Présidentielles 2022 : parlons de la liberté économique

La France obtient de mauvais scores dans le cadre de la liberté économique par rapport au reste des pays occidentaux.

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Présidentielles 2022 : parlons de la liberté économique

Publié le 28 décembre 2021
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Par Nathalie MP Meyer.

Quiconque pense que l’État doit intervenir massivement dans l’économie d’un pays sera certainement enchanté d’apprendre que la France jouit du privilège ambigu d’avoir reçu l’une des plus mauvaises notes du récent rapport Fraser 2021 sur la liberté économique au regard du critère « taille de l’État ». Avec un petit score de 5/10, elle occupe le 155ème rang sur 165 pays étudiés, en proche compagnie de véritables titans de la prospérité et de la liberté comme le Venezuela ou la Libye.

Car bien sûr, toute personne un tant soit peu keynésienne voire carrément planiste se réjouira de l’emprise étendue de l’État dans l’activité économique tandis que le Fraser Institute, think tank libéral canadien dédié à l’analyse des effets des politiques publiques sur la prospérité et la liberté des individus, la déplore. De ce fait, plus elle est importante, plus la note de liberté économique qu’il décerne s’en trouve diminuée.

La France est mal classée en matière de liberté économique

Il est vrai qu’en ce domaine, la Suède fait encore pire que la France (rang 162) et les Pays-Bas et le Danemark à peine mieux (rangs 152 et 150), mais comme ces trois pays se rattrapent nettement sur les autres critères (voir plus bas), ils se retrouvent respectivement au 37ème, au 19ème et au 10ème rang mondial du classement général quand la France n’arrive qu’à la 53ème place.

Quant à nos grands voisins comparables le Royaume-Uni et l’Allemagne, l’index Fraser les place aux rangs 12 et 22 respectivement (cliquer pour agrandir) :

liberté économique

Comme on peut le voir sur les fiches pays ci-dessus, le Fraser Institute analyse la liberté économique autour de cinq grands critères :

Taille de l’État : ce dernier a-t-il tendance à réduire les choix des individus par un interventionnisme exacerbé dans l’activité économique à travers les dépenses publiques, la fiscalité et des prises de participation étatiques ?

Système juridique et droits de propriété : les personnes et les biens sont-ils correctement protégés ?

Politique monétaire : la monnaie est-elle saine, autrement dit est-elle à l’abri d’une inflation qui érode la valeur des salaires et des biens ?

Échanges internationaux : la liberté des échanges est-elle garantie ?

Corpus réglementaire et législatif : le niveau de régulation étatique du marché du travail, du marché du crédit, etc. est-il suffisamment limité afin de ne pas entraver l’activité économique ?

Chacun de ces postes est lui-même détaillé en plusieurs axes, de telle sorte que la note globale obtenue par les pays résulte de 42 critères, auxquels il faut ajouter un ajustement « de genre » destiné à tenir compte de l’acquisition progressive par les femmes de droits économiques identiques à ceux des hommes (ouvrir un compte en banque en leur nom, créer une entreprise en leur nom, etc.)

La comparaison de la France avec ses deux voisins montre clairement que l’ampleur monstrueuse de l’État couplé à la surabondance des réglementations sont les deux facteurs principaux de son manque de liberté économique. On n’est guère étonné. Nombreux sont les hommes politiques qui dénoncent notre État obèse, sa bureaucratie absurde et les piètres résultats de ses grandes politiques publiques sur l’emploi et le pouvoir d’achat, sans parler de la situation dégradée de nos monopoles de la santé et de l’éducation.

Même le ministre de l’Économie Bruno Le Maire y a été de son fameux « Les impôts et les taxes, ça suffit ! » et même lui semble au courant que :

Si la dépense publique était la réponse à tout, nous devrions donc avoir le chômage le plus bas et le taux de croissance le plus élevé en Europe. Nous en sommes loin.(PLF 2018)

Passer du constat à l’action est évidemment beaucoup plus difficile. Aucun de nos dirigeants ne s’y est franchement risqué à ce jour, sauf à procéder à quelques petits toilettages ici ou là, histoire de donner un peu de consistance au courage qui anime en permanence notre exécutif.

L’effet covid ne va pas arranger la situation de la France

À noter que le classement Fraser 2021 porte sur les données de 2019, soit une période pré-covid où les États n’avaient pas encore abandonné toute idée de maîtriser leurs finances publiques. On n’ose imaginer ce que deviendra le classement de la France dans les rapports portant sur 2020 ou 2021.

Si tous les pays ont lâché les chevaux de leurs interventions pour faire face à la pandémie, la France a bien évidemment fait encore plus fort en vertu du « quoi qu’il en coûte » que le gouvernement continue de déverser avec une largesse tout électoraliste sur des problèmes n’ayant plus rien à voir avec le Covid-19. De 56 % du PIB en 2019, ses dépenses publiques sont montées à 62 % en 2020, contre 51 % pour l’Allemagne et 48 % pour les Pays-Bas (qui partaient de bien plus bas).

Le Fraser Institute n’est pas le seul à produire un index mondial de liberté économique.

Aux États-Unis, l’Heritage Foundation fait de même à partir d’une méthodologie similaire dans l’esprit mais articulée autour de 12 critères appliqués à 186 pays. Son index 2021 publié en début d’année porte sur des données de 2019 et début 2020, voire parfois, selon les indicateurs, sur les moyennes des trois dernières années (de 2017 à 2019 pour l’inflation par exemple).

Sans surprise, la France s’en sort là aussi plus que médiocrement par rapport à ses pairs européens. Classée 64ème sur 186 pays au niveau mondial, elle est aussi 34ème sur 45 pays d’Europe (dans et hors Union européenne).

Comme le montre le graphique ci-dessous, qui donne la note obtenue pour chacun des 12 critères, le très très gros problème de la France se situe au niveau de ses dépenses publiques débridées (note de 6,3/100 !), son très gros problème au niveau d’un marché du travail trop rigide (note de 44,8/100) et son gros problème au niveau du poids élevé de ses prélèvements obligatoires (note de 50,7/100) :

Elle obtient ainsi une moyenne générale de 65,7/100, soit un peu au-dessus de la moyenne mondiale (61,6) quand les cinq premiers de classe (en vert foncé) dépassent 80 (Singapour, Nouvelle-Zélande, Australie, Suisse et Irlande) et quand le Royaume-Uni occupe le rang 7, les Pays-Bas le rang 16 et l’Allemagne le rang 29, avec des notes supérieures à 70 (vert clair) :

liberté économique

Le Fraser Institute et l’Heritage Foundation ne s’arrêtent pas là dans leurs investigations. Ils montrent aussi, et là réside le point absolument essentiel, que plus les pays jouissent d’une grande liberté économique telle que définie dans leurs index respectifs, plus ils sont prospères et plus sont élevées les valeurs de progrès humain que la plupart des gens considèrent comme étant de la plus haute importance.

Plus de liberté économique favorise le progrès humain

Citons notamment l’accès à la santé, l’attention portée aux questions environnementales, le niveau éducatif, l’éradication de la pauvreté et le degré de liberté individuelle et politique (à gauche, graphe de l’Heritage Foundation ; à droite, trois graphes du Fraser Institute, liberté économique et PIB par habitant, liberté éonomique et mortalité infantile, liberté économique et taux de pauvreté) :

Les auteurs du Fraser Institute précisent que chacune des corrélations mises au jour demande à être précisée par une étude spécifique, car d’autres facteurs que les composants de la liberté économique peuvent éventuellement entrer en ligne de compte. Mais les résultats obtenus n’en décrivent pas moins des profils de développement humain très différents selon que l’on a affaire à une économie de marché ou une économie fortement investie et régulée par l’État.

À ce titre, l’exemple de la France, pays riche et développé empêtré depuis 1945 dans son triple État providence, stratège et nounou, est particulièrement éloquent. Le chômage y est systématiquement plus élevé qu’en Allemagne, aux Pays-Bas ou au Royaume-Uni (décembre 2019, juillet 2021) et le PIB par habitant reste à la traîne : 46 200 USD en parité de pouvoir d’achat en 2020 contre 59 200 aux Pays-Bas et 53 700 en Allemagne. Peut mieux faire, comme disent les enseignants.

En vue de l’élection présidentielle de 2022, n’y aurait-il pas un petit quelque chose à creuser de côté-là ? C’est du moins mon conseil aux futurs candidats, car on dirait bien qu’il y a tout à gagner à s’en remettre à la liberté.

Sur le web

 

Un article publié initialement le 28 octobre 2021.

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  • J’aimerais bien comprendre ce qui permet à cet institut de noter la politique monétaire européenne à plus de 9 sur 10…
    Il doit forcément me manquer une donnée 😀

    • C’est expliqué dans le rapport complet (en Anglais). La note « sound money » est calculée sur la base de trois indicateurs: la croissance de la masse monétaire (qui doit être proche de la croissance du PIB) sur les 10 années précédentes; la variabilité de l’inflation sur les 5 années précédentes, l’inflation sur la dernière année.

      Les données s’arrêtent en 2019, donc avant la pandémie et la création monétaire massive qui va dégrader le premier indicateur.

      • Il ne faut pas comparer la masse monétaire au PIB mais seulement au PIB marchand.

        • Totalement d’accord, plus l’état dépense et se collectivise plus le PIB augmente, plus ça masque la fausse monnaie de la banque centrale.
          Un trajectoire catastrophique notée 9/10… well.

  • Les commentaires sont fermés.

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