École : l’élitisme au Japon, l’égalitarisme en France

Pendant qu’en France on pratique l’égalitarisme à l’école, au Japon c’est l’élitisme qui est la norme, à cause d’une sélection sévère et d’une mentalité différente.

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A visit to Nara, the ancient capital of Japan by John Gillespie(CC BY-SA 2.0)

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École : l’élitisme au Japon, l’égalitarisme en France

Publié le 3 juin 2019
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Par Jacques Henry.

Les exemples vécus sont toujours les plus concrets et les plus simples à analyser. Dans cette réflexion sur l’élitisme, c’est-à-dire la stratégie adoptée par les parents pour orienter leurs enfants, à l’exclusion de toute autre forme d’élitisme en particulier dans le monde politique, je me suis appuyé sur une expérience familiale qui m’a conduit à rédiger ce billet.

Le fait que ma petite-fille de onze ans – celle qui est franco-japonaise – ait opté pour suivre des cours particuliers le soir après l’école pour présenter un concours d’admission à une école privée dans deux ans et dont l’enseignement comporte comme première langue étrangère le français mais s’adresse également à des enfants issus de milieux socio-professionnels aisés a interpellé ma fille et son époux.

Ces derniers sont tous deux professeurs de mathématiques en deuxième année des classes préparatoires aux grandes école d’ingénieurs respectivement dans deux lycées prestigieux de la Montagne Sainte-Geneviève à Paris. Ils ont été surpris de la décision de leur nièce, décision qui à ma connaissance n’a pas été influencée par ses parents.

Pourquoi financer des cours du soir à une jeune fille de onze ans qui a décidé de son propre chef de tenter une intégration sur concours dans une école, une « junior high school » privée réputée pour la qualité de son enseignement, si ce n’est de l’élitisme de la part des parents dès lors qu’ils acceptent de prendre en compte les désirs de leur fille ? Une gamine de 11 ans n’a en effet aucune idée de ce qu’est l’élitisme.

Pour ma fille et son époux, de purs produits du système éducatif public français, l’élitisme est réservé aux riches, par définition aux élites. Qu’une jeune fille de 11 ans exige à demi-mots que ses parents lui offrent des cours particuliers pour préparer un concours de sélection leur semble relever du plus pur élitisme alors qu’il s’agit du système éducatif japonais dans lequel une sévère sélection s’opère dès le collège.

Pour schématiser, un tiers des élèves des collèges sont orientés vers des écoles techniques et vers l’apprentissage, un autre tiers ira jusqu’au baccalauréat et tentera ensuite d’acquérir des connaissances supplémentaires pour pouvoir se positionner dans le monde du travail et enfin le dernier tiers progressera jusqu’à l’université qui englobe les écoles d’ingénieurs.

Où se situe au Japon la notion d’élitisme ? Difficile de répondre à cette question puisque dès le collège la sélection est sévère. En France, contrairement à de nombreux pays européens, la position de l’Éducation nationale est de bannir la notion d’élitisme « pour tous » dans la plus pure réthorique socialo-communiste consistant à effectuer un nivellement vers le bas, c’est-à-dire vers la médiocrité, en partant du principe que les enfants naissent égaux et disposent donc de chances égales pour affronter la vie.

Cette philosophie semble directement inspirée du système égalitariste qui prévalait en Union soviétique – pour faire court – et qui existe toujours à Cuba. En France, bienvenue dans un monde meilleur où tous les citoyens sont égaux… une chimère idéologique qui ne peut raisonnablement pas exister.

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  • Je suis pas sur qu il fasse tresser des louanges au Systeme educatif japonais.
    D abord il genere un grand nombre de suicide (http://www.rfi.fr/asie-pacifique/20170904-japon-suicide-enfants-adolescents-sante).
    Ensuite le Systeme japonais etouffe toute creativité. C est parfait pour avoir des executants mais problematique dès qu il faut innover
    C est pas pour rien que le japon n a jamais pu depasser les USA. Ils ont copies et amelioré des choses inventes ailleurs mais n ont jamais pu creer quelque chose d eux meme

    • Le système éducatif ne fait que refléter la mentalité générale dans la société japonaise. Un système éducatif favorisant la créativité n’a pas de sens, et bon courage d’ailleurs à qui voudrait en imaginer un ! La créativité qui consiste à applaudir sans réserve n’importe quelle bêtise de l’enfant du moment qu’elle est originale, non merci.
      Cela dit, il me semble que les Japonais à vocation créative font comme les Français qui veulent s’enrichir : ils s’exilent.

      • Vous exagérez, les Japonais ont des scientifiques de haut niveau et ne s’expatrient pas! Depuis la guerre ils ont obtenus 21 Prix Nobel scientifiques pour leur travaux, plus que les Français!

        • Je ne suis pas sûr que le Nobel récompense la créativité… En tout cas, j’ai vu de nombreux jeunes japonais prometteurs bloqués au Japon par le respect de la « seniority », et bien plus brillants dans les labos étrangers qui les accueillaient que ce qu’on aurait pu croire d’après leur travail au Japon.

    • Ce n’est pas spécifique au Japon. Tous les pays asiatiques font de même, et tous les asiatiques des pays occidentaux. Aux USA ils sont la majorité dans les facs de sciences dures des universités, et le seraient presque exclusivement sans les quotas des minorités. Tandis que les occidentaux squattent les disciplines sociales, droit et affaire! Cela annonce le déclin de l’Occident qui déserte, quand il ne rejette pas la science, et donc la suprématie de l’Asie dans les siècles à venir.

    • Sur la créativité, je ne me prononce pas.

      Par contre, autant le refus d’exiger des efforts de la part des élèves en France est désastreux, autant le système des  » juku  » (école du soir) au Japon (repris en Corée du Sud avec les  » hagwon  » et probablement dans d’autres  » dragons  » asiatiques) est souvent une horreur : combien de fois ai-je vu au-delà de 22h00 dans les transports en commun des pauvres gosses trainant un cartable, tombant de sommeil qui rentraient de ces instituts de dressage dans lesquels on apprend en premier lieu à améliorer ses performances dans l’exercice du QCM (désastreux apport étasunien) qu’il faut réussir pour réussir à entrer dans une bonne université ? Passé 8-10 ans, une proportion importante d’enfants japonais ou coréens n’a plus de réelle enfance. Plus ou peu de place pour le rêve, l’insouciance, la découverte de l’art, de la nature ou de tout autre activités permettant d’épanouir l’esprit… C’est l’excès inverse par rapport à l’avachissement de maints élèves en France.

      J’entends bien que rien ne s’acquiert sans effort, surtout dans un pays dépourvu de ressources naturelles, et la concurrence mène le monde. Mais de là à bousiller la vie des enfants… Et puis, tout n’est pas que économie, compétition, performance, carrière ! Et les Roland Moreno ne se produisent pas comme des saucisses ou des ordiphones.

      Au passage, on critique justement en France l’excessive prééminence des grandes écoles qui a pour résultat que la vie d’une majorité des  » élites  » se joue avant 25 ans, selon qu’on sort de Sup’ d’Arrogance ou qu’on a obtenu un bon rang de sortie de l’ÉNA pour 1/4 de point. Que dire du Japon – et d’autres pays asiatiques – dans lesquels la majorité des élites voit son destin également fixé avant 25 ans, selon que ces personnes ont réussi à entrer à Tôdai ou Wasedai au Japon, à Yonsei en Corée du Sud, etc. ?

  • C’est comme en économie…
    L’anti-élitisme aboutit à la misère intellectuelle pour tous.
    Le pire est d’avoir sacrifié l’égalité des chances (par une solide culture offerte à tous) sur l’autel de l’égalitarisme.

    • Très juste. Un possesseur du certificat d’étude après guerre était plus cultivé dans toutes les matières qu’un bachelier contemporain qui ne maîtrise même pas le français. 30% des élèves des grandes écoles provenaient de familles modestes, ils ne sont plus que 8%. Leur famille ne pouvant leur transmettre la culture indispensable, les hussards de la République leur enseignaient celle-ci. Mais les pédagogues ont fait supprimer ces enseignements ce qui explique la ségrégation culturelle.

  • Le collège unique participe « à l’œuvre de destruction de l’esprit que subissent en leur crépuscule les sociétés libérales occidentales […], d’aller vers le règne de l’uniformité, digne des démocraties populaires et vers la dépersonnalisation absolue, celle des steppes et des supermarchés. […]

    Ce mythe égalitaire est digne de ce peuple de guillotineurs que nous sommes depuis 1793, et se traduit par la culpabilisation de tout aristocratisme.
    De tout élitisme dans le savoir : raccourcir ce qui dépasse, ce qui excelle, voilà le mot d’ordre. »

    Jean-Marie Benoist (La génération sacrifiée ; les dégâts de la réforme de l’enseignement, 1980)

  • Je me demande ce qu’il en aurait été si au lieu d’aspirer à une Junior High cotée, la fillette avait voulu une école spécialisée dans la danse, le tennis, le patinage ou une autre discipline moins scientifique.

  • L’élitisme est réservé aux riches ? Mais un prof de prépa est riche, alors 2 … Surtout avec le retour des heures supp défiscalisées, dont ces collègues sont les premiers bénéficiaires.

    • Ceux-là sont les oncle et tante, pas les parents de la gamine. On ne connaît pas le métier de ses parents.

    • Peu de gens se voient comme « riches » en France, d’où le succès d’ailleurs de « faire payer les riches », qui consiste bien souvent à s’autopiller.

  • En France, la culture du béotien, du cancre, de l’ignorance pour former des ilotes au lieu d’élites, c’est ça la gauchiardise !

  • j’aime le Japon.
    les japonnais sont des perfectionnistes compulsifs.
    Quels que soit leur métier..
    un gardien de parking veut etre le meilleur gardien de parking , peu lui chaut de jalouser celui qui est dans la guérite.
    un jardinier est fier de son travail , il ne l’a pas choisi par défaut.
    et c’est pareil partout, dans tous les domaines.
    la france est a des années lumières de cette conception de la vie,
    sans doute la cause de la vente exceptionnelle des anti dépresseurs chez nous, ou le jeu consiste en faire le moins possible et accepter de vivre de la charité générale.. en faisant un travail de merde parce que çà va profiter au capitalisme
    pauvre france

  • L’EdNat c’est 300Mds€ claqués pour finir parmi les derniers pays européens en sciences, maths, en écrit et compréhension de la langue maternelle. Les élèves sont dans le culte du médiocre, le médiocre à 10.000€ annuels, pour qu’au final, il ne sache pas lire correctement, ni écrire, et donc ne comprenne rien de ce qu’il lit, et qu’il utilise à peine plus d’1% du vocable que comporte la langue française.
    Il y a 20 ans, on s’espantait que les jeunes des cités ne maîtrisaient que 400 mots de vocabulaire français. De nos jours, ils ne sont pas les seuls a en avoir aussi peu. Ceux des cités en ont encore moins qu’il y a 20 ans.

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