Roe v. Wade : controverse sur l’avortement entre progressistes, conservateurs… et libertariens

L’abrogation de Roe n’a pas fait qu’enflammer le débat entre progressistes et conservateurs. Les libéraux et les libertariens américains sont tout aussi divisés sur la question fondamentale de l’avortement.

Partager sur:
Sauvegarder cet article
Aimer cet article 2
abortion source https://unsplash.com/photos/0XFPG5ntedo

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Roe v. Wade : controverse sur l’avortement entre progressistes, conservateurs… et libertariens

Publié le 28 juin 2022
- A +

Comme un coup de tonnerre dans un ciel d’été aux États-Unis, l’arrêt emblématique qui faisait de l’avortement un « droit constitutionnel » a été abrogé. Roe v. Wade (1973), confirmé par la suite par l’arrêt Planned Parenthood v. Casey (1992), vient de voir ses conclusions infirmées par l’arrêt Dobbs v. Jackson Women’s Health Organization. Pour les juges, c’est « au peuple et aux représentants élus » d’encadrer la pratique de l’avortement, renvoyant ainsi la balle au Politique.

Affirmer que l’avortement n’est pas protégé par la Constitution revient à donner aux législations des États membres de l’Union le droit de juger de sa licéité et de son étendue sans que le gouvernement fédéral n’ait son mot à dire sur le sujet. Il s’agit donc d’une décision qui, en plus de toucher directement à la question de l’avortement, redessine les limites de l’autorité judiciaire et des droits politiques des États au sein du fédéralisme américain.

 

La guerre culturelle sur le plan du droit

Pour le camp progressiste, c’est un camouflet sans précédent et le signe annonciateur d’une remise en cause plus importante de la jurisprudence touchant au droit des femmes et aux minorités. Pour les conservateurs, c’est une victoire qu’ils attendaient depuis maintenant près de 50 ans. Seulement la polarisation politique extrême entre démocrates et républicains ne prendra pas fin avec l’abrogation de Roe, bien au contraire.

Comme l’observe le juriste Ilya Somin pour Reason, la guerre culturelle n’a fait que changer de braquet :

De même que la plupart des conservateurs n’ont jamais accepté la légitimité de l’arrêt Roe v. Wade et ont mené une lutte de cinquante ans pour le renverser, la grande majorité des progressistes n’accepteront probablement pas l’arrêt Dobbs et seront heureux de le renverser dès qu’ils en auront l’occasion. Cela ressort clairement de la réaction de la gauche libérale à l’arrêt Dobbs depuis qu’il a été rendu, ainsi que de l’évolution de la question de l’avortement au cours des dernières décennies. Dans ce débat constitutionnel, aucun des deux camps n’est prêt à accorder beaucoup de crédit, voire aucun, à la légitimité de l’autre.

Sans entrer dans les détails techniques, le fondement juridique de l’arrêt Roe v. Wade a toujours suscité les critiques des deux côtés du spectre politique. Pour les conservateurs, il témoignait de la dérive politique « gauchiste » de la Cour suprême des États-Unis. En s’appuyant sur une interprétation généreuse -et particulièrement vague- des 14e et 9e amendements de la Constitution, les juges auraient déduit le droit à l’avortement d’un droit plus large, celui à la vie privée (privacy), lui-même consacré par l’arrêt Griswold de 1965.

 

Quel droit constitutionnel à l’avortement ?

Pour un juriste conservateur comme Robert Bork1, on escamote ainsi la question centrale de la présence du droit dans le texte constitutionnel, ce qui revient à donner à la cour un pouvoir pour créer de nouveaux droits en lieu et place des institutions élues directement par le peuple américain. La question morale de l’avortement se double donc d’une question portant sur la limitation des pouvoirs de la Cour, accusée de vouloir imposer un gouvernement des juges d’inspiration progressiste en lieu et place de celui, plus légitime du point de vue démocratique, des assemblées.

Selon Christopher Caldwell2, pour ceux qui font de l’avortement légal une composante indispensable de la liberté moderne, le degré de protection juridique offert par la Cour était particulièrement faible. La justification légale de la Cour n’était que l’opinion d’un juge, dont le fondement pouvait à tout moment être retourné. Le seul moyen de « sécuriser » un tel droit ne pouvait passer que par la politique, c’est-à-dire créer un camp pro-choix particulièrement virulent capable de défendre la décision comme si elle émanait de la branche législative.

L’abrogation de Roe n’a pas fait qu’enflammer le débat entre progressistes et conservateurs. Les libéraux et les libertariens américains sont tout aussi divisés sur la question fondamentale de l’avortement. Il est possible d’en avoir un aperçu dans les colonnes de Reason, le magazine phare du libertarianisme aux États-Unis.

D’un côté, Liz Wolfe estime qu’il s’agit d’une victoire pour les libertariens pro-vie : « Une telle décision ne mettrait pas fin à l’avortement, mais elle réduirait presque certainement le nombre d’avortements pratiqués chaque année aux États-Unis. » Elle ajoute que contrairement aux craintes des démocrates, il n’est pas question d’interdire l’avortement : « Dans les arrêts Roe et Casey, la Cour a garanti le droit des femmes à l’avortement et a cherché à minimiser les « charges indues » qui pourraient y faire obstacle. L’annulation de ces décisions n’aboutirait pas à une interdiction nationale de l’avortement, mais renverrait la question aux législatures des États. Il en résulterait un patchwork de lois sur l’avortement, État par État. »

 

Surveiller les femmes

Du point de vue pro-choix, Nick Gillespie craint que la protection renforcée du fœtus n’aboutisse à une surveillance accrue de la sexualité de la femme : « Si la vie commence effectivement à la conception, alors l’État a le devoir de protéger tous les zygotes (œufs fécondés), les blastocystes (zygotes âgés d’une semaine) et les embryons (zygotes implantés sur la paroi utérine). D’un point de vue libertarien, les implications d’un tel changement sont stupéfiantes. Il s’agit d’une recette non pas pour un gouvernement limité mais pour un gouvernement qui doit, au nom de la protection de la vie, de la liberté et de la poursuite du bonheur, surveiller et suivre tous les actes de procréation potentielle. »

Comment sortir de la guerre de position entre conservateurs et progressistes sur l’avortement ?

Selon Ilya Somin, les États-Unis devraient rechercher un consensus large sur la question comme il en existe dans certains pays européens :

« Les limites de 14 semaines qui existent en France et en Allemagne en sont de bons exemples. Si l’opinion publique américaine parvient à un consensus similaire, peu de gens se soucieront des détails de la jurisprudence en matière d’avortement, tant qu’elle ne fait pas obstacle aux politiques favorisées par ce consensus. Par ailleurs, les élites juridiques pourraient parvenir à un consensus sur la méthodologie constitutionnelle qui résoudrait clairement la question de l’avortement dans un sens ou dans l’autre. »

  1. Robert H. Bork, The Tempting of America, Free Press, 1990.
  2. Christopher Caldwell, The Age of Entitlement, Simon & Schulster, 2020.
Voir les commentaires (41)

Laisser un commentaire

Créer un compte Tous les commentaires (41)
  • Je croyais naïvement que la question était avant tout de décider jusqu’à quel point le fédéral peut prendre le pas sur les choix du gouvernement local en l’absence de consensus.

  • Et même en ayant déjà une loi chez nous, c’est parti pour tenter de la mettre dans notre constitution, qui ne sert pas à ça… J’espère qu’ils rajouteront que la sécu ne remboursera pas les opérations, dans un soucis d’égalité homme/femme… Ou alors faut faire cotiser plus les femmes ! 😀

    • La grossesse n’est pas arrivée par hasard, ( on n’a qu’un témoignage il y a 2000 ans et il est pas hyper fiable),des hommes doivent bien y être pour quelque chose? Pour le coup la parité est respectée.

      • L’immaculée conception n’est pas abordée sous l’angle de Marie.
        Quid de la notion de consentement de Marie de Nazareth de voir son corps être utilisé pour une GPA divine ?
        Si on lui avait donné son avis et laissé le choix d’eux mettre un terme à une grossesse non désirée d’un enfant qui n’est pas celui de son mari Joseph de Nazareth, qu’elle aurait été sa réponse selon-vous ?

        • Avatar
          Hyacinthe Herve
          28 juin 2022 at 13 h 08 min

          L’hypothèse la plus crédible aujourd’hui est plutôt celle d’un adultère inavouable que celle d’une gpa divine. Mais c’est un peu hors sujet tout ça.

          • Avatar
            Hyacinthe Herve
            28 juin 2022 at 13 h 13 min

            Ça pourrait aussi être un viol. Mais disons que c’est c’est un peu anachronique de parler de Marie.

        • Dieu ne demande pas leur avis aux gens.
          Je veux bien une seule preuve qu’IL le fait pour modifier définitivement mon opinion sur deux ou trois trucs importants.
          Sinon la question n’est pas très interessante puisque nous avons la réponse autant que je sache. Marie risquait la lapidation si Joseph l’avait condamné pour adultère (j’imagine aisément les complications que cela peut entraîner pour une femme enceinte si elle survit à l’épreuve ). Je ne sais si l’histoire de Marie est vraie, j’ai comme un léger doute, ni si Joseph l’a cru, mais je suis certain que dans le récit il s’est comporté en homme bon pour son épouse et son « fils » à naitre.

  • Je suis le premier à aimer exagérer un peu pour dénoncer les failles d’un raisonnement. Mais conclure que si l’on respecte la vie de l’embryon, alors il faut nécessairement fliquer la vie des femmes, me paraît absurde.
    Il y a une différence entre interdire un acte d’agression contre autrui (l’avortement dans ce cas,) et imposer des surveillances et comportements destinés à « protéger tout le monde coûte que coûte. »
    C’est le même genre de dérive kafkaïenne que celle qui consiste à infliger des traitements aux bien portants pour protéger la santé des malades. Une société qui ne serait pas dirigée par des ânes constructivistes devrait pouvoir tirer une ligne rouge basée sur le bon sens.

    • Respecter la vie de l’embryon et le choix de la femme… en même temps ?
      Macron, sors de ce corps !

      • Et L’anti américanisme primaire est le socialisme des imbéciles (De Gaulle paraphrasant Babel). je répondais à abon neacent

      • Traitez moi de tout mais pas de maqueron svp, il y a des degrés dans l’immonde…
        Si le choix d’un quidam, homme ou femme, menace directement la vie d’autrui, alors f..k le choix.

        Je reformule néanmoins: on interdit normalement le meurtre. Ça ne veut pas dire que l’on va pour autant installer des caméras de surveillance jusque dans les domiciles pour s’assurer que nul n’étrangle son conjoint.
        Bon ben pareil pour la vie des femmes. On ne va pas pister leurs rapports ou surveiller leur consommation de produits hygiéniques. Sauf à être totalement foutraque.

        • Si les femmes avortent hors légalisation – et elles avortent… que ceux qui croient aux vertus de la prohibition lèvent le doigt – la mortalité d’icelles est multipliée par 10 (au minimum).
          On peut faire avec… ou pas.
          Faut choisir entre un embryon qui n’a rien demandé mais qui n’est pas juridiquement une personne et une femme qui est une personne mais qui aurait pu se poser des questions avant.

          • position pratiquo pratique qui se défend très bien !!!

          • Bien essayé, mais on ne parle pas d’un joint ou d’une passe.
            Donc oui, je crois aux vertus de la prohibition du meurtre.
            Dans la mesure où le nb de décès de personnes adultes consentantes sera inférieur au nb d’enfants sauvés, l’arithmétique de la chose, quoique déplaisante, n’est pas inacceptable.
            Dans une société civilisée l’adoption et l’aide aux mères en difficulté ne sont pas un problème. De même que les options de contraception. Pourquoi faut-il absolument que des enfants meurent?

            • Il ne s’agit ni d’un enfant ni d’un meurtre.
              Juridiquement et scientifiquement.
              Votre argumentation ne vaut qu’en tordant le sens des mots.
              Et de fait, vous additionnez des choux et des carottes.
              Moralement, ça peut se discuter.
              Mais pour moi, la seule morale qui vaille, c’est celle qu’on s’applique à soi-même. Pas celle qu’on veut imposer aux autres.
              Laissez les femmes faire ce choix en conscience.

              -2
              • @abon J’attends donc votre raisonnement scientifique pour me démontrer que ce n’est pas un enfant. Et m’indiquer la présence de choux et de carottes dans mon raisonnement. Essayez d’argumenter au lieu d’accuser, pour changer.

                Il est pour moi, moins qu’idéal, que les lois votées par des outres à vide autorisent la mise à mort d’un être humain pour des raisons de confort personnel des électeurs. C’est à la fois une question de morale, et paradoxalement, de limitation des prérogatives de l’état (ici prérogative de désigner qui est bon pour l’abattoir, basé sur des critères plus ou moins fumelards.)
                Accessoirement j’apprécie très moyennement de payer pour les homicides de confort en question.

                Quant au côté juridique, « C’est pas un enfant parce que la loi dit que ce ne l’est pas », c’est bien la pertinence des lois ce que l’on débat ici…
                Et justement la décision de la CS permet à la loi (de certains états US) de changer: deal with it.

                • La question de savoir si c’est un humain ou pas, a des droits ou pas est philosophique. Mais on peut regarder la pratique.
                  Il est techniquement impossible pour l’état d’empêcher l’avortement médicamenteux sans enfreindre gravement nombre de libertés fondamentales. A quoi sert une loi impossible à appliquer? A rien. Et nombre de lois votées en France sont inapplicables et donc inutiles. Pour les pro-vie comme pour les anti-drogue, il faut réfléchir à ce qui est techniquement possible.

                  -1
                  • Je comprends et partage ce point de vue en ce qui concerne les substances récréatives.
                    Par contre quand il s’agit de supprimer des vies humaines, non. Il y a une ligne rouge qu’on ne peut pas franchir au nom de l’efficience.
                    L’interdiction sera d’une efficacité nécessairement limitée, OK, mais elle aura néanmoins un impact non négligeable: le rapport (coût et risque)/ bénéfice de l’opération va changer drastiquement, cela permettra a minima d’éviter l’absurde dérive de l’utilisation contraceptive de l’avortement.
                    Et fera cesser dans l’esprit des gens un peu simples la détestable confusion « si c’est légal c’est bien. »

          • Les gens qui volent hors législation… et ils volent… encourent bien plus de risques que ceux qui volent légalement, par exemple après avoir payé leur victime pour la compenser du vol en question, et obtenu leur assentiment.
            Donc on va légaliser le vol, hein ?
            Idem pour le meurtre. Les tueurs qui agissent « hors législation » ont souvent une espérance de vie très courte alors que les bourreaux officiels vivent souvent assez bien (là où il en reste, genre Chine, Arabie, etc.)

            L’argument de la « personne juridique » est assez risible : faites du fœtus une personne juridique ou retirez le statut aux femmes et vous avez réglé votre problème 🙂

  • Le contrôle du ventre des femmes, on a longtemps pensé que c’était la marque des civilisations barbares et des peuplades reculées.
    Raté !

    -2
    • les femmes civilisées contrôlent leur ventre, normalement, donc elles n’y trouvent pas d’enfant qu’elle ne voudraient pas. Si il y est vraiment contre leur gré (viol, en gros), on peut discuter selon vos termes. Mais c’est moins de 0.5% des avortements pratiqués.

  • Il y a deux sujets :
    – la possibilité d’avorter qui peut se concevoir dans des cas particuliers assez nombreux…et que l’on peut alors assimiler à une liberté pour les femmes de disposer de leur corps…
    – le délai de 22 semaines pour avorter aux USA qui est tout simplement monstrueux. Pour avoir assister à des avortements thérapeutiques à cette période de la grossesse il faut avoir le voleur bien accroché: on brise les os, le crâne…
    A ce stade ce n’est plus la liberté pour les femmes mais le droit de l’enfant.
    Bien que non pratiquant c’est tout simplement immonde et inhumain de le faire sur un enfant à 15 jours d’être viable.
    Au lieu de se déchirer pour permettre, ou non, l’immonde, la possibilité d’avorter dans un délai raisonnable (12 semaines de grossesse, 14 d’aménorrhée) devrait faire un consensus propre à faire la paix sociale.

  • Sur ce sujet, concernant les libertariens, Rothbard a déjà tout dit en 1983 (L’éthique de la Liberté) et a clos le débat il me semble.

    • Pas si simple de trancher le débat même ( surtout ? ) entre libertariens.
      Les sentiments et les croyances rentrent trop en compte ( et c’est normal, c’est pareil pour moi ) pour que les raisons puissent s’accorder, même si on s’efforce d’être full rationnel.
      Il faut conséquemment être prudent avant de considérer sa vision personnelle de la morale comme « universelle ».
      Une discussion entre libertariens : http://www.quebecoislibre.org/031108-9.htm

    • Il manquait un poil de connaissances scientifiques à l’époque. Il est désormais clairement établi, scientifiquement parlant, que passé 1/2 h après la fécondation de l’œuf on est en présence d’une vie humaine. Il n’y aurait pas l’avortement et son « droit à…  » (pas un truc très libéral, normalement, le « droit à », mais là aussi, on fait des exceptions spéciales autour de ce sujet) il n’y aurait pas le moindre débat. Comme l’avortement est une question qui semble centrale (bizarre pour un truc qui devait être ultra rare et réservé aux cas vraiment problématique… qui représentent désormais moins de 1% des avortements pratiqués) alors on fait comme si la question scientifique n’était pas complètement tranchée (un peu comme pour la notion de « race » et le « genre », d’ailleurs).

  • A notre époque il est dur de constater que les femmes ne peuvent pas disposer comme elles souhaitent d un libre choix.
    Certaines sont opposer à l avortement elles considèrent que la vie commence dès la procréation c’est leur choix.
    Même certaines cas en de violence refusent l avortement, c’est leur choix
    D autre choisiront l avortement c’est leur choix.
    Personnes ne doit s opposer à leur choix, aucune religion, aucun dogme .
    Petite réflexion : le droit d avorter est il un droit de tuer?
    Tiberle contra…

    • Bah oui, c’est un « droit de tuer ». Le zygote dès quelques minutes (dans les 1/2h, de mémoire) après l’entrée du spermatozoïde constitue une entité biologique, différente de la mère (code ADN différent) et vivante (négantropie, auto-maintien des propriétés, etc.) et clairement humaine (là encore, cf ADN). Etrangement quand on parle de tout sauf de l’avortement chez l’humain ces trucs sont scientifiquement complètement admis, hyper consensuels, etc.
      On peut envisager l’avortement comme possible dans un contexte libertarien au regard de nos connaissance scientifiques : la disposition complète de sa propriété (son corps) en tant que lieu où l’on a droit de vie et de mort.
      L’avortement est donc concevable, mais dans le même temps il faut admettre que coller une bastos dans la tête du voisin venu prendre l’apéro et qui nous sort « la taxation c’est le prix à payer pour la vie en société » est parfaitement OK. L’un ne va pas sans l’autre, sauf à avoir des croyances religieuses, anti-scientifiques et peu logiques, sur le fœtus/embryon/etc. qui ne serait « pas vraiment vivant » ou « pas vraiment humain » …

    • « le droit d’avorter » est-il un droit de tuer ?
      Oui, si le foetus est reconnu comme une personne, non s’il est considéré comme un parasite incapable de vivre en dehors du ventre de sa mère, position de Murray Rothbard qui semble être la plus logique et rationnelle.

      Tant que le foetus ne peut mener une vie autonome, il ne peut être différencier du corps de sa mère, et donc celle-ci a tous les droits sur une extension de son corps qui ne peut être reconnu comme une personne ayant des droits humains.

      Mais je suis preneur d’une position philosophique différente si elle est mieux argumentée (un argument religieux est un oxymore)

      • Je conçois mal une autre approche que la vôtre.
        La limite haute de l’avortement est souvent fixée à 20-22 semaines, quand le foetus devient viable.
        La limite basse un peu en-dessous de 8 semaines quand l’embryon n’est pas encore un foetus.
        Nos pro-life seraient-ils des adeptes du principe de précaution ?
        Quoiqu’il en soit, sur ce débat, l’avis de vieux mâles andropausés ne remplacera qu’imparfaitement celui des principales concernées.

        -1
      • Un enfant qui vient de naître ne peut mener de vie autonome et ne survie pas longtemps sans les soins d’un autre être humain. D’ailleurs le bébé n’a pas la conscience de soi et considère les entités qui s’agitent autour de lui comme des extensions de lui-même, d’où sa grande frustration quand leurs actions ne correspondant pas à ces désirs ( qu’il ne sait encore identifier comme des besoins )
        Un bébé n’est pas humain, je ne vois pas d’autre possibilité si j’accepte vos prémisses.

        • La seule question qui vaille est : à partir de quel moment, un humain devient il un sujet de droit ? Quand il a conscience de soi, avant, dès la conception, à l’âge de raison ?
          Et ce ne sont pas nos morales respectives qui vont nous aider à tous être d’accord.
          Seul le choix permet d’être libre. La loi peut permettre l’avortement, temps qu’il n’est pas obligatoire et que les futurs parents ne sont pas culpabilisés dans un sens ou dans l’autre, ça m’ira parfaitement. Le droit positive ne me sert pas d’éthique pour être heureux ou pour juger en conscience, j’ai autre chose pour ça
          La loi Veil était un bon compromis.
          Mais le progressisme social de nos justiciers sociaux ne se satisfait jamais du progrès précédant, sinon il perd sa raison d’exister.

          • C’était exagéré selon moi de dire qu’on tuait des bébés avec un délai d’ avortement à 12 semaines d’aménorrhée, c’était la bonne limite ( et j’admets qu’elle peut se discuter à la baisse, c’est peut-être un peu trop ).
            Mais quand on avorte un enfant deux semaines avant sa naissance, j’ai seulement envie de hurler.

          • En l’occurrence c’est l’intégrisme moral d’une poignée de juges qui a fait le coup. Et ne venez pas me dire que c’est en réaction aux délires progressistes actuels. Ça fait 50 ans que ces gens-là sont restés bloqués sur les années 60 (sans le rock’n’roll).
            Ce que veulent les femmes en situation de se faire avorter, c’est que ça se passe bien. Pas dans la cuisine d’une faiseuse d’anges avec des aiguilles à tricoter.
            Alors le droit positif, dites-vous avec une pointe de mépris…
            Mais quand vous allez à l’hôpital pour une intervention critique, vous ratiocinez autant ?
            Ne partez pas du principe que c’est un droit en plus. Mais que c’est une interdiction en moins.

            • Les juges en question ont considéré (et avec une solidité juridique assez correcte… En privé RBG considérait aussi que Roe v. Wade n’était « ni fait ni à faire » et devrait être supprimé… sur des bases juridiques, mais elle ne voulait pas y toucher pour des raisons sociales) que l’avortement n’est pas une question constitutionnelle et donc ne relève pas de l’État fédéral. Il ne s’agit pas d’un droit garanti à tout humain et que le gouvernement central doit donc protéger, mais une action privée non consubstantielle à la nature humaine et dont la légalité doit donc être décidée par les citoyens eux même via les lois des États fédérés.
              La décision en question permettrait donc aux citoyens d’un État qui jugent en majorité que l’avortement devrait être libre et gratuit jusqu’à la naissance d’avoir cette loi. Elle permet à un État potentiellement de décider que l’avortement est « interdit » après 20 semaines d’aménorrhée, ou après qu’on puisse détecter le battement du cœur, ou pour tout cas autre qu’un viol ou une menace établie pour la vie de la mère. Bref, la décision « Dobbs » rends la liberté et ré-ouvre le débat sur un sujet hautement débattable.

              Ça semble vous gêner et c’est surprenant !

              Quant à moi quand je suis en situation de tuer quelqu’un qui me gêne, j’aimerais aussi « que ça se passe bien » pas de devoir agir en catimini, en ayant peur d’être vu, et peut-être même d’aller en prison pour ça (chose qui ne menace pas les femmes en question, juste les personnes pratiquant l’avortement, pour les lois en place ou en projet dans les États « contre l’avortement »).

      • Le fétus est parfaitement distinct du corps maternel, quoique dépendant.
        Un nourrisson ne peut pas mener une vie autonome.
        Un enfant de moins de trois ans ne peut pas mener une vie autonome.
        Une personne lourdement handicapée ne peut pas mener une vie autonome.
        Un sénile ne peut pas mener une vie autonome.
        Aucun des cas ci-dessus ne constitue une extension de la propriété de sa famille ou de la communauté, ni ne peut être légalement supprimé.
        Tous les cas ci-dessus sont susceptibles d’être supprimés moyennant une dérive légale.

        • On vient, mine de rien, de glisser de « viabilité » à « autonomie ». Comme tantôt de « foetus » à « enfant ».
          Il ne vous reste plus que la trahison sémantique en magasin ?

          -2
          • Une personne en coma n’est pas viable sans aide, une personne lourdement handicapée, un vieillard, un enfant de moins de 6 ou 7 ans non plus… Tout ces humains protégés par la loi ne sont pas « viables » sans leur entourage. Mais cet entourage n’a pas le droit de les tuer. Un fœtus n’est pas viable sans sa mère pendant au moins 6 ou 7 semaines (après, en fait, moyennant beaucoup d’efforts médicaux, si, donc potentiellement l’avortement peut être envisageable sur le terrain de la viabilité jusqu’à ce point seulement) cela donne-t-il le droit de le tuer ? C’est un humain, il est vivant, la science est sans ambiguité à ce sujet…
            Je dis que oui, le cas peut-être présenté et tenir d’un point de vue libertarien, mais attention, si c’est le cas, il faut aussi admettre que le propriétaire du lieu ou vous vous trouvez peut vous tuer sans souci (l’idée étant que l’on peut sur sa propriété agir totalement comme on souhaite et donc éliminer ce qu’on considère « gênant »). Perso ça m’irait assez mais j’ai comme l’impression que mon « intégrisme libertarien » ne passe pas avec beaucoup de gens, y compris « très libéraux »… donc l’avortement ne devrait pas bien passer non plus, alors qu’en fait si. Donc là je ne comprend pas trop… Deux poids deux mesures, peut-être ?

          • Ah, non. C’est un peu compliqué sur ce fil, la ref à l’autonomie c’est en réponse au post de Stephane.

  • Les commentaires sont fermés.

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Ce vendredi 2 février, les États membres ont unanimement approuvé le AI Act ou Loi sur l’IA, après une procédure longue et mouvementée. En tant que tout premier cadre législatif international et contraignant sur l’IA, le texte fait beaucoup parler de lui.

La commercialisation de l’IA générative a apporté son lot d’inquiétudes, notamment en matière d’atteintes aux droits fondamentaux.

Ainsi, une course à la règlementation de l’IA, dont l’issue pourrait réajuster certains rapports de force, fait rage. Parfois critiquée pour son ap... Poursuivre la lecture

Nicolas Tenzer est enseignant à Sciences Po Paris, non resident senior fellow au Center for European Policy Analysis (CEPA) et blogueur de politique internationale sur Tenzer Strategics. Son dernier livre Notre guerre. Le crime et l’oubli : pour une pensée stratégique, vient de sortir aux Éditions de l’Observatoire. Ce grand entretien a été publié pour la première fois dans nos colonnes le 29 janvier dernier. Nous le republions pour donner une lumière nouvelles aux déclarations du président Macron, lequel n’a « pas exclu » l’envoi de troupes ... Poursuivre la lecture

La campagne de Joe Biden ne se déroule pas bien. Bien qu’il semble se diriger vers la nomination de son parti, sa cote de popularité ne cesse de chuter, laissant croire que Donald Trump le vaincra s'il obtient la nomination. Son bilan économique mitigé ne sera pas la seule raison pour laquelle plusieurs de ses électeurs en 2020 s’abstiendront ou changeront de camp.

En effet, le récent rapport d’un procureur spécial affirme que Biden a bel et bien été négligent avec des documents confidentiels qu’il a conservés secrètement. Et à l’insta... Poursuivre la lecture

Voir plus d'articles