Immigration : ne pas confondre intégration et assimilation

Un pays assimilant progressivement évite les problèmes des pays multiculturels.

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Immigration : ne pas confondre intégration et assimilation

Publié le 18 novembre 2020
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Par Yves Montenay.

Les derniers attentats islamistes ont relancé, une fois de plus, les demandes politiques de limitation ou de suppression de l’immigration.

À mon avis, c’est tromper l’opinion, car s’il est exact que l’immigration est un sujet fondamental, qu’on en soit partisan ou adversaire, il mérite plus que cette affirmation rapide.

En effet l’immigration est un facteur important de notre démographie, de notre économie, de notre sécurité, de notre identité… il faudrait un livre pour développer chacun de ces points et surtout leurs interactions.

Cet article va donc se borner à un seul thème sous-jacent : celui de l’identité.

Si l’on veut préserver l’identité française, il faut assimiler, mais dans l’esprit des Français, intégration et assimilation sont souvent confondues.

Je vais donc traiter de ces deux notions et renvoyer les autres effets de l’immigration à des articles passés ou à venir.

En préliminaire, il faut déjà se demander ce que l’on nomme immigration.

 

Qu’est-ce que l’immigration ?

De quels immigrés parlons-nous ?

Parlons-nous des entrées annuelles légales en France (ordre de grandeur 200 000, mais sans parler des départs, notamment ceux des étudiants) ?

Parlons-nous des immigrés déjà installés : environ 6 millions, dont 2,4 originaires d’Afrique du nord ou du sud du Sahara, et le même nombre (mais pas les mêmes) ayant acquis la nationalité française ?

Parlons-nous de leurs descendants ?

L’INSEE les compte très précisément par pays d’origine pour les deux premières générations. Comme en général on se polarise sur les immigrants d’origine africaine, disons que le total des deux générations est de l’ordre de 8 millions y compris, semble-t-il, les enfants des couples mixtes.

Pour la troisième génération et les suivantes, est-il encore pertinent d’évoquer l’immigration sauf cas particulier ?

L’immigration n’est pas un bloc d’origines homogènes

De plus, tous ces chiffres suggèrent que l’immigration est un bloc, ce qui est complètement faux puisque l’on mélange non seulement des origines totalement différentes :

  • tant nationales (pensez à l’hostilité et aux violences entre les Asiatiques et certains Maghrébins)
  • que sociales (pensez à la différence entre un médecin algérien et un subsaharien analphabète)
  • ou encore religieuses : un catholique ivoirien n’est pas un Sénégalais maraboutiste dont l’islam est totalement différent de celui d’un Turc… et de plus l’islam turc comprend aussi bien « les loups gris » ultranationalistes que les Alévis, qui ne sont pas vraiment considérés comme musulmans… sans oublier les Kurdes, plus traditionalistes mais opposés à Erdogan.

 

Ainsi une grande partie des soignants que nous honorons à juste titre par ailleurs sont des immigrés ou issus de l’immigration. Cela va des médecins algériens ou roumains à la femme de ménage maghrébine ou subsaharienne de l’hôpital, en passant par les infirmiers et infirmières.

Mais l’utilité (ou non) économique, sociale et démographique de l’immigration sera l’objet d’autres articles.

Car ce n’est pas cela qui tracasse l’opinion, mais l’assimilation et l’intégration que beaucoup confondent, alors que c’est fondamentalement différent.

 

Personne ne s’assimile, il faut plusieurs générations

L’assimilation, c’est de devenir, du moins « dans sa tête », semblable à un Français. Ce n’est pas simple à définir, car les Français sont extrêmement variés.

Réussir l’assimilation a longtemps été la politique de la France. Mais depuis quelques décennies est apparue une attitude plus ambiguë où certains milieux de gauche sont devenus favorables au multiculturalisme et considèrent l’assimilation comme une violence faite à une culture étrangère tout aussi respectable que la nôtre.

Nous verrons que cette idée n’a aucun sens puisque l’assimilation n’est pas décidée, mais est le résultat d’une évolution sur plusieurs générations. Et à titre personnel, je pense qu’un pays assimilant progressivement évite les problèmes des pays multiculturels.

Symétriquement on entend certains milieux de droite dire que « telle personne n’est pas assimilable » comme si c’était une nouveauté grave.

On oublie que personne n’est assimilable, ni l’Italien catholique traditionaliste arrivé il y a 120 ans, ni le Maghrébin ou le Sénégalais musulman d’aujourd’hui.

Si l’on arrive adolescent en France, on ne sera jamais assimilé. On restera dans sa communauté pour des raisons de logement, de langue maternelle, d’entraide etc. C’est normal, et on ne peut le reprocher à personne.

Par contre, les enfants iront depuis leur plus jeune âge à l’école maternelle, avec des Français de souche ou pas, ce qui est une variable importante. Ils seront en général au moins bilingues, voire francophones hors de la maison.

Quant aux petits-enfants, les grands-parents s’apercevront brusquement qu’ils sont français à tout point de vue… ce qui provoque souvent des drames familiaux : « Comment, ma petite fille, j’apprends que tu vis avec ton collègue de bureau français. C’est une honte pour la famille et pour moi en particulier, car je t’avais promise à notre cousin du bled. »

Bref, personne ne s’assimile, mais la descendance se découvre assimilée. Les nombreux mariages mixtes y aident.

Les livres d’histoire nous rappellent que l’immigration polonaise en France d’avant la Deuxième Guerre mondiale était réputée inassimilable, bien que catholique. Cette question a disparu aujourd’hui.

De même celle des Antillais arrivés en Angleterre, alors totalement blanche, après la Deuxième Guerre mondiale, a soulevé d’interminables débats sur leur « différence irréductible » et suscité la création d’un parti politique ressemblant au Rassemblement National français. Ce parti a disparu depuis et les Antillais, en général protestants, se retrouvent aujourd’hui dans le camp anglais face aux Pakistanais.

 

Islam et assimilation

L’islam est réputé être un obstacle à l’assimilation. C’est à la fois vrai et faux : un musulman, plus encore que d’autres immigrants, a souvent une raison de plus de ne pas devenir identique à un Français moyen, pour des raisons qu’il n’est pas utile de rappeler ici.

Bien sûr cette réflexion ne concerne pas les musulmans « bourgeois » ayant une bonne culture française et qui étaient déjà presque assimilés à la France dans leur propre pays.

J’en connais plusieurs qui, bien que vivant au Maghreb, se sentent culturellement français. S’installer en France pour des raisons économiques ou par crainte des islamistes ne fera que parachever leur assimilation.

C’est le cas d’un très grand nombre de spécialistes qualifiés (médecins, ingénieurs…), notamment parce qu’ils viennent en général de familles francophones et que les études scientifiques se font en français au Maghreb.

Revenons au migrant musulman « moyen » : ce n’est pas lui, mais ses petits-enfants qui seront assimilés, et souvent ne seront même plus musulmans.

En effet, si l’on prend le nombre de personnes se déclarant musulmanes dans les sondages, et que l’on calcule le nombre d’immigrés musulmans et leur descendance, on trouve un écart de plusieurs millions, notamment du fait de cette troisième génération.

Plus généralement, je reproche aux sondages sur les musulmans de France de ne pas s’intéresser aux très nombreux Français d’origine musulmane qui ne sont plus croyants. Cela rééquilibrerait beaucoup de considérations.

Ce décalage entre origine familiale et comportement actuel est illustré par la fréquence des prénoms dits « arabo–musulmans » qui seraient près de 20 % selon l’INSEE.

Je suis un peu sceptique sur leur qualification de « musulman », et cela pour deux raisons.

D’abord, plus un prénom est répandu, plus il perd sa spécificité (Christian est-il catholique comme le suggère son prénom ?).

Ensuite, il est de tradition de choisir le prénom d’un enfant parmi ceux de ses ancêtres. Résultat : les titulaires de ces prénoms sont environ deux à trois fois plus nombreux que les musulmans, et ne sont donc plus un indicateur de religion… à condition de s’intéresser justement à cette troisième génération et aux suivantes.

Que faire de ces « une ou deux générations non assimilées » ? En général, il n’est pas nécessaire de s’en soucier puisque les gens vieillissent tranquillement chacun dans sa communauté. Mais pas tous.

Pour les autres, et notamment ceux qui estiment que leur croyance les met au-dessus des lois républicaines, il faut évidemment être très strict sur le respect de la loi.

Pour cette question, c’est une excellente chose que nos responsables politiques s’écartent de la pression morale exercée par l’influence de la gauche indulgente envers l’islamisme. Pression qui a été décrite notamment par Christophe Naudin islamogauchiste repenti dans son Journal d’un rescapé du Bataclan et ses nombreux interviews dans la grande presse française en octobre et novembre 2020.

En résumé, l’assimilation est un phénomène très lent, mais très puissant. Il ne faut pas le confondre avec l’intégration.

 

L’intégration

À l’opposé de l’assimilation, l’intégration peut être assez rapide et objectivement constatée au fur et à mesure de ses succès ou de ses échecs. Il ne s’agit plus de savoir si l’on est devenu intellectuellement « comme les Français », mais si on se comporte matériellement comme eux, notamment au travail et à l’école.

C’est évidemment le cas de la grande majorité, d’abord d’après l’observation quotidienne (collègues, fournisseurs, clients, commerçants, employés en contact avec le public, artistes… et, encore une fois, soignants).

Mais aussi d’après les statistiques d’emploi : le chômage des immigrés était d’environ 15 % contre 8 % pour le reste de la population en 2019.

D’abord, cela signifie que 85 % travaillent.

Mais, comme les médias ne parlent pas des trains qui arrivent à l’heure l’accent est mis, non pas sur les 85 % qui travaillent, mais sur les 7 % de chômeurs en excès.

Je ne vais pas entrer ici dans l’analyse de cet excès qui est très débattu (échec scolaire, mauvaise connaissance de la langue pour certains nouveaux immigrés, discrimination…). Il faut toutefois remarquer qu’il s’agit en général d’un état transitoire qui s’atténue avec l’âge, et selon les sociologues, avec le mariage et les pressions familiales : « tu vas être père de famille, il est temps que tu cherches un vrai emploi, même si tu gagnes moins qu’avec tes trafics ».

L’intégration est l’occasion de rappeler que nous sommes relativement favorisés par le fait qu’une grande partie des immigrants arrivent en connaissant assez bien le français, langue dans laquelle ils ont été scolarisés s’ils viennent de l’Afrique francophone ou dont ils ont une certaine connaissance lorsqu’ils viennent du Maghreb ou du Liban.

Les Allemands qui ont accueilli au moins un million de Syriens ou d’Afghans ont dû intégrer des arrivants qui n’avaient aucune notion de la langue allemande et ne connaissaient même pas l’alphabet latin.

Avec leur sérieux habituel, ils se sont lancés dans un immense effort de formation publique ou privée (églises, entreprises…) qui semble porter ses fruits.

 

Éviter toute affirmation péremptoire

Encore une fois, cet exposé rapide laisse de côté les facteurs démographiques, économiques et sécuritaires et a pour unique objectif de sortir de la confusion entre une assimilation individuellement quasi impossible, et une intégration qui se passe normalement dans la grande majorité des cas.

Donc attention aux affirmations sommaire du genre « tel groupe n’est pas assimilable », ce qui est présenté comme scandaleux et dangereux, alors que c’est évident et normal, et laisse entendre qu’il n’est pas intégrable, ce qui est faux comme le montre l’exemple ci-après.

Je pense notamment à l’intégration en Allemagne des enfants d’immigrés turcs Ugur Sahin et Ozlem Türeci, cofondateurs du laboratoire Biotech qui vient de se distinguer dans la recherche pour le vaccin anti-Covid. Un succès qui les a classés parmi les 100 personnes les plus riches d’Allemagne.

J’ai bien dit « intégration » et non « assimilation » car il est probable qu’ils parlent turc entre eux et avec leurs parents, tandis que leur religion ne nous regarde pas.

Ce sont leurs enfants ou leurs petits-enfants qui seront allemands, et probablement protestants ou athées… ce que le président Erdogan veut éviter à tout prix !

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