Paris 2024 : un gouffre financier prévisible déguisé en plan Marshall

Quatre ans après les JO d’été les plus chers de l’Histoire, le coût des JO commence, semble-t-il, à effleurer l’esprit de nos élus.

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Paris 2024 : un gouffre financier prévisible déguisé en plan Marshall

Publié le 24 octobre 2022
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« Il n’y aura pas d’impôt JO. »

Ce lundi 25 juillet, le soleil brillait sur la capitale, alors qu’à Élysée se réunissait le Conseil olympique et paralympique. L’occasion d’évoquer les questions de la sécurité et des transports en vue des Jeux olympiques de 2024.

En marge de l’événement, le chef de l’État accordait une entrevue à nos confrères de L’Équipe dans laquelle il annonça l’absence d’une fiscalité propre à ces jeux, une annonce qui laisse songeur à l’heure où le « too big to fail » constitue la principale ligne de conduite des dirigeants occidentaux.

Il faut dire que l’expérience olympique est plus qu’amère pour les villes organisatrices, au point qu’on ne peut que se demander pourquoi, tous les quatre ans, une demi-douzaine de villes en moyenne présentent leur candidature.

Quatre ans après les JO d’été les plus chers de l’Histoire – largement pénalisés par la crise covid – le coût des JO commence, semble-t-il, à effleurer l’esprit de nos élus.

Dans ce contexte, l’annonce d’un prérapport rédigé par deux députés sur ses retombées économiques, moins de deux ans avant l’événement, questionne.

 

Un prérapport à 18 mois des jeux

Alors que de plus en plus de collectivités locales s’interrogent sur l’opportunité des jeux olympiques parisiens, deux députés, l’un de la majorité, l’autre de l’opposition, vont évaluer l’impact économique et social de la préparation des JO.

Le prérapport de Stéphane Mazars, député Renaissance de l’Aveyron, et Stéphane Peu, député communiste de Seine-Saint-Denis, sera publié en février 2023, soit moins de 18 mois avant les JO.

Le texte s’inscrira dans le cadre d’une mission d’information spécifique à l’approche d’une deuxième loi olympique, 5 ans après une première visant à faciliter les règles d’urbanisme et d’aménagement.

Quelques semaines après la présentation du budget actualisé de la compétition prévu le 12 décembre, le nouveau projet de loi devrait quant à lui prévoir des mesures particulières en matière de sécurité et notamment d’identification des comportements anormaux susceptibles de nuire à la sécurité des Jeux.

 

La priorité au 93

Au cœur du prérapport se trouve un engagement pris par l’État à ce que la compétition olympique provoque des retombées économiques et notamment en Seine-Saint-Denis, département actuellement en travaux dans le cadre du Grand Paris et où se concentreront 80 % des investissements matériels. La manœuvre s’apparente à un nouvel arrosage financier digne des pires heures des plans banlieue et ce d’autant plus que le 93 serait le principal département exportateur de délinquance dans la capitale selon des données de la Préfecture de police de Paris rapportées par Le Figaro en 2009 et que la sécurité est la principale préoccupation des organisateurs des jeux.

 

Le souvenir des jeux de Montréal

Dans ce contexte, il est difficile de ne pas penser aux fameux jeux de Montréal.

En 1973, l’emblématique maire de la principale ville québécoise, Jean Drapeau, s’était fait le porte-flamme du projet qui devait voir le jour trois ans plus tard en estimant « [qu’]il [était] aussi impossible pour les Jeux olympiques de Montréal de produire un déficit que pour un homme de devenir enceinte ». Si la deuxième partie de la phrase apparaît cocasse au vu des débats actuels, la première n’a rien à lui envier.

En effet, les jeux de Montréal sont aujourd’hui reconnus comme étant le plus grand désastre financier de l’histoire des Jeux olympiques modernes, avec un coût dépassé de près de 720 %.

Peu aidés par la crise économique et l’inflation qui frappent les pays occidentaux à cette époque, les contribuables locaux mettront trois décennies à payer les conséquences de ces jeux et notamment l’hypothèque de 1,74 milliard de dollars contractés pour les installations olympiques.

Cette situation a bien failli provoquer la fin des jeux modernes : une seule ville sera candidate aux jeux de 1984 – ceux de 1980 ayant déjà été attribués au moment des événements de Montréal – à savoir Los Angeles, ville qui a la particularité d’avoir été désignée deux fois en étant seule candidate, étant également la ville hôte des JO de 2028 après un accord avec le CIO lors de l’attribution des jeux de 2024 à la capitale française.

Selon Alexandre Delaigue, professeur agrégé d’économie à l’Université de Lille I, le dépassement financier moyen d’une ville hôte pour des jeux d’été s’élèverait à 176 %. Difficile, dans ces conditions, d’imaginer que la situation parisienne serait une exception et, surtout, une surprise.

 

Un désastre prévisible

Alors, combien vont coûter ces jeux ? C’est toute la question. Une seule chose est sûre : le désastre financier, même avec un financement a priori à 97 % privé, reste prévisible. Une prévisibilité sur laquelle Contrepoints alertait dès l’été 2017, deux mois avant l’attribution des JO à la capitale hexagonale, avant d’évoquer tour à tour leur coût abyssal pour les contribuables et les nombreux problèmes qu’allait devoir résoudre la Ville Lumière.

 

Des jeux imposés

En imaginant que les promesses présidentielles soient tenues, les Français pourront tout de même être mis à contribution. Tel est déjà le cas puisque l’Élysée a annoncé, toujours en juillet, l’achat par l’État de quelques 400 000 billets afin de les distribuer à des jeunes ainsi qu’une billetterie populaire destinée aux personnes en situation de handicap, leurs aidants et les fonctionnaires participant à l’organisation.

Rappelons enfin que, selon un sondage Le Parisien-Aujourd’hui en France publié en 2017 et cité par Serge Federbusch dans nos colonnes, 6 Français sur 10 préféraient que Paris organise l’Exposition universelle de 2025 plutôt que les JO. Une Exposition universelle qui se déroulera finalement à Osaka.

 

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    The Real Franky Bee
    24 octobre 2022 at 6 h 31 min

    Ne vous inquiétez pas, prochainement le FMI viendra mettre de l’ordre au sein de ce pays émergent géré par des clowns. Ce ne sont pas vos enfants qui paieront le coût de tout ce grand n’importe quoi inarretâble, mais vous.

    • Il est impératif que ce soit « nous » qui payons, puisque c’est « nous » qui avons élu ces clowns à roulettes depuis 50 ans. Les « nous » se reconnaitront. Petite indication : ce sont ceux qui ont élu Giscard, Mitterrand, Chirac, Sarkozy, Hollande, Macron… C’est sûr, ça fait du monde.

  • Pauvre France et surtout pauvres Français. Autant en emporte le vent !…..

  • Un pays hyper endetté comme le nôtre n’aurait jamais dû se proposer candidat aux JO. Un désastre financier, et j’ai peur aussi d’un attentat pendant ces jeux… Nous avons trop de problèmes de sécurité non réglés en France, l’insécurité y est totale…

  • A noter que la note sera même payé par les français au moins deux fois puisque pour faire passer la flamme olympique dans tout le pays les départements vont devoir mettre la main à la poche et pas qu’un peu.

    Il serait très intéressant de faire un carte de France des départements qui paient pour sauver Hidalgo et surtout Macron…

  • La spécialité de l’état français c’est le déficit public. Les sans-dents payeront.
    Et les sans-dents adorent le déficit public. Ils en redemandent à chaque élection. Où est donc le problème des J. O. ?

  • A noter que Budapest et Hambourg étaient villes-candidates mais qu’elles ont retiré leur candidature après que leurs électeurs aient été consultés…
    En plus des désastres financiers, on pourrait éviter de donner des leçons de démocratie.

  • Ne pas oublier qu’il n’y avait que 2 villes en compétition pour ces Jeux (Los Angeles et Paris), mais que, prudemment, Los Angeles s’est rétractée au bénéfice de Paris et en remettant sa candidature à plus tard ! Pourtant, et si je ne me trompe, les Jeux à Los Angeles ont ét parmi les rares à ne pas être en déficit ! Normal : là-bas l’Etat ne s’en mêle pas ! Mais chez nous, nos « clowns » de service (Macron et Hidalgo) ont flatté leurs egos, autant que leurs électorats..

  • Ils ont peut-être un secret pour taxer les pickpockets ?

  • Seul les jeux de Los Angeles en 1984 dont l événement à été financé par le privé,et les jeux Atlanta sponsorisé par Coca Cola en 1996 ont été bénéficiaire, tout les autres jeux olympiques sont des gabegies déplorables
    Tout cela bien sûr payé par le contribuable

  • Mmouais, à quelques milliards d’euros la facture des JO me semble être une facturette comparée à celle de du Grand Paris Express (https://fr.wikipedia.org/wiki/Grand_Paris_Express) et ses dizaines de milliards d’euros.
    Paris n’a pas vraiment besoin des JO pour entretenir son prestige international et attirer les touristes, mais les JO y contribueront quand même (à condition d’éviter les loupés comme la dernière finale de la ligue des champions de football). Et quasiment toutes les infrastructures existaient déjà, le risque de dérapage financier est donc quand même sérieusement limité.
    Par contre le GPE me semble être un bien meilleur candidat pour le titre de gouffre financier. Alors que le télétravail s’est brutalement développé, on peut se demander s’il recevra le nombre de voyageurs prévu. Si la ligne 15 parait utile, les lignes 16, 17 et 18 posent largement question.

  • Une gabegie dont seule la classe dirigeante est capable .

  • Y aura t il des touristes étrangers pour assister au jeu en connaissant la réputation de la Seine saint Denis

  • La cencure est bien présente, méme si elle est, j’espére, au bord du gouffre.

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