L’État n’a rien à faire dans nos assiettes

Non seulement le gouvernement n’a aucune décision à prendre concernant ce que nous mettons dans nos assiettes, mais il a largement prouvé qu’il est un abominable conseiller en la matière qui ne peut prendre que de mauvaises décisions. Les individus et leur famille sont bien mieux qualifiés que lui pour choisir ce qu’ils mangent.

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L’État n’a rien à faire dans nos assiettes

Publié le 19 juillet 2012
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Non seulement l’État n’a aucune décision à prendre concernant ce que nous mettons dans nos assiettes, mais il a largement prouvé qu’il est un abominable conseiller en la matière qui ne peut prendre que de mauvaises décisions. Les individus et leur famille sont bien mieux qualifiés que lui pour choisir ce qu’ils mangent.

Par Baylen J. Linnekin, depuis les États-Unis.

En mai, l’Institut pour la Justice a poursuivi la Caroline du Nord au nom du bloggeur Steve Cooksey. Cet État aurait violé la liberté d’expression de Cooksey en lui annonçant que son blog anti-diabète allait à l’encontre d’une loi locale interdisant de prodiguer des conseils diététiques aux personnes ne possédant pas le bon diplôme.

Cette semaine, Forbes rapporte qu’à l’origine de l’attaque juridique contre Cooksey se trouve l’Académie nationale de Nutrition et de Diététique (anciennement Association Américaine de Diététique). Le magazine dit s’appuyer sur des documents internes et indique que cette organisation pousse les États à mettre en place de puissantes commissions pour la diététique et la nutrition (comme celle qui a pris Cooksey pour cible en Caroline du Nord) « dans l’unique but de limiter la concurrence pour les diététiciens qui en sont membres ».

Si c’est la vérité, voilà qui est à la fois illégal et préoccupant. Mais pas vraiment surprenant.

C’est un exemple représentatif d’une tendance plus large. Après tout, aux États-Unis, de nombreuses régulations existent pour que les gens se dirigent préférentiellement vers certaines pratiques diététiques au détriment d’autres, souvent soutenues par de puissants et discrets intérêts pécuniaires et presque toujours sans aucune raison valable.

Par exemple, le gouvernement subventionne les fermiers pour qu’ils cultivent certains produits plutôt que d’autres (pensez au maïs, au soja, aux produits laitiers ou au sucre). Les politiques publiques favorisent certains aliments. Le programme « MyPlate » (qui était anciennement la pyramide alimentaire) du US Department of Agriculture, le label apposé sur les produits par l’Institut de Médecine, les licences fédérales et locales requises pour exercer le métier de diététicien sont autant d’exemples de cette tendance. Les régulations facilitent la production d’un certain type de nourriture et l’entravent pour d’autres. Par exemple, de multiples règlements fédéraux créent une barrière pour la production et la vente à petite échelle des viandes, fruits et végétaux, ce qui pose souvent d’énormes problèmes d’échelle et concentre le marché dans les mains d’un petit nombre de gros producteurs.

Un tel système de préférences serait aberrant même si on pouvait le qualifier de réussite. Après tout, ce n’est pas au gouvernement de promouvoir ou restreindre certaines manières de se nourrir. Mais quand on considère que les raisonnements scientifiques derrière ces interventions sont encore souvent discutés, incertains voire simplement faux, beaucoup en concluent que les résultats ont été rien de moins que catastrophiques.

Le mois prochain, je me trouverai au Ancestral Health Symphosium 2012 à la faculté de Droit de Harvard. Le groupe auquel je participerai (les racines du mécontentement : entraves réglementaires à la pratique du régime ancestral) se penchera sur les nombreuses et souvent terribles manières dont le gouvernement fausse les choix diététiques des américains.

La lutte de Steve Cooksey en Caroline du Nord et le procès qui s’en est suivi sont très présents dans mon esprit tandis que je rédige ma présentation. Pourquoi ?

Cooksey n’est pas uniquement un militant anti-diabète. Il s’agit aussi d’un blogueur paléo, et le symposium AHS réunira certains des principaux praticiens et promoteurs mondiaux du paléo. Pour ceux d’entre vous qui ne connaîtraient pas ce terme, les défenseurs du régime paléo (ou ancestral) privilégient les aliments qu’ils pensent se rapprocher le plus de ce que les êtres humains ont mangé pour évoluer durant l’ère paléolithique. Cela inclut la viande, les fruits et les légumes (les bonnes calories) et exclut les céréales, les huiles industrielles et le sucre ajouté (les mauvaises calories).

Les tenants du régime paléo, dont l’auteur et scientifique Gary Taubes, apportent des éléments tendant à prouver que l’explosion moderne de l’obésité pourrait avoir pour origine les politiques diététiques combattant les bonnes calories en faveur des  mauvais carbohydrates. Dans une interview fascinante l’année dernière avec l’économiste Russ Roberts de l’université George Mason, Taubes explique que le gouvernement fédéral n’avait, pour ainsi dire, aucune base scientifique pour imposer un régime high-carb aux Américains, et des raisons pour faire exactement l’inverse. Et comme le gouvernement a ignoré le sens commun pendant des décennies, les programmes publics pour nous remettre en forme nous ont arrondi le ventre.

L’apparition de Taubes dans le podcast de Roberts consacré au marché libre (EconTalk) peut sembler surprenante, mais ce n’est qu’une nouvelle preuve que le régime paléo plait aux militants du « esprit libre, marché libre ». Si un groupe a été séduit (au moins anecdotiquement) par ce régime ces dernières années, c’est bien celui des libertariens (un phénomène que d’autres ont noté).

Comment l’expliquer ?

« Le régime approuvé par le gouvernement, incarné dans la pyramide alimentaire, ne peut exister que grâce à un département de l’agriculture aux ordres », affirme Jerry Brito, adepte récent du régime paléo, Senior Research Fellow et directeur du Technology Policy Program au Mercatus Center.

Britto explique que la désinformation et les subventions sont sans doute responsables de l’attirance grandissante de plus en plus de libertariens vers le paléo. Il ajoute : « En outre, je crois que les libertariens sont en général sceptiques et non conformistes, et qu’adopter ce régime est aussi un doigt d’honneur au système et ses recommandations. »

« Je vois deux courants de pensée qui relient joliment la philosophie libertarienne et le mode de vie paléo », dit Michael Ostrolenk, conseiller politique de l’Ancestral Health Society (co-sponsor de la conférence à Harvard) et coach à la SEALFIT’s Unbeatable Mind Academy, dans une remarque qui fait écho à celle de Brito.

« Le premier est la mentalité anti autoritaire et non conformiste du mouvement paléo, qui rejoint ce que je comprends de la pensée libertarienne aux États-Unis. Les deux visions du monde rejettent la version officielle de la manière dont les gens devraient penser ou vivre leur vie. En second lieu, les paléos tendent à ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain et essaient de faire la synthèse entre la sagesse ancienne et la science moderne, tentative d’intégration que je retrouve chez beaucoup de mes amis aux penchants libertariens. »

Ce serait une erreur de penser que seuls les libertariens et ceux qui pratiquent le régime paléo sont touchés par des politiques diététiques fédérales biaisées et incompétentes. Un autre groupe, qui s’oppose de bien des manières et totalement aux carnivores paléos, rencontre des problèmes similaires : les végétariens.

« En subventionnant à coups de milliards pour faire baisser artificiellement le coût de production de la viande, des œufs et du lait, le gouvernement fédéral contribue à propager la fausse impression que les produits issus de végétaux sont plus chers que les produits issus d’animaux, » dit Paul Shapiro, vice président de la Farm Animal Protection with the Humane Society of the United States. « Partout dans le monde, c’est le contraire qui est vrai : les repas de viande réguliers sont réservés aux nantis. »

Il a raison. De même que Ostrolenk, Brito et Taubes.

Il est quasiment impossible de mettre en place des politiques fédérales qui avantagent également les adeptes du régime paléo et les végétariens. Lequel des deux le gouvernement devrait-il choisir ? Aucun, bien entendu. Non seulement le gouvernement n’a aucune décision à prendre concernant ce que nous mettons dans nos assiettes, mais il a largement prouvé qu’il est un abominable conseiller en la matière, qui ne peut prendre que de mauvaises décisions. Les individus et leur famille sont bien mieux qualifiés que lui pour choisir ce qu’ils mangent.

On n’a pas besoin d’avoir adopté le régime paléo comme moi pour penser que les politiques diététiques du gouvernement sont détraquées. Ce n’est pas un principe paléo. Ce n’est pas non plus un principe végétarien, ni une solution unique aux régimes kasher, halal, végétalien, cru, macrobiotique, Atkins, Pritikin ou South Beach. Non, ce n’est rien d’autre que du sens commun. C’est gratuit et permis à tous sans restriction.

—-
Article original titré Fight For Your Right to Go Paleo, publié le 14.07.2012 sur reason.com. Reproduit avec l’aimable autorisation du site. Traduction : Lancelot/Contrepoints.

(*) Baylen J. Linnekin est un avocat, directeur de Keep Food Legal, une organisation qui milite en faveur de la liberté alimentaire.

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  • Le problème « diététique » aux USA dépasse de loin des questions de « business » et de « monopole médical » ( même si celles -ci y sont très importantes, évidemment).
    Plus fondamentalement, il existe aux USA une vieille tradition « collectiviste- hygiéniste », issue des tendances « dures » du protestantisme moral ( songez aux putitains anglais qui essayèrent de faire clore les théâtres, et persécutèrent Shakespeare), qui essaient, et actuellement parviennent, à imposer un ordre moral ( c’est à dire une répression de la sexualité au sens large), via de très classqiues prohibitions ( relayées d’ailleurs par des femmes; ex: Michèle. Obama, devenue une rombière parvenue, qui a pris la tête de la croisade » anti-fat »…pas de beurre dans la nourriture, j’ai vécu ça dans un resto aux US);

    Le problème est donc celui d’un puritanisme mondial dont les USA, tendance archéo protestante, sont le fer de lance, la facette alimentaire n’en étant qu’un des chevaux de Troie.

    Selon une opinion strictement personnelle mais assumée, l’augmentation du nombre d’obèses aux USA ( mais pas seulement là bas) est un problème de non-jouissance, de perte du sens du plaisir, de l’art de vivre tout simplement, avatar d’un puritanisme collectiviste ( pléonasme).

  • @protagoras :
    Vision intéressante ! Mais en fRance aussi nous avons nos propres peines-à-jouir, entre la repentance forcée et des dérives hygiénistes similaires à celles que vous dénoncez – où le rapport à la nourriture devient malsain: tout est toxique ou presque, il faut se « détoxifier » très régulièrement, les aliments ne sont plus qu’un moyen détaché de toute fin personnelle, et ne sont plus considérés que dans la mesure où ils soutiennent (ou pas) une idéologie écologiste et internationale-socialiste.

    J’avais d’ailleurs noté il y a quelques années que les productions télévisuelles françaises sont envahies de comportements de ce type…

    • @Jesrad
      Celà va de soi: cette idéologie hygiéniste ( monde sans tabac, 5 fruits et légumes, le « sport évite la récidive de cancer » etc..) nous est imposée, et entre dans le cadre du « grand village mondial », tout à fait semblable au « meilleur des mondes », par des méthodes « orweliennes »;

      Il ne faut pas, à mon avis, s’étonner de voir survenir des révoltes individuelles ( fut -ce par le suicide, le délire, les dépressions de toutes sortes, l’amok meurtrier etc..) ou collectives; tout simplement parce que les humains, dans leur immense majorité, résistent tôt ou tard au fait que l’on tente de tuer en eux tout désir non préformaté.

  • Et après, on va encore dire que le libéral est un homme du paléolithique… 🙂

  • « « En subventionnant à coups de milliards pour faire baisser artificiellement le coût de production de la viande, des œufs et du lait, le gouvernement fédéral contribue à propager la fausse impression que les produits issus de végétaux sont plus chers que les produits issus d’animaux, » dit Paul Shapiro, vice président de la Farm Animal Protection with the Humane Society of the United States. « Partout dans le monde, c’est le contraire qui est vrai : les repas de viande réguliers sont réservés aux nantis. » »

    IL A TOTALEMENT TORT !

    Les subventions à la production de viande et à l’agriculture toute entière AUGMENTENT incroyablement les coûts de production et de les diminuent pas bien entendu ! Les subventions à la production d’énergie par la biomasse augmente le prix de la paille… les subventions à la production de céréales augmentent le prix des terrains agricoles… les subventions augmentent le prix des machines agricoles…

    Il suffit de voir les conséquences des réformes agraires réalisées en NZ en 1983/1985… des coûts de production incroyablement diminués avec une productivité en forte hausse suite à l’arrêt de TOUTES les subventions !

    Sans oublier le rôle destructeur de la PAC qui a garanti un niveau de prix aux producteurs et du coup entraîné des excédents à la production… excédants qui 60 ans plus tard sont impossibles à résorber sans mettre 50% des fermiers en faillite.

    Ce sont dons bien les prix de vente des produits qui sont maintenus artificiellement bas par les subventions et non les coûts de production!

    Sans oublier que les produits issus de végétaux sont incroyablement subventionnés aussi… à commencer par tout ce qui est BIO….

    • Tout à fait! Nous en France nous avons la chance d’avoir un état qui subventionne la production de viande ET celle des fruits et légumes donc nous avons la joie de constater que le le prix de TOUT les produits agricole sont devenu exorbitant…

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