Voyez plus loin que les analyses à court terme !

Il n’y a pas que Warren Buffett dans la vie ; l’Europe compte elle aussi des investisseurs de talent – qui, bien que plus discrets, ont beaucoup à vous apprendre.

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Voyez plus loin que les analyses à court terme !

Publié le 30 août 2019
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Par Christian Hubbs.

« La clef consiste à attendre, et nous sommes reconnus pour savoir le faire. »

– Francisco Garcìa Paramés

Francisco Garcìa Paramés – parfois surnommé le Warren Buffett espagnol – est maître dans l’art de sélectionner des actions sous-évaluées. Il reste pourtant encore largement méconnu du grand public. Cela pourrait changer avec la publication de son tout premier livre, Investir à long terme.

Les trois premiers chapitres de son livre présentent sa biographie, retraçant son parcours depuis son entrée à l’université, où il n’était qu’un étudiant moyen, à son premier emploi tout en bas de l’échelle chez El Corte Inglés (une importante chaîne de grands magasins en Espagne), avant qu’il ne décide d’intégrer 15 mois plus tard un MBA qui va changer le cours de son existence.

Ce parcours l’a conduit à s’intéresser pour la première fois à l’investissement et à travailler pour la société espagnole Bestinver, où il a débuté en tant qu’analyste et a gravi les échelons pour devenir gérant de fonds, jusqu’à ce qu’il décide de quitter Bestinver afin de créer son propre fonds d’investissement.

Ces premiers chapitres vous permettront de mieux comprendre le parcours intellectuel de Paramés, avec la découverte du livre de Peter Lynch Et si vous en saviez assez pour gagner en bourse et de l’école autrichienne d’économie, ainsi qu’au travers des décisions d’investissements qu’il a prises en tant que gestionnaire d’actifs et de la façon dont il sélectionnait les actions dans lesquelles il investissait.  […]

Philosophie d’investissement

La seconde section du livre de Paramés – qui comprend environ les deux tiers du texte restant – est dédiée à sa philosophie et à sa méthode d’investissement.

Le premier chapitre de cette section met en avant l’influence des économistes de l’école autrichienne, qui lui ont apporté des idées et un cadre d’analyse cohérents avec une stratégie d’investissement dans les actions sous-valorisées (investissement par la valeur, ou value investing).

Il s’agit d’un élément-clef, car une telle stratégie n’a pas pour objectif de prévoir l’évolution des cours boursiers. À la place, les investisseurs qui suivent cette stratégie pensent pouvoir identifier des entreprises dont les fondamentaux économiques sont solides mais qui restent sous-évaluées par le marché, acheter ses actions à un prix attractif puis attendre patiemment.

De la même façon, les économistes de l’école autrichienne ne cherchent pas à prévoir le taux de croissance du PIB de l’année suivante, le taux de chômage, le taux de l’inflation ou toute autre donnée statistique inlassablement reprise dans les grands médias.

Ils s’appuient plutôt sur leurs théories pour réaliser des prédictions économiques à long terme. Leur timing est dans le meilleur des cas imprécis, mais les événements prévus finissent par se produire, conformément aux théories émises par Mises, Rothbard et bien d’autres.

Ces théories offrent un cadre d’analyse puissant qui fonctionne sur le même horizon de temps que celui d’un investisseur dans les actions sous-évaluées, ce qui permet de générer des rendements à long terme en se protégeant des erreurs de politique monétaire et des bulles financières.

Dix points essentiels

Paramés résume en 10 points clefs les idées essentielles de l’école autrichienne d’économie appliquées à l’investissement :

  1. Par définition, les marchés fonctionnent.
  2. Les marchés ne sont jamais en situation d’équilibre.
  3. La croissance économique est basée sur l’amélioration de la productivité, financée par l’épargne.
  4. Investir nécessite d’épargner, c’est-à-dire de renoncer à consommer immédiatement, afin d’augmenter la productivité et pouvoir ainsi consommer davantage dans le futur.
  5. La manipulation des taux d’intérêt par les banques centrales entraîne des cycles d’expansion économique et de récession.
  6. La déflation est la situation naturelle d’une économie.
  7. L’absence de lien entre les devises et l’or – ou toute autre matière première similaire indépendante des décisions politiques – implique que leur valeur est vouée à décliner par rapport aux actifs réels.
  8. Les prix des biens et services – qui dépendent de ce que les consommateurs sont prêts à payer – déterminent le niveau des coûts et non l’inverse.
  9. Les coûts de production des biens et services sont subjectifs, ce qui signifie que toute structure de production est susceptible d’évoluer en fonction des conditions économiques.
  10. Les modèles économiques – quels que soient leurs objectifs – sont inutiles.

Pour chacun de ces points, Paramés donne des exemples concrets d’applications dans le domaine de l’investissement, issus de sa propre expérience. Grâce à cette contextualisation, le lecteur est en mesure de comprendre plus profondément comment la compréhension des mécanismes économiques peut avoir un impact direct sur leur épargne et leurs décisions d’investissement.

Comment investir

Au-delà de son cadre d’analyse économique, Paramés consacre plusieurs chapitres à l’explication de sa méthode d’investissement et d’analyse des entreprises, et pourquoi il procède tel qu’il le fait.

Un passage important du livre détaille son analyse des données historiques concernant le rendement à long terme des actions par rapport aux autres actifs, ainsi que la façon dont il conçoit la notion de risque. Il affirme que les investisseurs devraient privilégier les actions par rapport à tout autre actif. Pour cela, il s’appuie sur les données des 200 dernières années et montre la progression régulière des indices boursiers par rapport aux obligations, aux bons du Trésor, à l’or et à l’épargne liquide.

De mon point de vue, le fait d’analyser les données sur une période de 200 ans conduit à sous-estimer l’importance actuelle de l’or en tant que classe d’actif ; cependant, il est crucial de revenir à cette vision à long terme.

C’est particulièrement vrai pour les investisseurs qui suivent une stratégie de value investing, étant donné que la dernière décennie depuis la crise financière a été difficile pour eux.

Cette vision à long terme est également en ligne avec la façon dont Paramés conçoit la notion de risque qui, selon lui, ne dépend pas du niveau de la volatilité d’un actif, mais plutôt de la probabilité pour un investisseur de supporter des pertes s’il décide d’investir dans un actif donné.

Comme il le démontre dans son livre, cette vision du risque joue en faveur des actions, étant donné que leur rendement à long terme a toujours été positif.

[…] L’un des chapitres les plus intéressants arrive à la fin du livre, lorsque Paramés discute de la psychologie humaine.

Nous devons tous combattre des biais psychologiques profondément ancrés en nous, et les investisseurs dans les actions sous-évaluées peut-être plus que les autres.

Cette approche nécessite en effet d’être particulièrement patient et de faire preuve d’objectivité. Nous pouvons nous brûler les doigts en vendant les actions d’une société solide trop tôt, ou au contraire en tombant amoureux des sociétés que nous avons sélectionnées et rester accrocher à nos actions alors que nous les avions mal analysées.

Il est essentiel de procéder régulièrement à un rappel, tel que celui prodigué par Paramés, des angles morts de la psychologie humaine afin de rester attentifs et conscients de nos propres failles en tant qu’investisseurs.

Un livre à ajouter à votre collection d’ouvrages sur l’investissement

L’ouvrage de Paramés représente une contribution unique à la littérature dédiée à l’investissement par la valeur. Bien que les idées qu’il présente ne soient pas nécessairement nouvelles, il apporte sa propre analyse des principes développés par les pionniers de l’investissement value.

Plus fondamentalement, il incorpore de façon explicite le point de vue de l’école autrichienne d’économie dans ses stratégies d’investissement et ses analyses (une approche qui, à ma connaissance, n’a été proposée que dans deux autres ouvrages sur l’investissement, mais aucun d’entre eux ne formule une stratégie exclusivement basée sur la sélection d’actions sous-évaluées).

Selon moi, c’est un angle d’analyse qui était resté trop longtemps absent de la communauté des investisseurs spécialisés sur les actions sous-évaluées. [La] plupart ont adopté le point de vue de Warren Buffett — qui est correct dans une certaine mesure — selon lequel les économistes ne sont d’aucune utilité pour les investisseurs.

Le problème, c’est que Warren Buffett, ainsi que la plupart des investisseurs qui suivent une stratégie similaire, semblent ne connaître que les économistes conventionnels qui cherchent exclusivement à prévoir l’évolution de la conjoncture économique sur les 12 prochains mois.

Leurs modèles mathématiques sont totalement inadéquats et ne sont d’aucune autre utilité que de faire perdre du temps aux investisseurs à la recherche de rendements largement supérieurs à la moyenne sur le long terme.

Enfin, au-delà du fait d’avoir incorporé l’approche de l’école autrichienne, Paramés met en avant certaines opportunités uniques disponibles sur les marchés européens.

[…] Pour résumer, je vous recommande fortement de vous procurer Investir à long terme. Ce sera pour vous une lecture enrichissante, que vous soyez encore novice ou un investisseur expérimenté dans les actions sous-évaluées, en particulier si vous vous intéressez à l’école autrichienne d’économie et aux marchés financiers européens.

 

Article traduit avec l’autorisation du Mises Institute. Original en anglais ici.

Pour plus d’informations, c’est ici 

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  • Intéressant, très juste dans l’absolu mais est ce encore applicable / d’actualité avec le capitalisme de connivence et les QE ?

    En particulier sur les 10 points évoqués
    – sur les marché ok, Sauf psycho humaine au sens large et impact des normes / réglementations qui peuvent les impacter fortement
    – sur l’épargne et l’investissement, Quid impact des taux 0 et QE
    – sur la manipulation des taux, Discutable car contraire à 2 marché en équilibre et à un des buts de la manipulation
    – que faut il entendre par coût de production subjectif, peut être plutôt que la structure de production doit s’adapter au marché ou disparaître

    • Cela donne encore plus envie de découvrir le livre.
      La question que je me pose est que se passera t-il si tous les investisseurs suivent son approche ?

      • Que tous les investisseurs suivent cette approche, c’est de la pure spéculation, donc exactement ce qui est inutile pour réussir, si j’ai bien compris 🙂

      • @indivisible

        Un livre très intéressant qui ne doit cependant pas faire oublier l’approche naturellement moutonnière d’une majorité d’ investisseurs qui ont pour habitude de surréagir non pas à la lecture d’un livre,mais au moindre » son du canon ».
        Par ailleurs ont ils d’autres choix puisqu’il est impossible pour l’investisseur lambda de prévoir toute » exubérance irrationnelle des marchés » provoquée par une possible crise financière ou autre, bouleversant nécessairement les méthodes d’évaluation des entreprises ?
        il semble bien que la diversification soit le maître mot en matière de placements financiers car il n’existe pas de martingale.

  • « La croissance économique est basée sur l’amélioration de la productivité, financée par l’épargne. Investir nécessite d’épargner, c’est-à-dire de renoncer à consommer immédiatement, afin d’augmenter la productivité et pouvoir ainsi consommer davantage dans le futur. »

    Ces deux phrases, à apprendre par cœur, résument le fonctionnement de l’économie mieux qu’un long discours.

    Elles permettent de comprendre pourquoi les politiques des banques centrales, faites de taux nuls (zirp) et d’impression monétaire (QE), induisent la récession à terme. Le phénomène peut déjà s’observer à travers la baisse tendancielle des investissements de croissance des entreprises (growth capex). Il est temporairement masqué par l’hyperinflation des actifs, sous l’effet des flux monétaires artificiels, donnant l’illusion de la prospérité.

    La guerre commerciale ou la guerre des monnaies sont des facteurs déclenchants éventuels d’une crise mais n’en sont pas la cause profonde. En sacrifiant l’épargne et l’investissement de long terme pour sauver les Etats obèses impécunieux, les BC sont responsables d’avoir posé les conditions de la récession à venir.

  • Sur le très long terme, l’auteur a riaosn, mais sur des périodes plus courtes, l’investissement immobilier a pu dégager des profits importants: l’immobilier parisien a doublé en une décennie, par exemple.

    • Certes.
      cependant, l’effet de richesse généré par cette hausse des prix immobiliers de ce que vous vendez à Paris est effacé par la hausse de ce que vous devez acheter.
      dit autrement, si votre bien a vu sa valeur doubler, lorsque vous le vendez vous avez deux fois plus d’argent mais devez aussi en dépenser deux fois plus pour en acheter un autre.
      l’effet de richesse ne se transforme en richesse que si vous quittez le marché (pour vous installer dans la Meuse, par exemple, où effectivement vous aurez un pouvoir d’achat immobilier de prince saoudien).

  • Sans doute un livre interessant mais surement pas un moyen de s’enrichir ,la methode ne suffit pas il faut l’intuition.. ou avoir de gros capitaux au depart ….et etre riche a 80 ans… ça profite qu’aux maisons de retraite ^_^

    • Les gens qui travaillent dans les maisons de retraites ne méritent-ils pas leurs salaires ?

    • @reactitude

      Les besoins financiers existent quelque soit l’âge qui est toujours relatif, contrairement à une idée reçue, et il conviendrait de ne pas l’ignorer.

  • Les commentaires sont fermés.

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