Norwegian Airways : prends l’oseille (publique) et envole-toi !

L’administration française a subventionné à hauteur de 8 millions d’euros Norwegian Airways, une compagnie étrangère en grande difficulté depuis de longues années. Y a-t-il encore un pilote dans l’avion ?

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Norwegian Airways : prends l’oseille (publique) et envole-toi !

Publié le 11 mai 2021
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Par Pierre Robert.

En septembre 2019, lors de son passage à l’émission « Le Grand Jury » RTL-LCI-Le Figaro, notre ministre de l’Économie et des Finances accusait la compagnie Norwegian d’avoir provoqué la chute de la compagnie française XL Airways.

Une vertueuse indignation

 

Elle casse les prix, elle est endettée, mais elle a le soutien public norvégien, et ça je ne peux pas l’accepter.

Dans la foulée, il annonçait son intention de saisir la commission européenne à propos des aides publiques que cette compagnie low cost aurait indument reçues dans son pays et ajoutait :

Imaginez qu’avec l’argent du contribuable, j’aille subventionner XL Airways, Aigle Azur ou d’autres compagnies low-cost.

Un étrange aveuglement

Depuis, notre administration a fait pire en subventionnant à hauteur de 8 millions d’euros cette compagnie étrangère en grande difficulté depuis de longues années.

Plombée dès 2017 par une dette gigantesque due à une stratégie infructueuse d’expansion à marche forcée puis frappée de plein fouet par la crise sanitaire, Norwegian a fini par présenter en décembre 2020 un plan de sauvetage visant explicitement selon son Directeur Général « au maintien des infrastructures critiques et à la création de valeur en Norvège ». Simultanément elle s’est mise sous la protection des lois irlandaises et norvégiennes sur les faillites sans pour autant demander la liquidation de sa filiale française.

Officiellement toujours sous contrat, les 286 salariés de la branche française n’en sont pas moins privés de salaires depuis des mois tout en étant dans l’impossibilité de s’inscrire au chômage ou de bénéficier du régime français de garantie des salaires (ou AGS).

Notre administration a donc soutenu financièrement au nom du « quoi qu’il en coûte », mais sans aucun discernement, une société étrangère dont le statut juridique a été configuré pour lui permettre de payer le moins d’impôt possible et d’échapper aux contraintes de notre législation sociale. Fondée en Norvège, un pays qui ne fait pas partie de l’UE, elle abrite en effet l’essentiel de ses activités en Irlande, un paradis fiscal.

En outre, comme le rappelle le site Air-Journal, la spécialiste norvégienne du vol pas cher a annoncé en janvier dernier l’arrêt définitif de tous ses vols longs courriers et donc la fermeture de sa base de Roissy dont c’était l’unique vocation. L’outil de travail de la branche française ayant manifestement perdu sa raison d’être, il n’y avait donc pas lieu de subventionner son maintien en l’état par des aides publiques.

Norwegian Airways : le retour de l’oiseau prodigue ?

Le comble est que par un tour de passe-passe, les responsables de la compagnie déchue sont en train de la recréer sous une autre forme en la rebaptisant Norse ainsi que le déplorait en mars dernier un communiqué du syndicat national des pilotes de ligne (SNPL) :

Comment accepter qu’une compagnie nouvelle apparaisse, d’un coup de baguette magique, sur les cendres encore chaudes de Norwegian France, reprenant ses acquis et potentiels, alors que les salariés français et l’État français se retrouvent seuls face à la liquidation de Norwegian France ?

Au passage ce communiqué rappelle que l’État français a ouvert le bénéfice de l’activité partielle à Norwegian France et devra pallier les manquements en matière de liquidation et de licenciement des salariés français via l’AGS.

Le robinet de l’argent public n’a donc pas fini de couler.

Norwegian Airways : un réveil bien tardif

Force est de constater que les autorités françaises ont mis du temps à s’en inquiéter. Selon les syndicats concernés, la ministre du Travail Élisabeth Borne et le ministre délégué aux Transports Jean-Baptiste Djebari n’ont pris contact que le 14 avril dernier avec l’Irlande et la Norvège « pour trouver une solution au problème ».

De ce constat découle inévitablement quelques questions, la première étant de savoir ce qui rend possible un tel manque de discernement. On comprend qu’en période de troubles économiques aigus provoqués par des fermetures administratives imposées, il faille adopter une procédure simple afin que les entreprises condamnées à ne pas travailler reçoivent rapidement les aides d’urgence indispensables à leur survie.

Mais dans le cas de Norwegian France, il ne s’agit pas d’une petite structure et les sommes en jeu sont considérables. Perdue dans le dédale de ses procédures, notre administration en est venue à subventionner Icare sans même probablement s’en rendre compte. Cela devrait une fois de plus alerter l’opinion sur les risques de laisser notre technocratie envahissante voler toujours plus haut qu’elle ne devrait. En matière de gabegie, Norwegian, qui n’a sans doute en France aucun actif susceptible d’être saisi, pourrait bien devenir un cas d’école.

On peut alors espérer que le Parlement s’en saisisse et que, s’élevant au-dessus de cet exemple particulier, l’une des deux chambres crée une commission d’enquête pour savoir ce que sont devenus les crédits publics alloués aux entreprises confrontées à la crise du coronavirus, en particulier à celles qui opèrent dans le secteur des transports aérien et maritime.

À un niveau encore plus général, on peut légitimement se demander s’il y a encore un pilote dans l’avion alors que beaucoup de nos concitoyens sont persuadés qu’on peut émettre de la monnaie à jet continu sans que cela ait de conséquence, qu’il n’est pas nécessaire de rembourser la dette publique et qu’il est inutile de protéger les brevets.

À l’aune de tous ces nuages qui s’accumulent à l’horizon, il est vrai que les millions d’euros octroyés à Norwegian ne représentent qu’une bien petite turbulence. Tenter de la contrer pourrait pourtant amorcer un processus vertueux de remise à l’endroit des esprits.

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  • « elle abrite en effet l’essentiel de ses activités en Irlande, un paradis fiscal. »
    :mrgreen:

  • Ce n’est pas grave : c’est l’état qui paye…

  • ayant la vague idée qu’en entreprise c’est un truc simple..je me suis retrouvé lâché à la premiere aide d’un état..

  • Pour tordre le cou au canard de BLM : https://www.latribune.fr/entreprises-finance/services/transport-logistique/norwegian-beneficie-t-elle-d-un-soutien-public-norvegien-comme-le-dit-le-maire-829395.html ( mais ça, c’était en 2019 )

    Pour les huit millions d’€ que l’état français aurait versés à Norwegian, l’auteur pourrait-il trouver confirmation par qui, à qui et quand ces montants auraient été attribués – je n’en retrouve pas d’autre trace que les déclarations syndicales citées dans l’article. Merci

  • Et l’Irlande est loin d’être un paradis fiscal.
    L’Irlande a fait le choix d’impôts sur les sociétés faibles, mais l’impôt sur le revenu y est plus lourd qu’en France.
    C’est à dire que ce pays privilégie le dynamisme économique, l’installation des entreprises et perçoit l’argent via les salariés après coup.
    En France, on prend tout le fric d’abord (parce qu’on sait jamais, hein…) le problème étant que les entreprises, préfèrent aller en Irlande par exemple.

    • En Suède aussi l’impôt sur le revenu est us haut qu’en France. Mais pour les norvégiens comme les suédois il y a retour sur investissement. Pas comme en France où l’argent publique est trop souvent jeté par les fenêtres.

  • Article très mauvais qui s’appuie sur des arguments socialisants pour dénoncer l’inefficacité de l’état … il y a comme un problème de logique.

    D’une manière générale, appuyer son argumentation sur les paroles de notre benêt ministre de l’économie ne peut être qu’une mauvaise idée.

    Norvégien s’est planté malgré les subventions et malgré sa bonne gestion fiscale mais il n’existe pas de compagnie aérienne qui ne soit pas subventionnée. S’en prendre spécifiquement à Norvégien n’a pas de sens.

  • Mais que voulez-vous, personne n’a empêché le petit Bruno LM de rêver de voler quand il était à la maternelle ( pas à Poitiers évidemment)! De là à financer une chimère de plus avec l’argent du contribuable…. comme dit Balthazar…. c’est l’Etat …….!

  • Choqué par 8 millions de subventions à Norwegian mais pas par les 12 milliards annuels donnés à la SNCF.

    « ce qui rend possible un tel manque de discernement »

    286 salariés qui pourraient bien voter.

  • 1. Tenter de récupérer nos sous relève du rêve comme pour les arnaques sur le net.
    2. Ce sont nos énarques et leurs potes de la CGT qui se sont faits rouler dans la farine a force de vouloir sauver un canard boiteux et véreux.
    3. S’il y avait un peu plus d’UE du droit des affaires en place, une simple interdiction de vol de l’espace EU et d’utilisation des infrastructures européennes à l’encontre de Norse tuerait leur projet dans l’oeuf et empêcherait les escrocs de miser sur la concurrence entre les pays de l’UE …..mais ça, nos bons souverainistes de village ne nous en parleront pas…..

  • Surtout que la Norvège est un pays socialiste qui possède un des plus grands fonds souverains du monde grâce au gaz et au pétrole. Ils pourraient s’en servir plutôt que de faire payer la France ? qui est assez stupide pour payer.
    Leur économie a du mal à survivre tellement elle est taxée c’est pour ça que certaines de leurs entreprises sont basées dans des pays fiscalement plus accueillants.… c’est un pays où tout est cher, tout est hors de prix, c’est la direction qu’a pris la France.

  • L’auteur ne semble pas s’émouvoir des milliards qui se sont envolés plus surement que les avions de la compagnie ex-nationale qui les a reçu.

  • Bruno Le Maire ce matin sur CNews « La croissance française meilleure que celle des autres pays européens »
    Voilà une doctrine économique solide et étayée, qui va certainement nous faire rebondir très haut.
    Le pire c’est qu’il semble croire ce qu’il dit.
    Soit il est complètement benêt, soit c’est un formidable acteur.

  • Les commentaires sont fermés.

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