Vous, cochons de contribuables. À moins que, par miracle, les revenus explosent dans les années qui viennent. C’est ce qui arrive quand un gouvernement mise entièrement sur les revenus pour équilibrer ses budgets. Au lieu de faire deux tiers des efforts, comme il l’avait promis.
Sous Jean Charest, la dette aura augmenté de plus de 50 milliards $. Le Québec est champion de l’endettement au Canada, peu importe la mesure utilisée. Quand le premier ministre a parlé de « réingénierie de l’État » au début de son mandat, c’aurait été bien qu’il nous montre ses dessins. Si j’avais su que le plan était d’ajouter un étage au paquebot, j’aurais mis mon X ailleurs.
Oh, j’oubliais : 67 établissements de santé ont accumulé des déficits de 79 millions $ en 2010-2011… alors que la Loi sur l’équilibre budgétaire du réseau interdit les déficits depuis 2001. Bah!
Bientôt, il faudra engager la banque d’affaires Goldman Sachs pour faire durer notre bonheur quelques années de plus. Avec des trucs comptables pas toujours nets, comme la Grèce a fait il y a pas longtemps. (Mémo à moi-même : va donc vérifier tout de suite si ce n’est pas déjà le cas.)
Sinon, on n’aura qu’à hausser la TVQ d’un ou deux pour cent encore. Et pourquoi pas une nouvelle taxe sur l’essence? Afin de s’assurer que tous les incompétents puissent maintenir leur train de vie, sans conséquence jamais. C’est ça, être solidaire.
Ce cirque finira seulement quand nos créanciers se réveilleront. Et qu’on n’aura plus les moyens de s’endetter. Aujourd’hui, le vérificateur général nous dit qu’on est plus près qu’on pensait. C’est presque une bonne nouvelle.
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