La chasse aux sorcières contre les jeux vidéo continue

Auparavant, il poussait à sacrifier des chèvres à Satan et provoquait de l’acné. Maintenant, il vous transforme en bébé Hitler, selon des études forcément très sérieuses. Mesdames et messieurs, voici le jeu vidéo selon les nouveaux puritains.

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La chasse aux sorcières contre les jeux vidéo continue

Publié le 22 mai 2019
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Par Dern.

À n’être sous le contrôle d’aucune instance gouvernementale, le jeu vidéo et plus largement la culture pop sont le sujet de bien des fantasmes. Cela fait peur aux élites qui ne comprennent ni ne peuvent contrôler ce loisir. C’est ce dont on s’aperçoit en lisant la catastrophique tribune de Megan Condis, assistante d’un professeur d’études du jeu, dans le prestigieux et très politiquement correct New York Times.

Jeu vidéo et goût de l’effort

L’auteur de la tribune commence par écarter le fait que les jeux vidéo aient un lien avec le terroriste qui a frappé Christchurch en Nouvelle-Zélande, comme s’il y avait eu débat sur la question entre ses différentes personnalités intérieures.

Puis elle poursuit en soulignant que ce ne serait pas le jeu vidéo qui serait lui-même un vecteur d’extrême-droite, mais bien le contexte autour, assène-t-elle sans expliciter ce qu’est ce contexte.

On pourra partir sur deux constatations. Tout d’abord, venant du NYT, on peut s’attendre à une interprétation très large et toute personnelle de ce que serait l’extrême droite, qui commence sûrement quelque part entre Bayrou et Bellamy.

 

Ensuite, refuser l’analyse du jeu vidéo est perdre de vue ce qu’il porte en lui-même. Le jeu vidéo porte des valeurs intrinsèques, la plus forte étant la résilience : le fait de recommencer et devenir plus fort et plus habile, malgré des épreuves de plus en plus difficiles, constitue la mécanique de base du jeu, ainsi que le détaille le docteur James Paul Gee dans son livre What video games have to teach us. Cette résilience conditionne l’esprit des joueurs à ne pas apprécier par exemple la discrimination positive qui rémunère les caractéristiques physiques de certains plutôt que le talent personnel et le goût de l’effort.

Des agents infiltrés

Puis l’auteur débute une théorie du complot qui ne la lâchera pas de tout l’article : de mystérieux et persévérants recruteurs d’extrême droite démarcheraient de pauvres joueurs. Ces recruteurs structureraient des arguments qui feraient voir les immigrants comme un danger. Qui sont-ils, d’où viennent-ils, par quoi sont-ils motivés ? On ne le saura pas.

On notera que la Corée, pays le plus porté sur le jeu vidéo, est aussi contre l’arrivée de migrants. Coïncidence ?

De jeunes hommes blancs, imaginez ma bonne dame !

En tous cas à l’en croire, ces recruteurs vont sur les plateformes de gaming car c’est là où traînent les jeunes blancs désœuvrés. Elle ajoute que ceux qui montrent un intérêt pour le discours de droite sont amenés dans un flux de rhétorique raciste de plus en plus soutenu. La célébrissime pente glissante.

 

Nous avons là un concentré de mauvaise foi, et d’inversion de la cause et de la conséquence : la raison même pour laquelle les jeunes hommes blancs dits cisgenre vont jouer aux jeux vidéo, c’est que ce lieu est le dernier dans lequel ils ne sont pas relégués automatiquement à l’écart du tissu social, cantonnés dans leur irréversible état de mâle (imaginez !) blanc (quelle indécence !) cisgenre (en fait-on encore des comme ça ?).

Si vous comprenez cette référence, vous êtes sur le bon article

En jouant, on part dans un univers imaginaire et merveilleux où, pour une fois, seul le talent individuel compte. L’auteur va même jusqu’à prétendre que l’humour limite serait un des modes de subversion à l’idéologie suprématiste. Comparé aux tentatives d’humour ouatées et gênantes du camp du Bien, on est vite limite.

Plus loin est avancée la thèse, contradictoire avec son propos précédent, mais passons, que le jeu vidéo serait aussi divers que la société, et que les suprématistes blancs, quels qu’ils soient (il est probable que dans sa classification personnelle, vous en soyez aussi) profitent de l’arrivée des minorités et autres LGBT dans le milieu vidéo-ludique pour pousser leur propre agenda.

La réalité est rigoureusement l’inverse de la situation décrite.

Une contre-culture vive

Pour échapper à cet agenda omniprésent qui pousse sans cesse à s’extasier sur la dernière communauté à la mode, les jeunes hommes blancs cisgenre qui n’intéressent plus personne trouvent refuge dans le monde du jeu ; la culture geek fournit leur imaginaire en quêtes épiques et autres pistolasers, bien plus intéressants que la nouvelle politique de recyclage des bouchons de bouteille ou le dernier quota obligatoire de roux chez les députés.

 

Mais jusque dans leur loisir, il faut leur casser les pieds. Même dans le jeu vidéo où seule la compétence compte, on leur explique qu’ils ne seront jamais aussi fabuleux que ceux avec une orientation sexuelle ou une carnation préférable. Alors sur les forums où l’on échange des astuces pour les jeux de stratégie, on en profite pour parler parfois politique, et relâcher la soupape de pression.

L’auteur le souligne elle-même : le jeu vidéo passe sous les radars du mainstream, des grandes télévisions et de l’industrie des loisirs classique. C’est donc une contre-culture, de la même manière que les radios pirates l’étaient dans les années 60. Ce qui s’y dit va subséquemment à l’encontre de la doxa dominante : c’est une réaction au discours dominant, et non l’inverse. Un courant de liberté dans un discours public verrouillé.

Il est urgent d’interdire

Notre collectiviste souhaite donc y mettre un coup d’arrêt impeccablement étatiste. Elle ponctue son discours de vœux vibrants pour une censure. Vite, des coupes claires ! Elle s’estime tentée par l’idée d’interdire la pratique du jeu vidéo, et déplore le manque de censure de la part des géants du secteur.

On lui concède, ainsi qu’elle le reconnaît elle-même, que les jeux vidéo ont la double casquette de loisirs et de machine à communication. Exactement, madame le prix Nobel, c’en est devenu une, et c’est ce que l’on reproche à tous les tenants du Camp du Bien. Ils s’en sont servis trop longtemps dans leur sens, tordant les mondes imaginaires pour les faire coller à leur agenda, provoquant l’ire de ceux pour qui c’était devenu un refuge.

Ceux qui en premier ont politisé le jeu vidéo et les mondes imaginaires ne sont ni les développeurs ni les joueurs. Une contre-culture qui leur déplaît a pris l’ascendant sur une partie des joueurs par effet de balancier politique, et cela leur déplaît.

Megan Condis, et tous les autres néo-puritains de la Team Progrès, les joueurs ne sont pas des petits bébés Hitler en puissance. Oui, leur humour vous dérange et c’est pour ça que vous les accusez d’être d’extrême droite.

Par votre arrogance et votre irrévocable vocation à tout censurer, vous avez créé le monstre qui vous guette à présent d’un œil courroucé.

A lire aussi : les jeux vidéos rendent-ils violents ?

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  • de nos jours , pour un pet de travers on vous soupçonne de faire parti de l’extrême droite ; ça devient du harcèlement ;

  • Moi, je croyais que ça rendait sourd … Ou alors je confonds ?

  • Il n’y a pas que pour les jeux vidéo. Les puritains ont réussi à faire abandonner la série télévisée « Lucifer » par la Fox qui se moquait un peu trop ouvertement de Dieu, des anges et du diable. Heureusement Netflix l’a rachetée. J’adore cette série pleine d’humour mal-pensant !

  • Chouette ! Un nouvel article de Dern ! Il va encore tirer à boulet rouge sur le « camp du Bien », « la Team Progrès », les bobos, les SJW, bref : la Gauche…. et bien sûr, ne vous inquiétez surtout pas chers amis libéraux : Dern est l’un des nôtres, c’est un libéral pur et dur, ce n’est nullement un énième réact/conservateur/nationaliste, par conséquent il va également tirer à boulet rouge sur la Droite ! Il va exploser la Droite aussi brutalement qu’il explose la Gauche ! Ooops, on me dit dans mon oreillette qu’il va une fois de plus totalement ignorer les conneries de la Droite…



    « L’auteur de la tribune commence par écarter le fait que les jeux vidéo aient un lien avec le terroriste qui a frappé Christchurch en Australie, comme s’il y avait eu débat sur la question entre ses différentes personnalités intérieures. »

    Christchurch est en Nouvelle Zélande, pas en Australie. D’autre part, puisque le terroriste à lui-même évoqué (certes en trollant) certains jeux vidéos c’est partiellement de sa faute s’il y a un débat sur le lien entre jeux vidéo et terrorisme.



    « le jeu vidéo passe sous les radars du mainstream, des grandes télévisions et de l’industrie des loisirs classique. C’est donc une contre-culture, de la même manière que les radios pirates l’étaient dans les années 60. Ce qui s’y dit va subséquemment à l’encontre de la doxa dominante : c’est une réaction au discours dominant, et non l’inverse. Un courant de liberté dans un discours public verrouillé. »


    La doxa dominante ne se limite pas au New York Times ou à CNN ou MSNBC (la Gauche.) La doxa dominante c’est aussi Fox News (la Droite.)



    « […] Cette résilience conditionne l’esprit des joueurs à ne pas apprécier par exemple la discrimination positive qui rémunère les caractéristiques physiques de certains plutôt que le talent personnel et le goût de l’effort. »

    La discrimination positive vantée par la Gauche… ET la préférence nationale vantée par la Droite.



    « de mystérieux et persévérants recruteurs d’extrême droite démarcheraient de pauvres joueurs. Ces recruteurs structureraient des arguments qui feraient voir les immigrants comme un danger. Qui sont-ils, d’où viennent-ils, par quoi sont-ils motivés ? On ne le saura pas. »


    Elle a donné quelques exemples concrets d’où vient selon elle la menace : le site Stormfront, des plateformes comme Discord et Steam, des modifications de jeux de Doom, Counter-Strike, Stellaris, des jeux indés comme Ethnic Cleansing et Muslim Massacre. On peut tout à fait ne pas être d’accord avec son constat, mais c’est malhonnête d’affirmer qu’elle a parlé sans fournir des exemples concrets.



    « L’auteur va même jusqu’à prétendre que l’humour limite serait un des modes de subversion à l’idéologie suprématiste. »

    Elle a raison.



    « leur humour vous dérange et c’est pour ça que vous les accusez d’être d’extrême droite.


    Ou alors : leur humour s’acharne toujours sur les mêmes, manque de subtilité, manque d’autodérison, et c’est pour ça qu’ils sont accusés d’être d’extrême droite.



    « Plus loin est avancée la thèse, contradictoire avec son propos précédent, mais passons, que le jeu vidéo serait aussi divers que la société »


    Mensonge. Elle précise initialement que le monde du jeu vidéo est divers (« Surveys show that in the United States, gaming is not dominated by people of one race or gender. » )



    « Alors sur les forums où l’on échange des astuces pour les jeux de stratégie, on en profite pour parler parfois politique, et relâcher la soupape de pression. »

    En quoi cela invalide-t-il l’idée que des recruteurs d’extrême-droite sont présents afin d’aider, à leur manière, à « relâcher la soupape de pression » ?



    « Notre collectiviste souhaite donc y mettre un coup d’arrêt impeccablement étatiste. Elle ponctue son discours de vœux vibrants pour une censure. »

    Elle est loin d’être aussi catégorique que vous le prétendez, puisqu’elle a écrit : « It can be tempting to write off video games as toxic hotbeds of hate, too tainted for the uninitiated to engage with. But this would be exactly what extremists like the New Zealand shooter want. »



    « Ceux qui en premier ont politisé le jeu vidéo et les mondes imaginaires ne sont ni les développeurs ni les joueurs. »


    Laissez-moi deviner : ceux qui en premier ont politisé le jeu vidéo c’est le « camp du Bien », « la Team Progrès », les bobos, les SJW, bref : la Gauche ! Par contre la Droite est entièrement innocente, n’est-ce pas ? J’ai bien retenu la leçon ?

    • Je n’ai lu que la question malhonnête en conclusion, malhonnête parce que vous faites à la fois la question et la réponse.

      Alors réponse claire: dans le cas présenté ici, oui, c’est bien une tenante d’un courant politique de gauche, bienpensant et militant en faveur de minorités trans-truc qui a écrit l’article dans le NYT, qui est le sujet de ce billet. Il faut suivre…
      Et c’est ce même courant politique qui est le plus bruyant, le plus médiatisé, le plus agissant, bref, le plus assommant sur ces thèmes d’importance discutable quand on les compare, par exemple, à la guerre au Yemen… aux guerres et exactions diverses en général.
      Pour la question où vous faites mine de demander si la droite est innocente, personne n’a dit qu’elle était sans reproches, ce n’est juste pas le sujet.

      Et pour tout dire, il semble que vous n’aimez juste pas qu’on porte une critique pertinente contre votre bord politique. Désolé… nan, j’rigole! 😀

      • « Pour la question où vous faites mine de demander si la droite est innocente, personne n’a dit qu’elle était sans reproches, CE N’EST JUSTE PAS LE SUJET. »


        @Dr Slump :
        Avec Dern CE N’EST JAMAIS LE SUJET . Et c’est justement ça le problème.
        Je peux au contraire vous citez plusieurs articles où H16, qui ne se prend pourtant pas plus au sérieux que Dern, se distance clairement des réacs, ou des conservateurs, ou des natios d’extrême-droite (exemple : son excellent article sur l’ordre spontanné/catallaxie qui emmergeait parfois dans la « Jungle de Calais ». )
        Mais pour ce qui est de Dern j’attends toujours de trouver un article où il se distance clairement des réacs ou des conservateurs ou de l’extrême-droite.

        Vous avez raison de reprocher aux SJW (Gauche régressive) de se focaliser sur des sujets d’importance discutable plutôt que sur des vrais drames (guerre au Yémen, dette publique, chômage, etc) mais le même reproche pourrait être fait aux anti-SJW comme Dern.

        Dans le monde actuel il existe d’innombrables drames résultant du racisme anti-blanc : par exemple l’affaire des 4 voyous noirs ayant kidnappé puis torturé un blanc handicapé dans la ville de Chicago, ou les expropriations de fermiers blancs au Zimbabwé et en Afrique du sud, ou les prisonniers blancs poussés au suicide dans les prisons où les gangs noirs ou latinos ou autres sont sureprésentés etc… etc…

        Posez-vous cette question : au lieu de nous parler de ces vrais drames, de quoi Dern choisit-il de nous parler jour après jour dans ses articles ? Réponse : d’une petite phrase débile de l’actrice Brie Larson (Captain Marvel) ayant déclaré que ce n’était pas à des hommes blancs journalistes d’évaluer un film destiné à des femmes de couleur. Ou alors Dern choisit de nous parler de Jeff Bezos en l’accusant (sans fournir la moindre source) d’avoir déclaré que Le Seigneur des Anneaux « était un peu raciste. »

        Bref, au risque de me répéter, bien qu’il est vrai que les SJW se focalisent sur des sujets d’importance discutable plutôt que sur des vrais drames, pour moi les anti-SJW comme Dern ne relèvent guère le niveau.

    • La droite n’est pas innocente, ses dirigeants sont lâche et bête au point de vouloir plaire à leurs opposants plus qu’a leurs électeurs et du coup se couchent devant les gauchos de peur de ce faire traiter de je ne sais quoi…

  • « Tout d’abord, venant du NYT, on peut s’attendre à une interprétation très large et toute personnelle de ce que serait l’extrême droite, qui commence sûrement quelque part entre Bayrou et Bellamy. »

    Perso, dernièrement j’ai consulté à la va-vite le programme de Bellamy puis celui du RN, et j’ai été étonné de la retenue du RN concernant l’immigration comparée à l’obsession absolue de Bellamy pour ce sujet. Mais bon, j’ai conscience qu’en creusant davantage le sujet j’aurais sans doute fini par trouver en quoi Bellamy est réellement plus modéré que les supposés extrêmistes.

    • Vous avez parfaitement raison : le programme de Bellamy pour les Européennes est hallucinant. C’est LR qui est désormais d’extrême droite tandis que RN s’efforce de plus en plus de ressembler à un parti de centre-droit.

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