Profiter de la crise sanitaire pour réindustrialiser la France

L’Etat est responsable des délocalisations à cause des contraintes fiscales, sociales et réglementaires qu’il fait peser sur les productions françaises et qui les rendent non compétitives.

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France by Nicolas Nova(CC BY-NC 2.0)

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Profiter de la crise sanitaire pour réindustrialiser la France

Publié le 12 juin 2020
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Par Sébastien Chapotard.
Un article de l’Iref-Europe

La crise actuelle a mis en exergue le problème de la désindustrialisation progressive de la France. D’abord par la médiatique pénurie de masques. Ensuite par des tensions répétées dans la chaîne d’approvisionnement des principes actifs de certains médicaments.

La classe politique en a tiré la conclusion que « délocaliser notre industrie a été une faute majeure » (Bruno le Maire). Mais c’est l’État qui est responsable de cette délocalisation.

Il l’est plus généralement par l’importance des contraintes fiscales, sociales et réglementaires qu’il fait peser sur les productions industrielles françaises et qui les rendent non compétitives.

Réindustrialiser la France ne pourra pas se faire en favorisant le protectionnisme. Une augmentation des droits de douanes ou des barrières réglementaires à l’entrée des produits étrangers en France entraînerait directement des mesures réciproques et donc une diminution des échanges commerciaux. Cette diminution conduirait à un appauvrissement et à une baisse du pouvoir d’achat.

Elle marquerait également le déclin de la France et son incapacité à s’inscrire dans la mondialisation. La solution serait au contraire de profiter de cette envie de réindustrialiser pour permettre à la France de trouver pleinement sa place dans la mondialisation.

La France doit retrouver pleinement sa compétitivité

La réindustrialisation de la France ne pourra se faire si ses entreprises ne sont pas compétitives. Or beaucoup ont dû délocaliser pour rester en vie, et des sites industriels ont fermé. Ce manque de compétitivité s’explique notamment par une fiscalité étouffante et inefficace, car majoritairement concentrée sur des impôts de production.

Ceux-ci ne sont pas liés aux bénéfices mais à d’autres éléments : foncier, chiffre d’affaires, salaires, ou valeur ajoutée. Ils s’appliquent donc sans tenir compte de la situation financière de l’entreprise, qu’elle soit en bonne santé ou au bord du dépôt de bilan. L’impact sur la compétitivité est tel que Nicolas Marques évoque pour l’Institut Molinari « une subvention aux importations ».

En 2019, ces impôts représentaient 13 milliards d’euros en Allemagne contre 75 milliards en France ! Ils sont principalement perçus par les collectivités locales (communes, intercommunalités, département et région).

Les diminuer est difficile et n’entraînerait de toute façon qu’un bénéfice politique faible pour la collectivité car du fait de la complexité de notre millefeuille territorial, personne ne sait précisément quelle collectivité perçoit quelle taxe. Pourtant, sans une diminution globale de ces impôts de production, les entreprises françaises ne pourront reprendre assez de forces.

C’est ainsi que, paradoxalement, pour qu’elles retrouvent une pleine compétitivité à l’international, il faudrait commencer par une réforme de la fiscalité locale.

Des formations professionnelles sont nécessaires pour réindustrialiser la France

La réindustrialisation ne peut se faire non plus sans ouvriers qualifiés. La désindustrialisation de la France a entraîné la perte de nombreuses compétences. Les salariés ne sont aujourd’hui plus adaptés à la demande des entreprises.

Des tensions dans le recrutement étaient d’ailleurs déjà perceptibles dans certains secteurs avant la crise sanitaire. Des formations devraient être mises en place pour deux catégories surtout : d’une part, les chômeurs de longue durée qui peinent à retrouver un travail ; d’autre part, les jeunes qui sont massivement touchés par le chômage (19,6 % en 2019) et qui peinent à se repérer dans la masse des formations pour la plupart assez inefficaces.

Conçues en partenariat avec des entreprises, elles apporteraient de réelles compétences et offriraient de sérieuses garanties d’emploi. À condition bien sûr d’être adaptées aux métiers de demain et aux industries qui doivent être relocalisées en France. À condition, aussi, d’être accompagnées d’un allègement des contraintes étatiques sur la filière.

Ces deux axes constituent deux priorités pour réindustrialiser la France. D’autres éléments restent cependant essentiels. Les autorités administratives et judiciaires doivent cesser de s’opposer aux projets d’entreprise et au travail.

Nous avons vu, avec la fermeture de l’usine Renault à Sandouville et des entrepôts d’Amazon, comment la justice peut entraver le travail industriel. Nous voyons fréquemment aussi comment les normes freinent la réindustrialisation. Les chantiers sont nombreux et doivent être entrepris dès aujourd’hui pour des effets qui ne se feront sentir que très progressivement.

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  • Merci pour cette réflexion pour une réindustrialisation de la France.
    Il s’agit d’une réflexion inspirée par un esprit entrepreneurial qui pourrait, normalement, aboutir à du concret dans un pays qui serait emprunt de libéralisme à tous les niveaux…
    Mais la France, investie par une « fonction publique » omniprésente et incontournable, n’est ni une démocratie ni un pays libéral!…

    • J’ai été dans l’industrie durant 30 et quelques années: on ne décrète pas « d’en haut » un tel mouvement de (re)construction, surtout sur un champ de ruines, les YAKAYFOKONYRESPUKA me fatiguent, ils ne payent rien, ce sont ceux qui sont à l’œuvre qui courent les risques et le parasitage de ces officines perturbent le calme qui sied à la réflexion et à la prise de décision. En tout état de cause il est temps de faire place nette et d’expurger la fonction parasitaire dite publique pour pouvoir avancer, sinon c’est l’échec garanti !
      Pour mémoire : les deux secteurs qui comptent sont la manufacture et l’agriculture les autres n’existent pas sans cela.

  • C’est sympa de reindustrialiser la France mais pour vendre quoi et à qui ?
    La France n’étant pas le centre du monde mais plutôt une petite lune, un caillou , il n’y aucune raison que les autres se laissent faire et ils ont une avance considerable qu’on ne peut plus rattraper .

    • Je nuancerai votre propos. Il subsiste quelques domaines où des producteurs français restent au meilleur niveau mondial : là où seuls comptent le niveau de performance et/ou de qualité et le prix n’a aucune importance pour les acquéreurs. Cela démontre qu’il subsiste un très bon niveau de savoir-faire en France bien que l’absence de perspectives conduise de plus en plus de français (ceux qui sont capables de faire et d’entreprendre) à s’expatrier. Si donc, par miracle (malheureusement je n’y crois guère) le garrot fiscal et réglementaire constitué par l’administration française pouvait être largement desserré voire supprimé, notre pays pourrait retrouver sa place parmi les plus prospères.

      • non c’est trop tard

      • Vous parlez du luxe sans doute mais l’industrie du luxe ne vend pas d’objets il vend un service psychologique, vous êtes riche ou très riche, l’objet est cadeau et pinuts sur le prix de vente. Quand le vent aura tourné avec l’intégrisme écologique tout ça disparaîtra.

  • tant que la France sera dirigé par des énarques qui ne comprennent rien à l’économie et à l’ entrepreneuriat , on ne s’en sortira pas ; les gens qui n’ont jamais rien crée de leur vie ne peuvent pas comprendre ce monde là ;

    • surtout que ce sont eux qui ont créé les problèmes !

    • On se demande d’ailleurs comment font les autres pays pour se passer de cette caste administrative supérieure,il y en a une autre ce sont les X mines très forts en concours aussi (c’était le graal quand il y a bien longtemps j’étais en terminale C) mais après se partagent les fromages et les planques de la république sans être inquiétés le moins du mode sur leurs erreurs en centaines de millions Gohsn,Lauvergeon…

  • « Vendre quoi et à qui » et à quel prix du fait de la fiscalité ,le gvt a exhorté les entreprises françaises à surproduire des masques
    qui leur reste sur les bras car ce même gvt et les collectivités locales s’empressent d’aller en acheter en Asie avec nos impôts.

    • A PCC.
      D’une part, pousser les entreprises françaises à produire des masques alors que l’épidémie est passée est m’en-foutiste et criminel ; d’autre part, vos propos exposent bien la vision « relocalisation » façon pieds nickelés… l’inéluctable « en même temps », crétinerie par excellence ! C’est le Leitmotiv de nos clowns à roulettes : mi février, ils expédient (sous couvert humanitaire), 19 tonnes de matériel (masques, gants, sur-blouses…etc ) en Chine pays producteur, privant ainsi la population française des protections élémentaires… et « commandent » « en même temps » à ce pays, les fameux masques manquant, dont ils martèlent « en même temps » l’inutilité. Maintenant, ils louangent les entreprises françaises qui les fabriquent et « en même temps » les achètent à l’étranger. Fabuleux ! Non ? Cet axiome du « en même temps » constitue le raisonnement « subtil » des cervelles nébuleuses de nos guignols frelatés, qui ne se rendent même pas compte combien ils sont ridicules , grotesques et méprisant face au peuple !

  • Merci aux auteurs sur le fond et de pointer sur les effets pervers de notre complexité dont le coût diffus passe souvent inaperçu. Un point rarement mentionné mais majeur: Dans tous les domaines, l’évolution technologique rapide rend improbable le rattrapage d’un retard accumulé, même faible. Les gens qui ont dû délocaliser ont leur raison et leur savoir faire patiemment bâti n’est pas forcément réimportable sinon dans le discours abstrait. Au lieu de lorgner sur la moinde poule aux oeufs pour lui faire les poches l’État serait bien inspiré, au mieux, d’accompagner des formations de pointe, au pire de ficher la paix aux entreprises. Mais pour ça, à l’évidence, il ne faut pas être dans les palais nationaux.

  • non la réindustrialisation de la france ne se fera pas!
    L’industrie s’installe là ou on la compromet le moins , taxes , syndicats , écologie ,normes etc..
    Les seules entreprises relocalisées se feront avec vos impots

  • Encore un qui a trouvé une bonne planque alors qu’il n’y connaît rien dans ce domaine,Griveaux nommé à la BITD,cela ne s’invente pas,toutefois le T (Technique) va être remplacer par S(Souveraine) on se demande bien pourquoi?

  • Les commentaires sont fermés.

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L'auteur : Éric Pichet est professeur et directeur du Mastère Spécialisé Patrimoine et Immobilier, Kedge Business School.

 

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