Les « Frugal four », ces pays qui montrent la voie en matière de budget européen

Qui sont ces « frugal four », ces pays qui s’astreignent à une rigueur budgétaire ? Et comment font-ils ?

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Les « Frugal four », ces pays qui montrent la voie en matière de budget européen

Publié le 9 mars 2020
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Par Alexandre Massaux.
Un article de l’Iref-Europe

Le budget de l’Union européenne 2021-2027 est actuellement en discussion et suscite des dissensions entre les frugal four soutenus par l’Allemagne (devenant ainsi les frugal five) et les « amis de la cohésion » soutenus par la France. La sortie du Royaume-Uni prive l’UE de son second contributeur net et oblige, comme l’IREF l’avait prévu, les institutions européennes à faire des choix qui divisent les États. Pour autant, plusieurs éléments montrent que les frugal five méritent d’être suivis.

Les « frugal five » comme modèle de gestion budgétaire

Frugal five n’est pas une alliance anodine et spontanée d’États. Ce sont des pays de la « Nouvelle ligue hanséatique », un groupe de pays qui s’opposaient dès 2018 aux projets européens du gouvernement français : ce dernier souhaitait augmenter les dépenses au niveau de l’UE.

Les frugal five partagent le fait d’avoir une gestion vertueuse des dépenses publiques. En effet, les cinq pays ont tous un excédent budgétaire : en 2018, l’Allemagne a un excédent de 1,7 % du PIB, la Suède et le Danemark 0,8 %, les Pays-Bas 1,5 % et l’Autriche 0,2 %.

Si les trois derniers avaient un déficit budgétaire en 2015, ils ont tous su le résorber. De même, si le Danemark, la Suède et l’Autriche sont respectivement les quatrième, cinquième et sixième pays de l’UE ayant une dépense publique élevée, des efforts ont été faits pour la diminuer ou éviter de l’aggraver.

Ainsi, entre 2015 et 2018, la dépense publique du Danemark est passée de 54,53 % du PIB à 50,94 %, celle de l’Autriche de 51,13 % à 48,35 % et celle de la Suède se maintient à 49 %. Quant à celle des Pays-Bas, elle a diminué de 44,61 % à 42,05 % tandis que l’Allemagne stagne entre 44,04 % et 44,57 %. En comparaison, la dépense publique de la France reste à 56 % du PIB.

En outre, cette rigueur budgétaire ne s’est pas faite au détriment de la démocratie. Bien au contraire, ces pays sont parmi les plus libres du monde. Selon l’Human Freedom Index de 2019, le Danemark est le sixième pays le plus libre au monde, l’Allemagne le huitième, la Suède et les Pays-Bas onzième ex-aequo et l’Autriche treizième. Là encore un score bien meilleur que celui de la France qui est à la trente-troisième place.

Dès lors, ces cinq pays s’avèrent être un exemple de bonne gestion budgétaire et politique. De plus, ils représentaient à eux seuls 50 % des contributions nettes au budget l’UE en 2018. Avec la perte du Royaume-Uni, le poids de ces pays devrait donc augmenter. Ils sont aussi ceux qui contribuent déjà le plus au budget européen en fonction de leur Revenu National Brut. Une hausse de leurs contributions serait donc difficile à accepter.

Le danger d’un budget accordant plus de subventions

L’une des causes de la discorde est liée à la Politique Agricole Commune. Les subventions agricoles impactent déjà les discussions sur le libre-échange en créant des fractures dans ce domaine. La Politique Agricole Commune représentait 37,8 % du budget européen pour la période 2014-2020.

De plus, comme l’a révélé le New York Times, ces subventions profitent à certains dirigeants d’Europe centrale : en Hongrie, le gouvernement possède de nombreuses terres agricoles qui ont été vendues aux alliés politiques du gouvernement. De même, la compagnie agricole Agrofert, dirigée par le Premier ministre tchèque aurait touché 42 millions de subsides européens.

Dès lors la PAC est devenue un outil promouvant un capitalisme de connivence, où les États utilisent les fonds publics européens au profit de personnes proches du pouvoir. À l’échelle européenne, 80 % du budget de la PAC est capté par 20 % des agriculteurs bénéficiaires.

On comprend que dans une telle situation, les frugal four se montrent réticents envers une hausse des contributions européennes. Au final, les subventions européennes ont créé des dérives et ont amené un pourrissement du débat politique au sein de l’UE : il n’est pas improbable que les sanctions contre la Pologne et la Hongrie en matière de violation de l’État de droit soient liées au fait que ces deux pays soient les premiers bénéficiaires des aides européennes.

Les subventions sont sources de dépendance et empêchent les pays bénéficiaires de transformer leur économie pour être vraiment indépendants financièrement.

À l’inverse, la République tchèque devrait devenir un contributeur net aux alentours de 2025, alors qu’il est le pays d’Europe centrale et orientale qui perçoit le moins de subventions par rapport à son RNB.

Ainsi permettre davantage de souplesse en matière de dépenses européennes reviendrait à punir les bons éléments au détriment de ceux qui abusent du système des finances publiques de l’UE. Une telle situation n’amènera que des tensions entre les États membres.

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  • Le drame français est que l’Etat est un très gros employeur! Ainsi le ministère de l’agriculture emploie 16 000 salariés alors que le ministère allemand n’en occupe que 900! Le problème est là: il faut payer et occuper cet armada d’employés qui se régalent de normes, statistiques, contrôles et autres contraintes difficiles à gérer par les seuls payeurs c’est-à-dire les pauvres agriculteurs.
    Avec 6 millions de fonctionnaires (l’Allemagne n’en a que 3 millions pour 15 millions d’habitants en plus), la France est tellement technocratisée qu’il lui est impossible de réduire les déficits.
    Autre exemple: une petite ville de 20000 habitants gère un office de tourisme avec un budget de 600 000€ par an dont 500 000 sont mangés par les salariés. Il ne lui reste que 100 000€ pour gérer l’utile!
    Le problème concerne toutes nos collectivités: les hôpitaux, les Régions, les comcom, les communes….
    Comme c’est là le principal vivier électoral de nos Politiques, rien ne changera et la France continuera de s’endetter sur le dos de nos enfants et petits enfants….
    La galère…..

    • Cela s’appelle une occupation intérieure.
      16.000 fonctionnaires pour 1 million de producteurs : ratio 1 fonctionnaire pour traiter les affaires de 62,5 producteurs agricoles.

    • Si cela peut s’arrêter, mais malheureusement dans le mur. Les politiques (si on peut appeler ça comme ça) clientéliste sont tellement ancrées et bénéficient à tellement de personnes qu’on ne pourra jamais en sortir par le haut.

  • C est sur que si on doit augmenter le budget de l UE pour augmenter les subventions aux paysans, c est debile ! ET ces pays ont raison de s y opposer (bon soyons realiste, s ils avaient une FNSEA et un electorat agricole qui a un poids important ils chanteraient probablement une autre chanson …)

    Apres si l UE decide de reorienter ses depenses, ca peu se discuter. En particulier si ca permet de mutualiser les depenses : autrement dit on supprime des conction au niveau des etats pour les transferer au niveau europeen

  • DONC LE COUT NET POUR LES FRANCAIS EST…
    l’équivalent de nos budgets suivants:
    Médias, livre et industries culturelles 586 750 028 Ministre de la Culture
    + Sports, jeunesse et vie associative 1 217 185 999 Ministre des sports, ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse
    + Immigration, asile et intégration 1 812 344 347 Ministre de l’Intérieur
    + Économie 2 357 023 068 Ministre de l’Économie et des finances
    + Outre-mer 2 372 468 247 Ministre des outre-mer
    + Action extérieure de l’État 2 868 357 179 Ministre de l’Europe et des affaires étrangères
    + Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales 2 941 821 464 Ministre l’Agriculture et de l’alimentation
    + Culture 2 961 178 255 Ministre de la Culture
    + Relations avec les collectivités territoriales 3 468 044 158 Ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales
    + Administration générale et territoriale de l’État 3 970 364 789 Ministre de l’Intérieur
    + Justice 9 388 907 510 Garde des sceaux, ministre de la Justice
    + Travail et emploi 12 984 499 742
    + Écologie, développement et mobilité durable 13 246 014 340 Ministre de la Transition écologique et solidaire
    + Cohésion des territoires 15 153 621 889 Ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, Premier Ministre

    WAHOOOOO…. Heureusement que nous avons l’Union Européenne qui nous sauve de la guerre!

    source Article 97 et annexe état B de la loi du 28 décembre 2019 de finances pour 2020

    • Intéressant de voir comment l’état gaspille l’argent des français: 13 milliards pour l’écologie, 15 pour la cohésion des territoires?

  • Sans trop se tromper, nous pouvons déjà prédire qu’avec le coup de mou lié au coronavirus, l’économie marchande va déguster, tandis que la fonction publique ne bougera pas, ce qui augmentera mécaniquement la dette: bis repetita de 2008.
    Alors que l’on chante les louanges des systèmes dits « durables », nous avons sous nos yeux un système intenable.

    • Ce matin encore, un article de Bruno Le Maire qui s’inquiète du prix du pétrôle pas forcément bien pour la France. Avec la baisse de TVA perçue, tu m’étonnes!
      Alors effectivement le coup de mou de l’activité, lié au coronavirus, couplé aux charges fixes toujours plus importantes va avoir un bel effet ciseau sur notre capacité à tenir un budget.

  • Qualifier de « rigueur budgétaire » le simple fait d’équilibrer son budget est déjà un signe de déliquescence intellectuelle.

  • La France est malheureusement à la traîne et ne montre pas du tout la voie. Au lieu de tenter de saborder les « frugal five », elle ferait mieux de prendre exemple sur eux!

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