L’État de droit, une espèce en voie d’extinction ?

Le retour à l’État de droit doit se faire si l’on veut qu’il continue de régir nos sociétés dites démocratiques et qu’il survive à la crise que nous traversons.

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Covid-19 in Washington DC BY dmbosstone (CC BY-NC-ND 2.0)

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L’État de droit, une espèce en voie d’extinction ?

Publié le 24 avril 2021
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Par Doriane de Lestrange.

Cela fait désormais plus d’un an que la population française, à l’instar de ses voisins européens et de bon nombre de pays à travers le monde, est privée de certaines de ses libertés les plus élémentaires sous couvert d’état d’urgence sanitaire.

Officiellement instauré pour la première fois durant le premier des confinements par la loi du 23 mars 2020, l’état d’urgence sanitaire avait d’abord été prolongé jusqu’à juillet 2020.

Une loi organisant la sortie de l’état d’urgence sanitaire avait alors mis en place un régime transitoire qui autorisait le gouvernement à prendre des mesures exceptionnelles jusqu’à la fin du mois d’octobre suivant pour faire face à l’épidémie.

Le 17 octobre 2020, l’état d’urgence sanitaire était à nouveau instauré par décret sur tout le territoire français. Il avait été prolongé une première fois par le vote d’une loi mi-novembre 2020.

La loi du 15 février 2021 l’a prorogé une nouvelle fois jusqu’au 1er juin prochain.

On le sait, le gouvernement serait en train de travailler à une sortie de l’état d’urgence sanitaire : un projet de loi est attendu en Conseil des ministres le 28 avril et à la mi-mai à l’Assemblée nationale.

S’il peut paraître anodin de le rappeler, l’état d’urgence sanitaire est une « mesure exceptionnelle » pouvant être décidée en Conseil des ministres et prolongée par la loi en cas de catastrophe sanitaire mettant en péril la santé de la population.

Et pourtant, après plus d’une année d’application, ladite mesure n’a en réalité plus rien d’exceptionnel. En outre, si elle est aussi exceptionnelle et dérogatoire qu’on nous le dit, l’on peut s’étonner qu’il faille passer par une procédure aussi complexe que le vote d’une nouvelle loi pour en sortir…

Les promesses de retour à la normale et les annonces d’assouplissement des restrictions ont été si nombreuses depuis le mois de mai 2020 et si peu respectées, qu’il semble que d’un régime d’exception nous soyons passés à un état pérenne dont le gouvernement peine lui-même à sortir.

Et pourtant, le retour à la normale, c’est-à-dire à l’État de droit, doit désormais se faire si l’on veut que ce dernier continue de régir nos sociétés dites démocratiques et qu’il survive à la crise que nous traversons, car au regard des défaillances des États européens et de l’Union européenne elle-même, cette crise est loin d’être terminée.

À défaut d’action du gouvernement en ce sens, c’est certainement la population elle-même qui finira par se charger de remettre la vie et l’économie du pays en marche, avec tous les débordements, abus, et épisodes de chaos que l’on imagine sans peine et que l’on voit déjà fleurir en Europe.

S’il semble devenu classique de lister les bonnes raisons de maintenir l’isolement et la vie économique et sociale au ralenti, il n’en est pas moins aisé – bien que d’aucuns l’aient oublié – de citer de nombreuses justifications à un retour à la normale.

Le retour à l’État de droit est une urgence

Statistiquement d’une part. Les chiffres, rois des journaux télévisés depuis un an, sont clairs et une lecture a contrario permet bien souvent une vue différente des choses : il est désormais incontestable que la maladie laisse vivre plus de 99 % des personnes l’ayant contractée ; nous n’oserons pas faire ici la comparaison avec les taux de décès induits par la peste ou la grippe espagnole en leur temps…

Comment donc justifier de telles atteintes aux libertés fondamentales si ce n’est, non pas par le danger, certes évident, que le Covid représente, mais surtout pour pallier la faillite constante des ministres de la Santé qui se succèdent depuis vingt ans et qui ont allègrement grignoté les budgets hospitaliers, précarisant toujours davantage le secteur de la santé devenu quasiment incapable de faire face ne serait-ce qu’aux épidémies annuelles de grippe, que tous semblent d’ailleurs avoir oublié cette année.

La gestion calamiteuse du plan de vaccination est d’ailleurs une illustration supplémentaire de l’incompétence qui règne de manière générale en la matière.

Le retour à l’État de droit pour restaurer les libertés économiques

Économiquement ensuite. Est-il encore nécessaire d’expliquer pourquoi ? Si les nombreux décès réellement provoqués par le virus sont une tragédie ayant touché presque tout le monde, d’aucuns considèrent que l’ampleur de la tragédie économique qui s’annonce est sans commune mesure.

Secteurs économiques sinistrés dans leur ensemble, chômage de masse, précarisation de l’emploi, crise financière et de la dette. Les prévisions des économistes sont quasi unanimement pessimistes, voire alarmistes.

C’est sans compter les aspects sociaux qui vont de pair avec une telle crise. Les inégalités sociales n’ont pas été aussi marquées depuis des décennies : que ce soit en termes d’instruction (école à la maison, accès aux nouvelles technologies, retards et décrochages scolaires qui s’amoncellent), de violences domestiques, de solitude des personnes âgées qui se meurent aussi, ne l’oublions pas, de l’isolement qui leur est imposé.

Éviter la maladie, refuser la mort

Philosophiquement enfin. La crise qui dure pose véritablement la question de la place de la mort et de la maladie dans nos sociétés modernes. Que dire de gouvernants et d’une partie de la population qui n’acceptent pas l’idée que, dans une certaine mesure bien entendu, la maladie soit un risque inhérent à la vie humaine, et que la mort en soit le terme inévitable vers lequel chacun de nous chemine inexorablement ?

Ce refus de la possibilité de souffrir ou de mourir sans en contrôler la cause justifie-t-il que l’on sacrifie toute une génération ? Cette vision humaniste héritée des Lumières et par laquelle l’Homme utilise sa raison pour se déterminer lui-même, refusant l’idée de se laisser transcender par quoi que ce soit, n’est-elle pas en train d’atteindre ses propres limites ?

Le philosophe André Comte-Sponvile, qui a osé poser ces questions très tôt, aura d’ailleurs tantôt récolté l’ire des tenants de l’argument sanitaire et tantôt l’approbation de ceux qui osent encore poser la question.

Il semble parallèlement que l’on soit définitivement entré dans l’absurdité alors qu’après une année d’auto-restriction pour sauver principalement nos aînés, l’on décide aujourd’hui d’examiner une proposition de loi visant à permettre leur euthanasie.

Ce n’est plus un état d’urgence ou d’exception

Si nous pourrions énumérer encore bien des raisons de restaurer l’État de droit, ces dernières nous semblent suffisamment illustrer combien les termes urgence et exceptionnel sont largement galvaudés et ce depuis de longs mois.

L’application de ces notions peut-elle en toute logique s’étaler sur une période aussi longue sans leur faire perdre tout leur sens ? Le manque d’adhésion croissant de la population pour les mesures décrétées par le gouvernement n’en est-il d’ailleurs pas une parfaite illustration ?

La lassitude a bien gagné la population qui ne se sent plus dans une situation d’urgence mais bien dans un état de fait pérenne qui perdure depuis trop longtemps. Notre Constitution et notre tradition politique de ces deux derniers siècles ne sont-elles pourtant pas basées sur les principes de la démocratie plutôt que sur ceux de la bureaucratie, de la technocratie ou encore de l’oligarchie ?

Si les promesses faites par le gouvernement venaient une fois de plus à ne pas être tenues, il sera bientôt permis de se demander si nous ne sommes pas en passe de changer de modèle.

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  • J’avoue être toujours dubitatif quant à cet étendard de l’Etat de droit. La plupart des dictatures sont fondées sur le droit.
    A mon avis, il y a deux problèmes de fond. Le premier serait sans doute l’excès de droit consécutif que tout pourrait être arbitré par le droit. Le délirant (de mon point de vue) principe de précaution qui est quelque part l’élément justificatif de tout le délire autour de la gestion du Covid en est sans doute l’exemple le plus emblématique.
    Le second problème, sans doute le plus fondamental, est celui de la qualité des dirigeants politiques. Pour une même situation, un bataillon d’incompétents prétentieux la transforme en catastrophe globale tandis que d’autres la font traverser dans le calme.
    Enfin, je ne suis pas juriste mais il me semble que, pour l’instant, tout ce qui fait par le gouvernement est parfaitement légal, pourtant nous avons basculé dans une forme de dictature.
    Plutôt qu’un retour à un état de droit qu’il ne me semble pas que l’on ait quitté, ce pays a plutôt besoin d’un retour à la démocratie… qui justement ne soit pas empêchée par le droit comme lors des dernières élections présidentielles…

    • « J’avoue être toujours dubitatif quant à cet étendard de l’Etat de droit. La plupart des dictatures sont fondées sur le droit. »

      ??!?
      Vous ne comprenez visiblement pas ce que signifie la notion d’Etat de droit. D’ailleurs vous confondez Etat de droit et démocratie.
      Et vous semblez confondre par ailleurs Lois et Droits fondamentaux.

  • L’état de droit n’est pas bafoué…
    Où est le problème ?
    S’il s’agit de liberté, lesquelles ?
    La liberté est toujours contrainte, la liberté est une utopie.
    Aujourd’hui nous avons une contrainte supplémentaire que l’on le veuille ou non, attendons qu’elle disparaisse complètement.
    Peut être faudra-t-il une vaccination obligatoire ? Ou alors une assurance obligatoire couvrant les risques pour ceux qui ne veulent pas du vaccin.
    Il y a eu une contamination de variole à New York par un touriste, 700 personnes hospitalisées, n’aurait-il pas dû assumer en réglant la facture globale ?
    La liberté sans responsabilité complète, c’est le foutoir !

    • Comme disait Sartre, « on n’a jamais été aussi libre que sous l’Occupation »…

    • Quelle tristesse de voir autant de Français ne pas comprendre ce que signifie la liberté ! Du coup, il ne faut pas s’étonner qu’il y ait tant de gens serviles en France.

    • Pourquoi pas une assurance obligatoire si on refuse le vaccin, ok. Il faut bien sûr y retrancher le cout des vaccins (payés par la « collectivité ») ainsi que les autres soins que l’on aurait eu s’il on était pas mort de ça, et bien sûr l’économie de retraite. Le truc c’est que ça pourrait bien faire un montant négatif tout ça.
      Ca me rappelle les taxes sur le tabac avec l’estimation du cout social. Il y a bien une estimation des économies de retraites ainsi que des couts médicaux évités (car il faut bien mourir de qqch), mais c’est « immoral » de les soustraire…

  • « Si les promesses faites par le gouvernement venaient une fois de plus à ne pas être tenues, il sera bientôt permis de se demander si nous ne sommes pas en passe de changer de modèle. »
    Il est « permis » depuis très longtemps de se poser cette question! Manipulation permanente des indicateurs, opacité entretenue des tests diagnostics, blocage délibéré de tous les médicaments génériqués susceptibles d’enrayer la maladie, censure massive de ceux qui défendent des lignes qui divergent de la ligne officielle, mise en sommeil du Parlement, refus du Conseil d’Etat de trancher les recours contre les principales mesures liberticides…
    Que vous faut-il de plus ?

  • Il ne faut pas confondre « L’Etat de droit », et le niveau et l’exercice et la règlementation des libertés individuelles !
    L’état de droit en fait, est sérieusement menacé quand des étrangers irrégulier égorgent et massacrent quotidiennement sur le territoire de la république.

    • Wikipédia :
      L’État de droit1 est un concept juridique, philosophique et politique. Il implique la prééminence du droit sur le pouvoir politique dans un État, ainsi que l’obéissance de tous, gouvernants et gouvernés, à la loi.

  • Le covid n’est qu’un révélateur de la dérive constitutionnelle de notre pays. Il y a longtemps que nous ne sommes plus en démocratie : un président qui n’a aucune vision pour notre pays, qui navigue à vue en menant une campagne électorale permanente, qui s’arroge de fait, et non de droit, tous les pouvoirs (il suffit de se réclamer la présidence pour ouvrir toutes les portes : cf Benala), tour à tour premier ministre ou assistante sociale, un parlement à la botte, des ministres perroquets chargés de diffuser les éléments de langage… Aucune réforme de nos administrations coûteuses et inefficientes. Nous sommes les derniers dans tous les classements internationaux. Des impôts prétendument en baisse, un tour de passe passe faisant disparaître les impôts « visibles » (impôt sur le revenu, taxe d’habitation…) au profit d’un alourdissement des taxes indirectes (gazole, taxes annexes EDF…). Enfin des subventions « quoi qu’il en coûte » pour acheter les voix de 2022 et que nous allons payer très cher une fois l’élection passée… Tout cela parce qu’un peuple d’assistés a baissé les bras !

  • l’état de droit c’est pour la racaille et les voyous qui s’arrogent le droit de mettre le bordel en France au nez et à la barbe d’un gouvernement qui plie l’échine ; pour tout les autres , l’état de droit n’existe quasiment plus ;

  • l’état de droit c’est l’état du plus fort !

  • L’état de droit et l’état de la gauche écarlate ne font pas bon ménage surtout qu’il y a un troisième larron, la finance internationale et la gauche aime, adore l’argent des autres en plus du notre.

  • Moi ce que je retiens avec cette crise sanitaire et ses mesures liberticides, c’est cette effervescence libérale de beaucoup de gens se définissant défenseurs des libertés individuelles ou plutôt de leurs  » PROPRE LIBERTÉS INDIVIDUELLES « . J’ai toujours su que le libéralisme étaient haïs par beaucoup de monde jusqu’au jour où se sont leurs propres libertés que l’on confisque. Des gens comme ça j’en connais. C’est le monde des faux-c… où seul leur liberté compte et pas celle des autres en temps normal.

  • Il y a longtemps que l’état de droit à eu plomb dans l’aile. Quand un état laisse pulluler des illégaux ,des criminels (Viry), des parvenus qui vivent de notre sueur….

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