Le rêve de la fermeture des frontières

Plaidoyer à contre-courant des idées reçues en rappelant aux mémoires courtes ce que nous a apporté l’ouverture des frontières.

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Le rêve de la fermeture des frontières

Publié le 10 décembre 2020
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Par Yves Montenay.

La grande mode du jour est la fermeture des frontières. La crainte de l’immigration, des virus, d’une avalanche de marchandises de mauvaise qualité ou de prix très bas ruinant nos commerçants hantent les populations de la grande majorité des pays.

C’est un réservoir de voix très tentant pour les démagogues.

Ces derniers viennent de faire une nouvelle recrue : François Ruffin, de la France insoumise qui déclare dans Le Point qu’il faut « poser des limites à la circulation tous azimuts des personnes »Cette convergence des démagogues est suspecte.

Je vais ici à nouveau plaider à contre-courant des idées reçues en rappelant aux mémoires courtes ce que nous a apporté l’ouverture des frontières.

Bien sûr, comme pour toute question politique, il y a des arguments « pour » et des « contre », mais qu’il s’agisse de l’immigration, des marchandises, des services et des capitaux on a tendance à se polariser sur les inconvénients en oubliant les avantages.

Commençons par l’immigration, qui est relativement chiffrable, dont les effets économiques sont clairs, même s’ils sont mal connus, mais dont les effets  civilisationnels déclenchent les émotions les plus opposées.

 

L’immigration, côté chiffres et économie

Il circule beaucoup de chiffres fantaisistes sur l’immigration, alors qu’il est pourtant facile de trouver les bons. Ensuite on peut en penser ce que l’on veut.

À partir de chiffres exacts (6,5 millions d’immigrés en 2018 d’après l’INSEE), certains sont catastrophés, alors que d’autres les trouvent tout à fait normaux par rapport à nos bientôt 70 millions d’habitants, et à ce qui se passe dans d’autres pays.

Les quelques dizaines de milliers de personnes qui débarquent clandestinement chaque année sur les côtes européennes (pour 500 millions d’Européens), et dont quelques milliers finissent par arriver en France sont présentés comme étant un problème épouvantable.

Il est pourtant clair que ce n’est pas leur nombre qui fait problème, mais la façon de les accueillir.

Quelques centaines de tentes place de de la République, c’est très visible et leur évacuation musclée aussi. Je ne vais pas parler ici des responsabilités de l’ONG Utopia qui les a dirigés illégalement vers cette place, ni de celles de la police chargée de les en déloger.

Je veux simplement illustrer que l’on se focalise sur un petit nombre de personnes alors qu’il y a plusieurs millions d’immigrés et, encore une fois, bientôt 70 millions de Français.

Je précise tout de suite que, pour moi, ces chiffres n’ont pas de sens :

  • à quoi sert d’additionner un médecin algérien et un terroriste islamiste ?
  • Un brillant banquier noir (je refuse le politiquement correct « d’origine subsaharienne ») et un trafiquant de drogue.
  • Ou encore d’additionner un Afghan et un (cas réel que je connais bien) expert-comptable d’origine chinoise diplômé des Arts et Métiers qui se tue au travail pour ses clients, chinois également mais fraîchement arrivés. C’est lui qui les intègre concrètement dans notre économie, notamment en les faisant cotiser à nos caisses de maladie et de retraite, alors qu’ils sont habitués à frauder… tout en travaillant énormément.

 

Une immigration sous contrôle tatillon

Enfin pour rester sur le thème des frontières, ces dernières sont très solides, car, contrairement à ce que l’on entend souvent, la France n’est pas du tout ouverte à l’immigration.

Il faut des conditions extrêmement strictes pour immigrer légalement (conditions pas toujours les bonnes à mon avis mais c’est un autre sujet), et l’immigration illégale est très difficile et dangereuse, et donc très limitée.

Elle est d’ailleurs souvent arrêtée par les pays avec lesquels l’Europe à un accord « anti-immigration » comme les trois pays du Maghreb (Maroc, Algérie et Tunisie) qui bloquent les Subsahariens.

Je suis témoin chaque année du refus d’admettre en France des personnes parfaitement qualifiées dont nous aurions besoin, parce qu’elles n’y ont pas de famille.

Par contre, il paraît que les liens familiaux sont parfois revendiqués en s’appuyant sur des « vrais-faux » passeports, qui ne sont pas recoupés par des tests génétiques contrairement à ce qui se passe dans d’autres pays. Mais l’idée en a été repoussée avec horreur comme « s’immisçant dans la vie privée des familles ».

 

L’immigration a beaucoup apporté, économiquement du moins

Finalement, même si dans un premier temps ils travaillent moins souvent que les nationaux, les immigrants apportent une population active sans laquelle nous serions beaucoup moins développés et plus pauvres.

Nous ne pourrions notamment pas financer nos retraites.

Voyez la réussite des pays d’immigration massive comme les États-Unis ou l’Australie. On oublie souvent que ces deux pays n’ont plus depuis longtemps d’immigration majoritairement « blanche ».

Voyez également les succès de l’intégration allemande du million de réfugiés principalement syriens et afghans arrivés en 2015, malgré des difficultés bien supérieures aux nôtres : des individus n’ayant aucune notion de l’Allemagne, de la langue allemande et ne connaissant même pas en général alphabet latin alors que  nos migrants savent en général lire et écrire en français.

L’Allemagne ayant un besoin aigu d’immigrants pour des raisons démographiques et économiques, les entreprises, les églises et toute la société civile se sont retroussé les manches pour accueillir, former et embaucher. Le contraste est frappant avec la situation française.

Voyez enfin les difficultés des pays d’émigration comme l’Italie et l’Europe du sud-est, qui ne seront plus bientôt peuplés que de parents souvent âgés attendant l’envoi d’argent de leurs enfants travaillant en Allemagne ! Cela dans des pays à retraite minuscule ou très menacée faute de cotisants.

 

Mais à part l’économie ?

On me dit souvent que je réduis les immigrants à leur utilité économique, mais que leur présence entraîne d’autres inconvénients.

Il n’y a pas de réponse générale à cette question s’agissant d’individus de cultures et de compétences extrêmement variées qui vont des meilleures aux pires, y compris quand ils viennent du même pays.

Les Maghrébins nous fournissent d’excellents élèves dans nos grandes écoles, qui restent en général dans des entreprises françaises ou travaillant à cheval sur la Méditerranée, et nous avons déjà parlé des soignants de tous niveaux, alors que l’on met en général l’accent sur des individus aux profils moins sympathiques, qui existent également.

Beaucoup d’Asiatiques sont extrêmement travailleurs et sont parents de bons élèves, mais certains d’entre eux ont amené de mauvaises habitudes, par exemple sur leur façon de régler leurs problèmes avec l’administration.

Et le discours est obscurci par la constatation que l’assimilation des première et deuxième génération ne se fait pas, ce qui est dénoncé alors que c’est normal, mais par contre que l’intégration est rapide dès la première génération, ce qui déclenche en général l’assimilation de la troisième.

Je ne développe pas davantage ce passage sur l’immigration et vous renvoie pour plus de détails à mon article précédent.

 

Marchandises, services et capitaux

À part l’immigration, on pense surtout aux marchandises quand on parle frontières. Les discussions sur le libre-échange sont vieilles comme le monde, et en général les pays sont spontanément protectionnistes sous la double pression des patrons et des employés.

C’est la vieille distinction exposée par Frédéric Bastiat : « ce qui se voit et ce qui ne se voit pas ».

Ce qui se voit, par exemple la ruine des producteurs nationaux, pousse à fermer les frontières.

Ce qui ne se voit pas, le fait que les prix baissent (ou ne montent pas) grâce aux importations. Ça ne se voit pas directement, car personne ne sait ce qu’aurait été le prix si elles n’avaient pas eu lieu.

L’Europe a par exemple bénéficié très largement du développement chinois, ce qui peut se vérifier en regardant des indices de prix des produits internationaux, et en les comparant à l’évolution qu’ils avaient.

Cet impact positif a été très important sur le niveau de vie : minorer de 2 % la hausse annuelle des prix fait une différence qui a empêché nos prix de doubler en 30 ans (durée approximative de l’arrivée massive des produits chinois).

Mais cet enrichissement important des Français ne se voit pas, contrairement à la fermeture des usines qui ont mis au chômage des régions entières.

Quant au fait que cela ait tiré de la misère des centaines de millions de Chinois, la majorité de la population française s’en moque complètement… surtout depuis que la Chine est devenue agressive !

Et quant aux frontières fermant plus ou moins la route aux services et aux capitaux, le raisonnement est analogue avec comme complication supplémentaire que ça se voit encore moins !

Vous êtes souvent au contact avec un centre d’appel situé au Maroc dont la jeune employée a pour consigne de dire que son prénom est Catherine. De même pour les Anglais qui ne savent pas qu’ils parlent avec une Indienne. Or, c’est pourtant cela qui explique que ce service soit en général gratuit.

Encore moins visible est la mondialisation des prestations médicales, d’assurance, des dividendes et autres services ou capitaux qui ne font que faire bouger une ligne sur un ordinateur !

Beaucoup d’Occidentaux se sont enrichis en participant au capital d’entreprises asiatiques cotées sur les places internationales, y compris des retraités modestes par l’intermédiaire de leur fonds de pensions.

De même, l’Inde n’est pas seulement une « usine du monde », très secondaire par rapport à la Chine, c’est aussi un réservoir de matière grise, notamment en informatique et en médecine. On vient de le voir pour un vaccin, et en allant sur place on s’aperçoit du nombre de cliniques dont les clients viennent des pays riches… notamment des États-Unis où les malades sont mal assurés.

Cela contraste avec l’image de l’Inde particulièrement sale et polluée, qui est malheureusement exacte également.

Finalement, il n’est pas étonnant que ce soit La France insoumise qui lance la charge contre l’ouverture des frontières, quand on connaît l’admiration qu’elle a porté à son modèle vénézuélien ultra barricadé, descendant direct du modèle soviétique !

Concluons par un rappel historique : c’est la fermeture des frontières par le blocus continental qui a été une des raisons principales de la chute de Napoléon qui a eu le tort de mépriser l’Angleterre, « pays de boutiquiers » mais dont l’Europe appréciait les marchandises et les services.

Et le Japon, Taiwan, Singapour, la Corée du Sud puis la Chine, ont tiré un immense bénéfice d’avoir ouvert grand leurs frontières aux capitaux et aux compétences étrangères.

Notre niveau et mode de vie vient des Hommes, de leurs compétences par rapport à leur coût et des services qu’ils se rendent les uns aux autres. Se limiter à un pays, c’est s’en priver d’une bonne partie.

Et ce n’est pas seulement matériel, comme on peut le constater sur les réseaux sociaux où les groupes fermés deviennent rapidement extrémistes ou complotistes, car il n’y a plus personne pour ramener aux réalités.

 

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