La monarchie parlementaire : un régime défenseur des libertés

À l’occasion du Jubilé de la Reine d’Angleterre rappelons nous que les monarchies occupent plus de la moitié des « top 10 » des pays les plus libres et certaines se situent à la première place.

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Queen's 80th Birthday at St Paul’s Cathedral By: Michael Gwyther-Jones - CC BY 2.0

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La monarchie parlementaire : un régime défenseur des libertés

Publié le 4 juin 2022
- A +

Par Alexandre Massaux.
Un article de l’Iref-Europe

Les monarchies parlementaires, comme certains pays du Commonwealth et scandinaves, dominent les classements des libertés économiques et politiques. L’importance donnée au Parlement tout comme la non-politisation du chef de l’État offrent un cadre institutionnel propice à des décisions libérales.

La mort du prince consort Philip Mountbatten, mari de la reine Elizabeth II, a soulevé des questions relatives au rôle de la monarchie dans nos sociétés modernes. Certains en France vont même jusqu’à considérer ce modèle dépassé et estiment qu’il devrait être aboli en faveur de la république.

Pourtant, cette dernière est-elle nécessairement un meilleur régime ? Les indicateurs et classements évaluant le degré de liberté des pays démontrent le contraire : la monarchie parlementaire se révèle efficace en matière de protection des libertés. Sa structure institutionnelle peut l’expliquer : le pouvoir est paradoxalement moins concentré entre les mains d’une seule personne.

 

Les monarchies dominent en matière de libertés économiques et civiles

Le Royaume-Uni n’est pas la seule monarchie parlementaire en Occident et dans le monde industrialisé. En Europe continentale, la majorité des pays nordiques sont, encore de nos jours, des monarchies. En Scandinavie, la Norvège, la Suède et le Danemark sont dirigés par des dignitaires royaux. Tout comme au Benelux, la Belgique, les Pays-Bas et le Grand-Duché du Luxembourg.

Même situation en Espagne. Plus loin, plusieurs pays du Commonwealth sont sous l’autorité de la couronne britannique : le Canada, l’Australie et la Nouvelle-Zélande ont comme chef d’État Elizabeth II, représentée par des gouverneurs généraux. Et le Japon a gardé son empereur.

Il paraît pertinent d’analyser la performance de ces pays en matière de libertés économiques et politiques. L’Index de l’Heritage Foundation de 2021 offre des informations sur les premières. Le classement du Cato Institute de 2020 et les données de la Freedom House donnent des éléments sur les libertés politiques et civiques. Le tableau ci-dessous met en évidence le rang des monarchies dans les deux premiers classements et leur score attribué par la Freedom House. La République française est utilisée comme pays de comparaison.

Plusieurs observations s’imposent. Les monarchies occupent plus de la moitié des « top 10 » des pays les plus libres et certaines se situent à la première place. En matière économique, à l’exception de l’Espagne, toutes sont classées « libres » ou « majoritairement libres ». Les pays du Commonwealth sont, en moyenne, légèrement plus performants que les monarchies continentales.

Le score plus faible de l’Espagne peut en partie s’expliquer, la monarchie ayant été rétablie à l’initiative du général Franco à la fin de son règne. Elle est donc plus récente et c’est un choix politique. Enfin, la principauté du Liechtenstein est absente de ce tableau car elle ne figure pas dans les classements d’Heritage et du Cato.

 

Une politique menée par un Parlement plutôt que par un homme providentiel

Dans tous ces pays, le monarque a des pouvoirs très limités, voire symboliques, contrairement aux républiques présidentielles comme la France ou les États-Unis où le président détient pratiquement à lui seul le pouvoir décisionnel.

Aux États-Unis, le Congrès joue un rôle de garde-fou mais en France, le Parlement apparaît de plus en plus comme une chambre d’enregistrement. La discipline de vote au sein de la majorité et en faveur de l’exécutif présidentiel ne favorise pas le débat politique au niveau législatif.

Dans les monarchies, la vraie tête active de l’exécutif est le Premier ministre, qui tire sa légitimité du Parlement. Là où un Président l’obtient de son élection, le Premier ministre voit son sort dépendre du Parlement qui peut le révoquer. De même, il n’est pas lié à la volonté du chef de l’État. C’est l’une des raisons qui permet à ces régimes monarchiques de mieux fonctionner qu’une république.

Dès lors, quelle différence entre une république parlementaire comme l’Allemagne et une monarchie ? Dans certains pays comme le Royaume-Uni, le monarque possède des pouvoirs utilisables en temps de crise. Ainsi la reine d’Angleterre a un droit de veto qu’elle a déjà fait valoir dans le passé.

Certes, les présidents républicains ont également cette capacité. Mais le fait que le monarque ne soit pas désigné directement par une procédure électorale comme en France ou indirectement comme en Allemagne, empêche une décision purement politicienne. Si le rôle réel du monarque est limité, son rôle symbolique est puissant. Le roi réunit le pays sur sa personne. Son pouvoir moral et exceptionnellement juridique offre une limite au pouvoir des autres institutions.

Telle est la force de la monarchie constitutionnelle : décentraliser la prise de décision avec le Parlement tout en assurant une stabilité de la nation en temps de crise grâce à un dirigeant qui reste au-dessus de la mêlée.

Article publié de 20 mai 2021.

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  • +1 à tout l’article. Mais bon, nous avons tué le dernier roi, alors que fait-on ? En tous les cas il est clair que notre nation erre dans le brouillard, elle cherche en vain un père ou une mère spirituelle, déçue et trahie à chaque élection présidentielle, la colère gronde et monte d’un cran à chaque tour de manège.

    • Vu d’ici, je trouve les Francais royalistes et insulaires. Et c’est dit avec tristesse, sans provocation. Le culte de l’homme d’action providentiel a la vie dure, et ce qui se passe de l’autre coté du mur, on s’en fout, du moment que les gens cessent de le franchir, la misère du monde en entrée, les « casse toi sale riche » en sortie. Les jours de la 5eme sont comptées. Ce n’est pas encore la Sale Gueuse, mais nous n’en sommes plus très loin, et c’est dramatique. A ne plus entrevoir le moindre espoir, un remake d’été 1940 sous une forme ou une autre est probable.

  • La monarchie héréditaire a cela de bon que le Roi ne doit sa place à personne.
    Après que le pouvoir soit détenu par une personne ou par un Parlement, qu’elle différence dans l’absolu? Il reste toujours beaucoup trop concentré. Je ne suis pas convaincu que la démocratie et le parlementarisme soient une fin en soit. Ce n’est pas suffisant. Il faut une structure réellement décentralisée, sans forcément aller jusqu’au fédéralisme, de manière à ce que le pouvoir central ne puisse accomplir tous ses desseins.

    • Le modèle Suisse a des résultats probants. Maintenant, est il certain que ce modèle puisse être transposable a d’autres populations? En France, après le désastre continu de l’éducation nationale depuis près d’un demi siècle?

    • Effectivement, quelle que soit la forme du gouvernement, beaucoup de problèmes seraient évités en commençant par limiter ses prérogatives à la portion congrue. Minarchisme ftw.
      Après à un moment ou un autre, il va falloir trancher: soit on essaie une vraie démocratie, et le modèle suisse peut être une source d’inspiration. Personnellement je suis convaincu qu’il est plus intelligent de voter pour les politiques à mettre en œuvre que pour des hommes qui feront ce qui leur chante.
      Soit on retourne à la monarchie, qui semble culturellement ou inconsciemment adaptée à l’esprit français – certaines propositions royalistes incluant un remarquable niveau de décentralisation et de démocratie directe dans les villes et cantons… En serrant quand même les fesses au cas où un Charles VI aurait les codes nucléaires (mais Macaron me fait une impression si détestable que je ne serais pas surpris d’apprendre qu’il a foutu le feu à ses danseurs exotiques favoris.)
      Le compromis de la Vème, aggravé du calendrier électoral léonin, représente le pire des deux mondes: un pouvoir quasi autocratique sans vision de long terme dynastique.

  • Dans un autre article de ce jour, Contrepoints encense le Luxembourg, la Suisse et l’Irlande. Un seul de ces trois est une monarchie parlementaire.

    J’en conclus que lier monarchisme et performances économiques ou défense des libertés est fallacieux, d’autres facteurs sont bien plus importants, à commencer par ce qui sort des urnes.

    Quant au parlement « chambre d’enregistrement », c’est une simple conséquence mécanique du fait que l’exécutif soit issu du parlement ou du chef de l’état (on ne vote pas pour les ministres). C’est autant le cas aux Etats-Unis qu’ici. Il suffit de voir comment Trump a été blanchi : majorité contre opposition, peu importe le fond du dossier.

    • Trump n’a pas été blanchi, puisqu’il n’y avait à lui reprocher que les calomnies des démocrates!

    • Juste. Mais le fait que le roi (ou la reine) ait un droit de veto permet d’empêcher le premier ministre d’engager tout le pays dans une voie qui ne serait pas acceptable (ou accepté par une majorité).

      La Suisse n’a pas de souverain, mais a l’avantage d’avoir une démocratie directe où tout le monde peut demander à changer la constitution (et il faut une double majorité (du peuple et des cantons/départements) pour qu’une initiative soit acceptée en votation) ou s’opposer à un projet de loi accepté par les députés et sénateurs par un référendum. Donc là aussi, une seule personne ne peut engager le pays.

      Quant à l’Irlande, ne connaissant pas assez, je ne me prononcerai pas, mais je pense qu’elle est tout de même intimement liée au Royaume Uni et a la même mentalité, ce qui peut peut-être expliquer qu’elle s’en sorte mieux que d’autres (en plus des éléments de l’autre article)

  • Nous devrions peut-être reconnaître et faire notre roi le Grand-Duc de Luxembourg, dernier bourbon souverain ayant une descendance mâle.

    • Ah la question dynastique. Les milieux royaliste français (pour ce qu’il en reste), sont divisés entre Légitimistes (partisans de l’application stricte du principe de primogéniture masculine, c.a.d. de la branche aînée de la Maison Capétienne en dépit de la renonciation de Philippe V d’Espagne à ses droits au trône de France) vs les Orléanistes (qui reconnaissent ladite renonciation comme valide et considèrent de ce fait la branche aînée issu de Philippe V comme étrangère, donc non-dynaste selon le principe du vice de pérégrinité).

      Bref, c’est un peu le bordel, et un gros frein à tout projet de restauration de la royauté (qui à mon avis mériterait un vrai débat).

    • Le Grand-Duc de Luxembourg n’est que dynaste au yeux des légitimistes, où il occupent le 35e rang dans l’ordre de succession. Au nom du même vice de pérégrinité, les orléanistes rejettent la lignée des Bourbon-Nassau.

  • ce ne sont pas tant les règles du jeu qui comptent, mais la qualité des joueurs.

    toutefois, les règles peuvent influencer les joueurs…

    • C’est ce qu’on se dit en regardant un match de foot… jusqu’à ce qu’on suive un tournois de golf. Et là on réalise que les règles du jeu ont un rôle souverain et forment (ou informent) en grande partie les joueurs et les arbitres !

  • J’échangerai la république rousseauiste, héritage des Jacobins Montagnards, à n’importe quel moment en faveur d’une monarchie parlementaire et libéral.

    -1
  • La monarchie constitutionnelle a l’avantage de mettre les politiques à leur juste place. Ils doivent s’incliner devant une incarnation qui leur est supérieure.
    Seul inconvénient: priver les membres d’une lignée d’un destin choisi!
    Mais quel avantage de ne pas être obligé d’avoir à subir une République quasi religieuse en lieu et place de la France!

    • Pour parler de l’exemple belge que je connais bien pour le vivre, il est hors de question que le roi mette son veto à quoi que ce soit, c’est au moins ce que je comprends quand vous dites « s’incliner devant une incarnation qui leur est supérieure ». D’abord c’est un pouvoir qu’il n’a pas et ensuite ce genre de situation s’est présentée il y a déjà longtemps : le roi Baudouin a refusé de signer la loi dépénalisant l’avortement. Cela a provoqué un tollé général et le premier ministre de l’époque a trouvé un subterfuge pour passer outre le refus du roi.

      Le roi a juste le pouvoir de mener les entrevues lors des formations des gouvernements. Mener veut dire convoquer qui il veut et cela s’arrête là. Une fois le gouvernement en place, il n’a plus aucun pouvoir.

      Il me semble que la reine Elizabeth n’a pas plus de pouvoir, sans compter les monarchies nordiques ou l’empereur du Japon qui, eux, n’ont clairement aucun rôle politique.

      • Vous ne m’avez pas compris.
        Un monarque, même sans pouvoir, est une institution incarnée plus parlante qu’un conseil constitutionnel, qui s’impose aux politiques et limite leur ambition et leur prétention.
        Churchill ou Disraeli par ex devaient s’incliner devant leur monarque.
        Nos « leaders » en France n’y sont pas contraints et se prennent pour »Dieu parmi nous » par ex.

  • Analyse très intéressante et pertinente.

  • N’en déplaisent à ceux qui se gargarisent de République en oubliant la France, les monarchies constitutionnelles n’ont pas à rougir de leurs résultats.

    • Il me semble que république ou monarchie est d’une importance secondaire. Le Royaume-Uni est avant tout une union comme la suisse ou l’Allemagne dans une moindre mesure. Au contraire en France il y a (eu) une « union » forcée ce qui provoque nécessairement un pouvoir central autoritaire et qui passe par une homogénéisation et un contrôle excessif du territoire. Il ne peut y avoir véritablement de dialogue et de compromis par crainte de la désunion alors la verticalité s’impose.

  • Pardon, mais défininir la place de quelqu’un dans la société uniquement en fonction de sa naissance ne me paraît pas un concept particulièrement moderne… Vous voulez quelqu’un au-dessus de la mêlée, passant sa vie à représenter la France par des petits voyages payés par le contribuable, soit. Mais qu’il soit CHOISI, et pas seulement NÉ.

  • Les commentaires sont fermés.

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