Manifeste libéral de David Lisnard : des éléments pour une bonne politique scientifique

Partager sur:
Sauvegarder cet article
Aimer cet article 1

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Manifeste libéral de David Lisnard : des éléments pour une bonne politique scientifique

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 12 mai 2025
- A +

Il y a quelques jours ont eu lieu des black-out monumentaux en Espagne et au Portugal après le black-out du sud du Royaume-Uni du 9 août 2019. Les Européens découvrent progressivement par le biais de ces épreuves les conséquences d’une mauvaise politique scientifique, c’est à dire les conséquences d’un mauvais choix par rapport à des solutions technologiques ou des législations qui se présentaient à eux. Ici en l’occurrence, le fait d’avoir confié la production électrique à une trop grande capacité d’ENR et d’avoir négligé les moyens pilotables comme l’expliquent les experts qui s’expriment sur le sujet (1). Une question d’ordre général se pose : « que faire pour combler le déficit de politique scientifique qui fait que les idéologies collapsocrates et algorithmocrates se sont engouffrées dans la brèche de l’impensé que représente le progrès scientifique et technique ? »

Dans de Gaia à l’IA (2), mon nouvel essai, je montre que l’écologisme est un premier essai de politique scientifique, mais qu’il a échoué. Car d’une part, cette idéologie a voulu se débarrasser de la science prométhéenne (3), d’autre part, elle a voulu récupérer la science (4) pour en faire un levier de décision politique. Or, elle se trompe deux fois, en jugeant mal la science des ingénieurs et en instrumentalisant la science des législateurs. La tentative de combler le vide et de reprendre le contrôle de l’innovation technologique, ce moloch qui emporte tout sur son passage était toutefois légitime. Mais la manière de s’y prendre n’était pas la bonne, car elle a négligé le fait que la méthode scientifique était la meilleure pour nous aider à nous adapter à notre environnement. Je liste donc une dizaine de principes pour une bonne politique scientifique. Ceci fait, et la politique étant le domaine de l’action, ces propositions ne valent pas grand-chose, si elles ne trouvent pas d’acteur pour les incarner. Or, la lecture d’Ainsi va la France, Manifeste Libéral de David Lisnard (5) m’a mis sur la piste d’un candidat potentiel pour défendre ces dix principes. Je vous propose donc une lecture du manifeste libéral au travers de cette grille de lecture.

Esprit critique

Développer un « esprit critique afin de sauver l’humanité du nihilisme idéologique » est le premier de mes dix principes. J’ai découvert cette faculté chez David Lisnard, à l’occasion d’un passage à l’émission Quotidien de Yann Barthès ; le maire de Cannes y avait tenu tête aux complaintes d’une militante écologiste qui critiquait le manque d’action climatique du gouvernement (6) ; il lui avait expliqué posément l’existence de solutions technologiques, prouvant ainsi qu’il n’était pas soumis à la doxa écologiste catastrophiste. Pour autant, Lisnard ne tombe pas dans le techno-prophétisme béat et n’hésite pas à porter un regard critique sur le progrès technologique « L’innovation radicale est par essence porteuse de grands risques, proportionnels aux opportunités qu’elle fait naitre. L’IA peut être source d’aliénation. » Deux prises de positions qui peuvent nous laisser croire que nous avons à faire à un homme capable d’exercer son esprit critique et qui ne cédera ni aux sirènes de la Collapsocratie, ni à celles de l’Algorithmocratie.

Talent

Mais cela ne le qualifie pas automatiquement pour exercer l’art d’une bonne politique scientifique. Rappelons son CV : à l’origine, ce commerçant a voulu se faire élire au niveau local pour faire bouger les lignes. Rien ne semble donc le distinguer de l’homme de la rue et de ce fait, on se demande pourquoi on pourrait bien lui confier une tâche aussi élevée et qualifiée. Or c’est justement le profil recherché. Car « le quidam » doit s’intéresser à la politique scientifique et il est regrettable que celle-ci ait été confisquée par les ONG et les idéologues. Il suffit de lire « Ainsi va la France” pour comprendre que Lisnard est curieux de science et de technologie et consacre de nombreux passages à ces sujets en nourrissant sa réflexion d’une quantité de données à la pointe de l’information scientifico-technique :« Il faut sauver l’industrie spatiale satellitaire », « Porter une ambition numérique et dans l’intelligence artificielle », « Pour un Internet à très haut débit pour tous », « Le paradoxe nucléaire d’Emmanuel Macron », « Ce qui est bon pour les agriculteurs est bon pour les Français », pour ne citer que quelques exemples. S’il est souhaitable que le politique ait une excellente culture scientifique, il n’est aucunement nécessaire qu’il soit lui-même de profession scientifique. Le principal étant qu’il s’intéresse vraiment au sujet et sache s’entourer d’experts qui puissent le conseiller. Choisir les bonnes solutions relève d’une forme d’art et non de la science, car si c’était le cas, nous aurions à faire à du scientisme. Alors, de quelle faculté est-il doté pour faire des choix dont tous peuvent bénéficier ?

Libre responsabilité

Lisnard se revendiquant libéral sans aucun complexe, il cautionne la « libre Responsabilité » autrement dit, la valeur cardinale qui doit permettre de choisir, comme on le verra, les meilleures solutions pour notre adaptation. Il faut savoir placer le curseur pour la science des ingénieurs et celle des législateurs afin d’optimiser notre liberté et notre responsabilité.

Le président de Nouvelle Energie faisant de ces deux valeurs les parangons de l’action politique en général – il suffit de lire « Vive la liberté » (p.22) ou « En responsabilité » un concept irresponsable (p.401) – c’est l’attribut qui lui donne la capacité de faire les meilleurs choix par rapport à la politique scientifique.

Arbitrer

Concrètement, cet attrait pour la libre-responsabilité amène notre politique a remettre à plat les débats qui opposent les idéologues pour s’interroger sur la meilleure solution qui nous rend le plus libre et plus responsable à la fois. Pour prendre un exemple, après avoir constaté la contradiction du Président Macron dans « Quand en même temps devient tout et son contraire » (p.230), il montre qu’il est inconsistant de vouloir choisir les ENR et le nucléaire, ayant fait une analyse en profondeur des deux solutions pour lister leurs avantages et leurs inconvénients. Après avoir suggéré d’arrêter de subventionner l’éolien, il rappelle que le nucléaire est « chez lui en France ». Une manière d’argumenter qui donne les bonnes raisons et permet d’échapper aux idéologies qui affirment par exemple que les éoliennes sont plus naturelles ou qu’il faut le nucléaire parce que c’est le progrès.

Instrumentalisation

Qu’en est-il maintenant de son appétence à instrumentaliser la science au service de la politique ? Si Lisnard évoque souvent les problèmes liés au réchauffement climatique, il n’essaye pas pour autant de s’appuyer sur la science des législateurs pour dompter l’opinion comme le font désormais la plupart des élus. On en veut pour preuve ses critiques renouvelées des législations ubuesques du code de l’environnement et des structures bureaucratiques qui l’incarnent, ou encore, des mesures kafkaïennes que sont, par exemple, les ZFE (zone à faible émission), la DPE (Diagnostic de performance énergétique) ou le ZAN (Zéro artificialisation nette) ; le maire de Cannes, préfèrera toujours la science des ingénieurs et les solutions d’adaptations qu’elles offrent à l’écologie punitive déduite de La Science (instrumentalisation politique de la science). Cela se manifeste également par sa volonté de libérer le secteur agricole, celui du bâtiment ou encore de l’entreprise.

Planisme

Ce qui m’amène à une réflexion sur le planisme, mon 6ème principe et le distinguo entre les planifications productives des planifications destructrices. Alors que ces deuxièmes sont des mesures fourre-tout dignes de l’ère soviétique avec pour objectif de modeler les populations à coup d’idéologies, les premières sont davantage des projets de type « shot to the moon » initiées par un état entreprenant. Lisnard parle souvent d’un projet de type Darpa européenne … il a conscience que certaines technologies nécessitent la mise en commun de moyens colossaux et la collaboration entre entreprises concernées et éventuellement les Etats (le plan Boiteux-Mesmer ou l’aventure Airbus restent des exemples indépassables) plutôt que la mise en place d’une gouvernance pyramidale de Bruxelles avec des moyens financiers dont l’attribution serait pilotés par des bureaucrates.

Controverses

L’ouvrage ne comporte pas de développement explicite sur la liberté d’expression et les controverses scientifiques (le 7ème principe), il y a toutefois quelques réflexions bien senties sur la gestion du Covid : « Le débat raisonnable d’idées est menacé : celui qui porte sur un processus démocratique et le rapport entre une valeur cardinale, la liberté, et une réalité sanitaire, économique et sociale. Car si le caractère « préventif» du vaccin ne doit pas être remis en cause mais simplement expliqué et argumenté avec calme et clarté, on peut légitimement comprendre le « sentiment » d’excès d’autoritarisme éprouvé par des millions de Français et ne pas balayer d’un revers de main méprisant cette impression qu’il entrave leurs libertés individuelles. »

Croissance

« Growthology : ne jamais céder aux sirènes de la décroissance » est la huitième proposition que je soutiens. Même si le malthusianisme reste une théorie intéressante sur le plan intellectuel, il suscite des débats à n’en plus finir qui reposent sur des sophismes. Ainsi la double inconnue intriquée dans l’affirmation « une croissance infinie dans un monde fini est impossible »(7) implique qu’une bonne politique scientifique ne peut être une Collapsocratie (un régime qui vise la décroissance). Les décideurs doivent forcément privilégier la croissance qui garantit la souveraineté du pays…. Bien évidemment ils doivent laisser la liberté à ceux qui le souhaitent de bénéficier d’un RDA (revenu décroissant assumé) (8). Lisnard est loin de toute forme de décroissance puisqu’il parle à plusieurs reprises de libérer les entreprises, de réindustrialiser (selon lui, on doit pouvoir de nouveau produire des pulls en France et pas seulement des industries de pointe !) ou « retrouver une agriculture rentable »…. Et surtout, il n’oublie pas l’essentiel :  « refaire des enfants ».

Technoprophètisme

Soucieux de ne pas passer à côté d’une révolution scientifique, le politique doit veiller également à ce que ladite révolution nous libère effectivement et ne soit pas à l’origine de nouveaux déterminismes qui nous asservissent encore davantage que si nous choisissions la Collapsocratie. Il est donc impératif de résister à l’asservissement digital. Conscient de la puissance de l’IA et du fait qu’elle est une solution pour réformer l’Etat, Lisnard a toutefois remarqué qu’elle peut « émanciper comme aliéner … le défi est d’en faire un instrument de liberté. Un Etat moderne ne doit pas être un Etat pesant qui surveille tout le monde mais un Etat alerte qui sanctionne la minorité d’individus nuisibles » (p.416)

Rapport à la nature

Le dernier principe ne regarde pas directement la politique scientifique mais l’individu. Il s’agit d’abandonner l’écologisme (défini comme idéologie politique) pour « l’Esthétique, la Spiritualité et la Métaphysique de l’environnement ». Cela revient à développer une politique rationnelle à l’égard de la nature ( l’adaptation à notre environnement de manière libre et responsable) et vénérer la valeur intrinsèque de celle-ci  (utilisée comme levier par les militants extrémistes pour accéder au pouvoir) à titre privé (notre rapport à la nature et l’environnement) qui regarde chacun d’entre nous.

Conclusion

L’ouvrage de Lisnard traite de politique générale et dépasse bien largement le cadre de cette analyse. Mais il ne fait aucun doute que notre grille de lecture met au jour les qualités d’un homme qui pourrait jouer un rôle fondamental pour l’avenir de la France. Car la politique scientifique est déterminante pour l’histoire comme le montre, par exemple, la France qui réussit le plan Boiteux Mesmer et échoue sur le plan calcul (9).

Choisir la bonne politique scientifique c’est garantir à son pays la meilleure adaptation possible en optimisant la liberté (les individus échappent aux déterminismes de la nature sans pour autant retomber dans la prison des techno-solutions) et la responsabilité (ils ne nuisent pas à autrui, ni dans le présent ni dans le futur).

Précisons enfin qu’il s’agit là de grands principes et non d’un plan ou d’une méthode à suivre point par point. Mais il est vrai qu’il est important de s’y tenir de même qu’il faut se tenir à d’autres impératifs tels que la suppression du principe de précaution dans la constitution pour ne pas décourager l’innovation et favoriser la science des ingénieurs d’une part et d’autre part, défendre les libertés individuelles, le droit de propriété et enfin le principe de subsidiarité contre une science des législateurs qui voudrait empiéter sur tous ces droits. Si vous avez encore le moindre doute, lisez le Manifeste libéral et vous comprendrez que tous ces réquisits font parti des acquis du président de Nouvelle énergie.


(1) Christian Semperes, Surproduction d’électricité en France, un système totalement à la masse  https://www.europeanscientist.com/fr/opinion/surproduction-delectricite-en-france-un-systeme-totalement-a-la-masse/

(2) Jean-Paul Oury, De Gaia à l’IA (VA édition, dec2024) https://amzn.eu/d/dl44eQP

(3) Jean-Paul Oury, Greta a tué Einstein (VA édition, dec 2020) https://amzn.eu/d/eH0PVy3

(4) Jean-Paul Oury, Greta a ressuscité Einstein, (VA édition, dec 2022) https://amzn.eu/d/6QrhK8i

(5) David Lisnard, Ainsi va la France, Manifeste libéral (Editions de l’observatoire, mars 2025) https://amzn.eu/d/i7st6SJ

(6) Jean-Paul Oury, Débat entre David Lisnard et Salome Saque, Le Figaro Vox  https://www.lefigaro.fr/vox/societe/debat-entre-david-lisnard-et-salome-saque-les-solutions-concretes-contre-l-emotion-et-la-demagogie-20230315

(7) Nous ne savons pas ce que l’homme imaginera demain et nous ne connaissons rien des ressources énergétiques ou matérielles qu’il mettra au jour à l’aide de techniques qu’il n’a pas encore inventées, même si théoriquement celles-ci sont finies. L’exemple du gaz de schiste qui a pu être exploité grâce à l’invention d’une nouvelle technologie d’extraction est tout à fait éclairant.

(8)Jean-Paul Oury, Eric Lombard veut des entreprises moins rentables et pourquoi pas des salaires décroissants, le Figaro Vox https://www.lefigaro.fr/vox/economie/eric-lombard-veut-des-entreprises-moins-rentables-et-pourquoi-pas-des-salaires-decroissants-20250211

(9) Jean-Paul Oury, PPE3, le mauvais plan, The European Scientist, https://www.europeanscientist.com/fr/editors-corner-fr/ppe-3-le-mauvais-plan/

Voir les commentaires (0)

Laisser un commentaire

Créer un compte

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don