Dyson va-t-il réussir son pari dans le véhicule électrique ?

Dyson annonce un véhicule, « conçu, fabriqué et commercialisé » par Dyson, soutenu par un investissement de plus de 2 milliards de livres au total, dont 200 millions dans des infrastructures permettant de concevoir et tester les véhicules.

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Dyson va-t-il réussir son pari dans le véhicule électrique ?

Publié le 6 septembre 2019
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Par Pascale Patat-Dubouis.
Un article de The Conversation

Après les aspirateurs, les sèche-cheveux et les sèche-mains, la voiture électrique. C’est la prochaine étape du chemin atypique de l’entreprise britannique Dyson depuis la construction de ses premiers prototypes électroménagers dans les années 1980. Ce parcours, soutenu par des investissements continus dans la mise au point de produits innovants, permet au fabricant d’afficher aujourd’hui plus de 4 milliards de livres sterling de chiffres d’affaires et un bénéfice de 1,1 milliard. Les gammes de traitement de l’air, les aspirateurs futuristes ou encore les sèche-cheveux Airwrap se vendent en effet toujours très bien.

Sans conteste, une des clés du succès de Dyson réside en la personne de son fondateur, Sir James Dyson. Maître dans l’art du storytelling, James Dyson a su créer autour de sa personnalité une marque forte, avec une identité claire, qui se différencie par un design de rupture et des technologies avancées. Le fondateur de l’entreprise souligne en ce sens que 5127 prototypes ont été nécessaires pour fabriquer en série l’aspirateur Dual Cyclone.


James Dyson se met parfois en scène dans les publicités pour ses produits.

En outre, James Dyson, qui affirme dans son autobiographie Dans la cour des grands (éditions du Cherche midi, 2003) qu’il vise tout simplement « l’immortalité », ne communique pas que sur ses produits. Il a par exemple appelé à prendre parti en faveur du Brexit, ce qui lui a valu des appels au boycott de ses produits sur Twitter ou Facebook en janvier 2019, lorsqu’il annonçait le déménagement de son siège à Singapour, où la fiscalité est plus douce. En 1999, cette communication massive et parfois agressive lui avait déjà valu d’être condamné pour publicité déloyale.

Au bilan, ces aspérités auront renforcé l’image d’une marque créatrice de valeur, capable de vendre des aspirateurs à 600 euros et des sèche-cheveux à 400 euros sur des marchés où la concurrence s’empoigne sur les prix de produits indifférenciés.

Véhicule « androgyne, tout-terrain »

Mais avant l’immortalité, la voiture électrique. Un projet sur lequel l’entreprise dit travailler depuis 2014 mais dont le résultat reste encore bien mystérieux… James Dyson en a dévoilé quelques aspects via ses dépôts de brevets et un mail adressé à ses équipes.

Dans ce mail, qui nous a été transmis par les relations publiques de Dyson, il assoit la légitimité du projet en l’associant au fait qu’il avait commencé à travailler en 1988 sur des filtres cycloniques pour retenir les particules nocives des pots d’échappement suite à la lecture d’un rapport, apportant déjà la preuve du danger représenté par les émissions des moteurs diesel. Aucun industriel n’avait donné suite à l’époque. Ce véhicule électrique aura donc presque un parfum de revanche…

Qualifié « d’androgyne, de tout-terrain », ce projet monopolise 500 ingénieurs au Royaume-Uni qui travaillent avec Tesla et Range Rover en ligne de mire. Dyson annonce un véhicule, « conçu, fabriqué et commercialisé » par Dyson, soutenu par un investissement de plus de 2 milliards de livres au total, dont 200 millions dans des infrastructures permettant de concevoir et tester les véhicules. C’est ce qui a notamment financé le très secret campus Hullavington Technology Campus qui abrite les équipes en charge du projet.

Plus largement, Dyson a également investi dans la création d’un Institute of engineering and technology et d’une fondation destinés à soutenir l’éducation des jeunes ingénieurs pour former des cohortes d’innovateurs et entretenir la culture maison. La société compte enfin doubler son effectif de 1000 personnes à Singapour, lieu choisi pour la fabrication du véhicule et soutient le développement de ses compétences en logiciel, robotique et intelligence artificielle à Bristol et Singapour également.

Présentation du Dyson’s Hullavington Technology Campus (vidéo Dyson UK, 2018).

Jake Dyson, fils et successeur potentiel de James, présente ainsi le projet :

« C’est une très belle opportunité pour réunir les technologies que nous avons développées ces 25 dernières années en un seul et unique projet. Nous sommes en train de développer des batteries particulières, nous sommes des experts dans les moteurs électriques numériques et en plus nous avons conçu un purificateur d’air […]. Nous investissons également l’intelligence artificielle, la robotique, les systèmes de vision 3D […]. L’investissement dans ces technologies, dans l’ingénierie créative, nous permet de penser à la possibilité d’un si grand projet qu’est la voiture électronique. »

Flou sur les batteries

Reste maintenant l’épineux sujet de la batterie, qui n’est pas dans le savoir-faire historique de la maison. Dyson avait fait l’acquisition en 2015 de la start-up américaine Satki dont la technologie devait lui permettre d’augmenter fortement l’autonomie de ses appareils. Si les premiers projets intégraient des batteries Li-ion, les suivants devaient utiliser des batteries à l’état solide. Or, en 2017, la compagnie a abandonné les brevets de batteries solides de Satki sans justifications claires. Il subsiste un flou sur ce sujet, Dyson a-t-il abandonné les brevets de Satki car ceux-ci ne n’apportaient pas la solution recherchée ou bien développe-t-il dans le plus grand secret une version plus avancée ? Quelle serait en fait la technologie choisie pour le véhicule électrique de Dyson ? Quoi qu’il en soit, la sortie du véhicule électrique est toujours annoncée en 2021.

Le Guardian avait révélé en 2016 que le gouvernement britannique apportait un soutien financier à Dyson via une subvention de 16 millions de livres sterling dans le cadre de son plan national pour les infrastructures 2016-2021. Une somme qui reste une goutte d’eau au regard de l’investissement d’un milliard de livres sur les batteries annoncé par l’entreprise britannique avant le rachat de Satki.

 

Les batteries représentent en effet un véritable enjeu stratégique pour l’ensemble de l’industrie automobile. Le projet de consortium franco-allemand soutenu par l’Union européenne traduit d’ailleurs bien l’ampleur et la complexité du sujet, tant d’un point de vue scientifique, industriel que commercial. James Dyson a bien compris que leur technologie et l’infrastructure industrielle pour les fabriquer nécessitaient des investissements gigantesques. Il a bien compris également qu’au moment où gouvernements et entreprises multipliaient les soutiens et projets, cet investissement massif lui permettait de jouer désormais… dans la « cour des grands ».

Pascale Patat-Dubouis, Enseignante et chercheuse en marketing et business development, IÉSEG School of Management

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.

The Conversation

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  • S’il met sa voiture électrique au niveau du prix de son électroménager, ça nous met la première aux alentours de 200000 euros ! Même Tesla peut dormir tranquille…

  • quel est le pari fait par dyson dans le domaine de la voiture électrique au juste?
    ce n’est sans doute pas d’en fabriquer..c’est assez facile..
    mais d’en fabriquer de meilleures ,ceci est est possible, qui se vendent..et là,ça n’implique pas que dyson…mais les gens..et surtout la masse des gens..sauf à faire du tesla.

    pour le reste, ça fait partie des articles où le fait qu’une personne intelligente et ayant connu le succès fait un « pari » celui ci sera ou gagnant ou raisonnable..

    c’est un argument d’autorité à la façon bill gates le pense donc c’est vrai.
    on en retire un vague sentiment que la voiture électrique c’est l’avenir..proche..

    mais le sujet est aussi technologique…et économique, et on peut se poser la question est ce dyson est une société de luxe reposant sur un image innovante et élitiste ou une société véritablement innovante..

    un aspirateur dyson est il le « meilleur » économiquement parlant ?

    telsal a vendu des bagnoles electriques..sont elles les meilleures?

  • Dyson, C’est une belle réussite.
    On ne peut que regretter qu’il n’y en ait pas de semblable dans la France contemporaine où seuls les énarques et les politiciens débiles sont reconnus.

  • Tout en espérant sa réussite, je ne peux m’empêcher de penser au parcours de Clive Sinclair qui, brillantissime inventeur comme Dyson, a quitté son domaine de compétence pour s’aventurer dans la production de son véhicule électrique C5, avec la retentissante faillite qui a suivi.

    • La vehicule electrique est voue a une faillite totale des constructeurs automobiles,par faute de moteurs batteries et clients solvables.pour l’instant ca tient la route par les subventions et le faible nombre de vehicules mais apres….et de toute facon le tracteur sera toujours au gasoil l’avion au kerozene et ma tondeuse..remplacee par une faux faute de pognon pour le plein d’essence de contrebande.

      • Des clients solvables, il y en aurait probablement si le réseau routier était décent. Le marché du snobisme et du luxe est significatif, mais il ne supporterait pas l’expulsion des VE des lieux justement chics que sont les centre-ville.

  • Un bon magicien qui a reussi a vendre cet horreur d’aspirateur ,des pseudo ventillateurs alors pourquoi pas une bagnole cyclonique qui decoiffe et en meme temps nettoie la route et purifie l’air !

  • Le secret qui entoure la conception de ce véhicule me rappelle Renault avec cette pseudo affaire d’espionnage de son véhicule électrique: l’objectif est de faire du buzz.
    Car que je sache, au final, le VE de Renault ne casse pas trois pattes à un canard côté performance. Tout ce foin pour ça?
    Et les particules du diesel, c’était en 1988; depuis, les constructeurs ont trouvé la parade, sans Dyson. Sans doute que les constructeurs ont trouvé le procédé peu adapté. En général, c’est la meilleure technologie qui l’emporte.

  • Il est relativement facile de calculer les limites théoriques des système de stockage fondés sur des ions. Cette limite n’est évidemment jamais atteinte, et on peut s’estimer chanceux si les systèmes réels atteignent 50 % de ces valeurs théoriques. Il faut en effet que les batteries possèdent une enveloppe, que les électrodes aient une solidité suffisante etc. Toutes ces contingences réduisent fortement les performances du système
    La batterie la plus performante serait la batterie lithium-air avec une capacité théorique de 3 669 Wh par kg.
    Le gazole possède une capacité théorique de 12 611 Wh par kg. Conclusion : le meilleur système de batterie aura des performances qui ne dépasseront jamais environ le tiers de ce que font les carburants actuels. La recherche ne pourra jamais sortir de ces limites très simples. Alors, pourquoi s’acharner ? Eh bien, parce que les gens comme James Dyson ne le savent probablement pas.

    • 1) peut etre qu on utilisera pas des batteries pour une voiture electrique. par ex on peut utiliser de l hydrogene

      2) le fait de ne pas utiliser de l essence (ou diesel) simplifie aussi pas mal la voiture (pas de pompe a carburant, de moteur a 4 temps, d injection ou d Echappement). donc cout et poids en baisse. ca laisse de la marge pour un Systeme electrique

      3) on a pas developpe les ampoules electrique et cherchant a ameliorer les chandelles. peut etre qu on doit developper le transport en ne cherchant pas a ameliorer les voitures mais en faisant quelque chose de radicalement nouveau

      • 4/ on se fout de tout ça et on continue avec l’essence et le gasoil avec un filtre absolu…ce qu’iil est deja en pratique pour le diesel.

      • Un moteur pèse dans les 30 kg, une BV à peine plus. Le tout dans les 100 kg. Quid du poids de la batterie ❓
        L’idéal est une alimentation continue, avec de petites batteries.

      • L’hydrogène ? Un cauchemar d’ingénieur et un rêve humide de terroriste…

      • la meilleure façon de transporter de l’hydrogène c’est de l’attacher à des atomes de carbone et de le transformer en alcool.
        (E85 par exemple)

    • La batterie n’est que de l’énergie potentielle, il y a le rendement qui entre en jeu et aussi la masse du produit final. Si la voiture électrique pèse 2 fois moins lourd, il faut moins d’énergie pour la propulser.

    • de deux chose l’une où c’est l’économie qui cause; et on laisse faire le marché, ou c’est la loi qui forcent à en utiliser et là…

      en fait la l’energie au kilo..on s’en fout un peu…

      charge utile du véhicule, volume utile, autonomie et prix..

  • Le meilleur storytelling du monde ne suffira pas à dépasser les lois économiques et physiques, implacables pour les rêveurs.

    Tant qu’une voiture électrique ne dépassera pas 500 km d’autonomie à 150 km/h de moyenne, autonomie acquise avec une recharge inférieure à 10 minutes, et qu’elle ne sera pas vendue hors subventions au prix moyen d’une voiture essence, les voitures électriques ne se vendront pas, en dehors d’un usage limité aux flottes captives ou aux loisirs sportifs de riches propriétaires. Dès à présent, la suppression des subventions en Chine a fait dramatiquement chuter les ventes de voitures électriques. Sans subvention, il n’y a quasiment pas de marché pour l’électrique.

    Pour parvenir à satisfaire l’appétit des voitures électriques, il faut compter de l’ordre d’un MWh extrait du réseau par voiture. En supposant de manière optimiste qu’une fraction de seulement 1% du parc automobile actuel doive être rechargée au même instant (400000 véhicules), 400 GW devront être disponibles à tout instant. L’électricité en France aujourd’hui, c’est 133 GW installés, dont une part significative est déjà gravement intermittente…

    Les lois prévoyant la fin des moteurs thermiques à l’horizon 2040 méconnaissent les lois économiques et physiques. Ces lois vendent du rêve, un rêve fou. En deux mots, c’est une escroquerie politicienne. Si jamais elles étaient appliquées, elles conduiraient à une interdiction pure et simple de l’automobile, puisqu’il n’y aura jamais d’alternative électrique au pétrole. Inapplicables, ces lois ne seront pas appliquées. Un gouvernement qui, toutefois, oserait s’entêter dans cette direction insensée serait renversé par la foule en colère, peu importe la violence qu’il utiliserait pour se protéger, avant de s’enfuir très loin.

    S’il faut rechercher une alternative au pétrole fossile pour des raisons géopolitiques sérieuses, et non pour satisfaire on ne sait quel délire du premier collapsologue venu en mal de notoriété, c’est la piste des carburants de synthèse, produits localement, qu’il convient d’emprunter dès aujourd’hui.

    • Les foules en colère ne sont plus ce qu’elles étaient. Elles seraient bien capables aujourd’hui de brûler les ingénieurs et scientifiques en place de Grève pour n’avoir pas su inventer le gadget qui transgresse les lois de la physique…

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