Par Gérard-Michel Thermeau.
Ce 6 juillet 2020 disparaît Ennio Morricone, un des plus importants compositeurs de l’histoire du cinéma, et avec Nino Rota, le plus grand musicien italien pour le grand écran. Son nom est associé plus particulièrement à Sergio Leone et au western spaghetti. Mais il a également travaillé avec d’autres grands cinéastes italiens notamment Pasolini, Bertolucci et Dario Argento. Sa réputation internationale lui vaut de signer des musiques pour de nombreux cinéastes, de Verneuil à Tarantino. En 2016, il obtenait la fameuse étoile sur le Hollywood Walk of Fame.
Papier peint et musique
Fils de musicien, il s’est formé de façon très classique à la fameuse Académie Sainte-Cécile de Rome. Comme la musique savante ne fait pas vivre son homme, il travaille pour la télévision et se fait arrangeur pour le monde du show-business. Mais c’est le cinéma qui va lui donner une gloire internationale.
« Je comprends que l’on ait besoin de papier peint dans une chambre, mais je ne comprends pas que l’on puisse prendre cela pour de la peinture. » Ainsi Stravinsky comparait-il la musique de film à la musique « sérieuse ». Pourtant bien des compositeurs éminents ont écrit pour le cinéma, de Saint-Saëns à Philip Glass en passant par Prokofiev et Arthur Honegger. Malgré tout, un certain mépris persiste à l’égard des compositeurs spécialisés dans la musique de film.
Comme d’autres compositeurs de cinéma, il laisse une œuvre « classique » non négligeable mais peu connue où il pratique la musique sérielle.
Une fructueuse collaboration avec Sergio Leone
En 1964, il commence une fructueuse collaboration avec Sergio Leone. Ceux qui ont lu mes articles sur le western connaissent mon peu d’appétence pour le western spaghetti.
La réputation de Leone serait-elle aussi flatteuse sans les partitions de Morricone ?
Imagine-t-on Le Bon, la Brute et le Truand sans l’habillage étincelant et ironique de ce maître incontestable ? Il réussit à transformer le duel final à trois dans le cimetière en grande séquence opératique. Disons-le, il a su donner une apparence de génie à des films qui étaient loin d’être des chefs-d’œuvre impérissables.
Généralement, le compositeur intervient en dernier au cinéma : une fois le montage terminé, il doit composer une musique en fonction des desiderata du réalisateur ou du producteur.
Mais parfois une collaboration étroite se crée entre un cinéaste et un compositeur qui permet d’échapper à cette redoutable routine. Ce fut le cas d’Alfred Hitchcock et Bernard Herrmann, de Federico Fellini et Nino Rota ou plus récemment d’Hayao Myiazaki et Joe Isaishi. La collaboration Leone-Morricone relève de ces ententes miraculeuses qui donnent une identité immédiatement reconnaissable à une œuvre cinématographique.
Ses musiques pour le western-spaghetti ont été souvent copiées et parodiées, rançon de la gloire.
Une carrière internationale
S’il a beaucoup travaillé pour le cinéma italien, y compris des « nanars », sa réputation a largement dépassé les frontières. Il a signé la musique de films fameux tels Mission d’Alex Joffé, Les Moissons du Ciel de Malick, Les Incorruptibles de Brian de Palma ou Le Clan des Siciliens d’Henri Verneuil. Il prête son talent à tous les genres, du film d’horreur à la comédie. Il signe quelques 500 musiques de films à l’image des 500 concertos de Vivaldi. Sa musique n’est ni tout à fait la même, ni tout à fait une autre.
Mélodiste de talent, imposant des thèmes facilement mémorisables, que l’on songe à Chi Mai dans Le Professionnel, il utilise à la fois ses talents de musicien expérimental et de bon connaisseur de la musique populaire dans ses musiques pour le cinéma. Comme ses confrères, il n’a jamais hésité à puiser dans le répertoire des siècles passés. Il savait aussi recourir à des instruments peu communs : l’arghilofono (proche de l’ocarina), le célesta, la guimbarde.
Il recevra un Oscar d’honneur en 2007 et l’Oscar de la meilleure musique à 87 ans, sortant d’une longue retraite à la demande de Quentin Tarantino.
Vous reprendrez bien un petit air d’harmonica ?
Merci, Ennio Morricone de nous avoir tant ému par la puissance de votre musique sur grand écran.
on peut citer aussi John Willams et George Lucas comme autre exemple de symbiose réalisateur compositeur
Dans son domaine, un incontournable.
Il faut se souvenir que lorsqu’il travaillait avec Sergio Leone, contrairement à l’usage commun, Ennio Morricone composait souvent ses musiques AVANT le tournage, sur les indications du compositeur (lui-même fin connaisseur de la musique). Les musiques étaient ensuite jouées sur le plateau, pour servir de référence aux acteurs et aux techniciens.
J’aime beaucoup la ‘ballade’ de Sacco et Vanzetti
RIP maestro.
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