Le bitcoin ne serait pas un abri en cas de crise monétaire

Pour Ray Dalio – fondateur du plus grand fonds spéculatif au monde – le bitcoin reçoit trop d’attention.

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Le bitcoin ne serait pas un abri en cas de crise monétaire

Publié le 10 février 2023
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La première des cryptomonnaies concentre beaucoup d’attention mais ne constitue pas un refuge dans la crise monétaire qui s’annonce, estime le fondateur du plus grand fonds spéculatif.

Pour Ray Dalio – fondateur du plus grand fonds spéculatif au monde – le bitcoin reçoit trop d’attention. Après quarante-sept ans d’investissement, Ray Dialo s’est mis en retrait de la gestion de Bridgewater Associates mais reste au Comité exécutif de son fonds qui gère près de 126 milliards de dollars.

Dans une récente interview sur CNBC, Ray Dialo assassine le bitcoin :

« Bitcoin n’est relié à rien. C’est une chose minuscule qui reçoit une attention disproportionnée. […] La valeur du bitcoin représente moins d’un tiers de la capitalisation de Microsoft. Ce n’est pas un moyen de stockage efficace de la valeur. Mais nous sommes dans un monde dans lequel la monnaie telle que nous la connaissons est en danger. »

Mais qu’est-ce que « la monnaie telle que nous la connaissons » ?

Ray Dialo évoque la plupart des grandes devises actuelles : dollar, euro, yen et critique : « nous en imprimons trop et ce n’est pas seulement les États-Unis mais aussi l’Europe, le Japon… »

Selon lui, ces monnaies sont aujourd’hui principalement vues comme un moyen d’échange mais demain renaîtra un souci de monnaie comme « moyen de conserver de la valeur » (1 minute 30 secondes). La monnaie idéale est celle qui est capable de « sécuriser le pouvoir d’achat » (2 minutes 30 secondes) et est « négociable partout » (2 minutes 55 secondes).

Il estime cependant que la valeur du bitcoin est trop fluctuante pour sécuriser le pouvoir d’achat.

 

Le bitcoin : un moyen d’échange dont l’usage est insignifiant

Ray Dialo a raison sur deux points.

Premier point : en douze ans, la progression de l’utilisation du bitcoin comme moyen d’échange au quotidien est effectivement insignifiante. Vous ne voyez pas souvent l’inscription « Bitcoin accepted » sur les vitrines des commerçants même dans les centres-villes touristiques.

Dans mon livre paru en 2021, je donnais un lien permettant de visualiser le nombre de commerçants acceptant le bitcoin. La situation n’a pas beaucoup évolué depuis et nous sommes loin d’une croissance exponentielle.

Le deuxième point sur lequel Ray Dialo me semble pertinent est la menace qui pèse sur les devises telles que nous les connaissons.

Les grandes devises incapables de sécuriser le pouvoir d’achat dans le temps

Les monnaies étatiques actuelles sont effectivement incapables d’assurer une fonction de stockage de « pouvoir d’achat » dans le temps.

Les taux d’intérêt négatifs en Europe étaient une anomalie multimillénaire. Cette anomalie a disparu mais les taux d’intérêt réels (taux directeurs diminués du taux d’inflation) restent encore largement négatifs.

Nous vivons dans un monde où l’épargne ne vaut plus rien. Le système bancaire est ainsi fait qu’il crée l’argent qu’il prête. Il n’a besoin de l’épargne des déposants que pour obtenir ce privilège. Dans ce système « les crédits font les dépôts » et non plus l’inverse.

Citons à ce sujet le ministère de l’Économie et des Finances :

« Tous les crédits ne donnent pas lieu à de la création monétaire. Lorsque des établissements financiers spécialisés (par exemple spécialisé dans le crédit à la consommation), qui ne sont pas habilités à recevoir des dépôts accordent un crédit, ils ne peuvent le faire que parce qu’ils sont préalablement financés et non pas en créant de la monnaie. Seules les banques qui gèrent les dépôts ont le pouvoir de création monétaire. Mais tous les crédits attribués ne donnent pas lieu à création monétaire. »

Tous les crédits ne donnent pas lieu à création monétaire, mais la majorité des crédits, oui ! C’est ce qui explique que de nos jours, la notion de capacité d’endettement a remplacé celle de capacité d’épargne. Par conséquent, parler de monnaie comme réservoir de valeur n’a plus aucun sens.

 

Trop de dettes et pas assez de rendement

Ce système de « créditisme » et non pas de capitalisme est à bout de souffle. Il y a trop de dettes (publiques et privées) mais pas assez de rendement (ou de véritable croissance) pour payer des taux d’intérêt normaux, c’est-à-dire supérieurs aux hausses de prix constatées.

Illustration récente en France : le bouclier énergétique qui permet aux ménages de continuer à consommer de l’électricité ou des hydrocarbures qu’ils n’auraient plus les moyens de payer en totalité eux-mêmes. Dans le même temps, la dette publique française émise pour financer ces largesses est complaisamment rachetée par la Banque centrale européenne.

La crise d’insolvabilité dégénérera en crise monétaire lorsque les gens exigeront un moyen de sécuriser eux-mêmes leur pouvoir d’achat sans attendre d’hypothétiques chèques que leurs gouvernements ne pourront plus payer.

Nous n’y sommes pas encore tout à fait et les gouvernements insolvables n’ont pas encore tiré leurs dernières cartouches…

 

Les dernières munitions des banques centrales pour camoufler l’insolvabilité

Promouvoir les monnaies numériques de banques centrales est l’une de ces cartouches restant à tirer. Ainsi, les gens seraient prisonniers du système financier et monétaire et tributaires d’une monnaie dont l’attribution pourrait être conditionnée par une note de « crédit social ».

Ce danger n’a pas échappé aux Suisses : l’initiative sur l’argent liquide a abouti collectant plus de 157 000 signatures. Ceci devrait permettre aux citoyens helvètes de se prononcer par référendum sur la garantie constitutionnelle du maintien des espèces et du franc suisse.

Comme le bitcoin, mais avec plus d’antériorité, l’or est une monnaie apatride qui n’est la dette de personne.

C’est ce qui explique probablement que les achats d’or de la part des banques centrales se soient intensifiés en 2022.

La « relique barbare » selon Keynes n’a donc pas dit son dernier mot. On peut cependant regretter que certains pays – dont la France – s’emploient à rendre l’or difficilement négociable pour les particuliers. La monnaie idéale selon Ray Dialo – celle qui cumule garantie de pouvoir d’achat et facilité de négociation partout dans le monde – existe. Mais, bitcoin ou or, encore faut-il que les citoyens expriment la volonté de s’approprier ces monnaies apolitiques et supranationales avant l’éclatement de la crise monétaire généralisée qui couve.

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