Par Francis Richard.
Bartholomé de Ménibus n’a pas tué le père, mais il l’a enterré. Après quoi il est parti du village. Il a gravi la montagne pour aller voir ce qu’il y avait derrière. Et il a vu que, de l’autre côté de la montagne, s’en cachait une autre, et, derrière celle-ci, une autre encore, et ainsi de suite.
Cela ne l’a pas découragé. L’homme est ainsi fait qu’il a soif de connaissances, depuis le pommier d’Eden, et qu’une déception, si grande soit-elle, ne suffit pas à le faire renoncer. Derrière chaque montagne Bartholomé fait des rencontres, qui ne laissent pas de le surprendre.
Derrière la première montagne il rencontre des vieillards abandonnés par leurs familles qui partaient en vacances : on n’abandonne pas seulement des chiens au bord de la route. Pour attirer le touriste, les vaches y sont pourvues de hublots, fenêtres sur leur panse, pour y voir leur lait…
Un ange boiteux
Rose Slatter s’inquiète pour Bartholomé de Ménibus. Elle a un physique disgracieux : elle boite. Mais elle a un cÅ“ur d’ange, un cÅ“ur sincèrement épris de Bartholomé. C’est un ange boiteux. Rose et Bartholomé, avant qu’il ne parte, aimaient s’asseoir sur un banc, côte à côte.
Après avoir attendu Bartholomé quarante jours sans qu’il revienne, elle part en claudiquant à sa recherche, en quête de traces qu’il aurait laissées derrière lui. Chemin faisant elle lui écrit une longue lettre affectueuse, tandis que, parallèlement, il fait le récit discontinu de son errance.
Le monde qu’ils décrivent l’un et l’autre n’a rien de réjouissant : c’est le monde cauchemardesque de La Terre tremblante, préfiguration de ce que le monde d’aujourd’hui pourrait bien être demain, faute non pas de prises de conscience, mais de responsabilités bien définies.
Les êtres et les choses s’adaptent pourtant aux nouvelles conditions auxquelles ce monde les soumet, comme si la vie devait toujours l’emporter sur la mort, ce qui ne veut pas dire que ce soit merveilleux pour autant. La merveille reste cet amour à distance de Rose et de Bartholomé…
Marie-Jeanne Urech, La terre tremblante, Hélice Hélas, 128 pages.
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