École : comment rouvrir ?

Le retour à l’école est prévu le 11 mai, mais les règles sanitaires et autres « gestes barrières » semblent impossibles à appliquer.

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École : comment rouvrir ?

Publié le 22 avril 2020
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Par Jean-Baptiste Noé.

La rentrée des classes étant censée se dérouler le 11 mai, l’intervention de Jean-Michel Blanquer devant la Commission des affaires culturelles et de l’éducation de l’Assemblée nationale était donc particulièrement attendue.

À trois semaines de la rentrée, aucune directive n’a encore été donnée aux établissements et aux communes, ce qui complique particulièrement leurs tâches. Le ministre a apporté quelques précisions utiles, qui permettent d’y voir un peu plus clair. Mais beaucoup d’inconnus demeurent. Surtout, les règles sanitaires et autres « gestes barrières » semblent impossibles à appliquer. Encore une fois, les grandes théories vont se fracasser sur la réalité de ce qu’est l’école.

Une rentrée en trois actes

Toutes les classes ne rentreront pas le 11 mai, la rentrée se fera sur trois semaines :

Le 11 mai : rentrée des grandes sections, des CP et des CM2. Priorité sera donnée aux élèves en zone REP+ et aux petites classes dans les zones rurales.

Le 18 mai : rentrée des sixièmes, troisièmes, premières et terminales, ainsi que les ateliers industriels en lycée professionnel.

Le 25 mai : rentrée de toutes les autres classes.

Simple en apparence, des complexités administratives sont néanmoins introduites. Les établissements scolaires doivent pouvoir faire respecter les normes d’hygiène et les classes doivent être limitées à 15 élèves.

Les élèves et les professeurs fragiles pourront rester chez eux et utiliser les cours à distance. Il sera possible aussi d’être exempté de cours d’éducation physique.

À ce stade, ce ne sont que les grandes pistes qui ont été évoquées. Il reste encore beaucoup de détails à régler et c’est là que les choses vont se compliquer.

Facile en apparence, compliquée dans les faits

Comment choisir les 15 élèves qui pourront assister aux cours ? Que faire des autres et que faire des classes de plus de 30 élèves ? Si l’on divise la classe en deux, le professeur devra-t-il faire deux fois cours ? Si le professeur est occupé à faire cours, il faut alors trouver des surveillants pour encadrer les autres élèves. Où les mettre, puisque les salles de classe seront occupées ? Devront-ils rester chez eux ?

Simple en apparence, cette mesure est en réalité impossible à mettre en œuvre.

« Geste barrière » ? Avez-vous déjà vu des enfants de maternelle ou de primaire ? Comment peut-on croire qu’ils vont rester avec un masque toute la journée, ou bien qu’ils ne vont pas jouer au ballon durant la récréation ? Une fois sortis des classes, ils seront mélangés. Ce qui renvoie à l’incongruité du premier cas : pourquoi limiter le nombre à 15 élèves par classe ?

Qu’en sera-t-il de la cantine ? Apparemment, il faudra étaler la prise des repas. Donc, commencer à 10 h 30 et finir à 14 heures pour que tout le monde puisse déjeuner ?

Étaler la rentrée sur trois semaines ? La belle affaire sur le papier, impossible à réaliser dans les faits. Les institutrices ont des enfants, ainsi que l’ensemble des personnels éducatifs. Beaucoup sont des mères célibataires. Qui va garder leurs enfants pendant qu’elles seront à l’école ?

La fermeture des écoles est déjà incomplète : sitôt fermées, il avait fallu rouvrir des classes afin d’accueillir les enfants des infirmières et de toutes les personnes devant travailler sur site. Certes, l’école sert à apprendre, mais elle a aussi un rôle de garderie. Comment vont faire les parents qui devront aller travailler si l’école ne prend pas en charge leurs enfants ?

Pour se rendre à l’école, encore faut-il pouvoir se déplacer. Or le bruit circule que seuls 50 % des trains et métros seront en circulation le 11 mai. Valérie Pécresse a annoncé qu’il fallait « rationner les transports ». Comment faire alors pour que les personnels éducatifs et techniques (ceux qui travaillent dans les cantines, ceux qui nettoient, etc.) puissent se rendre sur leurs lieux de travail ?

Un déconfinement partiel, comment ?

Le problème de fond vient de la notion même de déconfinement partiel.

Celui-ci est quasiment impossible à mettre en place, car toute l’économie étant liée, il est impossible de n’en déconfiner qu’une partie. Pour que les enfants puissent manger à la cantine, il faut que toute la chaîne logistique et d’approvisionnement puisse fonctionner. Idem pour nettoyer les classes et les couloirs.

Comme à chaque fois, l’Éducation nationale développe de belles théories et, comme à chaque fois, celles-ci se fracassent sur la réalité humaine.

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  • Et si on ne rouvrait pas ?
    En effet cette catastrophe a démontré que le travail a distance via les moyens modernes était possible en matière d’enseignement !
    Je pars du principe que l’éducation est un problème de parents responsables
    (Je sais que c’est un gros mot) bien sûr, et Je sais bien que pour beaucoup l’effet garderie l’emporte bref
    Imaginez une autre organisation, des professeurs triés sur le volet, des assistants de classe chargés de la discipline, un cours enregistré par un prof Accessible à des milliers d’élèves soin en classe, soit chez eux ..
    Avec 100 professeurs on fait le tour de la question des contenus en 3 mois !
    Un écran, un clavier, du personnel pour répondre aux questions et le cours se déroule au rythme de l’élève, un contrôle validant les acquis par des exercices, et hop qu’on soit en Lozère ou a Yaoundé, tous les élèves a Henry 4 à Paris !
    Ce n’est pas du social çà ? au lieu d’être avec des brèles au lycée « Georges marchais » ? à trifouilly les alouettes ou à Bagdad ? ?
    Bon c’est vrai qu’on n’économisera que quelques centaines de milliards par an (Au bas mot (une paille), mais surtout on aurait certainement de meilleurs résultats que l’incurie administrative et syndicale de l’EN ne sont capables de produire.

    • Il est tentant de rester confiné pour éviter la maladie, mais ce serait à vie : en l’absence de vaccin, de remède et de masques le déconfinement progressif va étendre l’immunité collective en réglant le déconfinement selon la capacité d’accueil des hôpitaux. L’idée est que la majeure partie de la population doit être atteinte en limitant les risques vitaux. Dans cette optique, la reprise des cours ne vise qu’à appliquer cette tactique en libérant les jeunes moins fragiles. Les discours éducatifs sur la reprise ne trompent pas, l’année scolaire est terminée,

      • Pourquoi raisonne-t-on encore comme si nous n’avions pas de traitement contre cette maladie?
        Traitement du Pr Raoult dont on a beaucoup parlé (y compris en négatif ce qui doit conduire à s’interroger au vu de ses résultats)
        Mais aussi traitement du Dr Sabine Paillard- Franco:

        Et encore l’abandon de la consigne idiote (merci qui?) qui consiste à ne pas traiter ce coronavirus comme une grippe:

        (à19′)
        Enfin cette nouvelle piste prometteuse de compréhension de la maladie:

        Pourquoi les médias autres qu’alternatifs ne parlent-ils pas de tout cela au lieu d’égrener des nouvelles destinées à entretenir la panique?

        • Minimiser le risque ne vaut pas mieux que l’exagérer. L’important serait de rendre chacun à peu près capable d’estimer correctement les risques qu’il court et qu’il impose à son entourage. Pour cela, la première chose serait de sortir de cette logique médiatique de polémiques, qui veut qu’il faille choisir son camp, sans rien y comprendre, entre des thèses exposées dans des micros-trottoirs par des gamins de 4 ans, leurs parents, et par des « experts » qui passent en hâte de studio en studio parce qu’ils savent bien parler aux foules.

          • Je pense surtout qu’il faut rendre leur pleine responsabilité aux médecins au lieu de les soumettre à des injonctions administratives.

    • Allez donc expliquer cela à Jean Michel TOUVABIEN et au calinotherapie de l’Elysée…Bon courage, mais votre proposition est loin d’être dénué de bon sens.

    • Abracadabrantesque. Littéralement. Un coup de baguette magique et tout est résolu. Reprenez du café cher ami, là vous rêvez.

  • Si on part du principe que le confinage partiel permet le contrôle d’une epidemie, il ne faut rien ouvrir du tout et autoriser uniquement les gens contrôlés à vivre normalement…..
    Il paraît que durant l’enfance il faut être confronté aux virus et bactéries pour se fabriquer une immunité…. On n’aurait jamais dû confiner les jeunes, aux adultes de se protéger… Avec des masques et du savon.

  • je travaille dans une structure accueillant des handicapés ( physique et psychique ) ; les seuls à porter des masques , c’est le personnel , agents d’entretiens compris ; les pièces , chambres et réfectoires sont désinfectés deux fois par jour ; pour l’instant tout se passe bien ; aucun malade ;

  • Le déconfinement à la main lourde, en même temps c’ est possible, et sans se mouiller.

  • A vouloir tout régenter de facon centralisée au mépris des réalités locales, c’est sûr que ça va bien se passer…

  • En même temps quel que soit la méthode il faut bien remettre le pays au boulot !!! alors
    écoles, bars, restos et tous les commerces vont bien devoir rouvrir, l’état ne pourra pas palier au manque a gagner a vitam aeternam, la peur de la maladie ne doit
    pas tuer l’économie et tant qu’il n’y aura pas d’immunité collective on vivra avec comme
    le palu en Afrique mais l’Afrique c’est pas rentable et ça coûte cher.

  • « Le problème de fond vient de la notion même de déconfinement partiel. »

    Bien vu. Le gouvernement a voulu paraître intelligent, faire le malin, donner l’impression de gérer finement la sortie de crise. Il va se retrouver dans une impasse, une de plus. Mais comment est-il possible d’être aussi mauvais, aussi souvent ?

    Les syndicats d’enseignants en rajoutent, dans un impressionnant concours de mauvaise foi assumée, refus du dialogue sarcastique face à un gouvernement empêtré dans la situation absurde qu’il a engendré. Pour le dire clairement, les syndicats espèrent que l’école ne reprendra pas du tout avant l’été. Ils auraient tort de se priver puisque les salaires sont maintenus à 100%. Celui qui est payé à ne rien faire un jour fait semblant de s’étonner de ne plus l’être le lendemain, en exigeant qu’on lui explique pourquoi. Puis viennent les délires sur les « risques » encourus, la mise en danger imaginaire des salariés, alors qu’on sait désormais l’absence de risque. Jusqu’à preuve du contraire, aucun prof n’a plus de 80 ans.

    Le spectacle de cette mauvaise foi syndicale serait jouissif si ce n’était pas dramatique pour le pays. Si ce gouvernement s’en faisait greffer ne serait-ce qu’une, il expliquerait aux syndicats que les grandes vacances ont déjà eu lieu et qu’elles s’appelaient confinement. Surprise ! Ecole en juillet et en août pour tout le monde, et ceux qui ne sont pas présents, rayés des listes. On est en guerre, oui ou non ?

    Par la suite, il sera temps de comprendre que ces sortes de choses doivent être gérées au plus près du terrain, école par école. Autrement dit, la solution est l’autonomie des établissements, ou pour prononcer un gros mot, la privatisation des écoles, ce qui signifie la suppression de 95% du ministère de l’EdNat devenus inutiles. 100% d’écoles privées en concurrence financées par chèques éducation distribués aux parents, ces derniers pouvant choisir de rajouter au pot pour améliorer l’ordinaire.

    • Les enseignants travaillent, mêmes pendant les vacances, ou du moins la majorité surtout en « primaire ».Le confinement donne même plus de travail: il faut en plus de s’adapter à chaque élèves comme il se doit, il faut aussi s’adapter à la réalité des moyens techniques de l’élève qui n’ont pas tous un ordinateur à la maison , ou un seul, pas le haut débit ,des parents peu capables d’encadrer le travail .

  • Derrière tout ceci il y a aussi la nécessité de renvoyer au travail les parents en les « libérant » des enfants…De protéger ces enfants car le nombre d’appels pour violences intrafamiliales se multiplient et se que constatent nombre de pédiatres …l’hygiène assez déplorable chez certains , la malnutrition chez beaucoup..et encore une fois les brimades subies par les tout petits…

  • Si on voulait être juste un petit peu pragmatique, en regardant qui est ou a été victime du Covid-19 au point d’avoir besoin de réanimation ou d’en décéder, on peut en tirer la stratégie suivante:

    Rouvrir l’école pour tous, payer les enseignants de + de 50 ans à rester à la maison jusqu’à la rentrée, faire de même pour le boulot, en tenant compte aussi de cas plus jeunes identifiés fragiles.
    Le confinement des anciens serait recommandé, avec les masques fournis aux concernés…

    Pourquoi je dis ça ? Mes enfants n’ont jamais cessé de travailler, ont été en contact avec des sujets contaminés, ont probablement ramené le virus à la maison en jouant avec leurs enfants.

    Dans toutes leurs interactions avec des dizaines de personnes, un seul collègue de ma belle fille ( qui travaille dans un labo d’analyses) a été testé positif, sans être malade et sans contaminer les autres.

    Pourquoi devraient ils cesser de travailler, alors que le seul en danger, c’est moi dans cette histoire, a moi de me protéger en les tenant à distance; ce que je fait.

    • Presque d’accord. Mais il y a tout un monde où simplement demander aux personnes à risque de se protéger ne suffit pas, et où la protection doit être le fruit d’une coopération consciente entre contaminateurs potentiels et personne à risque. Le type pas fini mais pas fragile non plus qui vous postillonne à la gueule dans la queue du supermarché, comment faites-vous ? La prise de conscience que chacun, même en bonne santé, devait se sentir responsable et contaminateur potentiel a joué pour beaucoup dans les pays orientaux. Je ne doute pas que ce sens des responsabilités règne aussi dans votre famille. C’est aussi mon hypothèse favorite pour expliquer pourquoi la multiplication des tests diminue la contagion : ceux qui se savent positifs se comportent différemment pendant la période où ils sont contagieux. Donc OK, les fragiles se protègent, le reste reprend une activité presque normale, mais avec le sens de la responsabilité envers ceux qu’ils pourraient contaminer. Et comment les enseignants vont-ils transmettre ce sens de la responsabilité à leurs élèves ?

      • Comment ?
        Je ne sais pas, mais faudra s’y mettre avant que le point de non retour ne soit atteint…
        Avons nous le temps de disserter ?

        Et je suis persuadé qu’un traitement différencié selon l’âge et/ou les risques permet de remettre la machine en route.

        Il n’échappera pas à votre perspicacité que je me base sur l’expérience de mes voisins directs suisses et allemands, d’une partie de ma famille qui y vit ou travaille;
        alors je n’invente pas, j’essaye de transposer, sachant que la machine industrielle et commerciale alémanique tournera a plein régime d’ici la fin de ce mois, au moins pour les besoins domestiques, les exportations dépendant des administrations des pays clients.
        (Pour rappel : seuls 7 morts de moins de 50 ans dans toute la Suisse, 0 dans les deux cantons de Bâle)

        Mais peut être suis je trop naïf de croire que ce que font des germaniques les français peuvent le faire…
        Ils ont bien essayé, en vain, de me faire croire à l’armée que c’était moi le Schpuntz qui ne comprenait rien…

  • Rouvrir, même partiellement, permet de casser la « dynamique » négative du confinement.

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Les auteurs : Nathalie Sayac est Professeure des universités en didactique des mathématiques, directrice de l’Inspe de Normandie Rouen-Le Havre, Université de Rouen Normandie. Eric Mounier est Maitre de Conférences en didactique des mathématiques, Université Paris-Est Créteil Val de Marne (UPEC).

 

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