États-Unis : un accord bipartisan inquiétant contre Tik Tok

Un accord bipartisan sur tik tok (pour différents motifs) risque de dérailler l’existence même d’Internet.

Partager sur:
Sauvegarder cet article
Aimer cet article 1
TikTok-vor-Menschen by Christoph Scholz

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

États-Unis : un accord bipartisan inquiétant contre Tik Tok

Publié le 31 mars 2023
- A +

Comme je l’ai montré récemment, il semble n’y avoir qu’un parti unique au Congrès à Washington. Quand ils ne proposent pas de « solutions » qui sont un mal net, les politiciens se mettent d’accord pour rapprocher les États-Unis d’un État totalitaire – pensez au Patriot Act, dont l’exposition au grand jour a valu la prison et l’exil contre des dénonciateurs comme Chelsea Manning et Julian Assange.

Il est donc ironique de voir les politiciens vouloir bannir le média social Tik Tok, qu’ils accusent… d’épier ses utilisateurs. Oh, il est certain que cette application, comme ses compétitrices, est hautement addictive avec ses algorithmes conçus pour captiver notre attention.

Mais contrairement aux autres, Tik Tok semble sous le contrôle direct du gouvernement chinois et capable d’espionner ses utilisateurs dans les moindres détails. C’est pourquoi des gouvernements partout sur la planète ont banni sur leurs appareils officiels pour des raisons de sécurité.

Cela dit, bannir Tik Tok pourrait créer un précédent et donner carte blanche aux politiciens de s’immiscer encore plus dans nos vies. Comme l’ont montré les Twitter Files, les médias sociaux se sont coordonnés avec les officiels pour censurer de l’information compromettante (Hunter Biden) ou supposément fausse (les dangers de *certaines* injections).

Encore là, un accord bipartisan (pour différents motifs) risque de dérailler l’existence même d’Internet. Les conservateurs veulent rendre responsables de la censure des médias sociaux, alors que les Démocrates veulent les forcer à redoubler d’effort pour censurer encore plus l’information qui les importune.

Main de fer dans un gant de ronces

C’est pourquoi tout libéral qui se respecte doit s’opposer à la présente loi, qui n’aurait strictement rien à voir avec la sécurité nationale, dixit Alexandria Ocasio-Cortez. Oui, malgré ses idées saugrenues sur l’environnement, « AOC » peut en avoir des sensées – nonobstant le démarchage de Tik Tok envers le caucus hispanique.

Selon la représentante de New York, les politiciens reçoivent toujours un compte rendu des faits quand un enjeu de sécurité est à l’ordre du jour. Or, rien de tout ça ne s’est produit pour le projet de loi baptisé RESTRICT, affirme-t-elle. La loi est tellement aberrante que ce commentateur conservateur, sans doute président de son anti-fanclub, lui donne son appui. Entre autres, ce projet de loi

  • Permet au secrétaire au Commerce de réviser et interdire des transactions entre particuliers et « ennemis étrangers » (non définis). Il pourra également s’adresser à tout risque sur toute transaction (y compris dans le futur) sous juridiction des États-Unis
  • Permet également au secrétaire de désigner n’importe quel gouvernement étranger comme ennemi s’il menace la sécurité du pays sans préavis au Congrès. Seule une résolution conjointe de ce dernier peut renverser une telle désignation
  • Couvre absolument tous les moyens de communication imaginable : Wifi, satellite, réseau cellulaire, nuage, application, intelligence artificielle…
  • Semble permettre à l’exécutif de créer une liste d’étrangers « dangereux » – seulement des étrangers, « naturellement » – contre qui tout semble permis, sans la moindre responsabilité
  • Fait fi du IVe amendement contre les recherches abusives et permet des fouilles contre toute suspicion d’importation de produits et services interdits par RESTRICT
  • Peut imposer des amendes d’au moins 250 000$ – jusqu’à un million au criminel – une peine de 20 ans de prison et la saisie des biens
  • A l’opacité du plomb sous les rayons X en étant exclu de toute demande d’information

Certains affirment aussi que le projet pourrait criminaliser les VPN, connexions simulant un endroit autre que celui où l’on se trouve. Considérant le langage vague utilisé, et malgré les assurances d’un des politiciens à l’origine de cette loi, il y a de quoi s’inquiéter. Après tout, l’État-espion était seulement censé protéger le pays de menaces *extérieures.*

Du même coup, l’on peut spéculer que les cryptomonnaies seraient également visées.

Heureusement, il y a de l’opposition au Congrès. Rand Paul, fils du très libéral Ron, s’oppose à cette loi – les laquais des médias rappelleront évidemment qu’il reçoit des dons de Tik Tok. Il est plus conservateur que son père, mais il défend toujours ardemment la liberté d’expression, qui serait ainsi violée selon lui. Il dénonce également la gigantesque portée de la loi, qui permettrait un ban de n’importe quoi au gré de l’humeur des dirigeants du moment.

Bref, si ban de Tik Tok il faut vraiment, la loi RESTRICT est la pire des solutions. Elle ouvre à nouveau la porte toute grande pour augmenter l’arbitraire des politiciens et diminuer nos droits et liberté. Des abus sont inévitables et, dixit le sénateur Paul, ne nous rend pas mieux que la Chine.

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Ce vendredi 2 février, les États membres ont unanimement approuvé le AI Act ou Loi sur l’IA, après une procédure longue et mouvementée. En tant que tout premier cadre législatif international et contraignant sur l’IA, le texte fait beaucoup parler de lui.

La commercialisation de l’IA générative a apporté son lot d’inquiétudes, notamment en matière d’atteintes aux droits fondamentaux.

Ainsi, une course à la règlementation de l’IA, dont l’issue pourrait réajuster certains rapports de force, fait rage. Parfois critiquée pour son ap... Poursuivre la lecture

Nicolas Tenzer est enseignant à Sciences Po Paris, non resident senior fellow au Center for European Policy Analysis (CEPA) et blogueur de politique internationale sur Tenzer Strategics. Son dernier livre Notre guerre. Le crime et l’oubli : pour une pensée stratégique, vient de sortir aux Éditions de l’Observatoire. Ce grand entretien a été publié pour la première fois dans nos colonnes le 29 janvier dernier. Nous le republions pour donner une lumière nouvelles aux déclarations du président Macron, lequel n’a « pas exclu » l’envoi de troupes ... Poursuivre la lecture

La campagne de Joe Biden ne se déroule pas bien. Bien qu’il semble se diriger vers la nomination de son parti, sa cote de popularité ne cesse de chuter, laissant croire que Donald Trump le vaincra s'il obtient la nomination. Son bilan économique mitigé ne sera pas la seule raison pour laquelle plusieurs de ses électeurs en 2020 s’abstiendront ou changeront de camp.

En effet, le récent rapport d’un procureur spécial affirme que Biden a bel et bien été négligent avec des documents confidentiels qu’il a conservés secrètement. Et à l’insta... Poursuivre la lecture

Voir plus d'articles