Covid-19 : à quand le ciblage du syndrome métabolique ?

Plusieurs chercheurs font état d’un « important lien direct entre le métabolisme, le système endocrinien et le processus de la maladie virale ».

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Covid-19 : à quand le ciblage du syndrome métabolique ?

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 11 avril 2020
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Par Brice Gloux.

« La présence d’une ou de plusieurs comorbidités liée à la contraction d’une forme grave de coronavirus, et plus généralement l’augmentation constante du nombre de personnes en surpoids ou obèses dans notre pays ne peut nous laisser sans réaction. C’est pour cela que j’ai décidé de rendre obligatoire le Nutriscore sur tous les emballages en plus des supports publicitaire. »

Rapporteur du projet sur la taxe soda et favorable à l’obligation du Nutriscore, c’est peut-être par ces mots qu’Olivier Véran renforcera le projet de loi annonçant une énième restriction des libertés dans quelques mois.

Bien évidemment pour le moment ça n’est pas la priorité, puisque qu’après la sortie de crise sanitaire, il faudra certainement faire face à une crise hospitalière. Crise où le sempiternel « manque de moyens » viendra faire écho dans l’organisation pragmatique et simplifiée du Cerfaland.

Pour en revenir à la citation du départ, si elle n’est peut-être qu’un mauvais présage, les faits présentés sont eux bien réels. Car malgré la multiplication des Plans Santé depuis une vingtaine d’années, près d’une personne sur deux en France est en surpoids.

Quant aux facteurs de risques liés au Covid-19, Santé publique France a déclaré lors de son deuxième point épidémiologique du 2 avril que « 62 % des 1325 cas répertoriés lors de cette surveillance présentait au moins une comorbidité ».

Près d’une personne sur quatre avait un diabète connu, et une personne sur cinq une pathologie cardiaque. L’obésité n’est pas en reste puisque Yazdan Yazdanpanah, de l’hôpital Bichat à Paris, constatait que : « Plus de 80 % des moins de 50 ans qui se trouvent en réanimation chez nous à cause du Covid-19 sont dans ce cas ».

Des comorbidités que l’on retrouve également dans les autres pays

Le CCDC (Centre chinois de contrôle des maladies) présentait le 17 février dernier une étude portant sur 72 314 cas. Si 0,9 % de personnes ne présentant pas de comorbidités constatées sont décédées, on observe que le taux de décès est de 6,0 % pour les personnes souffrant d’hypertension, 7,3 % pour les personnes atteintes d’un diabète et 10,5 % pour les personnes souffrant de pathologies cardiovasculaires.

En Italie, sur les 3200 personnes décédées jusqu’au 19 mars 2020, 1,2 % ne présentait pas de comorbidités, tandis que 23,5 % en avait au moins une. Aussi 73,8 % souffraient d’hypertension, 33,9 % de diabète, et 30,1 % de cardiopathie ischémique.

Aux États-Unis enfin, une étude préliminaire établissait que sur les données de 7162 personnes atteintes du Covid-19, 37,6 % présentait au moins un facteur de risque. Le diabète (10,9 %), les maladies respiratoires chroniques (9,2 %) et les maladies cardiovasculaires (9,0 %) étaient les affections les plus fréquemment signalées. Ces chiffres ne disent pas grand-chose puisque ces affections sont, malheureusement, communes dans le pays : « On estime que 10,1 % des adultes américains souffrent de diabète, 10,6 % de maladies cardiaques et 5,9 % de maladies respiratoires chroniques ».

Néanmoins, les chercheurs ont découvert que 78 % des patients admis en unité de soins intensifs avaient au moins un problème de santé sous-jacent : notamment le diabète (observé chez 32 % des patients), une maladie cardiovasculaire (29 %) ou une maladie respiratoire chronique (21 %).

C’est dans ce contexte qu’une étude est parue dans Nature le 2 avril dernier, dans laquelle les chercheurs font état d’un « important lien direct entre le métabolisme et le système endocrinien et le processus de la maladie virale ». Pour cela ils s’appuient sur différents points.

— Une étude de 2006 concluait que des antécédents connus de diabète et d’hyperglycémie étaient des prédicteurs indépendants de la mortalité et de la morbidité chez les patients atteints du SRAS. L’une des hypothèses était que cela pouvait être du au fait que ces patients présentent un état inflammatoire les prédisposant à une libération accrue de cytokines. Or, dans le cas qui nous intéresse, le Covid-19 produit un choc cytokinique dans la dernière phase de la maladie, entraînant la défaillance de plusieurs organes.

— Le second point met en jeu la fragilisation du système immunitaire en lien avec l’inflammation métabolique. Une étude chez des souris démontre un dysfonctionnement prolongé de la réponse immunitaire face au MERS-CoV, dans le cas où ces dernières présentaient un diabète de type2.

— Un troisième point est en lien avec les récepteurs auquel se lie le coronavirus pour entrer dans la cellule, les récepteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine 2 (ACE2). Les auteurs reprennent l’hypothèse d’une autre étude du 11 mars dernier selon laquelle l’expression de ces récepteurs serait augmentée chez des patients traités pour de l’hypertension ou un diabète, et ils seraient donc plus susceptibles d’offrir au virus une porte d’entrée dans la cellule.

Les auteurs concluent que si : « le COVID-19 n’est pas une maladie métabolique en premier lieu, le contrôle métabolique du glucose, des taux de lipides et de la pression artérielle est essentiel chez les patients atteints. Cette approche est importante pour traiter les complications métaboliques et cardiovasculaires bien établies de cette comorbidité primaire. De plus, le contrôle efficace de ces paramètres métaboliques pourrait représenter une approche spécifique et mécaniste pour prévenir et améliorer les effets aigus de ce virus en réduisant la réponse inflammatoire locale et en bloquant son entrée dans les cellules. »

Il va de soi que dans le contexte actuel, la priorité est de tenter de soigner du mieux possible les personnes déjà atteintes. Toutefois, dans le cadre d’une levée de confinement, progressive ou totale, il paraîtrait judicieux de mettre en avant la prévention du syndrome métabolique. Car il ne s’agit pas ici d’éviter la contamination, encore moins de donner un remède miracle contre le Covid-19, mais bien de prévenir le risque de complications importantes lié à celui-ci.

Ce syndrome métabolique n’est pas à proprement parler une maladie. Il se définit plutôt comme l’addition de certains troubles métaboliques, à savoir un tour de taille élevé associé à au moins deux des critères suivants :

  • un taux élevé de triglycérides : égal ou supérieur à 1,7 mmol/L, (150 mg/dL).
  • un faible taux de HDL : inférieur à 1,03 mmol/L (40 mg/dL) chez un homme et à 1,29 mmol/L (50 mg/dL) chez une femme.
  • de l’hypertension artérielle : supérieure ou égale à 130 mmHg pour la pression artérielle systolique et à 85 mmHg pour la pression artérielle diastolique.
  • un taux élevé de glycémie veineuse : égale ou supérieure à 5,6 mmol/L (100 mg/L).

Parfois encore appelé syndrome de résistance insulinique, il est fortement associé au risque de diabète, de maladies cardiovasculaires ou encore d’accident vasculaire cérébral. Et donc prévenir ce risque, essentiellement par l’alimentation, c’est limiter le risque de complications associé au Covid-19, et par conséquent, c’est limiter l’engorgement dans les unités de soins intensifs. Cette prévention, au demeurant utile en toute circonstance, s’avère donc primordiale dans le contexte sanitaire actuel.

L’importance de la prévention

Cette prévention, l’État, au travers des différents plans et autres politiques de santé publique, s’en porte le garant depuis une vingtaine d’années. Pourtant, au regard de la prévalence en constante augmentation d’un certain nombre d’affections, malgré toute la bonne volonté de ceux qui les conduisent, difficile de ne pas admettre que ces politiques sont un échec. Et malheureusement les chiffres de comorbidité du Covid-19 nous le rappellent.

Préférant s’enfermer dans des principes nutritionnels non fondés qu’il martèle à l’envie, préférant être dans le respect des normes et du cadre en vigueur plutôt que de sauver des vies, il fait payer aux citoyens son addiction cerfaïque et son centralisme boulimique. Alors si votre santé et celle de vos proches sont une priorité, rappelez-vous toujours que pour l’État ça n’est pas le cas. Dans ces conditions, le mieux est de s’en libérer, et de penser par soi-même pour se protéger.

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  • D’accord sur le fond de l’article. et notamment l’echec des politiques sanitaires pour lutter contre le fléau que représente l’obésité, porte ouverte aux maladies les plus envahissantes de nos sociétés (cancer, diabete, maladies coronariennes etc). Il me reste toutefois une interrogation :

    Si chacun doit être responsable de sa santé (idée que je partage volontiers), je m’inquiète lorsque je vois le comportement de beaucoup.

    Celui qui se laisse aller « volontairement » et s’expose ainsi consciemment, OK il a choisi. Qu ‘il assume sa responsabilité.

    Mais pour les imbéciles (oui oui il y en a), ceux qui n’ont pas les moyens intellectuels ou psychiques, Quel degré de responsabilité sont-ils à même d’assumer.

    Cette question me taraude moi qui suit liberal philosophiquement et economiquement. Doit-on les « abandonner » ? Et sinon, comment les aider ? Il s’agit pour moi d’une vraie interrogation ethique. Et si quelqu’un pouvait m’aider à trouver un début de piste, je suis soncèrement preneur

    Alain

    • on met en face ces individus supposément irresponsables mais souvent préférant un plaisir immédiat à un bénéfice à long terme non pas l’etat mais d’autres individus.. il faut que la relation soit une relation claire d’entraide avec reconnaissance..ce n’est pas le cas avec l’etat..

      il faut que la personne « aidée » le réalise..
      en outre il faut supposer que la grille d’analyse initiale soit « objective » placer au dessus de tout l’espérance de vie.. or ce n’est pas le cas, une vie sans aucune prise de risque est invivable pour certains.

      jordan peterson affirme que l’armée us a déterminer que elle était incapable de faire faire une tache productive à un individu dont le QI est inférieur à 83..

      mais écoutez les membres extinction rebellion..notre liberté nos opprime. Et eux affirment être des lumières.

      • quand on cherche des indices pour savoir si une population vit « bien » on regarde des critères comme perseverance de vie..or il y a du vrai mais il faut garder un certain recul..
        on peut aisément aller trop loin..

    • Et bien, regardez dans les pays (Suisse, Pays-Bas…etc) où la couverture santé est en grande partie privée et où les individus ont juste l’obligation de souscrire à une assurance santé quelle qu’elle soit. Ils ne sont pas « abandonnés ». Ils choisissent leur niveau de couverture, c’est de leur responsabilité.

      Même les irresponsables majeurs au sens psychiatrique du terme. Ces personnes sont sous l’équivalent de tutelle ou curatelle et ce sont d’autres personnes qui choisissent pour eux. Quant à ceux de cette catégorie qui sont isolés, il y a des services sociaux qui peuvent les aider avec la nomination judiciaire de tuteurs ou curateurs. Ces services sociaux peuvent venir de l’Etat ou de fondations privées.
      Franchement, quand on voit les services sociaux français pléthoriques servant à tout et n’importe quoi souvent dans un but électoraliste, et laissant souvent les plus démunis sur le bas-coté, il n’y a pas de quoi vouloir préserver un tel système.

      Par contre, ce que vous évoquez est un excellent épouvantail pour dissuader les français d’envisager autre chose que la Sécu!

  • Comme quoi l’interdiction de l’exercice physique quotidien ad libitum pourrait bientôt donner lieu à son remplacement par des exercices physiques obligatoires à heures dites en cohortes respectant l’espacement, afin d’éviter aux dirigeants de se faire traîner en justice pour mise en danger de la santé par engraissement dans l’oisiveté…

  • Comment peut-on être responsable de sa santé (même quand on n’est pas un imbécile) quand les informations grand public diffusées (d’aucun dirait matraquées) sont pour la plupart sans fondement voire erronées ?

    Quand on s’aperçoit des années plus tard que les recommandations données dans le passé l’ont été sur des bases fragiles ou absentes, sinon contrefaites, comme l’exposition au soleil, le sel, les graisses, le cholestérol, l’hydratation, etc. ou plus généralement le mythe de la pyramide alimentaire.

    Tous ces sujets ont subit des revirements à 180°, certains récents.

    Illustration : https://www.contrepoints.org/2019/10/08/355219-comment-letat-vous-rend-obese

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Xavier Hollandts est professeur associé à la KEDGE Business School. Docteur et HDR en sciences de gestion, il enseigne l’entrepreneuriat et la stratégie. Spécialiste des questions agricoles, il intervient régulièrement sur ces sujets dans les médias. Ses travaux académiques ont notamment été publiés dans Corporate Governance, Journal of Institutional Economics, Managerial and Decision Economics, ou la Revue Économique.

 

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