La tragédie des taux et crise monétaire (2)

Qui voudra acheter la dette européenne qui ne rapporte rien ?

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La tragédie des taux et crise monétaire (2)

Publié le 28 décembre 2018
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Par Simone Wapler.

Hier, je revenais sur les taux négatifs, expliquant qu’ils signifiaient que nous étions dans une phase de déconstruction de la monnaie et que 2019 serait un tournant.

La construction de la monnaie a commencé à l’époque de Sumer (-1750). Monnaie et crédit coexistaient dès cette époque. La monnaie était d’or ou d’argent et des dispositifs de limitation du crédit existaient afin d’éviter les troubles sociaux.

En effet, l’esclavage était la sanction des mauvais payeurs et une croissance déraisonnable du crédit aurait conduit à une société d’esclaves contrôlée par quelques nantis. Une route de la servitude…

Mais la monnaie est au carrefour de la politique et de l’économie, et il existe un triangle indissociable pouvoir-monnaie-impôt. Le pouvoir politique préfère le crédit car il peut le contrôler.

Il est bien plus facile de faire surgir du crédit que de l’or ou de l’argent – ou même des billets de banque.

Dès le tout début du XVIIIème siècle en Europe, les pouvoirs politiques vont s’efforcer d’écarter le public de l’or et de l’argent au profit de monnaies contrôlables et centralisées : billets de banque et crédit.

Les quatre principaux jalons de la déconstruction monétaire

Mise en place du système de Law (1716-1720) en France. C’est aussi la première opération de quantitative easing puisque la Banque Royale rachètera la dette de la France. Egalement, première tentative d’interdire la possession d’or au citoyen. La faillite du système de Law fut tellement retentissante que le mot “banque” fut banni du vocabulaire français. Les établissements bancaires qui furent ensuite créés préféraient s’appeler “caisses”. Mais la mémoire collective s’efface… Deux siècles plus tard, petit à petit des systèmes de Law se mettent en place dans les pays occidentaux dont les finances sont mises à mal par deux guerres mondiales. La monnaie papier – en principe adossée à des réserves d’or nationales – finit par s’imposer.

Décret (executive order) de Roosevelt de 1931 interdisant la “Clause Or” dans les contrats commerciaux. La “Clause Or” garantissait que les créanciers soient remboursés en or ou en équivalent-or, empêchant l’emprunteur de s’acquitter de sa dette en monnaie dévaluée. Ce décret permit à l’Etat fédéral américain de s’endetter confortablement.

Fin des accords de Bretton Woods en 1971 entériné par Nixon. Toutes les monnaies sont décrochées de l’or et deviennent flottantes. Depuis, 90% de la monnaie n’existe que sous forme de crédit (donc dette). Les Etats paient à crédit, la dette souveraine rémunérée constituant des réserves monétaires jugées préférables à l’or.

Mise en place des quantitative easings et des taux d’intérêt négatifs par les banques centrales entre 2008 et 2018. Le système de monnaie-crédit a conduit à des crises de la dette (subprime aux Etats-Unis et dette souveraine en Europe) d’ampleur inédite. Pour faire croire que ces dettes sont honorées, les taux sont forcés à la baisse, plongeant même en territoire négatif en termes réels.

2019 et la fin du risque sans rendement

Il n’a jamais existé de rendement sans risque, même avec les dettes souveraines. Le zéro risque a toujours été une monnaie marchandise. Aujourd’hui, avec les grandes devises, il n’existe plus de façon de stocker votre pouvoir d’achat dans la durée sans risque.

La dette a augmenté bien plus vite que les revenus. Les faillites sont évitées seulement en trichant sur les taux d’intérêt.

Les taux longs ont commencé à monter aux Etats-Unis en 2018 et les besoins d’emprunts du gouvernement américain sont gigantesques. L’économie ralentissant, les étrangers seront moins acheteurs de dette américaine. Une crise budgétaire se profile de ce côté.

De l’autre, qui voudra acheter la dette européenne qui ne rapporte rien avec les gilets jaunes dans les rues de Paris et la menace d’une nouvelle crise de la dette en Italie ?

Ou les banques centrales continuent leur destruction monétaire, provoquant une fuite devant la monnaie (et donc de l’hyperinflation)… ou elles avouent que les dettes ne seront pas remboursées et nous avons une cascade de défauts. Hyperinflation ou déflation. Charybde ou Scylla. La Peste ou le Choléra.

Ce qui me permet de conclure sur une note optimiste : l’un ou l’autre vaut mieux que l’esclavage et la route de la servitude, ou encore une guerre. D’autant plus que pour vous assurer à titre individuel contre cette future crise, c’est très simple : prenez de la vraie monnaie – de l’or ou de l’argent.

Pour plus d’informations, c’est ici.

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  • Conserver un certain pourcentage de ses actifs en or ou en argent est un excellent conseil. 5% par exemple est un bon niveau, plus serait un péché de gourmandise. Pour autant, l’or ou l’argent ne sont pas des monnaies, seulement des actifs, au même titre que l’immobilier par exemple.

    Concernant l’endettement, les dettes publiques sont pour l’essentiel irrécouvrables, pour la bonne raison que l’Etat non régalien ne produit strictement aucune richesse supplémentaire (il se contente de déplacer la richesse). Inversement, la dette privée est légitime tant qu’elle sert à produire, car la production future garantit le remboursement. Mais il existe un plafond au delà duquel la dette privée devient insupportable. Certains économistes admettent un plafond de dette privée égal à 150% du PIB.

    La crise de la dette est d’abord une crise de la dette publique. Elle nous apprend que, pour assainir le système financier, il convient d’interdire la dette publique sous toutes ses formes. Une institution qui ne produit rien n’a aucun moyen de rembourser sa dette. Elle ne doit donc pas pouvoir s’endetter, sauf à accepter la destruction des richesses à venir, en condamnant les générations futures à la pauvreté. La dette publique est un crime contre l’avenir, un crime contre la jeunesse.

    Cette crise doit également nous permettre de comprendre collectivement que le risque zéro n’existe pas. En économie, tout est relatif et tout est risqué. Il n’existe aucun point fixe, aucun référentiel absolu, aucune valeur intrinsèque, nulle part. Les concepts d’étalon ou de risque nul sont de pures illusions.

    • c’est donc bien purement politique

      • @ claude henry de chasne
        Oui: politique et économie ne parlent pas du réel mais de ce qu’on en fait (manipulation) grâce à ces pseudo-sciences!

      • L’acte politique ultime consiste à ne pas nuire.

        Mais avant d’y arriver, encore faut-il que les politiciens comprennent l’économie. En France, il y a du chemin à faire. Beaucoup de chemin…

    • « L’Etat régalien ne produit aucune richesse » ?!
      Les infirmières ne produisent donc aucune richesse ?! (pour ne prendre que cet exemple).
      Alors pourquoi se rendre à l’hôpital en cas d’urgence si les professionels qui y sont présents ne produisent aucun service qui a valeur à vos yeux?

      • Les infirmières, placées dans un contexte public non régalien, ne produisent aucune richesse supplémentaire. En effet, à toute leur production de richesses nouvelles (les actes et les soins) correspond une destruction préalable de richesses produites par ailleurs, par le biais des impôts, taxes ou cotisations nécessaires pour les financer.

        Le financement obligatoire et contraint des infirmières du secteur public détruit les moyens de financer volontairement les infirmières du secteur privé. Or, seules ces dernières sont mises en situation de créer des richesses supplémentaires car elles participent à l’échange volontaire à l’origine de la création des richesses.

        Même constat pour les hôpitaux publics. Pourquoi se rendre à l’hôpital en cas d’urgence ? Parce qu’il n’y a pas le choix, malheureusement. Tout l’argent disponible a déjà été spolié. Le seul moyen de faire participer les hôpitaux à la création de richesses, c’est leur privatisation. Ceci est vrai pour n’importe quelle activité collectivisée (santé, éducation, etc.) Dans une économie entièrement collectivisée, il n’y a plus de PIB possible, plus aucune création de richesses nouvelles.

        • Absolument pas.
          Si les hopitaux étaient privés et la sécu inexistante, Les infirmieres feraient le meme travail sous contrat privé et Les soins seraient identiques.
          La creation de richesse seraient la même. La seule difference seraient le financement (par mutuelle privé ou par sécurité sociale publique).
          Si selon vous, il ne peut pas y avoir de croissance économique par l’Etat, comment expliquez-vous le production soviétique n’a cessé d’augmenter au cours de XXe siècle ?

      • Je ne sais pas si les infirmières produisent ou non de la richesse, mais ce que je sais, c’est qu’elles n’ont aucune valeur aux yeux de l’état.

        Après (courte) réflexion, si les infirmières ont de confortables revenus en Suisse, c’est qu’elles doivent créer de la richesse et de la valeur ajoutée.

        A ce propos il y a quelques jours, avec une bronchiolite un peu préoccupante, mon petit fils d’un an a attendu exactement 0,2 nanoseconde aux urgences du ‘Kinderspital’ de Bâle.
        Il y a passé la nuit en observation avec un lit mis à disposition de sa mère.

        Mais il est vrai que l’état fédéral a d’autres chats a fouetter…

    • L’Etat non régalien

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