Vers des retraites redistributives, évolutives et… indéterminées

Personne ne sait aujourd’hui quelle sera l’évolution du nouveau régime des retraites. Tout dépendra du facteur politique.

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Vers des retraites redistributives, évolutives et… indéterminées

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 17 janvier 2020
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Par Patrick Aulnas.

Nous allons lentement sortir de l’épisode conflictuel réforme des retraites. Il laissera des traces parce qu’il a divisé profondément les Français. Quelques idées de base méritent d’être rappelées car elles ont été largement occultées : la réforme est redistributive mais évolutive, avec un avenir indéterminable, la valeur du point pouvant être amenée à baisser.

Une ambition redistributive

Le projet de retraite par points a principalement une ambition redistributive. Il vise l’égalité. Comment ?

D’une part, en remplaçant les 42 régimes actuels par un seul régime par répartition. L’accumulation des points au cours de la période d’activité professionnelle obéira au même principe pour l’ensemble des actifs, ce qui est loin d’être le cas aujourd’hui.

D’autre part, en favorisant globalement les retraités les plus modestes au détriment des cadres supérieurs et des professions libérales. Les très fortes retraites seront plafonnées, les retraites les plus faibles seront augmentées.

Évidemment, cette réalité est largement occultée dans le débat, qui est devenu politicien, avec toutes les petitesses et les arrière-pensées inhérentes.

Démocratie et dérives autoritaristes

Ce projet sera adopté par le Parlement et deviendra loi puisqu’une majorité parlementaire démocratiquement élue lui est favorable. Les syndicats réformistes (CFDT, UNSA) respectent la démocratie en discutant du contenu du projet sans s’opposer à son principe. Il est possible évidemment de prôner le retrait du projet et de le dire. Nous restons alors dans le jeu démocratique.

Mais nous en sortons si les blocages, la violence, les menaces sont utilisées. L’arrêt de la circulation des trains et métros, les coupures de courant, le blocage des dépôts de carburants, l’arrêt des raffineries dans le but d’obtenir le maintien du statu quo, toutes ces actions sont par essence anti-démocratiques. C’est une évidence, mais elle semble oubliée dans les médias.

La CGT, Solidaire-SUD, la gauche radicale (LFI, PC, trotskystes divers, etc.) s’opposent donc au fonctionnement normal de la démocratie. Ce sont des organisations favorables à l’autoritarisme et parfois même au totalitarisme.

Un avenir indéterminable

L’avenir à long terme n’est jamais prévisible et les régimes de retraite n’échappent pas à la règle. Des hypothèses peuvent cependant être faites, selon la vision de l’avenir des parties prenantes.

La sensibilité sociale-démocrate, très affaiblie politiquement en France (le PS est inaudible !), est surtout représentée par la CFDT. Si cette organisation syndicale puissante est favorable à la retraite par points, c’est pour l’utiliser comme vecteur de redistribution. La retraite par répartition doit alors devenir la principale source de revenus de la grande masse des retraités. Dans une perspective de faible croissance et de vieillissement de la population, la social-démocratie conduit à réduire progressivement les retraites élevées pour maintenir un niveau de vie acceptable aux retraités les moins favorisés, par transferts sociaux publics. La valeur dominante est alors l’égalité.

La sensibilité libérale modérée voit la retraite par points comme la retraite de base octroyée par l’État à l’ensemble de la population. C’est une première strate, obligatoire et universelle. Mais des régimes complémentaires facultatifs pourront être établis. Ils résulteront d’initiatives collectives ou de choix individuels et seront essentiellement des régimes par capitalisation. Ainsi, trois strates pourraient apparaître :

  • la retraite par points (répartition)
  • une retraite liée à l’activité dans telle ou telle entreprise ou tel secteur (capitalisation)
  • une retraite individuelle résultant de l’épargne personnelle (capitalisation)

La valeur dominante est alors la liberté.

Personne ne sait aujourd’hui quelle sera l’évolution du nouveau régime de retraite. Tout dépendra du facteur politique.

Si les actifs s’appauvrissent, les retraités aussi

Il existe quand même une certitude, qui a été honteusement bafouée par tous. Dans un système de retraite par points, la valeur du point ne peut pas être garantie. Inscrire dans la loi qu’elle ne peut baisser constitue un grossier mensonge. Si nécessaire, la loi sera modifiée. Il est évident que ce sont les conditions économiques du présent, dans un pays donné, qui déterminent le montant d’une retraite par répartition.

Puisque les actifs payent les retraites des inactifs, lorsque les actifs voient leur niveau de vie s’effondrer, il est impossible que les retraités maintiennent le leur. Cela est vrai quel que soit le régime par répartition, le régime actuel n’échappant pas à la règle.

Les exemples historiques sont pourtant disponibles. La chute de l’URSS à la fin du XXe siècle a ruiné le pays et réduit de nombreux retraités à la misère. Plus près de nous, les retraités grecs ne cessent de voir leur retraite diminuer depuis la crise de 2008. Huit années successives de récession ne pouvaient conduire à autre chose.

Le monde de Bisounours proposé aux Français n’existe pas. Une crise économique profonde n’épargne personne.

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  • Cette description (un socle par répartition avec un budget équilibré par adaptation du point, et des compléments par capitalisation plus ou moins individualisés) est celle du projet d’origine, que beaucoup de libéraux sont prêts à accepter.

    Mais quel sera le résultat réel ?

    • Tout dépend du plafond de la retraite par répartition. A 3 PSS et 28% de cotisations, il n’y a pas de complémentaire possible.

  •  » Les très fortes retraites seront plafonnées, les retraites les plus faibles seront augmentées. »
    quelle connerie … les retraites les plus fortes ne représentent rien en volume par rapport aux besoins des plus faibles..
    la vérité c’est qu’on va vraisemblablement fiscaliser la retraite et la faire payer par les classes dites moyennes pour protéger la fonction publique..

  • la valeur du point ne peut pas baisser…qu’est ce que ça veut dire?

    le projet vise l’égalité de quoi.. ???

  • La baisse des points … Si la retraite est recalculée chaque année pour les retraités ….mais ce n’est pas ce qui est envisagé ,pourtant cela devrait être la règle. La baisse des points n’influe que sur les futurs retraités ,erreur dramatique conduisant le système a la ruine et entraînera les futurs retraités dans la misère.

    • les retraités représentent deja aujourd’hui 16 millions d’électeurs qui votent… tous, … et sans leur pouvoir d’achat c’est 10 millions de chômeurs..
      ah ben oui va falloir réfléchir

    • Comment faire baisser la valeur du point sans baisser sa valeur nominale ?
      Avec l’inflation, bien sûr !

  • pourquoi ne pas plafonner les retraites pour un couple? a 3 smic par exemple
    puisqu’on donne des avantages fiscaux aux couples
    c’est qu’on prend en compte leur situation non?
    donc retraite plafonnée pour un couple et réversion
    ou retraite individuelle par individu (fiscalité individuelle ) et réversion au choix (meilleure retraite sans réversion)

    voila des idees !

    • La France n’a pas besoin d’idées mais de pognon , ton pognon.
      Est-ce que tes idées rapportent a l’état ? Je ne pense pas donc , poubelle.

  • Vous semblez ignorer que la réforle prévoit de s’appliquer jusqu’à 3 PSS, anihilant de fait une complémentaire par capitalisation sauf pour les très hauts revenus.
    D’autre part, il est facile d’arguer de la démocratie por critiquer les bloqueurs en tous genres. Certes, ils ne sont pas des démocrates, mais le gouvernement non plus. Le pouvoir macronien, usurpé à la faveur d’une élection pervertie, ne rend pas compte au peuple français (ce qui serait démocratique) mais aux factions qui ont porté E. Macron au pouvoir.
    Cette réforme fait partie, comme d’autres, de l’agenda imposé par le pouvoir non démocratique de la Commission Européenne. Les syndicats ont été consultés, tant au niveau rutopéen que national, pour la fome. Ils ont beau jeu ensuite, d’adopter des postures, histoire de canaliser, puis étouffer la contestation.

  • Que le débat est confus ! Personne n’y comprend rien.
    La vérité est que, dès l’origine, le problème est mal posé. Cela ne date pas de la réforme proposée par M. Delevoye, mais la faute de M. Delevoye est de ne pas y avoir remédié.

    Le problème est mal posé, parce qu’on veut poursuivre, avec le même outil, deux objectifs dont les logiques sont différentes (la solidarité et la capitalisation de droits), et cela se traduit par une ambigüité du statut des cotisations de retraite : ces cotisations sont-elle un impôt ? ou une épargne obligatoire ?

    En fait, elles sont plus ou moins les deux à la fois ; et la conséquence est que chacun s’emmêle en raisonnant tantôt dans une logique, tantôt dans une autre.

    • La solution est de séparer les problèmes et de créer deux dispositifs indépendants : l’un pour la solidarité, l’autre pour la capitalisation de droits.
      – la solidarité doit être financée par l’impôt (un impôt assis sur tous les revenus et pas seulement sur cotisations des salariés).
      – la capitalisation de droits (pour assurer aux imprévoyants, que nous sommes tous, le maintien de leur niveau de vie d’activité) doit se faire par une épargne obligatoire (une épargne gérée en toute clarté sous la forme d’un compte en euros).

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