La fin de l’étalon-or : cinquante ans de folie monétaire

L’étalon-or impliquait une limite à la voracité monétaire et fiscale des administrations. Le fait d’y mettre fin a ouvert en grand les vannes de la croissance de l’endettement.

Partager sur:
Sauvegarder cet article
Aimer cet article 0

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

La fin de l’étalon-or : cinquante ans de folie monétaire

Publié le 26 août 2021
- A +

Par Daniel Lacalle.
Un article du Mises Institute

Cette année marque le cinquantième anniversaire de la décision de Nixon qui a mis fin à la convertibilité du dollar en or. Cet événement a ouvert l’ère d’une économie mondiale dopée à la dette et la monnaie fiat. Depuis cette date les crises sont plus fréquentes mais elles sont aussi plus courtes et toujours « résolues » en émettant davantage de dette et de monnaie.

Figure 1 : Evolution du ratio dette sur PIB de 12 pays.  1971 a été le catalyseur du super cycle dette/QE.

La fin de l’étalon-or a été le déclencheur d’une expansion massive du crédit dans le monde entier et a consolidé la position du dollar en tant que monnaie de réserve mondiale, car il a de fait remplacé l’or dans les réserves des principales banques centrales.

Figure 2 : Fréquence des crises (probabilité annuelle en pourcentage).

Ainsi donc, depuis la fin de l’étalon-or, les crises sont plus fréquentes mais aussi plus courtes qu’auparavant.

Le montant des dettes au niveau mondial a crevé le plafond à plus de 350 % du PIB.  Ce qu’on appelle improprement « l’économie financiarisée », qui est en réalité une économie basée sur le crédit, s’est envolée.

Figure 3 : La dette mondiale à un niveau jamais atteint en 2020.

L’étalon-or impliquait une limite à la voracité monétaire et fiscale des administrations. Le fait d’y mettre fin a ouvert en grand les vannes de la croissance de l’endettement et la tentation sournoise des États qui reportent les déficits actuels sur les générations futures.

En remplaçant l’or par le dollar en tant que monnaie de réserve mondiale, les USA ont pu emprunter et émettre de la monnaie massivement sans déclencher d’hyper-inflation car ils exportent leur déséquilibre monétaire vers le reste du monde. Les autres monnaies suivent la même expansion monétaire sans la demande mondiale dont bénéficie le dollar. Les déséquilibres croissants finissent donc toujours par rendre ces monnaies plus faibles comparées au billet vert et les économies plus dépendantes du dollar.

Cette fuite en avant dans laquelle sont engagées la plupart des banques centrales a fait qu’il n’y a plus vraiment d’alternative au dollar américain comme monnaie de réserve car les autres pays ont abandonné l’orthodoxie monétaire et fiscale au même moment, affaiblissant ainsi leur capacité à constituer une réserve de valeur alternative.

Figure 4 : Bilan des banques centrales en pourcentage du PIB (données jusqu’en décembre 2020).

Dans les années soixante, n’importe laquelle des monnaies des principaux pays pouvait faire concurrence au dollar si ses réserves en or étaient suffisantes.  Aujourd’hui, aucune monnaie fiat ne peut concurrencer le dollar, ni en capacité financière ni en tant que réserve. L’exemple du yuan est emblématique. L’économie chinoise représente presque 17 % du PIB mondial et sa monnaie est utilisée dans moins de 4 % des transactions mondiales, selon la Banque des règlements internationaux.

Avec la fin de l’étalon-or, Nixon a consolidé et garanti pour longtemps l’hégémonie financière et monétaire des États-Unis, tout en lâchant la bride à une économie mondiale dopée au crédit où le risque financier dépasse l’économie réelle dans une mesure disproportionnée.

Les défenseurs de la fin de l’étalon-or mettent en avant le fait que les crises sont plus courtes et que l’économie mondiale s’est renforcée pendant cette période. Toutefois, il est plus que douteux que l’expansion massive du crédit soit la cause du progrès.  Les dettes improductives se sont envolées et la fiscalité s’est alourdie, alors que la gravité des crises s’est accrue elle aussi, crises qui sont à chaque fois « résolues » par plus de dettes et pus de prise de risques.

Une économie dopée au crédit et la création monétaire massive profitent de manière disproportionnée à ceux qui perçoivent les premiers l’argent et les crédits, c’est-à-dire les administrations et les riches. Cela aggrave les difficultés des classes moyennes et des plus pauvres qui tentent d’améliorer leur niveau de vie, étant donné que les prix des actifs sont artificiellement gonflés alors que les salaires réels croissent plus lentement que les dépenses essentielles comme le logement, la santé, l’énergie, cependant que les impôts augmentent.

Traduction Contrepoints.

Sur le web

Voir les commentaires (2)

Laisser un commentaire

Créer un compte Tous les commentaires (2)
  • Charles Gave disait que la principale de l’étalon-or était que tous les participants devait jouer franc-jeu. Cela passe par une masse monétaire équivalente à la quantité d’or possédée.
    Le problème est que les pays finissent par accumuler de l’or sans augmenter leur masse monétaire.

    Bref, j’ai bien l’impression que tant que l’État contrôlera sa monnaie, le juge sera aussi le bourreau et le criminel.

    • Si je me souviens bien, une des raisons qui ont poussé les États-Unis à mettre fin au système de Bretton Woods était que la masse de dollars « virtuels » en circulation était telle qu’il leur était devenu impossible de garantir la convertibilité en or de leur monnaie.
      Ils auraient peut-être pu se déclarer en défaut, ce qui aurait certainement provoqué une belle explosion sur le moment, le temps de trouver une alternative. Ils ont préféré la fuite en avant, sur le mode « notre monnaie n’est plus convertible, mais ça ne change rien, continuez comme avant ».
      On a échappé (pour l’instant) à une explosion certaine. Quant au long terme, je ne suis pas sûr qu’on en ait vu tous les effets…

  • Les commentaires sont fermés.

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

L'influent économiste Olivier Blanchard (ancien économiste principal au FMI) avait prévu, un peu imprudemment, que les taux d’intérêt (réels) allaient rester faibles et inférieurs aux taux de croissance réels pour les 20 prochaines années, et cela pour tous les pays (cf. PIIE, Reexamining the economic costs of debt, O. Blanchard, Nov. 2019). Donc inutile de procéder à un ajustement, la dette publique allait décliner par enchantement.

Pour M. Blanchard, les taux étaient sur une tendance séculaire à la baisse depuis le XIVe siècle… Dans ... Poursuivre la lecture

Les monnaies suivent les civilisations depuis 3000 ans, elles sont des créations humaines, et pourtant elles restent des ovnis. Leur rôle est de permettre l’échange de biens à travers un support capable de « cristalliser » de la valeur dans le temps, une sorte de confiance palpable.

S’il est compliqué de définir une monnaie, c’est parce que nous avons utilisé des centaines de monnaies différentes qui n’ont rien de commun, à part être une monnaie. Et aucune d’entre elles n'entre dans les critères d’Aristote : unité de compte, réserve de... Poursuivre la lecture

Par Daniel Lacalle.

Depuis 1960, le Congrès a relevé le plafond de la dette 78 fois, selon Bloomberg. Le processus de relèvement du plafond de la dette est devenu si régulier que les marchés s'en inquiètent à peine. En outre, comme l'a montré la crise du plafond de la dette en 2011, l'impact sur les prix des actifs s'est surtout fait sentir dans les économies émergentes. En 2011, les dettes turque et indienne ont été les plus touchées, tandis que les bons du Trésor ont augmenté.

Les hommes politiques pensent que le relèvement du... Poursuivre la lecture

Voir plus d'articles