Complotisme : Macron, le Grand Pontife de la vérité

La lutte du gouvernement contre le complotisme, au nom de la recherche de la vérité, présente un risque d’abus important.

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Emmanuel Macron by French Embassy in the US(CC BY-NC 2.0)

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Complotisme : Macron, le Grand Pontife de la vérité

Publié le 10 octobre 2021
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Par Adnan Valibhay.

Le complotisme consiste à attribuer une cause unique et occulte à différents phénomènes contingents. Bien souvent, les théories du complot tournent autour de l’idée que des groupes dissimulés régissent la société en secret. Emmanuel Macron, Président de la République, a donc décidé de prendre ce problème à bras-le-corps.

S’il est désormais loisible à tout un chacun d’exposer son opinion sur un sujet donné, nombreuses sont également les fausses nouvelles, celles dont le caractère erroné est manifeste, qui circulent dans ce flux d’informations si caractéristique de cette nouvelle ère du numérique.

L’importance de la liberté d’expression

Le souci de la vérité propre au cartésianisme lequel induit nécessairement un doute fécond imposerait de porter un coup d’arrêt à cette tendance. Hélas, les choses ne sont pas si simples dans un régime démocratique, libéral qui plus est, délié de tout carcan traditionnel. La vérité n’est plus l’affaire de quelques doctes érudits ou savants, mais elle devient éminemment relative et soumise à la subjectivité de chacun.

Plus encore, la liberté d’expression, principe fondamental des sociétés occidentales modernes, octroie à chacun le droit de se tromper. S’il est louable que soient condamnées les pratiques dilatoires susceptibles de constituer un dol, lorsque le propagateur des fausses informations n’en tire aucun profit, il ne fait qu’exercer son bon droit, dans les limites de la loi. Libre à quiconque d’adhérer ou de contester le discours prétendument déviant.

Le danger de réguler le débat intellectuel et idéologique au nom de la lutte contre le complotisme

C’est ainsi qu’en ayant nommé le mercredi 29 septembre dernier la « commission Bronner » chargée de « mesurer les dangers du numérique sur la cohésion nationale et nos institutions afin de mieux y faire face », le Président de la République descend de son trône élyséen pour espérer réguler le débat intellectuel et idéologique.

Le problème d’une telle manœuvre dont les intentions peuvent certainement paraître louables est que désormais le risque est de voir se développer des grands timoniers chargés de rendre compte des exactions commises à l’endroit de la Vérité à la personne au sommet de l’État, propulsée au titre de grand pontife de la vérité, tant il est évident qu’aucun des membres de cette commission, comme le Président d’ailleurs, ne sauront faire preuve d’une neutralité axiologique pourtant si nécessaire à l’exercice impartial d’une telle mission.

Des abus à prévoir

Si la tâche avait été confiée à un algorithme, la neutralité aurait pu être assurée et la police de la pensée neutralisée. Mais c’est à des hommes faillibles par nature, aussi brillants soient-ils au demeurant, qu’il incombera de remplir cette mission dont on sait déjà qu’elle sera périlleuse.

Pire encore, en poussant cette logique à son extrême, en donnant à une commission le pouvoir de décerner les bons et les mauvais points, de dire qui sont les gentils et qui sont les méchants, qu’adviendra-t-il du doute cartésien que requiert l’établissement de la vérité scientifique ?

La commission ne peut-elle pas elle-même se tromper ? Quid enfin de la liberté académique laquelle est pourtant garantie constitutionnellement depuis la décision « Enseignement supérieur » rendue par le Conseil Constitutionnel le 20 janvier 1984 ? Survivra-t-elle à ce premier pas sans précédent dans l’histoire de la Cinquième République ?

Il vaut mieux encore que circulent 1001 fausses informations plutôt qu’une commission susceptible d’imposer à tous une seule et unique mise en récit du monde, a fortiori en cette période de crise sanitaire où le pouvoir exécutif peine de plus en plus à faire accepter à l’opinion publique les différentes mesures liberticides qu’il a imposées au fil de ces derniers mois.

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  • D’autant plus que les idées dites « complotistes » sont parfois devenues vérité six mois plus tard … (cf. l’origine du virus provoquant la covid 19) !

    • ne vous trompez pas… le complotisme ou les fake news ne signifient pas vérité ou fausseté..mais intentionalité..

      le gouvernement se trompe parfois les complotistes sont vus comme des gens qui trompent ..

      de façon parallèle on peut rappeler la curieuse approche du conflit d’interet en science…

      on cherche le financement PRIVE.. pour aller quand il ya publicité pouvoir rejeter un résultat pourtant inattaquable méthodologiquement ..

      et seule la recherche financée par l’argent public est pure..est se trompe parfois mais ne trompe jamais..

      le procès d’intention orienté devient la norme,..

      • le but est l’ostracisation..virer du débat public sur une accusation.

        il n’empecheront d’ailleurs pas les gens de penser ..parfois très mal..

        c’est les gens attachés à la preuve qui sont perdants.

        • obtenir le maximum de couverture dans le débat public..

          il suffit de le dire dans les médias mille fois ça devient une vérité…

          tient les hommes peuvent porter des enfants..

  • En complément de la hotorité sur le climat, ce nouveau comité Théodule va définitivement faire passer le climatoscepticisme dans le camp du complotisme. Devra-t-il bientôt se réfugier dans le dark web pour continuer à complotiser ?

  • c’est amusant cette definition du complotisme puisque le complotisme est un complot..

    dans une société civilisée où la preuve serait necessaire à la condamnation ou au moins l’accusation..le complotisme ne serait pas un sujet…

    il me semble d’ailleurs que le vrai danger est à ce niveau, la multiplication de crimes qui EXIGENT de faire un procès d’intention..ce qui offre des possibilités extraordinaire pour organiser des campagnes en vue de détruite l’image de personnes gênante.

    la presse est pleine d’articles dans les quels des gens sont accusés, parfois arrêtés, pour avoir ..prévu ou pensé commettre des actes horribles…

    tuer des innocents c’est mal mais penser à tuer quelqu’un sinon le projeter n’est pas un crime ..or pourtant…

    sans parler de supprimons les produits controversés…ce qui fait sourire toute personne avec un peu de bonsesn qui se dit alors si je n’aime pas un produit il suffit que je lance une controverse à
    sons sujet???

    désormais l’image importe beaucoup, donc…de plus en plus l’important n’est pas la condamnation au tribunal, mais la publicité faite à l’accusation..elle suffit pour détruire le personnage public.

    on peut me traiter de négationniste climatique pour des raisons d’ailleurs obscures( je suis un négationniste absolu…de la preuve par l’ensemble de modèles) mais si macron est affublé d’une moustache… c’est un crime…

    dieu merci la france est un pays plein d’intellectuels et attaché viscéralement
    à la liberté sinon..

  • Depuis la nuit des temps, les politiciens sont d’infatigables créateurs de fake news. Et il faudrait maintenant leur faire confiance pour séparer le vrai du faux ??
    Ce serait risible si ça ne trahissait pas une volonté assumée de cadenasser le débat public, avec l’aide de la technocratie infiltrée à tous les échelons de la machine médiatique (Ernotte, Fries…), du quarteron de milliardaires qui détiennent la quasi-totalité des médias non publics et des réseaux sociaux contrôlés par les géants de la Tech.

    • A deux pas de la présidentielle, et c’ est presque de saison, ne nous étonnons pas que le gouvernement cherche à tirer le Macron du faux…

  • « La vérité n’est plus l’affaire de quelques doctes érudits ou savants, mais elle devient éminemment relative »
    La vérité n’est ni une affaire de quelques doctes érudits ou savants, ni éminemment relative. L’existence de vérités objectives est une condition pour que n’importe quel dialogue puisse avoir du sens. Si la vérité est relative et subjective, alors aucune phrase ne veut plus rien dire.
    Un livre intéressant pour réfléchir à ces sujets : « The constitution of knowledge, a defense of truth« , de Jonathan Rauch.
    Jonathan Rauch est notamment connu pour avoir écrit un livre référence sur la défense de la liberté d’expression : « Kindly Inquisitors : the new attacks on free thought« .
    Dans son niveau livre, il met cependant l’accent sur le fait que la vérité n’émerge pas d’un marché des idées anarchique. Dans un tel marché, les produits cognitifs frelatés qui brossent les biais cognitifs et les émotions dans le sens du poil deviennent hégémoniques. Il prend l’exemple de deux réussites remarquables (bien que toujours imparfaites) de régulations institutionnelles qui ont permis l’émergence de connaissances de bonnes qualités (sans sacrifier la liberté d’expression) : la science, qui se structure à partir du 17ème siècle par l’intermédiaire de sociétés savantes, de journaux savants, etc., et le journalisme, qui se structure au début du 20ème siècle autour de codes déontologiques. Il fait le parallèle entre ce qu’il se passe aujourd’hui sur internet et ce qu’il se passait au 19ème siècle pour le journalisme aux Etats-Unis et conclut qu’Internet doit aussi être structuré et régulé si on veut éviter que l’anarchie l’emporte sur le soucis de vérité, comme c’est trop le cas en ce moment. Reste à savoir si une commission gouvernementale est le bon outil pour le faire, et je peux comprendre que cette idée soit reçue avec scepticisme.

    • La vérité n’existe pas. Il n’y a que des discours réfutables.
      En tout cas ce n’est certainement pas à l’état de réguler l’information. L’anarchie est nécessaire dans le monde des idées.

      • « La vérité n’existe pas ». N’est-ce pas en soi une vérité ça ?

        • La Vérité =/= une vérité

        • Justement non, toute négation est bonne à prendre. Par exemple, la rose est une fleur n’est pas scientifique. Je classifie la rose comme étant une fleur se rapproche plus de la science. La rose n’est pas une fleur convient mieux. Il faut faire la différence entre le langage et les faits. Il n’y a marqué nulle part sur aucune rose (mot symbole) que c’est une fleur. Les mots ne sont pas les choses qu’ils décrivent. C’est encore plus patent avec des mots décrivants des abstractions dont le sens varient avec le contexte.

      • Plus exactement, seules assertions réfutables peuvent être vraies. Si une assertion est irréfutable, alors ce ne peut être qu’une opinion (en mathématiques, on dirait un axiome). Remarquons que ce n’est pas que théologique, même en physique des théories jolies mais qui ne peuvent être expérimentées ne sont pas considérées comme vraies, mais peuvent suggérer de nouvelles idées.

    • ni la science ni le journalisme ne sont des institutions…
      logique et fait..

      la science ou l’information ne pouvaient pas progresser à CAUSE d’institutions!!!

      • justement en science un homme peut « gagner » contre les scientifiques établis..
        d’ailleurs les institutions scientifiques sont putrescibles..il suffit d’une génétation..

        • le progrès scientifique peut tout à fait s’éteindre par exemple pas la creation d’autorité scientifique humaine..

          anarchie?? absolument pas..logique et faits sont les » dieux. ».pas des hommes pas des institutions sinon c’est terminé…

    • « Il prend l’exemple de deux réussites remarquables (bien que toujours imparfaites) de régulations institutionnelles qui ont permis l’émergence de connaissances de bonnes qualités »

      Grâce à elles ou en dépit d’elles ?
      Taleb montre que ces sociétés savantes ont mettent plus de bâtons dans les roues de la recherche et sont surtout doués pour tirer profit des découvertes d’autres.

  • Je crains qu’il n’y ait méprise. Cette commission n’est pas l’équivalent d’un CSA, qui a un pouvoir de blocage, mais un bidule chargé de rendre un rapport.
    Qui pourra accoucher d’une souris de gesticulation politique ou d’une montagne de tracas pour la liberté d’expression…
    A suivre…

    Pour l’heure, je suis allé voir à la source pour me faire une idée précise. Les objectifs élyséens sont les suivants :

    1. définir un consensus scientifique qui sera mis à disposition du grand public, des médias, des acteurs de la société civile sur l’impact d’Internet dans nos vies de citoyens : notre information, notre rapport à l’autre, notre représentation du monde et de nous-même, notre exposition à des biais cognitifs qui peuvent enfermer

    2. formuler des propositions dans les champs de l’éducation, de la prévention, de la régulation, et de la judiciarisation des entrepreneurs de haine afin de libérer la société des bulles qui enferment une partie de nos concitoyens et nourrissent les extrémismes, la haine, la violence, les dérives sectaires et les obscurantismes

    3. proposer de nouveaux espaces communs de la démocratie, de la citoyenneté, du collectif qui puissent trouver leur place dans le monde numérique, donner du sens à des citoyens isolés

    4. développer une analyse historique et géopolitique de l’exposition de la France aux menaces internationales qui pèsent sur notre démocratie et notre société au travers d’Internet et des recommandations sur les enjeux à porter dans le débat international et européen.

    L’item 3 est du pur blabla sans intérêt.
    L’item 1 n’est pas ce que j’ai pu lire ça ou là ; il ne s’agit pas d’un consensus scientifique sur par exemple le covid mais sur l’impact d’internet ; ce sera un simple constat, dont rien ne dit qu’il ne sera pas lui-même biaisé…
    L’item 4 me ramène au début du quinquennat quand la macronie avait accusé la Russie d’ingérence politique dans l’élection. En réalité, le vrai souci ici ce sont les grandes oreilles de la NSA. Gageons que la France n’aura pas les couilles ne serait-ce que d’en dresser un portrait fidèle, histoire de ne pas fâcher nos amis américains.
    A ce stade, seul l’item 2 me paraît passablement inquiétant. Il peut tout aussi bien viser l’islamisme (plutôt glop) que les propos de membres du RN ou de Zemmour (pas glop)…

    • Merci d’avoir pris le temps d’aller « à la source » et de nous avoir partagé tout cela.
      Entièrement d’accord avec votre analyse jusqu’aux derniers mots.

  • Bon., ce n’est qu’une commission, ça sert à rien sauf a montrer qu’on s’occupe d’un probleme, un de plus, plus il yb de problème plus l’état montre qu’il est indispensable.. Ces. Élections, vivement qu’on les supprime

  • « Si la tâche avait été confiée à un algorithme, la neutralité aurait pu être assurée et la police de la pensée neutralisée. »

    – 1) on a effectivement un problème

    – 2) confier le problème à un « écrivain sociologue » qui se prend pour un scientifique est une c… de plus de M.

    – 3) imaginer et surtout dire que des « algorithmes » peuvent résoudre ce genre de problème est encore plus c…

  • Je ne sais pas si je suis complotiste: je pense qu’il y a des groupes non secrets qui régissent la société en plein jour. Et que ces groupes non dissimulés sont la cause de nos problèmes.

    • « ces groupes non dissimulés »

      Les groupes sont non dissimulés, mais il y a une omerta certaine sur la question.

    • Pour diriger des anes ils faut des aniers, et des bergers pour les moutons… Y a pas un homme politique qui ne soit pas manipulé et pas en dépit de son plein gré, tant que cela fait une vie facile…

    • oui…commençons par la france…ensuite l’ue..

      vous vous souvenez de la loi pour augmenter le pouvoir d’achat et les revenus des agriculteurs.?

      et le pire je pense que le gouvernement espérais vraiment faire cracher la grande distribution..

      mais si j’en crois les sondages, qui influent sur les hommes politiques, les gens veulent de l’ecologie, de la sobriété ..toussa..

      alors forcement quand le politique fait des lois écolos; il faut bien trouver un coupable pour expliquer que l’elecricté gratuite coute plus cher..ou je ne sais quoi..

      l

  • En fait si on écoute le président, il devrait présenter sa démission puisqu’il n’arrête pas de mentir et de se contredire depuis 5 ans et il n’arrête pas de colporter des fausses vérités. on devrait donc lui interdire tout discours et tweet…..

  • Exactement, vous avez parfaitement raison, Adnan Valibhay, Je trouve la création de cette commission franchement dangereuse.

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