Droit des étrangers : l’État bureaucratique toujours défaillant

À l’approche de la campagne présidentielle, la politique migratoire se fait toujours au plus grand mépris du droit en vigueur. Témoignage.

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Barrières et barbelés By: Frédéric BISSON - CC BY 2.0

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Droit des étrangers : l’État bureaucratique toujours défaillant

Publié le 3 juin 2021
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Par Louise Rieth et Pierre Farge.

Après une trilogie de tribunes racontant le fonctionnement défaillant de l’État en matière de droit des étrangers, et symptomatique de leur traitement sur notre sol, Pierre Farge, avocat, témoigne de nouvelles péripéties dans ce dossier.

Ayant pourtant fait condamner l’État à accorder un rendez-vous à un étranger souhaitant régulariser sa situation, l’État refuse de lui délivrer le titre de séjour en résultant, alors qu’il remplit toutes les conditions. Vengeance, ou corporatisme ?

Depuis six mois, nous vous faisons le récit semaine après semaine des déboires d’un étranger avec la préfecture de police de Paris appliquant une politique migratoire restrictive au mépris du droit en vigueur et des principes de la République.

En février, nous avions cru, peut-être naïvement, que le problème était résolu : l’État avait enfin été condamné à donner une date de rendez-vous pour déposer sa demande de titre de séjour.

C’est sans compter qu’en avril, toujours la même préfecture répond par la négative, avec un courrier type l’invitant à quitter le territoire sous trente jours.

Les motifs de cette décision ?

Il ne fournirait pas de contrat de travail à l’appui de sa demande et ne justifierait pas de motifs exceptionnels d’admission au séjour, notamment au regard de la durée de sa résidence en France.

Pourtant, si l’agent de l’État en charge de son dossier avait pris le temps ne serait-ce que de lire les pièces versées à sa demande, il aurait vu non pas un, mais deux CDI, ainsi que tous les éléments justifiant de sa présence en France depuis maintenant dix ans.

C’est précisément dans ce sens que les articles L.313-14 et L.313-10, 1° du CESEDA imposent en l’espèce de justifier d’une activité salariée sous contrat de travail à durée indéterminée. Le Conseil d’État considère d’ailleurs que l’ancienneté du séjour sur le territoire peut constituer un motif exceptionnel d’admission au séjour (CE, avis, 8 juin 2010, Sacko et a., n°334793).

Mieux encore, les articles précités énoncent les motifs justifiant le refus d’un tel titre de séjour, comme par exemple, si la présence sur le territoire constitue une menace pour l’ordre public, ou s’il vit en état de polygamie.

Il n’en n’est évidemment rien dans le cas qui nous concerne.

Le Préfet estime ainsi qu’une personne qui vit et travaille en France depuis dix ans, qui a construit sa vie et dispose de toute sa famille sur place, ne justifierait pas de motifs exceptionnels d’admission au séjour. Il la condamne ainsi à retourner dans un pays où elle n’a plus aucune attache au mépris total du droit au respect de la vie privée et familiale.

Ce refus aberrant ne peut donc s’interpréter qu’à la lumière du contexte extrêmement difficile dans lequel cette demande fut initiée : sans doute que le Préfet, mécontent d’avoir été condamné pour son inertie à donner un rendez-vous, n’a pas ouvert le dossier, ou l’a tout simplement rejeté.

Las mais non moins déterminés, nous nous sommes donc engagés dans un recours en annulation de cet arrêté, pour que la demande soit scrupuleusement examinée et que son refus éventuel s’appuie sur une argumentation quelconque afin de pouvoir le comprendre.

Si nous prenons le temps de témoigner une nouvelle fois par cette tribune, ce n’est pas une affinité particulière à tenir un journal de cette affaire, mais parce qu’elle est absolument symptomatique de la politique migratoire qui sévit à l’approche de la campagne présidentielle, et toujours au mépris du droit en vigueur : en 2019 c’était plus de 20 % de mesures d’éloignement supplémentaires exécutées par rapport à l’année précédente, qui elle-même avait vu une hausse de 13 % par rapport à l’année d’avant.

Après l’accalmie liée à la crise sanitaire, il y a fort à parier que les chiffres 2021 soient encore plus importants.

 

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  • Je présume qu’on va avoir je présume les commentaires habituels résultant de la politisation de la question de l’immigration et la réduction de l’immigré aux caractéristiques générales du groupe « les immigrés » .
    le vrai sujet ici semble être l’état de droit..

    il ne faut pas mélanger les choses..si vous estimez la loi mauvaise , militez pour changer a loi ne vous réjouissiez pas si vos idées sont mises en pratique par des individus arbitrairement.

    on a plein et trop de lois, si , EN PLUS, chacune d’elle est laissé à l’appréciation d’un fonctionnaire..bienvenue en bureaucrature….

  • il faut croire que not bon gouvernement préfère laisser entrer sur notre territoire des gens qui n’ont rien à y faire plutôt que d’accepter ceux qui y sont déjà et ont su s’intégrer ;

    • ça ne dépend pas du gouvernement français qui entre sur le territoire français..

      le débat me semble européen en la matière.

      Et les imams islamistes » s’intègrent » très bien… dans certaines populations.

      vous faites glisser le débat de l’immigration à l’existence de populations inacceptables..

      vous posez la trivialité du concept de personne acceptable dans notre société.. vous vous posez en canon des valeurs du citoyen français. Bizarrement sans se référer aux textes.

  • Dans le même temps, on laisse (fait) rentrer des wagons d’étrangers clandestins.

  • La défaillance de la bureaucratie n’est pas une nouveauté. A lire cet article, elle a au moins 10 ans.
    Si elle avait traité correctement le problème dès le départ, cet homme aurait
    – soit obtenu depuis longtemps les autorisations nécessaires pour vivre en France.
    – soit été invité à ne pas rester sur le territoire : il aurait construit sa vie ailleurs et ne serait pas obligé de quémander une régularisation 10 ans plus tard.

  • En somme, l’administration fait tout pour pousser les immigrés dignes de confiance à la clandestinité. Bravo.

  • Merci à l’auteur de rappeler l’arbitraire qui règne au mépris de l’État de droit.

    Ecoeurés, nous voyons ce gouvernement, à la suite des précédents, torpiller l’État de droit pour, d’une part, empêcher la régularisation des immigrés que certains recrutent en raison de leurs qualités hautement appréciables et pour, d’autre part, nous obliger à accepter des immigrés que personne ne veut recruter, qui ruinent nos efforts et qui nous vouent à régresser.

    C’est ainsi que nos gouvernements successifs agissent, par l’intermédiaire des Préfets, systématiquement contre la population pour lui mettre des bâtons dans les roues, l’affaiblir et la ruiner.

    Ensuite, après avoir favorisé une immigration destructrice au détriment d’une immigration constructive, nos gouvernants vont tenter d’exclure ceux qui s’opposent à leur entreprise de dégradation, et qui ne peuvent qu’être aussi des opposants à une vaccination hautement suspecte, en en faisant des parias grâce à la quasi obligation vaccinale.

    Avec la défense des immigrés dont la régularisation est abusivement refusée, l’avocat auteur de l’article peut de même s’atteler à la tâche de défendre les citoyens mis abusivement hors la loi, comme rejetés de leur pays pour en faire des étrangers, par l’abus de lois et règlements qui, dans ces cas-là, sont appliqués avec zèle.

    Dans ce marasme liberticide où règne l’arbitraire, c’est toujours une bonne surprise de voir une graine de liberté estampillée Véra qui pousse en dépit des activistes de la servitude volontaire .

  • @Dr Slump
    De plus, non seulement les étrangers dignes de confiance sont poussés à la clandestinité alors même qu’ils travaillent depuis plus de 10 ans, étant justement appréciés par leurs employeurs, leurs partenaires ou leurs clients, mais en plus, les citoyens actifs et responsables sont également poussés à la clandestinité par l’abus des obligations inacceptables dont ils sont accablés.

    Dernière en date, une obligation de plus en plus pressante qui risque de prendre des allures de marquage d’un bétail humain. Ceux qui auront consenti à ce marquage indélébile devront en défendre bec et ongle la nécessité (au lieu d’un traitement précoce abusivement interdit) sous peine de ne plus pouvoir se supporter. Pour obtenir un tel niveau de corruption à son service, il faut un pouvoir avec un haut niveau de perversion.

    Quand un Préfet refuse de régulariser la situation d’un étranger au mépris des règles de l’État de droit, il le prive de la dignité de travailler, et c’est la dignité de chacun d’entre nous qui est visée.

    Les atteintes à l’État de droit sous les coups de mesures arbitraires revient à faire de chacun un étranger clandestin privé de la liberté de travailler pour construire son humanité. Autant dire un animal maintenu dans une impasse d’évolution et à marquer comme tel. Etrangers et citoyens, même combat pour savoir s’accorder entre personnes de confiance dans le cadre d’un État de droit..

  • conclusion : pas besoin de Marine l’état actuel fait aussi bien !!!!

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