La revanche de la société civile

…sur l’État providence

Partager sur:
Sauvegarder cet article
Aimer cet article 0
Etat Providence Ewald (Crédits : Grasset, tous droits réservés)

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

La revanche de la société civile

Publié le 2 novembre 2010
- A +

En 1980. Margaret Thatcher affirme : « La société n’existe pas, il n’existe que des individus. »[There is no such thing as society]

2010. David Cameron, son successeur, lui aussi conservateur, lance un vaste programme intitulé : « The Big Society ».

L’argument est à peu près le suivant : il y a en Grande-Bretagne trop d’individus et pas assez de société.

L’Etat, par son omniprésence, a détruit la société. Il lui appartient désormais de la reconstruire, d’encourager les individus à s’associer, s’organiser pour prendre leurs affaires en mains, et pour cela de soutenir financièrement les bonnes initiatives.

Recréer une « société civile » serait donc la tâche de l’Etat en ce début de XXI e siècle. Un programme qui, pour nous Français, n’est pas sans rappeler celui qui a présidé, il y a deux siècles, à la rédaction du Code civil : « Civiliser une société que la Révolution avait par trop politisée. » Quel fut l’instrument essentiel de cette « civilisation » ? L’institution de la famille.

Comment expliquer qu’on en soit arrivé là ?

Aujourd’hui, dans les sociétés occidentales, l’étatisation résulte du développement de l’Etat providence. Progressivement, ce dernier est devenu le gestionnaire direct de vastes services publics qui visent à organiser le bien-être (« welfare ») des individus. Ils achètent leurs nouveaux « droits » par l’acceptation de nouveaux prélèvements sociaux et fiscaux.

Ainsi est-on passé en matière de bien-être d’un système de devoirs à un système de droits : la santé n’est plus seulement l’ensemble des exigences de comportement pour se maintenir en forme, mais une créance qu’on a sur l’Etat ; la retraite n’est plus corrélative d’un choix d’activité de comportements d’épargne, mais un droit à vivre rentier. Et nous sommes peut-être en train d’inventer le droit à l’autonomie pour les personnes dépendantes.

Mais le système a atteint une double limite. Limite interne liée à l’acceptabilité des prélèvements et au fait que l’individualisme conduit a une utilisation si consumériste des protections sociales qu’elle menace ce qui les fonde. Limite externe : la dette sociale étatisée est perçue comme une dette publique qui engage la crédibilité et la solvabilité d’un Etat pris en étau entre la nécessité d’augmenter toujours plus les prélèvements d’un côté et de garder une économie nationale compétitive de l’autre.

La vision conservatrice britannique vise à sortir de cette difficulté d’une manière singulière. Il ne s’agit pas exactement d’un désengagement de l’Etat ; il ne s’agit pas non plus d’un report des risques et des charges sur l’individu. Il s’agit d’une politique publique qui cherche à ce que de nouveaux agents, regroupés en communautés, mutualisés, s’organisent pour prendre leurs affaires en mains. Et l’Etat s’engage à financer ou à contribuer au financement des projets portés par ces nouveaux agents.

Dans les années 1990, beaucoup d’acteurs de la mutualité avaient perdu la foi dans la vertu de leurs institutions. Il fallait devenir comme les autres et pour cela se démutualiser. Mais peut-être sommes-nous à l’orée d’un nouvel âge pour de nouvelles mutualisations.

Prendre en compte cette indication pourrait avoir deux grandes conséquences. La première concerne le traitement de la dépendance. Allons-nous traiter la dépendance en renforçant les droits que les individus pourront tirer sur des allocations publiques ? Allons-nous, à l’inverse, faire que la nouvelle politique publique renforce les liens et les réseaux qui organisent d’ores et déjà les soins donnés aux personnes dépendantes ?

La seconde concerne l’assurance et la stratégie des assureurs. Doivent-ils se penser comme les auxiliaires financiers d’un Etat providence devenu exsangue ? Ne sont-ils pas là plutôt pour être les institutions dont les individus, appelés à se prendre en charge, vont avoir besoin pour organiser les nouvelles « communautés » ?

Article repris du site de l’Institut Turgot avec l’aimable autorisation d’Henri Lepage

Voir les commentaires (0)

Laisser un commentaire

Créer un compte

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don
Un appel au sursaut face aux politiques du déni et de la facilité monétaire et budgétaire

Jacques de Larosière, ancien gouverneur de la Banque de France et ancien directeur général du FMI, nous alerte très régulièrement sur l’état de l’économie française et des égarements dont elle est l’objet depuis 40 ans, pour reprendre le thème d’un ouvrage de 2021 que nous avions présenté ici-même.

Un constat global accablant

Les constats sont, de fait, toujours les mêmes : endettement public incontrôlé et démesuré, appareil d’Etat tentaculaire, p... Poursuivre la lecture

Après les Trente Glorieuses (Jean Fourastié) et les Trente Piteuses (Nicolas Baverez), voici venues, depuis 2005, ce que l’on pourrait appeler selon Olivier Babeau les Trente Paresseuses.

 Après l’euphorie qui a suivi les guerres mondiales, puis l’indifférence un peu blasée une fois les acquis de la modernité considérés comme allant de soi, voici maintenant l’ère de la déprime.

La lutte multimillénaire contre les efforts physiques et contre les contraintes du groupe a en effet abouti à un degré de confort jamais atteint durant les diff... Poursuivre la lecture

Thomas Sowell, économiste et penseur influent, est reconnu pour ses critiques incisives des politiques publiques et des dynamiques sociales de son époque. Nos nombreux billets sur l’auteur peuvent témoigner de la pensée prolifique dont il aura nourri ses contemporains.

À travers ses ouvrages, il aborde plusieurs thèmes clés, notamment la concurrence entre les groupes, les échecs de la discrimination positive, et le rôle des tiers-parties dans la formation des politiques publiques. Nous avons décidé de laisser aux lecteurs l’opportunité... Poursuivre la lecture

Voir plus d'articles