Le vaccin anti-Covid à l’épreuve d’une population

Qu’apporte l’étude israélienne d’évaluation du vaccin anti-covid ? Comment cette étude a-t-elle été menée ?

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Le vaccin anti-Covid à l’épreuve d’une population

Publié le 12 mars 2021
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Par Paul Touboul.

Retour sur la vaccination anti-Covid-19 avec la publication dans le New England Journal of Medicine du 14 février 2021 d’un article ayant trait aux premiers résultats de la vaccination de masse réalisée en Israël (Dagan et al. BNT162b2 mRNA Covid 19 Vaccine in a Nationwide Mass Vaccination Setting).

L’étude sur le vaccin anti-covid en Israël

L’étude a été lancée sous l’égide du plus important organisme d’assurance santé en Israël, lequel couvre plus de la moitié de la population. Il s’agit d’une étude observationnelle c’est-à-dire qui réalise un suivi contrôlé des sujets soumis à la vaccination.

Pour pallier le biais lié au fait que l’échantillon traité ait une spécificité propre, chaque sujet vacciné a été mis en parallèle avec un témoin non vacciné tiré de la même source et présentant des similitudes en termes d’âge, sexe, secteur de résidence, vaccination anti-grippe dans les 5 ans, et diverses comorbidités considérées comme à risque d’infections sévères.

D’un total de plus de 3 millions de participants au départ, et en raison de divers critères d’exclusion dont, surtout, l’absence de mobilité, de domicile fixe, ou encore la fréquentation d’un centre de soins dans les trois jours précédant la vaccination, il n’est plus resté que deux groupes de 596 618 sujets chacun. Tous avaient au moins 16 ans et n’avaient jamais eu de test positif au SARS-CoV-2. Le vaccin BNT162b2 mRNA de Pfizer a été administré en deux injections intramusculaires séparées de 21 jours.

Considérant que l’immunité se construit progressivement, le calcul d’efficacité à l’aide de la méthode de Kaplan-Meier a été appliquée à trois périodes : les 7 jours précédents puis ceux suivant la deuxième injection (périodes 1 et 2), enfin, à partir de là, la période 3 étendue jusqu’à la fin du suivi.

Les inclusions ont eu lieu du 20 décembre 2020 au 1er février 2021. Autrement dit, avec le temps, un nombre décroissant de sujets a pu être évalué aux trois moments requis. Les critères de jugement retenus étaient au nombre de cinq :

  • infection au SARS-CoV-2 confirmée par un test PCR positif,
  • Covid-19 symptomatique documentée,
  • hospitalisation pour Covid-19,
  • formes sévères,
  • mort dues à la Covid-19.

Les sujets inclus étaient dans l’ensemble plus jeunes que la population de départ en raison du taux élevé de vaccination chez les gens âgés, lesquels ne représentaient plus que 3 % de l’effectif évalué.

Le vaccin anti-covid : quelle efficacité ?

Durant la période 1, l’efficacité du vaccin à l’encontre d’une infection documentée a été de 46 %, s’élevant ensuite à 60 % puis 92 % (périodes 2 et 3). Plus marquée au début à l’encontre des critères de sévérité (hospitalisation, formes graves, décès), elle a eu tendance ensuite à s’égaliser en phase tardive.

Semblable efficacité a été retrouvée dans les sous-groupes définis par l’âge, le sexe, la communauté d’appartenance, s’atténuant seulement en cas de comorbidités nombreuses. Les courbes d’incidence cumulée en fonction des différents critères de jugement ont montré que l’activité du vaccin se dessinait à partir de J12 pour devenir pleine et entière à partir de J28.

Ainsi tout concourt dans cette étude à appuyer l’intérêt du vaccin BNT162b2 mRNA  dans le contrôle de la Covid-19. Il importe cependant de soulever les points suivants.

Il s’agit d’une étude observationnelle dans laquelle le groupe non-vacciné a été créé en opposant à chaque sujet vacciné un témoin extrait de la population d’étude et considéré comme semblable sur la base de critères prédéfinis. Une telle pratique ne peut exclure l’intervention de biais liés au choix des critères d’inclusion et à la qualité de recueil des données choisies.

On peut regretter que les sujets de 80 ans et plus aient été si peu représentés alors qu’ils restent la cible privilégiée de l’infection et de ses formes les plus graves.

La durée du suivi est limitée. Compte tenu de la date de publication, elle a, pour les cas tardifs, toute chance d’être insignifiante.

Sans remettre en cause l’efficacité du vaccin, il faut souligner que la comptabilisation des contaminés dans chaque groupe, vaccinés et non-vaccinés, incluant également les 15 premiers jours du traitement, donne les chiffres respectifs de 4460 et 6100. Le délai d’apparition de l’action vaccinale a été associé à un taux non négligeable de contaminations, lequel est à mettre au passif du vaccin et en limite l’intérêt.

Rien n’est dit des effets secondaires dont on sait pourtant qu’ils sont à prendre en compte, l’évaluation d’un vaccin étant toujours un compromis entre efficacité et risque.

En conclusion

En conclusion, en dehors de son intérêt en tant qu’évaluation du vaccin anti-Covid  BNT162b2 mRNA dans la vraie vie et à l’échelon d’un pays, l’étude israélienne n’apporte rien de nouveau après celle publiée par Pfizer le 10 décembre 2020 qui, elle, était randomisée mais portait sur des effectifs limités1.

Elle est même plutôt décevante en termes d’efficacité par rapport à d’autres qui utilisaient déjà des vaccins ARN2

De plus, si l’on prend en compte le retard dans la protection lié à la contrainte des deux injections, celui-ci a été associé à un nombre significatif de contaminations, et ce d’autant que la circulation du virus en Israël se maintient à un niveau élevé.

Il faut déplorer enfin qu’aucune attention n’ait été portée à la tolérance qui demeure un facteur non négligeable d’acceptabilité.

 

  1. Polack FP, Thomas SJ, Kitchin N, et al. Safety and efficacy of the BNT162b2 mRNA Covid-19 vaccine ? N Engl J Med 2020 ;383 :2603-15.
  2. Baden LR, El Sahly HM, Essink B et al. Efficacy and safety of the mRNA-1273 SARS-CoV2 vaccine. N Engl J Med 2020 ; 384 :403-16
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  • Au dernières news, on doit prendre un doliprane, toujours lui, avant de se faire vacciner….. Rassurant sur l’acceptabilite par le corps de ces vaccins, dosage ?
    On commence à douter de toutes ces études, trop de mensonges jusqu’à présent, trop de médecins compromis… Cette étude israélienne… Digne du lancet ?

    • Toutes les études ont des biais, des limites, ne répondant qu’à certaines questions mais pas à d’autres. Mêmes pour des études bien réalisées et conduites.
      Quand vous lisez les articles sur ces études, souvent les auteurs eux-mêmes ont compris certaines limites de leur travail et en parlent dans l’article lui-même.
      Le problème bien souvent est l’analyse qu’en font d’autres personnes. Analyse biaisée soit involontairement par manque de recul et de connaissance, soit volontairement dans un but idéologique et/ou politique.

      Ces premiers travaux sont très souvent suivis par d’autres qui valident, précisent, réduisent ou infirment les résultats des premières études. C’est long mais relativement efficace.
      Par contre, cela ne colle pas avec le timing politique, électoral ou journalistique tjrs avide de sensationnel ou de validation facile des idées dominantes « main stream ».

  • « Une telle pratique ne peut exclure l’intervention de biais liés au choix des critères d’inclusion »
    C’est même un très gros biais de ce type d’étude même si la constitution d’un groupe cas témoin essaie d’en limiter les effets. Cela peut sembler n’être que du pinaillage sur des détails mais cela n’a absolument pas la valeur d’études sur des échantillons aléatoires obtenus par tirage au sort.

    Pour faire simple, le groupe de patients qui sont venus volontairement se faire vacciner, en particulier dans les 1ers temps, l’ont fait pour des raisons diverses: réflexions ou inquiétudes personnelles, antécédents médicaux ou autres personnels ou familiaux, exposition personnelle ou professionnelles, milieu familial ou professionnel, origine géographique…etc ou même simplement une propension de certains à attraper tout ce qui passe comme maladies sans pour autant avoir des problème médicaux bien étiquetés.
    Bref, ces facteurs peuvent influer sur la capacité et le risque d’attraper et/ou de développer la maladie tout en restant très difficilement évaluable sauf à faire une étude très pointue sur le mode de vie, l’état de santé et immunologique de chaque personne ce qui est infaisable sur de gros échantillons.

    Pour exemple, je me rappelle sur étude sur des animaux (des rats) avec un tel biais de sélection.
    Cette étude faite par un labo pharmaceutique visait à tester un nouveau psychotrope. Cela faisait partie des multiples études et tests qui ont lieu avant, si elles sont couronnées de succès, de passer aux études cliniques sur l’homme.
    Sur une population de rats de laboratoire, deux groupes avaient été constitués (ceux recevant le médicament et le groupe témoin) de manière « aléatoire » selon ceux qui menaient l’étude. Ils avaient mis ensemble tous les rats dans une grande enceinte avec une seule petite sortie. Ils avaient constitué le groupe de rat devant recevoir le médicament en prenant la première moitié d’animaux qui sortait de l’enclos par la petite sortie…
    Sans s’en rendre compte, ils avaient, in fine, sélectionné les rats les plus curieux, les plus actifs, ceux qui avaient la meilleure vue et odorat, ceux en meilleure santé le jour du test ou, tout du moins, ceux qui avait les meilleures capacité de se déplacer..etc. Les 2 groupes ne pouvaient pas être considérés comme comparables.
    L’étude a été retoquée.

    Donc cette étude israélienne est intéressante car c’est jusqu’à présent la seule sur un gros effectif de personnes vaccinées qui plus est avec la constitution d’un groupe de cas-témoins. Mais il faut aussi en saisir les limites.
    De plus, cette étude ne porte pas sur les cas à risque qui sont théoriquement le cœur de cible du vaccin.

  • au final, cette vaccination de masse a-t-elle eu un intérêt ?

  • Il semble en effet que la courbe épidémique en Israël suit une évolution naturelle. Mais il faut prendre également en considération la durée sur laquelle se fait l’immunisation après injection….et elle est longue.

  • La donnée la plus importante est la baisse du R0 et la durée dans les temps de cette baisse (durée d’immunité et mutations).

    Cela peut nous donner une idée du « monde d’après » (ou ce qui en restera) : tout le monde immunisé par la maladie ou le vaccin, mais nouveau virus endémique impliquant des changements durables dans le « vivre-ensemble » festif …

    (On n’a pas rendu obsolète les préservatifs, même si ce n’est plus à la mode).

  • Cette étude est peut-être fiable. Les vrais scientifiques sauront avoir un avis éclairé Mais à quelques jours d’une échéance électorale, les simples citoyens pourront avoir quelques doutes sur sa neutralité.

  • Ces « vaccins » causent des décès dans les 3 premières semaines, puis une après la seconde injection, apparait l’effet positif.

  • Les commentaires sont fermés.

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