L’audiovisuel public selon Riester : Netflix doit payer !

Les géants du numérique ont l’audace de s’implanter dans les pays d’Europe qui présentent la fiscalité la plus avantageuse et d’inonder la France de leurs abonnements ultra-libéraux mondialisés. Il faut donc que l’État intervienne !

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L’audiovisuel public selon Riester : Netflix doit payer !

Publié le 28 septembre 2019
- A +

Par Nathalie MP.

Mme MP, il serait temps de mettre un terme à votre anti-macronisme primaire ! Vous ne cessez de vous plaindre qu’Emmanuel Macron s’enfonce dans les traces de Chirac et Hollande réunis, que les dépenses publiques augmentent, que les impôts s’alourdissent et que la dette publique caracole, mais cette fois, ravalez vos lamentations car en 2020, la redevance télé va BAISSER grâce aux fabuleuses ÉCONOMIES réalisées par l’audiovisuel public !

Comme l’a expliqué le ministre de la Culture Frank Riester au micro de Franceinfo mercredi 25 septembre dernier (vidéo complète en fin d’article, 25′), la somme totale collectée l’an prochain au titre de la redevance sera supérieure à la trajectoire budgétaire de l’audiovisuel public. D’où deux solutions :

Soit ce surplus […] rentre dans les caisses de l’État, soit on le rend aux Français. Donc on a pris la décision de le rendre aux Français.

Avouez-le, Mme MP : il y a de quoi pleurer de joie tellement c’est beau ! Une redevance qui baisse, c’est du jamais vu depuis 15 ans et c’est sous Emmanuel Macron que ça se passe. Vous voyez bien que le gouvernement tient ses promesses et réforme progressivement la France !

Hum, pas si vite.

Que les Philippe, Darmanin, Le Maire et Riester (tiens, que des hommes originellement de droite !) se relaient sur les ondes pour tresser des couronnes à la gloire de leur volonté farouche – « courageuse » dirait certainement M. Darmanin – de baisser la fiscalité des Français tout en leur offrant le meilleur service public possible, nul ne s’en étonnera – c’est ce qu’ils font depuis le début. Mais que leurs propos trouvent un début de corroboration dans les faits, voilà qui n’est pas absolument évident.

Parlons justement de la redevance payée par les possesseurs d’un poste de télévision. De 139 euros par an en 2019, elle va passer à… 138 euros par an en 2020, soit 25 millions d’euros en moins au total. Une baisse, effectivement.

Mais une baisse tellement minime qu’elle en devient ridicule pour qui en parle comme d’une grande révolution fiscale et franchement insultante pour les redevables qui se voient gratifiés à grand renfort de roulements de tambour d’une misérable aumône de un euro par an soit exactement… 8,3 centimes par mois ! Quelle merveilleuse générosité ! On sent que le pouvoir d’achat se redresse à toute allure…

Ah oui, vraiment, vive Bercy et vive Macron ! – à condition d’oublier que Franck Riester a aussi dit, sans trop s’y attarder :

Dans l’avenir on pourra aussi adapter dans l’autre sens la contribution à l’audiovisuel public pour satisfaire les besoins de financements publics.

Dans l’autre sens comme « à la hausse » et dans l’avenir comme « après les élections » ?

Quant aux « économies », rien de bien renversant : il s’agit de gagner 190 millions d’euros de 2019 à 2022 sur un budget total de 4,4 milliards d’euros annuels dont 3,86 milliards environ financés par la redevance (en violet clair dans le schéma ci-contre). Ce chiffre tient compte de la première étape de la baisse des dépenses envisagée, soit 35 millions d’euros.

Et surtout, rien de bien sérieux car, comme souvent, ce qui est chichement restitué d’un côté est immédiatement repris dans des proportions démultipliées via un autre canal.

En l’occurrence, selon les mots du ministre, il s’agit de :

Faire en sorte que les nouveaux acteurs de l’internet rentrent dans le système français qui depuis des années a permis d’avoir une offre diverse, de qualité, pour le public français.

Et c’est là que l’on constate une fois de plus que « rentrer dans le système français » signifie obligation, taxe, impôt et contrainte. Et obligation. Et taxe. Et contrainte. Et arbitraire.

La réforme de l’audiovisuel public prévoit en effet d’obliger les plateformes de vidéo à la demande telles que Netflix et Amazon Prime Video à exposer les contenus français et à consacrer au moins 16 % de leur chiffre d’affaires en France au financement de contenus français, lesquels devront se répartir selon les directives ministérielles entre le cinéma, l’audiovisuel et la production indépendante.

M. Riester parle de contenus européens et dit s’appuyer sur deux directives européennes histoire de donner l’impression que la France suit le mouvement, un peu comme la taxe GAFA de son collègue Bruno Le Maire que seule la France s’est empressée de mettre en place, mais ne nous y trompons pas, c’est bien d’une politique française qu’il s’agit, politique que M. Macron se fait fort de soutenir à Bruxelles conformément à son idée particulière de « renaissance » européenne.

Quant au niveau1 d’investissement obligatoire, « ce sera plus que 16 %, croyez-moi » s’est exclamé le ministre dans un bombement de torse des plus déplaisants. Et si d’aventure les plateformes en question ne cédaient pas tout naturellement à son pouvoir de persuasion, il a prévu d’obtenir dans la loi les leviers judiciaires nécessaires pour imposer des sanctions financières voire une interruption de leurs services en France.

Impensable ingérence de l’État dans la liberté d’entreprendre. Victime finale : le consommateur français dont la latitude à s’extraire des choix faits pour lui par le service public est de plus en plus réduite. Mais dès lors qu’il est question de la fiscalité et des fins sociales voulues par le pouvoir en place, « impensable » n’est pas français.

Ce qui est très français en revanche, et qui apparaît comme le nez au milieu de la figure dans cette affaire, c’est le protectionnisme rampant et l’obligation faite à ceux qui réussissent de financer et promouvoir des productions culturelles qu’ils ne prendraient jamais en considération si leur liberté de choix était respectée.

Ce qui est très français, c’est que l’État, incapable de se réformer, est perpétuellement aux abois et cherche partout et n’importe comment2 de quoi satisfaire son insatiable compulsion dépensière. Par chance, la révolution numérique apporte des solutions qui n’ont pas échappé au gouvernement :

Si vous voulez aller chercher de l’argent, Caroline Roux, moi je vais vous dire où il est l’argent : l’argent, il est chez les géants du numérique.  (B. Le Maire, Les 4 Vérités, déc. 2018)

Les géants du numérique ont l’innommable audace de s’implanter dans les pays d’Europe qui présentent la fiscalité la plus avantageuse (Irlande, Luxembourg, Pays-Bas dans le cas de Netflix) et d’inonder quand même la France de leurs abonnements ultralibéraux mondialisés. Il faut donc que l’État intervienne pour réparer cette liberté décidément trop irrespectueuse de l’exception culturelle française !

Dans le cas qui nous occupe, il ne s’agit pas à proprement parler d’une taxe comme pour les GAFA parce que les 16 % (« au moins ») ne transiteront pas par le Trésor public mais c’est tout comme puisque qu’ils devront être investis exactement comme le gouvernement l’exige. Autrement dit : abus de pouvoir et remise en cause en bonne et due forme du droit de propriété.

Remarque de Netflix :

Nous investissons déjà de manière significative en France, depuis les débuts et sans y avoir été obligés par la loi.

À noter d’ailleurs que Netflix et ses semblables paient bel et bien des taxes et impôts à l’État français sous la forme de la collecte de la TVA à 20 % sur les abonnements et sous la forme d’une taxe de 2 % du chiffre d’affaires pour financer le CNC (Centre national du cinéma et de l’image animée). En ce qui concerne Netflix, au moins neuf millions d’euros pour cette dernière en 2018.

Ce qui est très français également, c’est la connivence et la rupture de concurrence visant à protéger certains acteurs privilégiés qui transpirent par tous les pores de cette mesure autoritaire. Car si les nouvelles plateformes doivent se conformer à l’arbitraire de l’État, les règles concernant France 2, TF1 et M6 sont assouplies. Notamment, la taxe de 2 % pour le CNC sera diminuée pour ces dernières et augmentée pour Netflix et les autres services en ligne tels que Youtube.

On ne peut s’empêcher alors de repenser à Salto, ce projet français de plateforme de vidéo à la demande propulsé spécialement pour concurrencer Netflix par le service public flanqué de M6 et TF1 ! On voit déjà ces dernières se frotter les mains à l’idée que leurs intérêts sont si bien gardés. Mais quand on sait à quel point l’État transforme tout ce qui ressemble à de l’informatique et du numérique en débâcle retentissante, nous autres contribuables avons largement de quoi nous faire du souci.

Mais écoutons encore les réflexions profondes de notre ministre de la Culture :

La question, c’est : a-t-on besoin d’un audiovisuel public dans ce pays ou pas ? Ma réponse, elle est clairement oui.

J’espère que vous êtes bien assis, car voici ses raisons :

Parce qu’on n’a jamais eu autant besoin d’information indépendante, on n’a jamais eu autant besoin d’éducation, on n’a jamais eu besoin autant d’ambition culturelle, on n’a jamais eu besoin autant d’offre de proximité dans ce pays.

Information indépendante ? Quand on sait que le président de la République rêve d’un contrôle public de l’information, c’est vraiment se foutre du monde. Éducation ? Tiens, le mammouth ne serait donc pas à la hauteur ? Ambition culturelle ? Mais quelle ambition culturelle si tout ce qui est fait par le service public doit être subventionné et soutenu à bout de bras par les acteurs qui réussissent par eux-mêmes ?

« A-t-on besoin d’un audiovisuel public dans ce pays ? » La question est pertinente, mais ma réponse, elle est clairement non.

Sur le web

  1. Le chiffre d’affaires réalisé en France par Netflix n’est pas connu précisément mais il a été estimé à 400/450 millions d’euros pour 2018. Les 16 % « au moins » d’investissements obligatoires seraient alors de 64/72 millions d’euros « au moins ».
  2. Encore deux beaux exemples du « partout » et du « n’importe comment » cette semaine : la suppression de la « niche-seniors » (finalement annulée) et la réduction des exonérations de charge des auto-entrepreneurs.
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  • Offres de proximité , circuit court , ca sent l’audiovisuel bio equitable et zero carbone.,labelise indépendant et bon pour la planete….. Bobo et tout ca pour un euro..de moins….

  • « Il vaut mieux se taire et passer pour un con plutôt que de parler et de ne laisser aucun doute sur le sujet. » – Coluche

  • Comparons ce qui est comparable. Vous ne le savez peut être pas mais dans certaines campagnes la vitesse du wifi avoisine les 500 kb/s. On est très loin des 20 Mb/s que tout le monde aurait.

    Avec mon abonnement Canal+ (59 €) j’ai découvert que j’avais accès à la VOD (films et séries). Malheureusement m’a télévision m’informe que l’internet n’est pas assez rapide pour visionner films ou séries.
    Avec mon abonnement Netflix (7,99 €) et mon iPad que je branche sur la télé aucun problème, je peux visionner films et séries.
    Pourquoi Canal+ n’est-il pas capable de réaliser ce que fait Netflix ? La technologie française parait être très en dessous de celle de Netflix.

    Alors le choix est tout fait.

    • C’est tout bete ,cnl ne met pas les moyens necessaires , j’ai eu le meme probleme avec la’tv de sfr , bas niveau alors que pour molotv ca marche au poil.
      C’est le mal feancais , le client , ils n’en ont rien a faire et la justice est a leur bottes

    • Plusieurs centaines de milliers ne peuvent toujours pas avoir une ligne fixe de téléphone. Magie du socialisme.

    • Merci, instructif ! Dommage que personne ne puisse interroger Monsieur Riester sur ce « problème » en direct à la télévision.

  • indépendante de quoi???

    on pourrait s’attendre à neutre objectif, pluraliste, complète…
    mais indépendante???

    mais on voit une idée qui fait beaucoup de mal à l’expertise scientifique..
    si je peux prouver que vous avez eu des relations avec une industrie alors vos arguments sont irrecevables…

    pour qui a discuté avec des gens à tendance gauchisante… l’argument « c’est un argument utilisé par l’extrême droit » vous permet d’échapper aux faits..
    à titre d’exemple un vidéo récente liée sur contrepoints;

    écoutez le préambule..êtes vous indépendante?
    la dame dit oui..
    alors on écoute son argumentation… qui ne dépend en rien de son éventuelle d »épendance »..

  • moi je regarde netflix , et prime d’amazon..
    les marchands de pub grassement pays par l’impôt , n’ont qu’a se démerder..

    • rance television devrait méditer ceci .. ce n’est pas la nature du diffuseur le problème mais la qualité de ce qu’il propose
      et là FT avec ses series pour QI a 2 chiffre boit le bouillon

  • franchement , quand on voit les merdes qui nous sont imposés , la redevance ne devrait même pas exister ; quand à leur cadeau à 1 euros , ils peuvent se le carrer là ou je pense et faire l’avion avec ;

  • « Pleurer de joie tellement c’est beau ! »
    Mes larmes troublent ma vision, aussi je ne peux lire la suite, me doutant Nathalie que vous allez continuer à encenser ceux qui nous gourdèrent, pardon gouvernent. Quel beau début de texte, après ces larmes de joie quand je le pourrais, les yeux secs, la vision et les idées claires, je vous promets d’en lire la suite espérant qu’elle ne me tirera des larmes de colère.

  • 1 Euro, c’est le prix du petit de vaseline 😉
    Allez, vas y Line, penche toi en avant, que je t’enfile une grosse taxe 😉

  • « se foutre du monde » : Nathalie commence à emprunter les expressions d’H16 : le ras le bol se pointe ? 🙂

    Pour le reste, non, nous n’avons pas besoin d’une radio -télévision d’Etat qui nous regarde et qui nous coûte 4 milliards d’euros par an : cela en fait des cathédrales restaurées !!!

    Et on n’a pas besoin non plus d’un CNC, d’une production artistique subventionnée…

    Bref, on n’a pas besoin d’un ministère de la culture, éventuellement d’un secrétariat d’Etat à la sauvegarde du patrimoine et encore…

    Mais dans ce cas, que deviendrait le ministre et tous ces fonctionnaires ?

    Il faudrait qu’ils apprennent à travailler : mais c’est trop dur !!!

  • La seule mesure intelligente et réaliste serait de dénationaliser la quasi totalité des chaînes (radio et télé) publiques et de supprimer ainsi cette redevance qui ne sert qu’à payer une pléthore de journalistes, présentateurs, copains etc… qui n’apportent strictement rien de plus que les chaînes privées. Si on veut, on peut conserver une chaîne style France 5 (Arte ne dépend pas de la redevance) avec un petit budget qui serait versé par le Ministère de la Culture.

    • C’est clair, il faut jeter tout cette m…. de gauche, télé poubelle soviétique qui ne sert qu’à laver le cerveau de nos compatriotes…

  • Ai, ai. Netflix a déjà trouvé la solution. Il s’allie à C+, sorte du marché français, laisse une petite marge à C+ pour offrir leur programme au public français qui s’AJOUTERA au prix pratiqué dans les autres pays, car ils sont conscient que le publc français va quand-même payer étant donnée que 90% de la production française (subventionnée par la politique imbécile de « l’exception culturelle ») sont indigérable. Et C+ paye déjà pour cette politique imbécile.

    Résultat de la course: les contenus Netflix seront 20% plus chers en France qu’ailleurs, mais la qualité des prodcutions françaises sera toujours aussi nulle, car les subsides font qu’on ne produit pas ce que le public veut, mais ce que quelques connaissances « intellectuelles » des politiciens pensent devoir cracher sur les spéctateurs.

  • Ah la bonne blague il croit qu’ils vont arrêter le numérique, c’est mort la télévision de Papy c’est finis, au pire on passe en VPN, qu’elle bande de tanche inculte, la marche forcé du numérique va les isoler et c’est pas leur bout de taxe qui vont arreter Disney Apple amazon Netflix et d’autre sont déjà en train d’arrivé. Je rappelle que la plateform netflix à déjà 10ans ….

  • Les commentaires sont fermés.

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