Glyphosate : encore une loi sur l’étiquetage des aliments

Une proposition de loi vise à imposer la mention du glyphosate si celui-ci entre dans les aliments de base ayant servi à fabriquer le produit transformé.

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Glyphosate : encore une loi sur l’étiquetage des aliments

Publié le 31 mai 2021
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Par André Heitz.

Qu’il est dur d’exister en tant que député à l’Assemblée nationale (ou au Parlement européen) sans déposer une proposition de loi (ou de texte européen) !

Imaginez le prestige acquis par l’apposition de son patronyme au mot loi… Tenez, la « loi Labbé » qui encadre l’utilisation des produits phytosanitaires sur l’ensemble du territoire national par les établissements publics et alourdit les budgets et donc nos impôts (ou contribue à la dégradation du patrimoine public par des mauvaises herbes du fait d’un défaut d’entretien, ce qui, à terme, alourdit aussi les budgets).

M. Michel Vialay est ainsi le chef de file d’un groupe de Républicains auteurs d’une « Proposition de loi visant à la transparence et au renforcement de l’information au consommateur via l’étiquetage de l’origine des aliments ainsi que de la présence de la substance active glyphosate ». Elle a été déposé(e) le 4 mai 2021.

Elle est constituée d’un article unique, que nous pouvons donc citer dans son intégralité :

« Après l’article L. 412 3 du code de la consommation, il est inséré un article L. 412 3 1 ainsi rédigé :

« Art. L. 412 3 1. – I. – L’origine géographique des produits, qu’il s’agisse d’aliments à l’état naturel ou des ingrédients qui entrent dans la composition du produit transformé, sont clairement et visiblement indiqués sur l’emballage dudit produit.

« II. – Un dispositif d’affichage visant à indiquer la présence de glyphosate dans les aliments de base ayant servi à la fabrication de produit transformé est institué. Il prend la forme d’un pictogramme clair et visible inscrit sur l’emballage dudit produit.

« III. – Les modalités de mise en œuvre du présent article sont déterminées par décret en Conseil d’État. » »

On peut légitimement se demander si les auteurs de la proposition ont bien saisi sa portée et ses conséquences. Mais l’essentiel en cette ère du paraître n’est-il pas de se profiler, ici, comme un grand défenseur des consommateurs et des agriculteurs ?

Le glyphosate ? Selon l’exposé des motifs :

« En effet, le glyphosate n’est pas un produit anodin. Le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), agence de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), l’a qualifié de « cancérogène probable » en mars 2015, et les études montrent ses effets de perturbateurs endocriniens. »

Et ce n’est que le début de l’argumentation. Il en est dans des entreprises incorporées sous forme d’associations qui ont dû être emplis de joie et de contentement à la lecture de la description des malfaisances alléguées…

« Par exemple, en Suisse, l’Office fédéral de la sécurité alimentaire (OSAV) a testé 170 produits en 2017. Le résultat est sans appel : des traces de glyphosate sont trouvées dans presque toutes les catégories de denrées alimentaires et se retrouvent sur nos tables dans les aliments courants que l’on peut manger plusieurs fois par semaine. Pâtes, spaghettis, biscuits, biscottes, céréales du petit déjeuner, chips… en contiennent… »

Houla ! On dirait du Générations Futures…

Nous avons évoqué ce test dans « Du glyphosate dans vos aliments : le test d’À Bon entendeur », en citant les propos de M. Vincent Dudler, responsable de l’évaluation des risques :

« Actuellement, des mesures urgentes concernant la contamination des denrées alimentaires par le glyphosate, il n’y en a aucune à prendre parce que les traces sont tellement faibles, le risque est tellement négligeable, que des mesures ou des recommandations pour les consommatrices et les consommateurs seraient totalement inutiles. Jusqu’à présent, tous les organismes qui évaluent des risques [ma note : le CIRC évalue un danger, enfin quand il fait proprement son travail] ont considéré que le glyphosate était une substance qui ne posait aucun problème de santé. »

Notre ami Albert Amgar a relayé la fiche de l’Office Fédéral de la Sécurité Alimentaire et des Affaires Vétérinaires (OSAV) dans « Glyphosate : sans risque pour la santé humaine, selon l’Office fédéral de la sécurité alimentaire et des affaires vétérinaires de Suisse » en reproduisant un tableau.

Qu’écrit l’OSAV en intertitre ? « Sans risque pour la santé humaine ».

Et pour cause ! Les valeurs mesurées sont très inférieures aux limites de sécurité, elles-mêmes établies de façon très sécuritaire.

Mais pour les auteurs de la proposition de loi, « le résultat est sans appel »…

Le tableau plus récent et plus complet

Les agriculteurs ?

« Or les Canadiens appliquent des normes de production moins exigeantes que les nôtres.

Ainsi, depuis de nombreuses années, les Canadiens épandent du glyphosate quelques jours avant la moisson pour combattre les mauvaises herbes dans les champs de blé, mais aussi pour faire murir les plantes artificiellement (dessication) et dessécher ainsi le blé avant la récolte car cela est plus profitable économiquement.

Cet exemple montre que, comme l’équivalence des normes n’est pas assurée, notre agriculture est donc menacée au nom des échanges commerciaux par cette distorsion de concurrence, cela contribue à détériorer la qualité de nos produits alimentaires et, surtout, cela pose un réel problème sanitaire. »

Un examen rationnel de la situation – pas forcément réalisable par un urbain détaché des réalités agricoles – montre que la dessication a pour objectif de pallier la brièveté de la saison de production (et de contribuer à la qualité et à l’état sanitaire de la récolte) et ne poursuit pas un objectif économique.

Un examen rationnel de la situation – réalisable même (et surtout) par quiconque n’a pas fait l’ENA – montre que les Canadiens (enfin certains…) procèdent à une opération supplémentaire par rapport aux Français. Toutes autres choses étant égales par ailleurs, la distorsion de concurrence joue en leur défaveur.

Mais que ne ferait-on pas pour faire étalage de sa vertu…

Poursuivons dans la vertu :

« Dans le même temps, le traité établi entre le Canada et l’Union Européenne (et ses 28 États membres), dit accord CETA, permet l’importation de produits qui ne sont pas soumis aux mêmes exigences que ceux produits en France et, même si les règles de l’Union européenne ne changeront pas, elles ne s’imposeront pas à l’OMC ! »

Peut-être y a-t-il des règles de l’OMC qui s’appliqueront à la France, surtout en relation avec une disposition législative qui est clairement hostile à un État ami – à supposer qu’elle soit adoptée et résiste, le cas échéant, à la censure du Conseil Constitutionnel.

On imagine les Canadiens (et d’autres) mettre en place un système de collecte des récoltes et d’acheminement séparant les filières pour pouvoir accéder au marché français…

On imagine les producteurs de denrées alimentaires – « de produit transformé » (pourquoi ces produits seulement ?) – monter des laboratoires d’analyse pour apposer ou non le pictogramme répulsif, selon les caractéristiques du lot d’« aliments de base ayant servi à [leur] fabrication » (c’est quoi les « aliments de base ») ?

Et dans notre supermarché, on imagine le gérant mettre en rayon – et le consommateur acheter – des pâtes ou une pizza arborant un effrayant « pictogramme clair et visible inscrit sur l’emballage dudit produit »…

Arrêtons là. M. Gil Rivière-Wekstein a bien raison.

Et encore, Twitter oblige, il est fort modeste. Car la logique commanderait d’étiqueter tous les produits phytosanitaires utilisés – ne serait-ce que parce que les initiants se réfèrent à l’« effet cocktail » – et tous les produits de consommation, d’entretien, etc. classés « cancérogènes probables » ou « cancérogènes certains » par le CIRC.

Les services aussi : coiffeurs, cafetiers qui servez des boissons chaudes, apposez un pictogramme sur votre devanture…

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  • quand il va falloir mettre la liste de tous les cancérogènes probables … avec des encres non cancérogènes, j’espere..

    jambon fumé garanti sans glyphosate, vin sans glyphosate..

    bon.le glyphosate est utilisé depuis des décennies..on SAIT des choses.. et on arrive à faire peur…
    alors imaginez ce qu’on peut faire avec le principe de précaution …

  • Hallucinant, celui la il fume de la bonne herbe sans glysphosphate !

  • Si cette loi est votée ce sera un signal de plus de l’effondrement intellectuel et économique de ce pays…

    • de l’idéologie, les « intellectuels » ne sont en rien protégés par leur intellect des effets de l’idéologie.

      ils furent massivement maoïste marxistes…le gros des scientifique est « interet-généraliste »…

      et l’effondrement économique, si il est choisi ne pose pas problème…

      il ya un marché et des gens accepteraient une mention sans glyphosate.. le seul problème est que je vais payer alors que je m’en fous..

      Mme la député combien de cancers sont dus au glyphosate via l’alimentation…de quoi nous protégez nous et à quel prix? la santé n’a pas de prix, , bonne mesure pour nuire à l’utilisation du glyphosate qui par ailleurs pose problème à l’environnement, perturbateur endocrinien, effet cocktail…
      Mme la ministre, vous introduisez un argument environnemental je tiens à vous signaler que l’agriculture en général pose problème à l’environnement, vous n’avez pas répondu à la question… le consommateur va payer pus cher…qu’a-t-il à en attendre? vos arguments me rappellent ceux de monsanto voire de l’extrême droite..

  • Pourquoi s’arrêter au glyphosate? On peut aussi imaginer de mettre sur l’étiquette la liste de TOUS les produits susceptibles de nuire à la santé et que les techniques actuelles permettent de détecter même à l’état de trace : mercure, plomb, arsenic, uranium, cuivre, soufre ( merci à la vouloir bordelaise autorisée en bio) , organe chlorés divers, etc

    • pas de problème si on donne la clef de lecture associé aux expositions et au risque…

      attention il y a du glyphosate qui est cancérogène dedans.. compte tenu des doses.. le surrisque que vous ayez un cancer est actuellement mesuré et connu nul. et l’impact sur votre espérance de vie nul…

      ce genre de chose…

  • Et si c’est le cas,pourquoi craindre la divulgation de la vérité si la mesure est à l’échelle européenne ???

    • le problème est l’obligation qui introduit un surcout, si ça vient des consommateurs et des producteurs pas de problème…

      ensuite vous utilisez divulguer la vérité..

      va on écrire pas le détail tout le détail , toute la vérité ! de production de tous les produits sur les étiquettes? des fois que…

  • Le prétexte glyphosate est l’illustration de comment détruire l’agriculture française par des mensonges éhontés. Les pisseurs de glyphosate de « Nous voulons des coquelicots » ont tenté par des analyses « orientées » de démontrer que tout le monde est intoxiqué alors que des agriculteurs ont prouvé que c’était faux (un d’entre eux, dosé à 0,84 µg/litre a déposé plainte avec preuve d’une analyse contradictoire négative). Pour un produit qui est utilisé depuis 45 ans, seul parmi de nombreux organismes officiels de santé le CIRC le prétend cancérogène probable ; il est quand même curieux que si dangerosité il y a, elle ne soit pas ni scientifiquement, ni statistiquement prouvée.
    La présence de résidus de glyphosate dans les produits alimentaires provient de l’importation de plantes OGM insensibles à cet herbicide ou à son utilisation en dessication. Ces plantes ou méthode sont interdites en France. Ainsi on veut priver les agriculteur français d’un herbicide efficace et sans danger selon la manière dont il est utilisé chez nous, mais on n’entend jamais les écologistes ou les consommateurs s’offusquer de l’importation de produits que en contiennent des résidus.

    • attention si ce sont les consommateurs qui « détruisent » l’agriculture français en n’achetant pas pour des raisons même stupides..ne n’ai pas de « problème » avec ça au point de vue de la liberté des gens de choisir .. aux producteurs de s’adapter…

      c’est simple que le glyphosate soit cancérogène ou pas on s’en fout.. ce qui importe est le quantitatif..

      de ce qu’on sait de l’utyilisationde glyphosate après des décennies d’uitlisation est qu’il ne pose AUCUN problème de santé public pour les consommateurs..on a des doutes pour les utilisateurs..

      mais pour les utilisateurs ce qui importe est désherber.. ils doivent comparer les méthodes de désherbage…non regarder seulement le glyphosate.. leur choix est vite fait..

      et ça pose un problème, ..si vous avez un employé vous êtes tenu en tant que patron d’utiliser les méthodes les moins impactantes pour la santé …
      interdire le glyphosate au motif de la santé des salariés est assez tendancieux..

  • J’ai du mal à comprendre cette allergie au Glyphosate! Alors que 2 études épidémiologiques sur les cancers en milieu paysan ont été réalisées. Une en France par l’INSERM et l’Université de Basse-Normandie (http://cancerspreventions.fr/wp-content/uploads/2014/12/AGRICAN.pdf) sur une cohorte de 180.000 agriculteurs. Une autre aux USA : Agricultural health study (www. aghealth.nih.gov). Les deux révèlent que le monde agricole est moins atteint par les cancers que le reste de la population.
    Comment peut-on encore prétendre que ce produit est cancérogène alors que la réalité montre que ce n’est pas le cas puisque les plus exposés en développent moins que ceux qui n’y sont pas?

    • Avec un y et un ph dans le nom, ce produit est un don du ciel pour le propagandiste moyen…

    • en fait ces études montrent juste que ce n’est pas un problème majeur. c.. je coirs que ça a un peu évolué, mais j’ignore si les derniers rapports ne sont pas en partie politique ..

      les agriculteurs ne vivent pas comme le reste de la population..ça montre juste que dire que c’ets le grand méchant loup est du flan…si effet il y a ils sont « faibles » et donc, même existant, acceptables compte tenu des avantages…

      on a montré depuis longtemps que la voiture est associée à une augmentation du risque de mourir..sur la route…et pourtant les gens roulent…non??

      les gens qui utilisent du glyphosate n’en ont pas peur…non plus…

  • la bêtise n’a vraiment pas de limite !

  • « la mention du glyphosate si celui-ci entre dans les aliments de base »
    Le Glyphosate serait donc un « Aliment ».
    Je n’imaginer pas un tel degré de pouriture verbale.

  • Ceux qui ont peur et légifèrent sur des « effets cocktails », soit des doses au millionième, sont partisans d’injecter des millilitres d’un produit non testé à toute la population.
    On peut rire ou pleurer, ça dépend de quel coté des barbelés de la frontière on se trouve.

  • Un peu HS, quoique…
    La mode est (ou a été) de bannir tout produit « OGM » de l’alimentation animale dans certains cahier des charges.
    Cela concerne exclusivement ou presque le tourteau de soja.
    Début des années 2000, la prime tourteau de soja « non OGM » (PCR<1% en fait) était de + 6 € par tonne par rapport à un tx de soja classique.
    Aujourd'hui, cette prime est passée à + 85/90 € et même beaucoup plus car ce soja devient presque introuvable, ce qui devient extrêmement compliqué pour faire des aliments "non OGM" à prix compétitif.
    En fait, l'Europe est devenu un acteur mineur dans le commerce mondial du soja et les producteurs brésiliens, argentins, américains ne vont pas s'embêter à produire ce type de soja "non OGM" pour nos beaux yeux, ce marché étant devenu marginal. D'où, impasse.
    Une pensée émue par exemple pour les laiteries qui ont incité (l'an passé) des éleveurs à signer un contrat avec une légère valorisation du prix du lait, avec, en contrepartie, l'interdiction d'utiliser des aliments avec du tx de soja "OGM": aujourd'hui, les éleveurs sont perdants car ces aliments sont hors de prix.
    En réalité, des sondages ont montré que les consommateurs sont peu sensibles à l'argument "non OGM", mais plus sensibles par exemple, à l'image "vaches au pâturage (mais autres problèmes en vue).
    Le marketing avec le "sans" est d'une pauvreté…

    • tout à fait…mais attention, un jour quand on est producteur il faut savoir choisir son marché et se défendre..

      dans ce que vous dites les agriculteurs français semblent estimer que le pari à terme gagnant est de miser sur le monopole du marché national en abandonnant l’idee de compétitivité internationale..il misent GROS sinon tout sur l’image en collaborant de fait avec des gens qui passent leur temps à les traiter d’assassins et d’empoisonneurs..
      mouais….
      .

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Xavier Hollandts est professeur associé à la KEDGE Business School. Docteur et HDR en sciences de gestion, il enseigne l’entrepreneuriat et la stratégie. Spécialiste des questions agricoles, il intervient régulièrement sur ces sujets dans les médias. Ses travaux académiques ont notamment été publiés dans Corporate Governance, Journal of Institutional Economics, Managerial and Decision Economics, ou la Revue Économique.

 

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