Le sport pourrait-il fonctionner sans joueurs étrangers ?

Michel Pautot, à l’origine de l’arrêt Malaja, analyse la place des sportifs étrangers dans le sport professionnel. Une lecture d’actualité pour la Coupe du Monde.

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Sport et nationalités (Crédits : L'Harmattan, tous droits réservés)

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Le sport pourrait-il fonctionner sans joueurs étrangers ?

Publié le 16 juin 2014
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Par Alexis Vintray.

Sport et nationalitésS’en souvient-on encore dans une Europe où les frontières se sont ouvertes, il y a moins de 20 ans, il était encore interdit d’avoir plus de trois joueurs d’un autre pays de l’Union Européenne dans une équipe de football professionnel.

À l’inverse, quand le PSG a débuté son match contre l’Olympique Lyonnais le 1er décembre 2013, tous les joueurs de l’équipe étaient étrangers : quatre Brésiliens, trois Italiens, un Suédois, un Néerlandais, un Argentin et un Uruguayen. Quel bouleversement en moins de vingt ans ! Alors que la Coupe du Monde de football vient de commencer, qu’est devenue la place réelle des joueurs étrangers dans le sport ?

C’est la question qu’aborde Maître Michel Pautot dans Sport et nationalités (L’Harmattan, 2014), avec de nombreux chiffres et exemples : de la saison 2002-2003 à la saison 2013-2014, le pourcentage de joueurs étrangers en Ligue 1 (Football masculin) passe de 32,1% à 41,3%. Pour le rugby masculin, on passe de 19,5% en 2003-2004 à 42,6% en 2013-2014. Quel que soit le sport, les frontières se sont largement ouvertes, permettant à de nombreux joueurs français de s’expatrier et au public français de découvrir les vedettes internationales. Le volley s’impose comme le sport le plus international, avec 57% d’étrangères dans les équipes féminines et 45% d’étrangers dans les équipes masculines. À l’inverse, c’est le handball qui reste le sport le plus fermé, relativement, avec 31% d’étrangères et 35% d’étrangers dans ses championnats majeurs. Fourmillant de tableaux sur les différentes équipes (l’équipe la plus internationale à avoir remporté la Champion’s League est ainsi l’Inter Milan en 2010 avec 93% d’étrangers), ce livre ravira les amateurs de statistiques sportives.

Surtout, on retrouve clairement au fil des pages l’effet positif des législations européennes, qui ont forcé à une ouverture à laquelle les différents pays se refusaient, préférant discriminer des sportifs à qui on interdisait de travailler dans un autre pays pour leur nationalité. En effet, à de nombreuses reprises, la Cour de Justice des Communautés Européennes a déclaré les quotas de joueurs étrangers contraires au principe de libre circulation des travailleurs communautaires : arrêt Walrave et Koch en 1974 sur le cyclisme ou arrêt Donà de 1976 sur la réglementation de la fédération italienne de football interdisant purement et simplement les étrangers ! Mais bien sûr, c’est l’arrêt Bosman de 1995 qui a le plus marqué les esprits puisqu’il a établi l’illégalité des quotas de sportifs communautaires. Concrètement, depuis cet arrêt, il n’est plus possible de limiter le nombre de sportifs des nationalités concernées dans une équipe ou une compétition professionnelle. Quelques années plus tard, l’arrêt Malaja, dont l’auteur fut l’un des acteurs, élargit la décision aux sportifs non communautaires mais ressortissant d’États ayant signé des accords d’association ou de coopération avec l’Union européenne.

Autant de décisions qui viennent souligner que l’Europe, quand elle se veut simplement une garantie des libertés individuelles, de circulation en particulier, peut-être à l’origine de grandes avancées libérales en réduisant les discriminations légales.

Michel Pautot, Sport et nationalités, L’Harmattan, 2014, 276 pages.

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  • Une grande avancée libérale serait de distinguer le mot « sport » du mot « spectacle ». Nombre de valeurs sportives sont libérales, mais pour le spectacle, je ne crois pas qu’il en soit de même.

    • « Nombre de valeurs sportives sont libérales, »

      Ce qui laisse entendre que le libéralisme est élitiste, l’est-il vraiment à la base ? Est-ce souhaitable ?

  • Je dirais presque : et ?

    Faire un constat c’est bien, surtout que l’on peut se passe (aisément) de l’ouvrage en référence pour ça.
    La liberté de circulation est une excellente chose, les motivations de tous ces arrêtés sont par contre animés d’intentions purement mercantiles, sinon, tout le monde s’en foutait, ce que la société n’a pas su faire le sport l’a demandé en son nom pour des motifs exclusivement financiers.

    Cela permet aux clubs de faire leur marché de façon plus large, ce que ne déni pas le terme « mercato » (il sera noté que le mot n’est pas traduit de l’italien, si tout le monde sait de quoi il s’agit, le terme français « marché » serait beaucoup trop parlant, moins folklore, plus dénonciateur…).

    Autre paramètre, non abordé ici, ce sont les « déchets » humains (fatalement très jeunes) éjectés des phases de recrutement du sport moderne, d’où mon interrogation en liminaire.

    Le sport co divise la société, il la caste, il n’y a rien de libéral la dedans, tirer un constat sur la libre circulation ne suffit pas à dire que le sport se libéralise, bien au contraire.

  • Je trouve ça justement contraire à la liberté car les sportifs nationaux sont méprisés au profit de sportifs étrangers qui « rapportent » et « coûtent cher »…. Ce n’est plus du sport, c’est du business. Et ce n’est pas normal ! Dans les équipes amateurs nationales, il y a forcément des espoirs et des joueurs qui sont bien plus « sains » que les pros étrangers. On ne leur laisse aucune chance. Entre un Benzéma et un petit footballeur de province, il n’y a même pas photo alors que le pro est « imbuvable », intolérant, antipathique et ne joue même pas régulièrement. Les nations aimeraient bien voir promouvoir des membres de LEUR pays. Or la place est prise par ces parasites, ces « divas » qui veulent tout mais ne donnent pas grand chose et prennent la place des nationaux….

    • Dit comme ça, c’est de suite plus simple ! On se demande comment ne pas y a voir pensé avant.
      Je rajouterais une analyse ADN de chaque joueur afin de s’assurer que le sang soit bien pur et régional, faut pas déconner hein ! on est vite abusé par des imposteurs…

      Vais la garder aussi celle-la, faut juste que je trouve un peu de place sur mes étagères pas mal encombrées.

    • Ah ! Mais on vous a trouvé, c’est vous qui avez écrit le programme économique du FN !

      Règles, planification et préférence nationale, liberté contractuelle et de circulation, c’est juste pour s’essuyer les pieds par contre

      • « pour s’essuyer les pieds par contre »

        Je dois être pipi-caca parce que j’ai pensé à autre chose 🙂

  • Euh les fédérations sportives sont théoriquement des organisations privées et devraient être libre de fixer leur propre règle comme elles l’entendent.

  • Les commentaires sont fermés.

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