Assistons-nous à une dérive croissante, étatiste et radicalement anti libre-marché, de la part de l’OCDE ? On peut se poser la question au vu de ses récentes publications.
L’OCDE (Organisation de coopération et développement économiques) regroupe la plupart des pays développés à économie de marché (38 membres). Elle emploie de nombreux experts et publie des études économiques, des analyses, des prévisions, et formule des recommandations de politique économique. Ses statistiques économiques (inflation, emploi, chômage, croissance, prééminents obligatoires…) sont en général fiables et permettent des comparaisons internationales. Ses prévisions économiques sont souvent intéressantes, mais largement biaisées par des a priori keynésiens, qui sont aussi présents dans les études par pays. Ce biais se retrouve dans ses recommandations de politique économique, même si l’on y a parfois quelques recommandations d’économie de l’offre ou quelques critiques du laxisme budgétaire. L’ensemble n’est guère libéral, mais plutôt « main stream ».
Cependant, de plus en plus, dans un grand nombre d’analyses et de recommandations, l’OCDE dérive vers des études au mieux « politiquement correctes », et le plus souvent rejoignant les thèses les plus opposées au libre marché, ce qui est paradoxal pour un organisme regroupant… les économies de marché. Cela n’empêche pas certains de présenter l’OCDE « comme une institution favorable au néo-libéralisme » (Wikipédia), ce qui est évidement faux, sauf à concevoir le libéralisme comme opposé au libéralisme.  C’est le cas en matière d’environnement, où l’OCDE reprend tous les thèmes en faveur de l’écologie politique, pour dénoncer le réchauffement climatique. Il suffit de citer le titre de son communiqué de presse du 7 novembre 2024 : « Les progrès accomplis au regard des politiques climatiques nationales restent insuffisants pour atteindre les objectifs 2030 ». Toutes les thèses écologiques sont là  : les politiques pour le climat, les objectifs internationaux à atteindre coûte que coûte, la lutte contre le réchauffement climatique, priorité des priorités, et mère de toutes les batailles. Cette passion pour l’écologie politique est hélas banale et partagée par beaucoup.
Plus intéressante – et peut-être encore plus dangereuse – est la question des politiques en faveur du « bien-être ». Le dernier communiqué de l’OCDE sur cette question est en date du 5 novembre 2024. Son titre est déjà tout un programme et en dit long sur ses arrière-pensées idéologiques : « L’OCDE présente son rapport Comment va la vie ? et sa plate-forme sur le bien-être à l’ère du numérique au service d’un bien-être plus inclusif et plus durable pour tous ». Ce rapport 2024 « est la publication phare de l’OCDE sur le bien-être des populations, de la planère et des générations futures. Le rapport a été présenté aujourd’hui (5 novembre) dans le cadre du 7e forum mondial de l’OCDE sur le bien-être, intitulé Renforcer les approches en matière de bien-être dans un monde en mutation ». Il ne s’agit pas seulement de fournir des résultats en matière de bien-être et « de mettre en évidence les enjeux sociaux et les défis en matière d’inclusion et de durabilité », mais surtout « d’orienter les responsables publics vers les domaines où leur action est nécessaire » : en clair, de proposer aux gouvernements des pays membres des mesures étatiques pour favoriser le « bien-être ».
Il y a là un bel exemple de la « présomption fatale » des hommes politiques. Les débats sur l’économie du bien-être ne sont pas nouveaux pour les économistes, depuis Bentham ou Pareto, jusqu’à Arthur Pigou il y a un siècle, et leurs développements ultérieurs, y compris sur « l’économie du bonheur » et la notion de BNB (Bonheur national brut). La première erreur est de prétendre mesurer le bien-être et, a fortiori, le bonheur. Ces notions sont totalement subjectives et varient d’un individu à l’autre. L’OCDE fournit des indicateurs sur la solitude, la précarité énergétique ou l’exposition à des températures extrêmes ; cet organisme mesure par exemple le pourcentage de personnes « qui éprouvent beaucoup de tristesse » (20,7%) ou encore « qui éprouvent beaucoup d’anxiété » (36,4%) ou des « douleurs physiques importantes » (28,1%). Mais aucune statistique ne peut mesurer ces réalités totalement subjectives, variant d’un individu à l’autre et d’un moment à l’autre et les termes « beaucoup de tristesse » ou « beaucoup d’anxiété » n’ont aucune réalité scientifique, sans parler de la mesure du bonheur !
Le plus grave est de passer de ces recherches fort discutables sur le bien-être et sa mesure vers des politiques étatiques en matière de bien-être, ce que propose l’OCDE : c’est l’Etat du bien-être (Welfare-State), qui débouche sur l’Etat-Providence cher à Beveridge. Mais on va là encore plus loin, car il ne s’agit plus seulement pour l’Etat de répondre aux risques de la vie (compenser un problème), mais d’aller jusqu’au plus intime de l’individu, son bien-être et son bonheur. La présomption fatale est à son comble, car il y a là un risque totalitaire : puisqu’on ne peut mesurer le bien-être objectivement, c’est l’Etat qi va en définir les critères et imposer, par ses politiques, sa conception du bien-être et du bonheur. On en a des indices avec certains des termes qu’utilise l’OCDE. Ce bien-être devrait être « plus inclusif », terme qui recouvre bien des réalités différentes, dont certaines peuvent être légitimement discutées et chacun pourra avoir sa propre conception de cette « inclusivité » et de ses limites. De même, ce bien-être devrait être « plus durable », ce qui nous renvoie au « développement durable », issu du rapport Brundland (1987), notion floue et discutable, qui sert en général de paravent à toutes les politiques étatistes anti-libérales, opposées au libre marché.
Mais l’OCDE ne vise pas seulement le bien-être des individus (des « populations »), mais aussi, comme indiqué dans son communiqué, le bien-être « de la planère et des générations futures ». La planère n’est pas une personne ; elle n’éprouve pas de bien-être ou d’angoisse ou de douleur ; seules les personnes éprouvent ces sentiments et la planète est faite pour l’homme et non l’homme pour la planète. Si on doit prendre soin de la planère, c’est pour le bien de l’homme et non celui de la planète elle-même, notion vide de sens. Quant aux générations futures, il est légitime de s’en soucier, mais mesurer le bien-être de personnes qui n’existent pas encore n’a guère de sens. Quant à l’héritage qu’on va leur laisser, il est paradoxal de voir les hommes politiques se soucier de certaines ressources non renouvelables, comme le pétrole, dont les générations futures n’auront pas besoin, car elles auront trouvé de nouvelles sources d’énergie, et accumuler, par leurs dépenses publiques inconsidérées, les dettes que devront rembourser les générations futures, ce dont ils ne semblent guère se soucier. Si les générations futures sont menacées, c’est bien par les politiques actuelles de l’Etat Providence: les hommes politiques « volent » en quelque sorte les générations suivantes en leur imposant, via la dette, le paiement de nos folles dépenses d’aujourd’hui.
L’OCDE annonce vouloir « replacer l’humain au cœur des processus décisionnels » et préconise pour cela « des politiques étayées par des données probantes », donc de faire appel à l’Etat, contradiction évidente. Bien entendu, les « sentiments de douleur, d’anxiété, de tristesse, de solitude et de satisfaction à l’égard de l’existence » sont des réalités aussi vieilles que le monde et varient d’un moment à l’autre ou d’une personne à l’autre. Ce sont des réalités humaines importantes pour la vie de chacun de nous, mais en quoi relèvent-elles des politiques étatiques, sauf à mettre en place un Etat totalitaire qui pense et choisit à notre place ?
Dès 1891, Léon XIII nous mettait déjà en garde : « Ainsi, en substituant à la providence paternelle la providence de l’Etat, les socialistes vont contre la justice naturelle et brisent les liens de la famille » (Rerum novarum, § 11). « Et qu’on n’en appelle pas à la providence de l’Etat, car l’Etat est postérieur à l’homme. Avant qu’il pût se former, l’homme déjà avait reçu de la nature le droit de vivre et de protéger son existence » (§ 6-2). Alexis de Tocqueville l’avait déjà expliqué dans De la démocratie en Amérique (1835) : « Au-dessus de ceux-là s’élève un pouvoir immense et tutélaire, qui se charge seul d’assurer leur jouissance et de veiller sur leur sort. il est absolu, détaillé, régulier, prévoyant et doux. Il ressemblerait à la puissance paternelle si, comme elle, il avait pour objet de préparer les hommes à l’âge viril ; mais il ne cherche, au contraire, qu’à les fixer irrévocablement dans l’enfance ; il aime que les citoyens se réjouissent, pourvu qu’ils ne songent qu’à se réjouir. Il travaille volontiers à leur bonheur ; mais il veut en être l’unique agent et le seul arbitre ; il pourvoit à leur sécurité, prévoit et assure leurs besoins, facilite leurs plaisirs, conduit leurs principales affaires, dirige leur industrie, règle leurs successions, divise leurs héritages, que ne peut-il leur ôter entièrement le trouble de penser et la peine de vivre ? ». Moins de deux siècles après, ces craintes de Tocqueville ou de Léon XIII sont devenues des réalités.
La chaîne YouTube “Dirty Biology” a récemment sorti une vidéo s’interrogeant sur les études sur “le bonheur”, et expliquant en quoi le fait que la notion de “bonheur” est éminemment subjective n’est pas un problème qui permettrait de disqualifier ces études.
Je crois qu’il n’a pas envisagé, dans sa vidéo, la situation d’un État qui essaierait d’intervenir sur ce point, son questionnement de départ était plutôt lié au bonheur mesuré en Ukraine, qui est relativement élevé malgré la situation géopolitique locale.
Pour la question de l’État, Jean Van Hamme l’avait évoquée avec brio dans une bande dessinée dans les années 80, qui est ressortie récemment sous forme d’intégrale : SOS Bonheur. Dont il semble malheureusement que nos dirigeants ont cru que c’était un manuel de bonne gouvernance…
Rien que la phraséologie de l’OCDE trahit l’influence de la gauche écologique! Rien à voir avec une économie de marché!
La pensée mainstream envahit tous les univers politiques médiatiques culturels syndicaux associatifs internationaux…
Les occidentaux ont adopté la culture bisounours….. qui les rend égocentriques mous faibles…….🤣🤣🤣🤣
L’OCDE combien de participants ? 38……aucun intérêt comme la plupart des organisations “internationales” à la botte de quelques illuminés.