Budget 2020 : l’État fait l’économie de… 47 fonctionnaires

47 fonctionnaires en moins, c’est supprimer le nombre de fonctionnaires qu’il y a dans un village de 570 habitants, parce qu’en France, une personne sur 12 est fonctionnaire, une personne en âge de travailler sur 5 est fonctionnaire.

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Budget 2020 : l’État fait l’économie de… 47 fonctionnaires

Publié le 5 octobre 2019
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Par Olivier Maurice.

« Je le redis, je lance un appel à tous les parlementaires, de la majorité comme de l’opposition. Regardons les masses de dépenses publiques sur lesquelles nous sommes prêts à réduire cette dépense en échange de transformations structurelles ».

Il y a des jours où on se pose des questions sur la liberté d’expression : sommes-nous vraiment obligés de tout tolérer ?

« Plus c’est gros, plus ça passe » a dû se dire Bruno Le Maire en endossant son costume de Fantômas réformateur et libéral qui va sauver la France. « Si je le dis, c’est que c’est vrai. »

Le gouvernement va donc réduire les dépenses (en les augmentant de 5,1 milliards d’euros) et se transformer structurellement, en réduisant significativement le nombre de fonctionnaires… de 47. Non, ce ne sont pas 47 000 postes qui seront supprimés. Non, vous avez bien lu : il s’agit bien de 47,47 postes. L’année prochaine, dans la fonction publique d’État, il y aura 47 fonctionnaires de moins !

Quarante-sept : ce n’est même pas l’épaisseur du trait, ce n’est même pas une minuscule fraction de la marge d’erreur : c’est 0,034 % de l’effectif du seul ministère des Finances, c’est 0,00085 % de fonctionnaires en moins ; c’est deux mille fois moins que le nombre de fonctionnaires qui n’exercent pas dans leur administration ou dans leur corps d’origine, qui sont détachés ou en disponibilité et donc soit placardisés, soit en train de faire tout autre chose ; c’est un départ à la retraite sur 1000 qui ne sera pas remplacé.

On se demande ce qui est pire : le mensonge éhonté sur des dépenses qui baissent en augmentant ou l’entourloupe et l’outrecuidance de présenter un chiffre aussi mesquin ? C’est vrai, on va transformer structurellement l’État gargantuesque, on va dégraisser le Mammouth : on va lui faire perdre du poids, 0,0000085e de son poids, ce qui correspondrait quand même à faire maigrir un pachyderme préhistorique de 100 grammes, d’une pomme, d’une toute petite pomme.

 

Fonctionnaires partout

Quarante-sept fonctionnaires en moins, c’est supprimer ceux qui sont en poste dans un village de 570 habitants, parce qu’en France, une personne sur 12 est fonctionnaire, une personne en âge de travailler sur cinq est fonctionnaire.

Le ministère de l’Économie et des Finances à lui seul emploie 60 000 fonctionnaires de plus qu’au Royaume-Uni, 80 000 de plus qu’en Allemagne, 10 000 de plus qu’aux États-Unis qui comptent presque cinq fois plus d’habitants que notre pays.

Et la liste est longue. Le ministère de l’Éducation nationale emploie 1,1 million de personnes, c’est plus que deux fois plus que Gazprom, le géant énergétique russe qui est la plus grande entreprise privée européenne en termes d’effectifs, c’est deux fois Amazon, huit fois Apple, douze fois Google. À l’époque, il n’y avait guère que l’Armée rouge pour rivaliser en termes d’effectifs avec notre Éducation nationale. Mais depuis la chute du Mur, ça y est : nous sommes les champions !

 

Fonctionnaires, impôts et manque de moyens

Si encore cette gabegie de moyens humains donnait des résultats économiques, sociaux, culturels…

Mais la charge de personnel de la fonction publique est loin d’être la conséquence d’investissement : elle s’effectue principalement au détriment des moyens et des salaires. C’est avant tout une charge subie, la résultante d’années de recrutements pléthoriques, de vaines tentatives pour tenter de camoufler le chômage chronique, d’idéologie centralisatrice et administrative.

L’état des commissariats, des hôpitaux, des écoles, des casernes, des routes ne cesse de se dégrader.

Les frais de personnels dans la police représentent 90 % du budget… et pour le reste : l’informatique, la peinture des locaux, les véhicules, l’essence, les analyses demandées par la police scientifique, les munitions, les uniformes, les gilets pare-balles, la facture du plombier pour déboucher les toilettes ou celle de l’entretien du photocopieur… il faut se débrouiller.

 

Réformer comment ?

On peut épiloguer longtemps sur le nombre de fonctionnaires qu’il y aurait en trop (entre 350 000 et un million selon les méthodes de calcul)… ou en moins (si on prend comme point de référence et de comparaison certains pays), mais cela nous ferait entrer dans une guerre des chiffres interminable : comment déterminer le bon chiffre ? Par comparaison (ce serait placer le débat sur le terrain mouvant de l’exception culturelle française), par décision populaire (ce serait encourager l’escalade démagogique), par volontariat politique (avec tous les risques de dérive totalitaire que cela implique), par idéologie (et on sait que celles-ci ne vont jamais que dans un seul sens) ?

Aucune entreprise de taille importante ne s’est jamais réformée de l’extérieur, elles se sont toutes réformées de l’intérieur par un travail long et fastidieux mobilisant l’intégralité des personnes concernées. Ces changements, toujours difficiles et délicats, nécessitent deux choses dont la fonction publique française aurait grand besoin : la stabilité de la direction et la mobilité des employés.

En France, un ministre n’est pas si tôt installé qu’il pense déjà à son prochain poste, et le statut des fonctionnaires grave dans le marbre l’impossibilité de modifier leur mission.

Une organisation, quelle qu’elle soit, ne se réforme que si les personnes qui la composent y trouvent un intérêt et si les cadres et dirigeants sont assez stables et assez forts pour maintenir le cap pendant la tempête.

 

Conséquence et non cause

Pourquoi réformer si ne n’est pour rendre le travail des fonctionnaires plus efficace, voire tout simplement possible ? Parce qu’en fin de compte, ce sont tout autant ceux qui utilisent et ceux qui dispensent les services, qu’ils soient publics ou non d’ailleurs, qui ont à pâtir des conditions déplorables et du manque de moyens.

Qui n’a pas attendu une demi-heure dans un commissariat, le temps que l’officier en charge de recevoir une plainte ne trouve un stylo ou attende que le système informatique fonctionne ? Qui n’a pas attendu pendant des heures aux urgences parce que le système ultra complexe de planification et de réalisation des analyses et des examens est totalement embouteillé ? Qui n’a jamais rempli un nombre incalculable de fois des formulaires incompréhensibles et redondants ?

Les fonctionnaires devraient être les premiers bénéficiaires de la réforme, parce que pour augmenter la productivité, l’efficacité, la pertinence, la qualité de la fonction publique, il n’y a aucune autre solution que d’augmenter les moyens mis à leur disposition et de revaloriser leur travail.

Améliorer le service rendu se traduira d’abord par une amélioration des conditions de travail : un meilleur environnement de travail, de meilleurs outils, une plus grande efficacité personnelle ; et donc par une professionnalisation…  et donc par une augmentation des salaires et des qualifications, par la rationalisation et l’externalisation des tâches subalternes…  et donc par une diminution des effectifs.

 

Service et moyens

Ce n’est pas davantage de moyens humains que réclament un peu partout les fonctionnaires dont la colère gronde de plus en plus : dans la police, les hôpitaux, les écoles… mais l’amélioration de leurs conditions de travail et d’avoir enfin les moyens matériels, financiers, organisationnels, et surtout l’autonomie indispensable à la bonne conduite de leur mission.

Nous ne sommes plus au début du XXe siècle, on ne peut plus sortir les gens de leur campagne, les habiller d’un uniforme rouge et bleu, les aligner en rang et les envoyer courir dans les champs la fleur au fusil.

D’ailleurs, les manifestants des ronds-points du mois novembre dernier  ne réclamaient pas davantage de services publics mais bien davantage de services (au sens services rendus) publics.

Nous ne sommes plus au XIXe siècle : le citoyen est un consommateur, et l’État ferait bien de comprendre rapidement que toute entreprise qui fournit des biens ne satisfaisant pas ses clients va à l’encontre de graves problèmes surtout si elle ne se réforme pas pour améliorer la qualité de ce qu’elle produit.

 

Il n’y a pas plus sourd…

Mais le gouvernement a refusé d’essayer de comprendre ce que la population en colère a tenté de lui dire : « moins d’impôt et plus de service public » : « c’est incohérent ».

Tout comme il refuse d’écouter les fonctionnaires qui essayent d’alerter sur la dérive pachydermique qui les pousse au désespoir. Il préfère écouter ceux dont l’objectif depuis plus d’un siècle est de transformer la France en parc d’élevage de prolétaires obéissants, identiques et calibrés. Il préfère tenir un discours démagogique et technique sur des chiffres et des objectifs.

Diminuer le nombre de fonctionnaires n’est pas un objectif politique : c’est à la fois un impératif, une conséquence et une preuve : celles de la nécessaire réforme de l’État, de l’amélioration de la qualité de service et de la diminution des coûts.

Réforme qui manifestement n’a pas lieu et n’est pas prêt de se produire.

 

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  • Les politiques n’ont pas le pouvoir qu’ils affichent..
    Notamment lors qu’ils affichent des intentions de réguler l’administration .ils n’en ont pas le pouvoir.
    L’administration règne en france , vous pouvez voter ce que vous voulez

    il faudra une revolution sanglante pour défaire la dictature des corps constitués

  • il va avoir besoin de beaucoup de fonctionnaires notre freluquet national , ne serait ce que pour se faire réélire ; tout ces fonctionnaires ce sont tout de même quelques millions de voix dans les urnes ;

  • Un article salutaire; merci à Olivier Maurice.
    Dans ce pays, l’envahissement administratif a pris une telle ampleur que nous avons atteint un point de non retour.
    Les couts directs et induits de cette dérive régalienne vont cannibaliser tout ce qui nous reste de secteur industriel et commercial.
    Nos jeunes générations l’ont bien compris en ciblant par leurs études et leurs diplômes les « planques » administratives…. Un geste de survie!

  • Comparer l’effectif de l’éducation nationale avec ceux de Gazprom, Amazon, Apple et Google n’a pas une grande signification.
    Idem pour celui de l’armée rouge, même si on perçoit l’idée (pas toujours vérifiée d’ailleurs) qui sous-tend cette comparaison.

    • Non ce n’est pas significatif, mais on peut comparer aux voisins:
      Allemagne 850.000 avec 1,5 millions d’élèves en plus,
      France 1.133.000 salaire de 32.000 euros comparé aux 47 pour les allemands.

  • Ok, on a tous la certitude qu’il faut baisser le nombre de fonctionnaires.
    Mais il faudrait le démontrer réellement avec chiffres à l’appui, en tenant compte des apports (redistribution par la gratuité apparente, etc …), et bien sûr des coûts (directs, reportés, absences d’impôts et de taxes, etc …) de ces « services publics » par rapport aux mêmes « services au public », s’ils étaient assurés par le secteur privé.
    Par exemple, existe t-il une étude comparant :
    – d’une part le système actuel d’éducation nationale, avec ses écoles publiques et ses écoles privées avec leurs cortèges de subventions et/ou exonérations,
    – et d’autre part un système de chèque-éducation (pour comparer toutes choses égales par ailleurs, avec le même effet redistributif) et des écoles entièrement privées et non subventionnées (avec charges sociales, taxes locales, impôts, dividendes, etc …) ?

    • ben non justement , on aimerait bien que e telles études existent mais làs on ne touche pas au clergé de la republique..
      bon une journée de clinique privée 2400 euros , une journée d’hôpital 3500 euros..
      et c’est pour tout pareil

    • Comme si l’Ednat n’était pas subventionnée…
      Les écoles privées ne font PAS partie de l’Ednat (heureusement).

    • Je n’ai pas d’enfants, pourquoi devrais-je payer pour le million de fonx de l’éducation Nazionale ?

    • Déjà essayer d’améliorer les systèmes pour pouvoir ensuite diminuer le nombre de fonctionnaire… C’est entièrement possible et ceci sans augmentation d’impôt…
      Après, une fois la dépense diminuée, il peut y avoir une baisse d’impôts et autres taxes des citoyens…

  • Ce gouvernement ne réforme pas, il fait croire à la population qu’il réforme, et fait par ailleurs, tout ce qu’il peut pour cacher le plus longtemps possible, ses insuffisances. Et les médias aux ordres entretiennent le déni de réalité.
    https://www.ifrap.org/budget-et-fiscalite/le-report-tres-politique-de-la-loi-de-programmation-des-finances-publiques

  • Je serai assez content de connaître les chiffres associés aux retraités (s’il y a 1 fonctionnaire sur 5 actifs) combien y a-t-il de fonctionnaires à la retraite sur la totalité des retraités ??? … et avoir également le rapport pour la population de plus de 80 ans !
    En fait si certains ne peuvent plus faire certaines de leurs activités, il peuvent occuper des postes administratifs, de management, d’enseignement (dans la formation continue pour adultes) et ainsi être actifs aussi longtemps que l’on doit l’être dans le privé…

  • Cette description du en même temps (plus de services publics, et plus d’impôts) est assez précise, mais trop négative.

    Pendant la campagne de 2017 fut proposée la suppression de 500 K (500 000 ) postes de fonctionnaires, ce qui aurait rapporté 50 Milliards structurels et sauvé la France de la ruine.

    Contrebalancée par une proposition plus raisonnable de 100 000, immédiatement assumée par les juppéistes convertis au pragmatisme, on se finit avec le chiffre annoncé, à mon avis très optimiste, vu qu’on embauche les gilets jaunes par wagons entiers à l’heure actuelle…

    Il y a un pacte de corruption entre les dirigeants et ce peuple, qu’il devient urgent de remplacer. Hélas, il y a plusieurs sortes de remplacement, et il est possible que celui qui est en cours ne soit pas à l’avantage de la France. Qu’importe ! La pauvre créature peut bien crever, personne n’en a plus rien à foutre.

    •  » une proposition plus raisonnable… » Juppé se mettre la FP à dos? il y en a vraiment qui rêvent tout éveillé . Juppé est le type même du parasite .

  • Vous êtes de mauvaise foi. Il faut bien commencer par quelque chose et là ce sont 47 fonctionnaires en moins. Si ce rythme est soutenu dans les budgets suivants, sachez qu’il n’y aura plus de fonctionnaires dans 106382 ans. Voyez ce n’est pas anodin pour les générations futures. Merci QUI ?

  • C’est bien pourquoi de plus en plus de jeunes fuient ce pays collectiviste. Et ce ne sont pas les moins instruits.

  • 47 ❓
    Mais vous n’y êtes pas : ce sera 4700-47 soit 4653 ponctionnaires en plus.
    La baisse de 47, c’est celle de l’augmentation passée sous silence car tacite. Ne prenons pas tout ce pond Le Maire (2) à la lettre, il faut savoir traduire.

  • Sur le modèle de la réforme des régions, il faudrait remplacer le ministère de L’Economie et des Finances par le ministère de la Dépense et des Impôts. On aurait les mêmes résultats mais avec un intitulé correct.

  • Il me semble qu’il y a une petite erreur dans les chiffres du chapeau de l’article.

    Il n’y a pas 1 personne en âge de travailler sur 5 qui est dans la fonction publique mais 1 sur 7. (5,6 Mls de fonctionnaires pour 41 Mls d’actifs + inactifs). Si on ramène le ratio aux actifs (sans les demandeurs d’emploi et les sans emplois) on obtient 1 pour 3,5. L’Etat et les collectivités doivent décentraliser leurs activités et vite !

  • Ces 47 fonctionnaires, c’ est à la louche ou au couteau?

  • Autre exemple: Tokyo 13 millions d’habitants : 13.000 fonctionnaires municipaux.
    Paris 2,2 millions d’habitants : 54.000 fonctionnaires. Voila où passe l’argent, merci Mme Hidalgo !

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