Un budget 2021 périlleux et fallacieux

Déficit du budget, trou béant de la Sécu, fausse baisse d’impôts : tous les clignotants sont au rouge.

Partager sur:
Sauvegarder cet article
Aimer cet article 0
Photo by Isaac Smith on Unsplash

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Un budget 2021 périlleux et fallacieux

Publié le 19 octobre 2020
- A +

Par Jean-Philippe Delsol.
Un article de l’Iref-Europe

Les clignotants budgétaires sont tous au rouge. La dette publique, qui était déjà proche de 100 % du PIB en 2019, passera à 117,5 % en 2020 et restera à 116,2 % en 2021.

Les dépenses publiques ont augmenté de 54 % du PIB en 2019 à 62,8 % en 2020 et seront encore à 58,5 % en 2021. Les dépenses augmentent donc énormément et sont financées à crédit.

Le déficit de l’État s’élèvera à 152,8 milliards d’euros l’an prochain après avoir été de 195 milliards cette année ! En 2021, le déficit public serait encore de 6,7 % du PIB après avoir été de 10,2 % du PIB en 2020.

On fera payer les générations futures, c’est-à-dire qu’on les appauvrira sans scrupules. Pour autant, les prélèvements obligatoires restent toujours au sommet, les plus élevés de l’OCDE sans doute encore cette année.

Et pourtant, les prévisions sont moins que prudentes. La prévision de croissance de l’activité retenue pour établir le budget 2021 est de moins 2,7 % par rapport à 2019, alors que les prévisions sont en recul de 4,3 % selon l’OCDE, de 3,8 % selon la Commission européenne, de 6,1% selon le FMI.

Les baisses annoncées de prélèvements obligatoires sont trompeuses

Selon le projet de loi de finances, le taux des prélèvements obligatoires (impôts et charges sociales) diminuerait pour atteindre 43,8 % du PIB (hors crédits d’impôts) en 2021 après une augmentation mécanique de ce ratio en 2020 (44,8 %, hors crédits d’impôts) en raison d’une diminution importante de l’activité, plus marquée que la baisse des prélèvements obligatoires.

Le gouvernement se vante qu’avec les baisses d’impôts prévues pour 2021 (10 milliards au titre des impôts de production, 2,4 milliards pour la première tranche de réduction de taxe d’habitation pour les 20 % de Français qui la payent encore, poursuite de la baisse de l’impôt sur les sociétés pour 3,7 milliards), les prélèvements obligatoires auront diminué de 45 milliards depuis 2018.

Mais le taux de prélèvements obligatoires est de 44,8 % en 2020 et est estimé, de manière optimiste, à 43,8 % en 2021 contre 44,8 % en 2018. Il n’y a donc pas eu de baisse en 2020, et au mieux il y aura une baisse de l’ordre de 1 point de PIB en 2021, soit une diminution espérée de 25 milliards au plus et non de 45 milliards.

Le gouvernement explique que le taux de prélèvements obligatoires a augmenté du fait de la baisse d’activité, et donc du PIB, mais l’inverse devrait être vrai dans un pays comme la France où la quasi-totalité des impôts et taxes sont au mieux proportionnelles aux revenus ou chiffre d’affaires et au pire progressives.

Observons d’ailleurs que les recettes nettes de l’État sont prévues à 296,1 milliards en 2021 contre 309 milliards en 2017 et 2018, soit une baise de 13 milliards.

Hors recettes non fiscales les ressources de l’État étaient de 395 milliards en 2017 comme en 2018 et devraient être de 271 milliards en 2021, soit une baisse de 24 milliards et non de 45 milliards. En euros constants, les prélèvements obligatoires ont été de 1037 milliardsen 2017, 1058 milliards en 2018, et devraient être de 1054 milliards en 2021.

Ce qui ne fait pas 45 milliards de moins, même si on tient compte de l’inflation qui a été très modeste dans cette période.

Une Sécurité sociale à vau-l’eau

Hors prise en compte, en 2020 comme en 2021, de l’impact de la crise sanitaire en matière de surcoûts pour l’assurance maladie, l’ONDAM (l’Objectif national des dépenses d’assurance maladie) 2021 progresse de +6 % pour atteindre un montant de 220,3 milliards d’euros.

Le budget de la Sécurité sociale sera en déficit de 44,4 milliards en 2020 et le budget pour 2021 prévoit encore 27,1 milliards de déficit (19 milliards pour la maladie et 7 milliards pour la retraite), proche du pire déficit atteint en 2010. Il n’est pas prévu de le résorber à court terme puisque l’excès de dépenses sur les recettes serait encore de 22 milliards dans quatre ans !

Pourtant tous les subterfuges ont été utilisés pour minimiser la casse : 136 milliards de dettes ont été transférés subrepticement, par une loi promulguée le 7 août 2020, à la caisse d’amortissement CADES dont la durée de vie a été allongée de dix ans, un prélèvement de 1,5 milliard sera opéré sur les caisses d’assurance complémentaire, des transferts sont prévus à raison de 5 milliards de la Caisse de retraite des industries électriques et gazières au profit de la Caisse de retraite de la Sécu.

En 2021, les recettes non fiscales s’établiraient à 24,9 milliards soit une hausse de 8,7 milliards par rapport à 2020, dont 10 milliards au titre de la première partie du financement du plan de relance par l’Union européenne qu’il faudra rembourser…

Des réductions au détriment de la démocratie locale

Au passage, le gouvernement en profite pour réduire l’autonomie fiscale et financière des collectivités locales. La réduction des impôts de production, soit 10 milliards qui pèsent sur les entreprises, sera opérée pour l’essentiel par suppression de la part de CVAE (issue de l’ex-taxe professionnelle) revenant aux régions et le transfert à leur profit d’une part de TVA.

Mais une partie non négligeable, soit 3,3 milliards, viendra en réduction des recettes de taxe foncière et CET (autre partie de l’ex-taxe professionnelle) payées par les entreprises au profit des communes et intercommunalités, une perte qui sera compensée par l’État, mais sans revalorisation annuelle liée à l’évolution possible des taux.

Ce sera donc autant de marge de manœuvre en moins pour elles. On renforce l’État et la subsidiarité reste un vain mot.

Pendant ce temps, au lieu de faire des économies, la politique multiplie les gadgets inutiles et parfois dangereux. Par exemple le budget de MaPrimeRénov’ qui est augmenté de 2 milliards sur 2021-2022 ; ou encore l’allongement du congé paternité dont le coût, très cher, est estimé à 520 millions par an (260 millions d’euros la première année compte tenu de la date d’entrée en vigueur au 1er juillet 2021) ; ou ce crédit d’impôt de 50 euros que chacun peut percevoir pour s’abonner à un journal, ou cette autre aide de l’État de 50 euros pour faire réparer son vélo…

Tout va à vau-l’eau.

Sur le web

Voir les commentaires (16)

Laisser un commentaire

Créer un compte Tous les commentaires (16)
  • Pauvres communes et intercommunalités auxquelles on va diminuer enfin les ressources issues de la CVAE et CET (ex Taxe professionnelle que Sarkozy se targue d’avoir supprimée alors qu’il l’a remplacée par ces 2 acronymes) ,taxes que les maires se sont empressés d’augmenter dès qu’ils ont eu la main en ne s’inquiétant pas des conséquences pour les entreprises.
    Ressources qui leur permettent de dépenser sans compter en projets pharaoniques inutiles et sans jamais de responsabilités sur les gouffres financiers que cela génère.
    Comment font les autres pays qui n’ont pas cette ressource facile,exemple une fois de plus l’Allemagne?

  • Ah ! non ! c’est un peu court, jeune homme !
    On pouvait dire… Oh ! Dieu ! … bien des choses en somme…
    En variant le ton, – par exemple, tenez :
    Agressif : « Moi, monsieur, si j’avais un tel déficit,
    Il faudrait sur-le-champ que je le comblasse ! »
    Amical : « Mais il doit servir à la populace
    Pour le réduire, faites-leur fabriquer des masques ! »
    Descriptif : « C’est un trou ! … c’est un abîme ! … c’est un gouffre !
    Que dis-je, c’est un gouffre ? … C’est un abysse ! »…

  • tout va à vau-l’eau , mais ça n’empêchera pas ceux qui nous enfoncent de palper une bonne retraite….et après eux le déluge hein ….

    • @Véra – Oui nous sommes dans l’abysse mais nos gouvernants s’en moquent, il ne s’agit pas de leur argent, pas de leur budget : et nous disent-ils les taux sont bas, on peut emprunter ! Et on dépense des sommes astroniques en c………..s – subventions aux EnRI ! par exemple ! On importe des personnes sans ressources, sans compétence, en mauvaise santé qu’il faut prendre en charge, loger, soigner, éduquer, et ce qu’on le veuille ou nom au détriment d’autres priorités.
      On abuse aujourd’hui sur la testomanie qui coûte un pognon de dingue et ainsi de suite !
      Je propose seulement qu’à mauvaise gouvernance on sanctionne le décisionnaire comme dans la société civile !
      Nombre de nos politiciens seraient ainsi à l’abri dans les prisons d’Etat.

  • « les prévisions sont moins que prudentes »

    Elles sont tout bonnement délirantes (insincères en langue de bois policée). Comment croire que le déficit ne sera que de 195 milliards cette année alors que le déficit naturel était déjà sur une tendance d’environ 100 milliards avant la crise et alors que pas un seul centime de dépense publique n’a été supprimé depuis ? Tout est fait pour maintenir l’illusion d’une maîtrise de la situation le plus longtemps possible, pour finalement placer les « partenaires » devant le fait accompli. Ah oui, désolé, on s’est trompé d’environ 100 milliards dans nos prévisions… Ah, et le PIB aussi, on s’est trompé de 3%… Tout de même, quel manque de chance dans les prévisions, n’est-ce pas ?

    • Pour bien comprendre l’ampleur du problème :
      – déficit habituel avant la crise : 100 milliards
      – baisse des recettes fiscales de 10% (PIB à -10%) : 100 milliards
      – injection d’aides supplémentaires (chômdu partiel) : 100 milliards

      A 10 milliards près, trois fois 100 milliards de déficit, dans n’importe quelle langue, ça fait toujours et partout 300 milliards, pas 195. Sauf en France…

  • Quelle blague d’entendre ce matin l’économiste Touati raconté qu’il
    a assisté à une réunion à Bercy en présence de Le Maire et du directeur de l’INSEE ,directeur qui est rentré dans une rage folle quand Touati lui a dit que ses prévisions de croissance post Covid étaient complètement irréalistes et farfelues…sans réaction du ministre.

    • Faut dire que les mecs tout en haut de l’INSEE (ENSAE) ne se prennent pas pour la dernière roue du carrosse. Pas question de s’abaisser à discuter avec la plèbe pour des sommités qui, il faut le dire, frôlent le divin. Touati, c’est nous, c’est la plèbe qui ose contredire le savoir incarné, la révélation ultime, la bonne parole… Non mais quel toupet ! Mais cococomment ose-t-il ? Ce n’est pas tolérable.

  • Il se trouve encore des imbéciles en France pour dire que spolier les entreprises de 65 milliards au lieu de 75 est un « cadeau » (baisse des impôts de production).
    Et d’autres crétins finis de la LREM pour exiger des « contreparties » aux entreprises qui ont bénéficié de tous ces « cadeaux » alors que c’est le gouvernement jui, volontairement les a mis lui-même dans la m…de.
    S’il reste une usine en France qui marche à fond la caisse, c’est bien l’usine à conneries.

  • Et Hidalgo et son égérie Pulvar (dotée d’une planque aussi inutile qu’onéreuse à la mairie) se promettent de tondre la classe moyenne et de dilapider ses économies par des prélèvements sans borne…

  • Je serais curieux de poser la question aux ex présidents, premiers ministres, hauts fonctionnaires etc… ce qu’ils pensent de déficit, budget, PIB quand ils font travailler leurs familles, les amis de feu Chirac

  • « soit une baise de 13 milliards »

    Qu’entendez-vous par là au juste?

  • Les commentaires sont fermés.

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Lors de son discours de politique générale, Gabriel Attal a annoncé deux milliards d’euros de baisses d’impôts pour les classes moyennes, financées par la solidarité nationale.

En langage courant, cela signifie payé par les riches. Les classes moyennes ne devraient pas se réjouir trop tôt : François Hollande avait déjà opéré ce type de transfert fiscal au début de son quinquennat et pour lui, être riche commençait à 4000 euros par mois. Le jeune Gabriel Attal était à cette époque membre du cabinet de Marisol Touraine. Le fruit ne tombe... Poursuivre la lecture

Mercredi 22 novembre, le chancelier britannique (ministre des Finances) Jeremy Hunt a prononcé son discours « Déclaration d'automne pour la croissance », une liste de politiques économiques conçues pour contribuer à la croissance de l'économie britannique. Hunt, ainsi que le Premier ministre Rishi Sunak, ont revendiqué le mérite de la récente goutte de 10,7 % à 5,3 %. M. Hunt a affirmé que ce taux d'inflation plus faible a permis au gouvernement de faire ce qu'il avait toujours voulu faire : réduire les impôts.

Malheureusement, il s'ag... Poursuivre la lecture

Un article de l'IREF.

En janvier dernier, dans un entretien accordé au Journal du Dimanche, le ministre de l’Économie et des Finances, Bruno Le Maire, annonçait la fin du « quoi qu’il en coûte ».

L’examen parlementaire en cours des projets de loi de finances de fin de gestion pour 2023, et de loi de finances pour 2024 montrent à l’inverse que, loin d’être fini, le « quoi qu’il en coûte » se poursuit. Et ce en dépit d’un goulet d’étranglement appelé à se resserrer du fait de l’aggravation de la charge de la dette dans les prochai... Poursuivre la lecture

Voir plus d'articles